Mondes Sociaux

Magazine de sciences humaines et sociales en openaccess

  • La démocratie athénienne est souvent convoquée pour justifier des réformes politiques. Mais les historiens invitent à la prudence… #Athènes #histoire #antiquité #politique

    https://sms.hypotheses.org/24826

    Classic Athenian democracy (Vth-IVth century) and its citizens are quite often referred to in the current/contemporary media and political spheres. In the context of the current « democratic crisis », it serves to legitimate the demand for a new political practice or for a reform whose goal would be to set up a political system that would enable citizens to play their part and be fully committed, « just like in Athens ».

    And yet, we are twenty-five centuries away from Périclès fellow citizens, which should call for a little more caution. In view of this observation, it may be worthwhile to examine what it was like to be a female and male citizen in ancient Greece and to what extent their actual practices could contribute to enlighten our contemporary debates (...)

  • Les universités, l’#enseignement_à_distance et le #Covid-19 (1/2)

    Alors que nos universités vivent depuis quelques semaines un des psychodrames dont elles ont malheureusement l’habitude au sujet des modalités d’examen ou de contrôle des connaissances à appliquer cette année, il peut être utile de prendre le temps de réfléchir quelques instants à la situation inédite à laquelle les universitaires sont confrontés et, surtout, à la manière dont cette crise va modifier, en profondeur, les métiers universitaires et l’université toute entière.

    En premier lieu, il faut remarquer et apprécier une véritable révolution spirituelle chez bon nombre de collègues, hier réticents et même hostiles à l’idée d’enseigner en ligne, de se faire enregistrer et diffuser, et qui semblent s’être convertis très rapidement à ces nouvelles méthodes, au point d’exiger, aux quatre coins de la France, l’organisation d’#examens en ligne afin de sanctionner les cours en ligne ! Alors qu’il y a quelques semaines, beaucoup refusaient catégoriquement de se laisser filmer en cours, considérant qu’il s’agissait d’une insupportable atteinte à leur liberté de parole ou d’enseignement, ils défendent aujourd’hui avec véhémence la conversion de l’université au tout numérique, examen compris, ce qui n’a pourtant jamais été envisagé même par les plus numériques d’entre nous. Étonnant revirement. Bien sûr, il convient d’interpréter ce nouvel amour pour ce qu’il est, c’est-à-dire un simple flirt passager lié aux circonstances particulières du confinement et la manifestation d’une addiction à l’examen et à la sélection qui frappe beaucoup d’universitaires.

    Toutefois, pour quelqu’un qui s’est battu presque dix ans pour développer la politique de #pédagogie_numérique de son université, cela reste un phénomène plaisant à observer. Naturellement, comme souvent, les nouveaux convertis se montrent imprudents, excessifs et bien trop zélés. Leur amour naissant les fait oublier bien des enjeux, comme la protection de la vie privée ou le nécessaire respect de l’#égalité entre étudiant∙es. Il convient, maintenant qu’ils ont la foi, de les faire réfléchir sur l’outil hier haï et aujourd’hui vénéré. Il y a urgence car si la conversion totale au numérique est une vue de l’esprit confiné, la réflexion sur ces outils désormais popularisés mais toujours méconnus doit désormais s’envisager dans une perspective de profonde rénovation de l’université que la crise sanitaire a complètement bouleversé au point de rendre un retour à la situation antérieure difficilement envisageable.

    Des #limites de l’enseignement numérique

    Une des premières choses qu’il convient de rappeler est le fait que l’équation « #cours_présentiel = #cours_à_distance » n’a jamais été vraie. Il y a une différence de nature entre les deux et il faut davantage envisager leur complémentarité plutôt que de les croire substituables. D’ailleurs, il ne s’agit pas d’établir une hiérarchie entre ces deux formes d’enseignement ! Dans certains cas, l’enseignement à distance se montre plus efficace que l’enseignement présentiel : il permet aux étudiant∙es de travailler en fonction de leur propre emploi du temps, ils peuvent revoir les interventions enregistrées, les utiliser pour apprendre puis réviser, poser leurs questions au milieu de la nuit ou en plein dimanche avec l’espoir de recevoir une réponse, rarement immédiate mais dans un délai raisonnable.

    Ainsi, dans mon université, après avoir créé une préparation estivale à distance pour les étudiant∙es souhaitant passer l’examen d’accès aux CRFPA (les centres de formation pour les futurs avocats), nous avons pu dématérialiser quasiment l’intégralité des préparations, même durant l’année universitaire, avec des résultats très concluant. Les préparations s’adressent à des étudiant∙es titulaires d’un Master 1 ou en passe de l’être et souhaitant entreprendre la carrière d’avocat. Avec un public très motivé, capable de travailler en parfaite #autonomie et ayant un temps limité pour préparer l’examen, la #dématérialisation des enseignements offre bien des avantages, pour le préparateur comme pour le préparant. Le programme est un indéniable succès qui a permis à l’université de devenir en quelques années le plus grand centre de préparation à cet examen en France. Pour autant, ce qu’il est possible de faire pour des programmes de préparation n’est pas nécessairement reproductible pour des enseignements de licence ou de maîtrise. Dans ces cas, la présence de l’enseignant demeure nécessaire pour stimuler les étudiant∙es, motiver ceux qui ne le sont pas ou plus, réorienter ceux qui sont perdus, orienter ceux qui survolent, c’est-à-dire enseigner en veillant à ne jamais laisser des étudiant∙es décrocher mais en s’efforçant aussi de ne pas frustrer les meilleurs. La recherche de ce fragile équilibre n’est pas vaine, dans un amphi ou dans une classe. Tous ceux qui ont eu l’occasion d’enseigner et qui ont senti une vocation, non à se mettre en scène, mais dans le fait de transmettre, le savent. Sans lieu, sans classe, sans amphi, tout cela disparaît et n’est pas remplacé. Il n’y a pas lieu de recenser ici les innombrables différences entre l’enseignement à distance et en présence de l’enseignant mais il convient de comprendre qu’elles sont de toute nature. Ainsi, par exemple, il n’est pas absurde de s’interroger sur la disparition ou la transformation du sentiment d’#empathie derrière un écran et l’effet que cela peut avoir sur le processus de #transmission. Quiconque connait le métier est à même de voir les innombrables différences entre ces méthodes s’il fait l’effort d’y réfléchir.

    Ensuite, même si dans certains cas l’enseignement à distance peut être utile et efficace, il suppose des #outils qui ne peuvent être improvisés en quelques jours ou en quelques semaines ! La construction d’un cours en ligne est un travail conséquent, que l’universitaire ne peut, en général, mener seul, sauf à réduire son enseignement à quelques vidéos mal cadrées dans lesquels on le voit en contrejour parler pendant des heures avec un mauvais micro ou à des documents à imprimer de plusieurs centaines de pages balancés en vrac aux étudiant∙es. L’attention d’un auditeur en amphi est déjà limitée à quelques dizaines de minutes ; devant un ordinateur, chez lui, c’est pire ! Le pouvoir de l’éloquence, les effets de manche et même, pour l’étudiant, le fait de pouvoir s’adresser à son voisin pour quelques secondes de détente disparaissent en ligne, ce qui rend le cours bien plus monotone et difficile à suivre, quel que soit l’intérêt de l’étudiant pour le propos de l’enseignant. Il convient donc de concevoir des #outils_pédagogiques qui prennent en compte ces limites et qui s’adaptent à cette réalité. La conversion en quelques jours et dans l’urgence de centaines d’enseignements en cours en ligne est une entreprise vouée à l’échec malgré l’enthousiasme de certains collègues et, si cette solution imparfaite permet malgré tout de sauver l’année en cours, elle ne saurait être considérée comme un modèle pour l’avenir ni comme une base sérieuse pour mettre en place un contrôle des connaissances discriminant.

    Surtout, l’enjeu de demain transcende largement le problème d’aujourd’hui et devrait nous convaincre, collectivement, à engager une réflexion approfondie sur notre avenir. Pense-t-on sérieusement que, passée la crise actuelle, nous allons revenir au monde d’hier, avec les amphis bondés, les couloirs noirs de monde, les nez qui coulent et les gorges qui raclent par centaines en hiver dans des espaces mal aérés ? Les comptoirs administratifs pris d’assaut, les files d’étudiant∙es se pressant autour de l’enseignant à la fin du cours, les cocktails de fin d’année où l’on égare son verre et récupère celui du voisin, les rentrées chaotiques avec les étudiant∙es perdus, errant de salles en salles à la recherche de leur enseignant, tout cela risque d’être impossible dans le monde de demain. La fin du confinement n’annonce pas la fin de la #distanciation_sociale ou de l’impérieuse nécessité de respecter des règles d’hygiène minimales actuellement impossibles à imaginer dans le contexte universitaire. Trop d’étudiant∙es, aucun moyen, des locaux vétustes et des habitudes bien ancrées risquent de faire de la rentrée et de toutes les rentrées prochaines un insoluble #casse-tête.

    Un nouveau modèle universitaire

    C’est dans ce cadre que l’outil pédagogique numérique mérite d’être étudié. Bien pensées, les formations à distance peuvent représenter un appui à l’intégration à l’université pour de nombreux étudiant∙es mais aussi des méthodes d’approfondissement particulièrement efficaces ; elles peuvent aussi être étudiée afin de désengorger considérablement les locaux universitaires permettant alors de consacrer les mètres carrés libérés à des actions davantage personnalisées. Ainsi, par exemple, il est possible d’imaginer que certains cours en présentiel ne soient accessibles qu’après avoir finalisé un parcours numérique d’apprentissage. Il n’est pas nécessaire d’imaginer des tests ou des examens discriminants : le simple suivi sérieux du cours peut suffire à s’assurer de la motivation et à exclure les plus dilettantes des séances en présentiel.

    Naturellement, des dispositifs d’appui aux étudiant∙es en difficulté numérique ou ayant besoin d’un suivi plus dense doivent se développer. Cette diversification plaide pour une multiplication des classes aux #effectifs_restreints. En revanche, l’enseignement classique, les cours dans les gigantesques amphis, serait progressivement abandonné au profit de #conférences_numériques accessibles à un nombre encore plus important d’auditeurs dans des conditions de sécurité et d’hygiène garanties. Ces conférences pourraient se tenir en public, avec un auditoire restreint mais, diffusées à grande échelle, elles permettraient à tous d’y accéder simplement. Ces nouvelles méthodes d’apprentissage pourraient également favoriser l’#entraide au sein de la communauté étudiante en valorisant l’échange entre étudiant∙es de niveaux différents. Le tuteur étudiant pourrait être rémunéré, le libérant ainsi de la nécessité de trouver des financements pour ses longues études en dehors de l’université. Ces nouveaux circuits économiques, peu exploités en France avant le doctorat, auraient pour effet de renforcer la communauté universitaire, multipliant les liens entre l’institution et son public.

    Dans ce nouveau monde universitaire, le mandarin avide de cours d’amphi mais avare d’échanges et fuyant l’étudiant comme la peste n’aurait plus vraiment sa place – qui s’en plaindra ? – contrairement à l’enseignant affable et humain, privilégiant le dialogue au monologue. Cela suppose, dans de nombreuses disciplines, une transformation radicale du rapport de l’enseignant-chercheur avec son université et ses étudiant∙es. Ainsi, par exemple, s’il doit pouvoir bénéficier d’un lieu de travail adapté au sein des locaux universitaires, l’enseignant doit, en contrepartie, accepter un temps de présence plus important au sein de la faculté au bénéfice exclusif des étudiant∙es. Le bureau de l’enseignant pourrait ainsi se transformer en lieu de production et de transmission du savoir, accessible aux étudiant∙es comme aux collègues. Aujourd’hui, le bureau universitaire, denrée rare dans certaines universités, est le plus souvent un simple espace utile pour expédier les trop nombreuses tâches administratives qui pèsent sur les épaules de nombreux enseignant∙es-chercheur∙es investis dans leurs universités et organiser quelques rendez-vous pour traiter les cas d’étudiant∙es un peu atypiques et suffisamment téméraires pour demander un entretien. La culture de la porte ouverte n’existe pratiquement pas.

    Plus généralement, ce nouveau modèle permettrait de mettre fin à l’illusion selon laquelle l’égalité serait respectée en offrant à tous le même régime. Il privilégierait, au contraire, une approche fondée sur la diversité et la confrontation avec l’étudiant, envisagé dans sa singularité et non comme un simple atome d’une masse informe dont il s’agirait de trier le bon grain de l’ivraie. Cette adaptation de l’institution à ses étudiant∙es ne saurait naturellement être totale mais au contraire centrée sur ce que l’université a réellement à offrir, c’est-à-dire le fruit du travail des chercheurs qui sont le véritable cœur de l’institution universitaire.

    https://academia.hypotheses.org/23645

    #université #facs #France #enseignement_distanciel #confinement #coronavirus #ESR #témoignage

    • Marianne veut anticiper les bons et les mauvais côtés du #téléenseignement à la #rentrée

      Pour dédoubler les enseignements — cours magistraux et travaux dirigés — à la rentrée 2020, il faut des locaux et des enseignant·es. Difficile de gérer les locaux, plus simple de recruter des enseignant·es ?


      https://academia.hypotheses.org/23577

    • #LaFacÀDistance – ou imaginer notre pédagogie en #télé-enseignement

      Nous le pressentions depuis des semaines, notre ministre confirme : la rentrée universitaire de l’automne sera au moins en partie en distanciel.

      Nous avons besoin de nous y préparer dès maintenant. Pour cela, quelques éléments à garder en tête d’abord :

      Oui, nous n’avons pas envie de le faire, parce que nous aimons enseigner en présence de nos étudiant∙es. Cela peut même être au cœur de notre pratique et identité professionnelles, voire la raison pour laquelle nous avons choisi ce métier. Il faut prendre le temps d’acter ce renoncement sous contraintes et de faire le deuil de ce qui aurait pu être.
      Oui le passage au distanciel pose énormément de questions politiques (mainmise d’entreprises privées par les outils choisis, accroissement de certaines inégalités – pas toutes –, instrumentalisation au service de la néolibéralisation en cours à l’université avec plus de précariat, moins de protection des personnels, risques psycho-sociaux etc.). N’oublions cependant pas que l’enseignement à distance est là pour améliorer la sécurité sanitaire des étudiant∙es, d’abord, et des personnels, pas seulement enseignantes. Et n’oublions pas non plus le travail acharné depuis des années en pédagogie critique du supérieur pour faire de l’enseignement à distance qui ait un vrai sens pédagogique et émancipateur1. Jeter l’anathème sur l’enseignement à distance dans son ensemble, non.
      Ce que nous avons fait au second semestre est un atterrissage en catastrophe : transférer en quelques jours des enseignements conçus pour être en présentiel en distanciel. Sans savoir pour combien de temps (@6amart6), sans avoir le temps d’être formé·es à cela ou d’y avoir réfléchi, avec les outils que nous avions sous la main, que nous prenions en main, en devant en changer, etc. Ce n’est donc pas du distanciel, c’est de la gestion d’urgence. Nous avons là un peu plus de temps pour réfléchir à nos enseignements de la rentrée et pour pouvoir les concevoir différemment. Nous pouvons prendre le temps de les penser en distanciel (surtout les CM). Nous pouvons les construire de manière flexible permettant l’alternance de phases en distanciel et en présentiel, sachant que nous n’aurons pas la main sur les dates d’éventuels reconfinements. Nous pouvons intégrer la possibilité d’un retour en présentiel, ce que @melpicard appelle les « penser à l’envers.
      Ce qui ne veut pas dire que nous n’avons rien à apprendre de l’expérience de ce semestre (full disclosure : ma charge d’enseignement mensuelle est presque en totalité au premier semestre, donc vous en savez en général plus que moi). Voir ce qu’en dit Michelle Miller ici : https://www.chronicle.com/article/5-Takeaways-From-My-Covid-19/248713 et les liens très intéressants de l’article.
      Enfin, tout ne dépend pas de nous. Beaucoup de nos étudiant·es n’ont pas d’ordinateur personnel (ou insuffisant) ; iels n’ont pas de lieu où travailler, pas de connexion stable, etc. Si nous pouvons et devons continuer de faire pression sur nos établissements pour que cela soit intégré (par l’emprunt d’ordi, par des envois et financements de clefs 4G comme cela a été fait, pour l’intégration des salles informatiques dans les équipements à rouvrir, avec règles de distanciation sociale, etc.), si nous pouvons et devons concevoir des dispositifs pédagogiques flexibles, avec des roues de secours pour un maximum de configuration
      J’insiste sur ce point : nous, enseignant∙es-chercheru∙ses, n’avons pas les moyens de résoudre ce problème matériel. Sachons distinguer ce que nous pouvons et devons faire, ce que nous devons faire remonter, et ce qui n’est hélas pas dans nos mains – nous en serons plus efficace ou plus satisfait∙es et moins en burnout.

      Nos étudiant·es savent quels sont leurs besoins et viennent d’avoir l’expérience de ce semestre en distanciel de catastrophe. Demandons-leur ce qui a marché et ce qui ne convient pas (sachant que les besoins et problèmes sont différents en fonction des gens, des disciplines, des niveaux, des établissements…) et mettons nos idées en commun (#entraide #KropotkinFoerever). En nous rappelant que sur cette question comme sur beaucoup de questions pédagogiques, il n’y a pas de solution magique et que chacune doit être adaptée à nos situations d’enseignement.

      Je restitue donc ici la discussion qui a eu lieu sur Twitter, en grande partie sous l’hashtag #LaFacADistance (merci @6amart6), en remerciant très sincèrement toutes les personnes qui y ont participé, listées ci-dessous. J’ai essayé d’attribuer au maximum les idées, parfois collectives ou dialogiques, et de les créditer quand leurs auteur·es m’en ont donné la permission, en citant les tweets en les éditorialisant a minima. Mes excuses, vous étiez tant que j’ai très probablement oublié des gens dans la multitude des belles réponses.

      Pour chacun.e d’entre nous
      1. Créér et maintenir la relation enseignant·e / étudiant·e

      Des rencontres (pouvant être visio) en petit groupe pour faire connaissance et instaurer la relation de confiance, notamment avec les nouveaux et les L1 (@Chouyo)
      Des horaires de permanence hebdomadaire aussi en visio, pour garder un maximum de contact et être accessible à celleux qui rencontreraient des problèmes. Et quand ces permanences sont pour répondre aux questions sur le cours, laisser un peu de temps pour « digérer » (@FrançoisLevrier) !
      Des tchats dédiés, pour comprendre collectivement les difficultés et ne pas hésiter à en parler pour ajuster (@GoLuluGogo)
      Les liens importants et adresse mail de contact dispo et visibles partout, tout le temps. (@Chouyo)
      Une vidéo d’accueil du cours, en particulier pour les L1
      Des accusés de réceptions des travaux, permettant de limiter le stress (@mcbd, @Chouyo, @WritingRg)

      2. Accompagner la création d’un collectif

      pour des L1 en particulier, mais pour les autres aussi, il faut favoriser le contact entre étudiantEs voire le travail de groupe, y compris sur les rendus (éventuellement en optionnel, @edragone18). Ce n’est déjà pas toujours évident en présentiel mais c’est gage d’entraide et donc de ne pas uniquement se reposer sur les enseignant·es. Cela aide aussi à la motivation (@GoLuluGogo). Cela peut aller avec un outil de type réseau social dans l’ENT (@melpicard) et selon plusieurs modalités : rendre un devoir commun, partager une lecture, échanger dessus, partager des incompréhensions, se relire (@ChRabier). L’idée est d’avoir un relais à l’enseignant·e et que le cours vive entre étudiant·es. De favoriser la cohésion et l’aide pour la réussite de toustes (@GoLuluGogo).

      3. Les cours eux-mêmes

      Un syllabus clair et complet pour chaque cours (@melpicard)
      Prendre un maximum de groupes de TD associés quand on fait le cours d’amphi pour permettre du face-à-face (oui, collègues PR, vous aussi). Car, comme le souligne @GoLuluGogo, les TD auront une vraie fonction de lien social. Sans lien et sans confiance mutuelle, le distanciel est pénible pour les enseignant·es et les étudiant·es.
      Enregistrer une partie du cours par oral (@edragone18) pour aller avec le PDF et/ou les diapos
      L’explication des cours en version vidéo (@49Lyloo05), en se rappelant des contraintes de connexion de certains étudiant·es et des difficultés à charger des fichiers lourds, ainsi que des recommandations des études de pédagogie sur le fait qu’il faut éviter des vidéos longues (<15 mn), inefficaces sur le plan de la transmission et de la rétention des informations. Bien cibler donc.
      Un mélange entre éléments synchrones (nécessaires, @adelinedurandm) et asynchrones
      La mise à disposition de tous les documents nécessaires numérisés (dont les ouvrages)
      Offrir des exercices d’application pour la mise en pratique du cours et pas une simple lecture (@edragone18)
      Donner un temps indicatif pour certains travaux et cours (prévoir 15min d’écoute pour cette capsule, 25 si prise de notes etc.) (@Chouyo)
      Donner des documents et des travaux facultatifs, pour celleux qui peuvent, veulent, voire en ont besoin, ainsi que des ressources supplémentaires en libre accès (@edragone18)
      Si possible, une barre de progression de la tâche/cours par rapport au déroulé du semestre. (@Chouyo)

      4. Les examens

      Construire les examens en fonction (@anthropolegiste) : par exemple en valorisant les questions métacognitives, comme « qu’est-ce que ma matière peut vous apporter »« quelle est votre opinion sur le sujet du cours ? » comme les questions de réflexion (@claireplacial)

      5. De la souplesse et de l’attention aux plus vulnérables

      Des créneaux, rendus, dispositifs de secours pour être le plus flexibles possibles, pour que les étudiant·es ne fassent pas les frais de pannes de connexion, souci matériel, maladie, mise en quarantaine subite, etc.
      De manière plus générale, augmentation des boucles rétroactives ! Isolé·es, les étudiant·es ont encore plus besoin de retours de la part des enseignants et de motivation/réconfort. (@stperret, @49Lyloo05). Voir qui décroche, n’ose pas poser de question, ne parvient pas à se connecter pour pouvoir agir de manière ciblée.
      Être particulièrement attentif.ve aux étudiant·es handicapé·es (@adelinedurandm) et intégrer leurs besoins dans le design du cours (voir par exemple les enjeux d’accessibilités pour les étudiant·es sourd·es, si on n’a pas de vrais moyens mis sur les sous-titres, aveugles et mal-voyant·es sur les diapos (@Anne-GE).
      Être aussi attentif.ves aux étudiant·es plus vulnérables : étudiant·es étranger·es, de première génération etc.
      Prendre en compte l’impact psychologique de la situation sur les étudiant·es y compris du retour en présentiel, dans ce qui peut aussi être un lieu nouveau (@adelinedurandm, @Angryotterr)
      S’assurer que les étudiant·es en fracture numérique puissent recevoir les cours et participer au cours le plus possible (@edragone18, @6amart6).

      À l’échelle de l’équipe pédagogique :

      De la coordination, de la coordination, de la coordination

      Un calendrier clair et donné à l’avance (sur un ou deux mois dans l’idéal, voire plus) pour les dates de cours, de TD, les dates de rendus, etc., partagé (@stperret, @gaydrian_smith, @adelinedurandm, @Angryotterr, @edragone18, @Anne_GE, @WritingRg) et UTILISE par les membres de l’équipe et partagé avec les étudiant·es
      Une attention collective donnée à la charge de travail globale des étudiant·es (@FrancoisLevrier)

      À l’échelle de l’établissement

      Travailler avec les services informatiques et les services d’appui pédagogiques pour le choix des outils, les questions d’équipement, de connexion, de soutien logistique, etc.
      Idem pour les questions d’accessibilité (sous-titres, question des illustrations etc.)
      Se mettre en lien avec les services handicap pour travailler à l’accessibilité (@adelinedurandm)
      Demander que l’université propose un outil de communication collective (libre) pour ses étudiant-es (un Mattermost par ex.) ; sans quoi celleux qui ne sont pas sur facebook vont être complètement écarté·es d’un groupe « promo ». (@Anne_GE)
      Demander que l’université ait réglé leurs logiciels sur les prénoms d’usage. (@Anne_GE)

      Et beaucoup, énormément, à la folie, toujours plus, jamais assez, de bienveillance (@stperret, @edragone18)

      Enfin, la plupart de ces belles idées sont des pratiques que nous enseignant·es devrions DE TOUTE FACON, adopter en temps dit normal et en présentiel…

      Pour compléter ce rapide panorama de propopositions, nous vous invitons à continuer à faire vos propositions #LaFacÀDistance sur la plateforme ci-dessous.

      Merci de votre aide !

      Formulaire à idées :
      https://framaforms.org/lafacadistance-1589008071

      https://academia.hypotheses.org/23546

      #rentrée_2020 #rentrée_universitaire #septembre_2020

    • À distance, il n’y a pas d’école

      Sous la condition du « confinement », l’univers numérique a connu une énorme expansion. Même les plus réticents et beaucoup de ceux qui étaient exclus de l’utilisation des nouvelles technologies –généralement des personnes âgées– ont fait leur initiation. La vie à distance a forcé l’intégration dans l’écosystème numérique.

      L’expérience en cours la plus notable et la plus importante est l’enseignement à distance, qui fait sortir l’école de son enceinte protectrice et la fait entrer dans l’intimité du foyer. Le dispositif de l’enseignement à distance implique un danger auquel nous sommes tous exposés aujourd’hui, presque sans protection : une expansion significative du panoptique numérique (qui permet de tout voir et d’exercer une surveillance). Mais la question fondamentale dans cette expérience est de savoir si elle est réussie sur le plan niveau didactique (plus précisément, quel niveau de réussite a été atteint), et quelles conclusions peut-on en tirer. Il est évident que les résultats diffèrent grandement, en fonction des disciplines, des enseignants et des élèves. Je ne me fonderai pas sur des expériences particulières, les réflexions que je propose se situent sur un plan moins empirique.

      Je commencerai par la question de la transparence : l’école a été protégée tant qu’elle a bénéficié de l’état hermétique de la classe, que la porte de la salle de classe a été fermée, créant un espace discontinu, sans intrusions extérieures (espace qui pouvait être utopique ou oppressant aussi bien). Ce temps est révolu depuis longtemps et la salle de classe, qui reflète l’ouverture de l’école dans son ensemble, n’est plus un espace autarcique. La transparence, qui auparavant avait déjà donné lieu à une discussion sur la nécessité ou non de la moduler, connaît désormais, avec le confinement, une nouvelle étape : elle est devenue totale et absolue. À la maison, chacun peut regarder les « performances » des enseignants, évaluer leurs manières de faire et « apprécier » leur vidéogénie. Un certain degré de technophobie était encore toléré tant que l’enseignant exerçait dans sa classe ; dans l’enseignement à distance, ce n’est pas possible, et les arguments pour légitimer cette technophobie ne semblent plus recevables.

      Mais la question la plus importante qui ressort de cette expérience exceptionnelle — qui a peut-être pour effet de montrer combien l’école est une institution indispensable et capable d’alimenter la dernière utopie à laquelle nous avons droit — est celle de l’école comme lieu de construction du collectif et de la centralité de la classe en tant que communauté. Le modèle de la communauté éducative a une très grande signification politique.

      Un autre aspect important est celui de l’attention. Comme nous le savons, le plus grand défi de l’école est celui de l’attention : comment gagner et fixer l’attention des élèves, ces « sujets numériques » qui vivent sous le régime du fractionnement de l’attention ? Le grand combat de l’école, ces dernières années, a consisté à se doter de rituels spécifiques qui servent de dispositifs attentionnels, afin de récupérer ce que l’on appelle généralement « l’attention conjointe » (ou attention partagée), mode qui désigne le fait que l’attention de quelqu’un (dans la circonstance, un élève) est attirée sur l’objet qui lui est indiqué par la personne (dans la circonstance, le professeur) qui joue un rôle de guide.

      Or l’attention conjointe est intrinsèquement liée à la présence. C’est un fait bien connu de nos jours que les enfants et les adolescents n’échouent pas à l’école parce qu’on leur y enseignerait des choses difficiles à apprendre, mais parce que ce qu’ils apprennent à l’école ne les intéresse pas. C’est pourquoi les situations d’enseignement doivent être analysées du point de vue d’une écologie de l’attention. La salle de classe doit être conçue comme un écosystème d’attention. Est-il possible de créer cet écosystème dans l’enseignement à distance ? Dans son livre sur la figure du pédagogue Joseph Jacotot, Le maître ignorant, le philosophe français Jacques Rancière décrit et analyse une action pédagogique visant essentiellement à « l’émancipation intellectuelle ». La fonction essentielle du maître (potentiellement ignorant) n’est pas d’expliquer les contenus, mais d’exercer sur les élèves la capacité d’attention, soit par un ordre imposé, soit en stimulant leur désir. Toute l’expérience de l’enseignement, dit Rancière, doit tendre à « l’habitude et au plaisir que l’on éprouve en observant et en fixant avec attention » (attention : ad-tendere, tendre vers). C’est pourquoi la salle de classe est le lieu d’une expérience unique, irremplaçable, capable parfois de procurer une expérience euphorique, tant au « maître » qu’aux élèves.

      https://academia.hypotheses.org/23475

    • #As_It_Used_To_Be

      Depuis 2001, le « 48 Hour Film Project » est une compétition annuelle qui invite de jeunes réalisateurs à réaliser un court-métrage à contraintes (en 48h, en tirant au sort genre, personnage, objet, réplique). Après avoir remporté la victoire à Paris en 2011 avec le film « Casse-gueule », #Clément_Gonzalez a rencontré le succès à nouveau avec « As it used to be » en 2012 (mise en ligne 2013), qui développe en deux séquences et 8’13’’ quelques puissantes images associées à l’enseignement à distance (EAD) dans les universités. Le concours se tient dans une centaine de centres urbains du monde entier ; c’est à Johannesburg que Clément Gonzalez et son « Collectif 109 » ont tourné « As it used to be », dont la carrière a débuté de façon foudroyante par une avalanche de programmations et de récompenses1, avant de ressurgir en 2020 par la grâce d’une généralisation brutale et massive de l’EAD dûe aux mesures de confinement.

      L’Université de Johannesburg prête son architecture brutaliste aux décors de cette courte histoire de near future, comme l’ont fait ensuite les structures de la Bibliothèque Nationale de France dans la série Tripalium (Arte, 2016), ou auparavant les célèbres Espaces d’Abraxas de Noisy-le-Grand dans de nombreux films, de Brazil (1985) à Hunger Games (2012). L’Université de Johannesburg est d’ailleurs également réputée pour avoir lancé les premiers diplômes 100% à distance d’Afrique du Sud en 2017 et 20182 – et ses étudiant·es se sont fortement mobilisé·es en avril dernier pour faire entendre la voix des moins bien équipé·es des leurs3.)

      Le charisme des deux acteurs du film, l’intelligence et l’émotion de cet aperçu de la passion d’enseigner font dire à Clément Gonzalez que le court-métrage, depuis le début, a rencontré l’adhésion aussi bien des étudiant·es que des professeur·es. Il confie également qu’un projet d’extension en long métrage est en écriture depuis quelque temps. Le moment ne serait pas mal choisi pour développer un récit de contre-dystopie, où des voix persévèrent à résonner entre les murs des amphis.

      https://academia.hypotheses.org/23598
      https://vimeo.com/57814889

      #court-métrage #film

    • Les universités, l’enseignement à distance et le Covid-19 (2/2)

      Mettre fin à une lente et longue dérive

      Ces dernières années, deux phénomènes ont progressivement fait perdre son sens à l’université et l’ont profondément pervertie. D’une part, la complexification administrative due notamment à l’augmentation des effectifs étudiant∙es conjugué à la réduction du personnel administratif, a eu pour effet de développer la fonction administrative de l’enseignant-chercheur, au détriment de ses deux véritables fonctions, l’enseignement et la recherche. Cette nouvelle fonction administrative est évidemment mal assurée par un personnel qui n’a pas été formé à cela et qui vit cet investissement nécessaire le plus souvent comme une punition ou une calamité. Cela a pour conséquence d’augmenter les tensions entre la composante administrative de l’université et la composante pédagogique et de diminuer, encore, la qualité du service surtout dans les grandes universités au sein desquelles les personnels se connaissent mal. D’autre part, la croyance, de plus en plus ancrée dans l’esprit des étudiant∙es, des enseignant∙es et de la société en général, selon laquelle le diplôme universitaire permet d’accéder à l’emploi, a entrainé une modification de la nature de l’enseignement et des diplômes universitaires, pensés comme de plus en plus professionnalisant et techniques et reflétant de moins en moins l’activité de recherche dans la discipline concernée. Le tissu économique, l’État et désormais de nombreux étudiant∙es voudraient que l’on sorte de l’université prêt·e à l’emploi, ce qui est difficilement envisageable dans la mesure où la plupart des futurs métiers des étudiant∙es universitaires ne sont pas représentés dans les athénées. Si le diplôme peut parfois permettre d’accéder à une profession, cela reste marginal et surtout cela ne saurait être considérée comme un élément décisif pour juger de la pertinence d’un enseignement universitaire.

      Le monde de l’entreprise a un intérêt à la transformation des universités en de gigantesques centres de formation professionnelle, car cela permet de réduire les coûts de la formation interne des entreprises. Le savoir technique est enseigné par des fonctionnaires, les stages sont financés par l’argent public et l’employeur peut donc embaucher des travailleurs prêts à l’emploi. Le risque d’une rapide obsolescence des formations trop techniques est ignoré au profit d’une incessante critique de l’incapacité de l’université à s’adapter à la réalité économique… Le transfert du coût de la formation interne des entreprises à la collectivité nationale, à travers notamment l’institutionnalisation du stage, n’est jamais mentionné et les universitaires sont au contraire invités à remercier gracieusement les entreprises pour leur sacrifice qui consiste à accueillir une main d’œuvre jeune, motivée et… pratiquement gratuite ! Loin de pouvoir leur demander des comptes, les universités sont sommées de se plier aux desideratas de ces gentils philanthropes. Si la loi d’encadrement des stages a permis de mettre fin à certains abus trop criants pour être ignorés, elle n’a pas eu pour effet de modifier le système en profondeur ou de changer les rapports déséquilibrés qui se sont progressivement installés au profit du monde économique.

      Surtout, ces deux évolutions concomitantes, l’augmentation de la charge administrative et l’injonction du prêt à l’emploi, ont perverti le travail de l’universitaire qui n’exerce plus que marginalement le métier qu’il a pourtant choisi et pour lequel il a été formé plusieurs années. Avec moins de temps à consacrer à ses recherches et contraint d’enseigner un savoir de plus en plus éloigné d’elles, il subi, comme de nombreux fonctionnaires, une lente dérive qui l’éloigne de ce qu’il est ou plutôt de ce qu’il voulait être. L’irruption massive du numérique, si elle est aussi pensée à cet effet, peut constituer un moyen efficace pour aider l’université à sortir de cette situation désolante et à se retrouver.
      L’informatique au service du renouveau universitaire

      Certes, il ne s’agit pas du remède universel capable de guérir miraculeusement tous les maux ! L’outil informatique demeure un simple instrument qui peut servir le pire comme le meilleur. Il peut toutefois permettre de concilier des impératifs apparemment contradictoires comme la nécessaire diminution de la fréquentation des sites universitaires et l’augmentation de l’audience des universités. Il favorise aussi le travail de divulgation et de diffusion des travaux de recherche dont tout chercheur doit aujourd’hui se préoccuper. Ainsi, les revues universitaires, les éditions de facultés qui ont progressivement disparu ou qui vivotent ici ou là doivent devenir de puissants vecteurs de diffusion des travaux des universitaires, non en direction uniquement de leur propre communauté scientifique, mais également en s’adressant au plus grand nombre. La recherche étant financée par des fonds publics, il va de soi que le savoir produit doit être distribué gratuitement ou à des coûts très modiques, ce que permet l’approche numérique. A contrario, l’existence des centaines et parfois des milliers de revues, propriétés de grands groupes privés mais qui vivent uniquement grâce au travail des chercheurs, principalement fonctionnaires, et concentrent aujourd’hui l’essentiel des publications scientifiques dans plusieurs domaines, mérite d’être profondément remis en question. Des initiatives en ce sens existe déjà et doivent être massivement développées.
      De même, la production de matériel pédagogique par les universitaires ne peut continuer, comme aujourd’hui, à alimenter un marché privé très rentable, massivement financé par l’impôt puisqu’essentiellement destiné à vendre des produits réalisés par des fonctionnaires dans le cadre de leur fonction mais qui débouche sur la vente de manuels forts chers pour les bourses étudiantes. Là encore, l’outil numérique est à même d’escamoter ce modèle économique étrange au profit d’une vision moins naïve permettant de rendre à l’université ce qui est à l’université tout en offrant à l’étudiant l’outil sans lequel ses études s’avèrent impossible et qu’il est aujourd’hui obligé d’acheter à un éditeur privé.

      A contrario, comme les universités en font douloureusement l’expérience depuis plus de dix ans, l’outil numérique ne peut se substituer à l’existence d’une administration universitaire importante pour ne pas dire pléthorique. La diminution conséquente du personnel administratif par rapport à la masse d’étudiant∙es en constante augmentation a conduit au recours au traitement informatique des données dans un nombre toujours croissant de domaines, des inscriptions à la saisie des notes jusqu’à la délivrance des diplômes. Tout, ou presque, a été dématérialisé. Si ce processus présente d’indéniables avantages qu’il convient d’exploiter pour l’avenir, il ne doit paradoxalement pas être accompagné d’une réduction massive des effectifs administratifs et doit au contraire servir à développer des fonctions essentielles progressivement délaissées.

      Il en va de la survie même de l’administration universitaire dont le travail ne peut se réduire, pour des milliers de fonctionnaires, à la saisie informatique de données. Ce travail à la chaine aussi abrutissant que dévalorisant doit être subdivisé et le plus possible délégué ou partagé avec l’ensemble de la communauté universitaire : personnels administratifs, enseignant∙es mais aussi étudiant∙es. Cette tâche ingrate mais nécessaire doit être évidemment compensée à la hauteur de sa pénibilité. Aux côtés de cette administration fortement dématérialisée et déconcentrée, il faut reconstruire une administration qui soit un véritable soutien aux usagers comme aux enseignant∙es. Cela ne signifie pas rétablir une hiérarchie interne qui n’a pas de raison d’être entre l’administration et les pédagogues mais au contraire mettre l’ensemble de l’université, enseignant∙es et administrations, au service des étudiant∙es et plus généralement de la fonction universitaire.

      Il faut un personnel formé, qualifié, comme il en existe dans des milliers d’entreprises prestataires de service qui se soucient du niveau de satisfaction de leurs usagers et se préoccupent de leurs employés. Ainsi, par exemple, les universités doivent se doter de réels services de ressources humaines, avec un suivi des carrières, une capacité à proposer à chaque employé des possibilités d’évolution, des informations utiles sur la formation professionnelle, etc. Aujourd’hui, les services d’orientation pour les étudiant∙es sont quasiment inexistants alors que l’univers de l’enseignement supérieur n’a jamais été aussi complexe. Également, les directions des relations extérieures doivent être renouvelée et renforcée, en particulier au service des étudiant∙es qui souhaitent avoir une expérience à l’étranger et pour lesquels si peu est fait. La liste des services à repenser est longue et il ne s’agit pas ici de la dresser avec exhaustivité. Il convient, dans un premier temps, simplement d’admettre que si beaucoup de choses peuvent aujourd’hui être traitées exclusivement par mail et par tableur, comme les inscriptions ou le suivi académique, d’autres ne peuvent pas l’être et ne pourront jamais l’être. Il faut cesser de faire comme si dans le simple objectif non avoué de réduire, toujours plus, les dépenses et donc le personnel. Le chantier de reconstruction de l’administration universitaire est immense et la route est longue mais il faut s’y engager pour espérer redonner à l’université sa fonction et par là-même, son prestige.
      Le nerf de la guerre : le diplôme national

      Rien ne sera cependant possible sans une réflexion profonde sur la place des titres et diplômes que délivrent les universités et qui se sont progressivement substitués au chercheur, à la recherche et à l’enseignement, pour devenir le véritable moteur de l’université. Il convient de les considérer pour ce qu’ils sont, c’est-à-dire de simples accessoires d’une entreprise plus noble et bien plus complexe que la distribution des distinctions : la transmission du savoir universitaire. Le titre ou le diplôme ne donne pas de travail, tout au plus qualifie-t-il pour un emploi mais dans la majeure partie des cas il n’est là que pour attester de la formation reçue par le diplômé. Il n’a pas d’autre valeur que celle qu’il certifie, à savoir la qualité de l’enseignement. Or, l’université ne sait véritablement et efficacement former que par la transmission du savoir qu’elle produit et dont elle est dépositaire. Ce savoir est parfois très pratique, y compris dans des champs disciplinaires qui pourraient paraître improductifs, mais il demeure intimement lié à l’activité du chercheur. Ce lien indissoluble entre recherche, enseignement et diplôme doit être restauré et conduire à l’abandon de l’idée selon laquelle l’université pourrait tout enseigner. Elle ne doit plus être vue comme le prolongement naturel de l’éducation nationale, destinée à accueillir toute la jeunesse française, prétendument capable de tout enseigner et de tous les former. A contrario, elle doit s’ouvrir à nouveau sur la société et s’adresser à tous, jeunes et moins jeunes, indépendamment de la question de la délivrance d’un titre national qui viendrait systématiquement sanctionner ses formations. L’univers de la formation aujourd’hui regorge de méthodes de certifications et autres techniques qui attestent de l’enseignement ou de la formation reçue, de manière plus souple, moins contraignante et souvent bien plus pertinente que les diplômes nationaux. Les universités doivent investir massivement ce champ afin de valoriser les domaines de recherche de ses enseignant∙es-chercheur∙es et au contraire délaisser les multiples formations pour lesquelles elles n’ont d’autres compétence que leur capacité à faire appel à des formateurs extérieurs ou à forcer leurs propres enseignant∙es.

      Le diplôme national, avec son cadre nécessairement rigide et l’indispensable harmonisation des formations qui le délivrent, doit retrouver sa juste place, c’est-à-dire celle d’un titre donnant accès à des professions, des métiers ou des formations qui ne peuvent être exercés ou suivies par quelqu’un qui n’en serait pas titulaires. Ainsi, la santé, la justice ou encore l’enseignement sont des activités qui peuvent supposer une certaine uniformité du savoir transmis aux futurs acteurs. C’est à la fois lié à la nature de l’activité et à sa prise en charge par la communauté. Il est d’ailleurs intéressant de remarquer, qu’à l’exception notable de la formation médicale qui peut intégralement avoir lieu au sein de l’université grâce aux centres hospitaliers universitaires, de nombreuses activités réglementées requiert le passage d’examens et de formations à l’extérieur de l’université, comme pour les professions juridiques (avocats, notaires, juges…) ou l’enseignement. En revanche, le diplôme national, n’a, dans de très nombreuses situations, aucune utilité : ainsi des milliers de métiers les plus divers peuvent légalement s’exercer sans devoir exhiber de titre. Malgré cela, le diplôme national s’est progressivement imposé comme la forme normale de certification d’une formation d’enseignement supérieur au détriment de la diversité et surtout de la qualité réelle des formations dispensées. Il ne garantit évidemment aucune forme d’égalité entre étudiant∙es provenant d’établissements universitaires différents mais donne au contraire lieu à des formes de concurrence malsaine entre établissements : certains choisissant de limiter l’attribution du diplôme afin de garantir la « qualité » du titre délivré par l’université tandis que d’autres facilitent cette obtention afin d’attirer des candidats. Le marché de l’emploi n’est pas dupe de cette réalité et sait parfaitement établir sa propre échelle de valeur des formations délivrées par les établissements universitaires. Aussi, faire croire que le diplôme est le même quelle que soit l’université qui le délivre consiste à entretenir une fiction à laquelle plus personne ne croit et qui finit non par valoriser la formation moins qualitative mais à faire perdre son sens au diplôme national.


      *

      La crise actuelle permet de penser le basculement. La fermeture des universités les a inévitablement réduites à ce qu’elles sont essentiellement : une communauté de chercheurs et d’enseignant∙es au service des étudiant∙es. Pour beaucoup, ils se démènent pour permettre à leur enseignement d’exister malgré les circonstances, pour continuer à transmettre mais aussi à apprendre. La transmission et la circulation du savoir résiste alors que tout le reste s’est effondré en quelques heures suivant le confinement. Cela n’aurait pas été possible, le plus souvent, sans l’implication active des services informatiques pédagogiques qui ont dans de nombreux cas remarquablement relevé le défi et ont efficacement épaulé des milliers d’enseignant∙es et d’étudiant∙es. Cette extraordinaire et héroïque résistance de ce qui constitue l’âme de l’université, sa fonction première de sauvegarde et de transmission du savoir, est un trésor sur lequel construire l’avenir.

      https://academia.hypotheses.org/23753

  • L’anthropologie expliquée, par des anthropologues, à ceux qui n’y connaissent rien... #SHS #anthropologie #vulgarisation

    https://sms.hypotheses.org/24844

    Qu’est-ce qu’un anthropologue ? Une femme ou un homme à la recherche de sauvages ? Un savant en quête d’exotisme ? Ne serait-ce pas plutôt un chercheur qui enquête sur un terrain et qui étudie des populations ? Un court-métrage d’animation corrige les stéréotypes sur le métier et présente les facettes du travail ethnographique : le terrain, mais aussi la recherche documentaire et bibliographique, l’écriture avant, pendant et après l’enquête à proprement parler, la relation avec ceux auprès de qui l’on conduit son travail.

    Le film a été produit dans le cadre du programme de recherche VISA « Vie Savante », programme visant a réunir un collectif de chercheuses et chercheurs qui s’intéressent à l’évolution de leur discipline et à ce qu’elle fait aux individus qui la pratiquent. Il s’agit pour eux de tenir compte de la diversité des façons de faire de l’anthropologie et de couvrir ainsi les différentes facettes de ces vies savantes : l’anthropologue-muséologue présente une configuration assez différente de l’anthropologue-réalisateur (...)

  • L’accès et la circulation des savoirs se font dans un monde de plus en plus ouvert. Les données en libre accès se multiplient, mais leurs usages ne vont pas de soi… #numérique #internet #usages #openaccess

    https://sms.hypotheses.org/24810

    Open source, open educational resources, open data, open courses, ces différentes expressions anglophones traduisent la multiplication des données actuellement accessibles en mode ouvert sur le web. Elles modifient progressivement les modalités d’accès et de circulation des savoirs à l’ère des géants du numérique –les GAFAM. Dans les domaines de l’éducation comme des données publiques, leurs usages ne vont pas forcément de soi.

    Ces questionnements ont fait l’objet d’un ouvrage collectif coordonné par Luc Massou, Brigitte Juanals, Philippe Bonfils et Philippe Dumas, regroupant une sélection de communications sur les sources ouvertes numériques dans le secteur éducatif et social réalisées lors d’un colloque à l’université Aix-Marseille en 2016 (...)

    • La #science_ouverte doit être interrogée bien au-delà de ce premier discours consensuel sur l’ouverture des données et des publications (soit un mouvement contre les éditeurs privés et l’appropriation commerciale du savoir - mouvement qui, soit dit au passage, est en phase d’institutionnalisation depuis quelques années).
      Plusieurs points sont systématiquement refoulés : le coût écologique de l’ouverture des données, la gouvernance économique (volonté de réduire les coûts), la transformation (voir la destruction) des métiers d’éditeur et de bibliothécaire...
      Les politiques scientifiques d’évaluation sont également systématiquement passés sous silence (le fameux #publish_or_perish). Je vous invite à lire ce très bon texte de #Peter_Sloterdijk (https://seenthis.net/messages/54405) sur l’augmentation du plagiat comme conséquence du publish or perish (ou publier pour publier à défaut d’être lu : le pacte de non-lecture).
      Ce que l’ouverture des données va également permettre, c’est le recours massif aux robots (#machine_learning), seuls capables de rechercher les mots clefs souhaités dans un corpus numérique monstrueux. Cela pose et posera des questions épistémologiques qui ne sont pour le moment jamais évoqués dans cet appel à une science 2.0 (ou e-science) jamais nommée.

      P.-S. Je parle essentiellement ici des SHS.

      #informatisation #accès_ouvert #open_access

  • La Normandie a accueilli pendant l’entre-deux-guerres de grandes écrivaines américaines souhaitant écrire sans entraves et vivre leur sexualité #littérature #histoire #sexualité #culture

    https://sms.hypotheses.org/24819

    Peut-on résumer les relations américano-normandes au débarquement en Normandie ? Ce serait par trop réducteur : entre les deux guerres, la région a accueilli de grandes écrivaines américaines souhaitant écrire sans entrave et vivre pleinement leur sexualité. Leurs écrits fournissent un point de vue décentré sur la France du début du XXe siècle, percevant la question de l’écriture et la problématique du genre depuis le prisme d’une littérature anglophone et féminine

    Certaines écrivaines séjournèrent à Honfleur, la patrie d’Alphonse Allais. C’est le cas de Natalie Clifford Barney, écrivaine et poétesse, qui résidait souvent chez l’une ou l’autre de ses maîtresses – et en particulier chez sa compagne de cœur, l’écrivaine Élisabeth de Gramont, épouse du duc de Clermont-Tonnerre. Libérée sexuellement et ouvertement lesbienne, Natalie Clifford Barney entretint aussi une liaison avec la poétesse Lucie Delarue-Mardrus. Tout comme elle, la dramaturge Djuna Barnes, a passé ses vacances dans la demeure d’Élisabeth de Gramont située sur la Côte de Grâce (...)

  • NAZISME ET MANAGEMENT : DES LOGIQUES COMMUNES ?
    5 mai 2020
    avec Johann Chapoutot

    Historien du nazisme et de sa vision du monde, Johann Chapoutot a récemment fait paraître un essai dont la réception n’a pas été unanime : Libre d’obéir : le management, du nazisme a aujourd’hui. Il revient avec Julien Théry sur la démarche du livre et profite de l’occasion pour répondre aux objections qui lui ont été opposées.

    https://www.youtube.com/watch?v=CjmH2fCVUyM

  • Comment les médias montrent-ils l’ennemi, dénombrent-ils les morts, figurent-ils le combat des soignants ? #médias #Covid19 #santé #crise_sanitaire

    https://sms.hypotheses.org/24815

    Pour un chercheur spécialiste d’imagerie scientifique, la crise sanitaire actuelle et sa médiatisation sont sidérantes car elles montrent la recherche de l’iconicité à tout prix en train de se faire. Et elle confirme que les ressources visuelles sont limitées. Dans des travaux de recherche (aujourd’hui anciens !) j’avais nommé cette quête d’images censées représenter certaines dimensions de cette crise, et ce en suivant la théorie Freud sur le travail du rêve, « la prise en considération de la figurabilité ».

    À l’issue d’un parcours non systématique dans divers médias « tous publics » et sans aucune prétention à l’exhaustivité, j’ai extrait (fin mars-10 avril 2010) trois catégories d’illustrations. Ce sont celles qui émergent de la presse écrite, de la télévision et plus marginalement de l’Internet dès lors que ces médias veulent s’adresser à leurs publics. Elles correspondent à trois catégories d’intentions : exhiber l’ennemi ; calculer le nombre de morts ; figurer le combat du personnel soignant (...)

  • Les élèves qui décrochent du système scolaire sont en difficulté pour entrer dans le marché du travail. Ils sont aussi très exposés au chômage et au sous-emploi durant leur vie #école #élèves #échec #emploi #chômage

    https://sms.hypotheses.org/19807

    Les décrocheurs scolaires sont aujourd’hui nombreux à quitter le système éducatif sans diplôme. Ils sont ainsi exposés au chômage et au sous-emploi en début de vie active. Avec la crise, cette exposition se prolonge bien au-delà de la période d’insertion sur le marché du travail. Et même si une partie d’entre eux acquiert finalement une qualification, leur destinée professionnelle reste largement marquée par l’insécurité de l’emploi ou des emplois de mauvaise qualité. Dans ces conditions, quitter le système scolaire (collège, lycée général, lycée professionnel ou centre de formation pour apprentis) sans diplôme apparaît bien comme un risque socio-économique.

    Les pouvoirs publics sont bien conscients de cette inégalité qu’ils désignent sous le nom de « décrochage scolaire ». Ils en ont fait le cheval de bataille de leur politique éducative et entendent ainsi réduire ce risque qui concerne actuellement un jeune sur six.

  • Coronavirus : en France, avoir un bilan final du nombre de morts prendra plusieurs mois, Henri Seckel et Chloé Hecketsweiler
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/05/02/coronavirus-en-france-avoir-un-bilan-final-prendra-plusieurs-mois_6038434_32

    Seule la généralisation du certificat de décès électronique permettrait un décompte précis des morts en temps réel.

    Soyons clairs : il est aujourd’hui impossible d’établir avec précision le nombre de victimes du Covid-19 en France. Les chiffres en temps réel avancés çà et là sont tantôt des hypothèses qui risquent d’être infirmées une fois l’épidémie achevée, tantôt l’addition de décès attribués avec certitude ou presque au virus, mais qui omet des milliers de cas. Le bilan quotidien du directeur général de la santé (DGS), Jérôme Salomon, se range dans la seconde catégorie. Vendredi 1er mai, il était de 24 594 décès causés par le SARS-CoV-2.

    Jusqu’à fin mars, le DGS n’annonçait que la mortalité « en milieu hospitalier », relayant le nombre de décès transmis chaque jour par les hôpitaux à Santé publique France (SPF) par l’intermédiaire du système Si-Vic (système d’information pour le suivi des victimes de situations sanitaires exceptionnelles), mis en place après les attentats de 2015. Au 1er mai, on dénombrait 15 369 décès à l’hôpital.

    De nombreux biais
    Depuis début avril sont comptabilisés, en outre, les décès survenus dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et autres établissements sociaux et médico-sociaux, remontés grâce à un système équivalent à Si-Vic mis en place en cours de l’épidémie. Près de 7 200 institutions, dont 4 500 Ehpad, sur les quelque 10 000 du pays ont transmis des données à SPF. Au 1er mai, 9 225 morts étaient recensés en #Ehpad – les 3 215 résidents morts après leur transfert à l’hôpital sont comptabilisés parmi les décès en milieu hospitalier.

    Reste la troisième catégorie, l’angle mort de cette pandémie : les #décès_à_domicile. Le syndicat de médecins généralistes MG France avance le nombre de 9 036 décès entre le 1er mars et le 19 avril, après extrapolation de chiffres fournis par 2 339 généralistes (sur 55 000 environ dans l’Hexagone). Ce total obtenu par une simple règle de trois est dénué de robustesse scientifique, mais d’évidence, il existe « en ville » une surmortalité liée au Covid-19 absente des statistiques.

    Par souci de transparence, le DGS a commencé à donner les chiffres de la mortalité de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), qui ne les dévoile d’habitude qu’une fois par an. Cette statistique est très fiable – tous les certificats de décès atterrissent à l’Insee – mais ne renseigne pas sur la cause des décès. On sait donc que 106 732 personnes sont mortes en France entre le 1er mars et le 19 avril 2020 (dont 25 514 à domicile), contre 84 927 (dont 20 055 à domicile) sur la même période en 2019. Mais 21 805 morts en plus d’une année à l’autre (dont 5 459 à domicile) ne signifient pas 21 805 morts du Covid-19 : « La hausse est liée à l’épidémie, sans qu’il ne soit possible à ce jour d’en estimer la part attribuable précise », souligne SPF.

    Car les biais sont nombreux. Le confinement a permis d’éviter des décès liés aux accidents de la circulation ou du travail, ainsi que la propagation de maladies infectieuses ou virales hors coronavirus. A l’inverse, certaines pathologies n’ont pas été traitées correctement du fait de l’encombrement du système de soins, entraînant des décès évitables en temps normal. Il faut encore tenir compte de la hausse naturelle de la mortalité au sein d’une population vieillissante comme la nôtre. Bref, l’équation est complexe.

    Une seule institution sait la résoudre en France : le Centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (#CépiDc), qui dépend de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Mais il lui faut du temps. En effet, une fois qu’un médecin a rempli un #certificat_de_décès – à l’hôpital, en Ehpad ou à domicile –, le volet administratif parvient rapidement à l’Insee, mais le volet médical, un document papier sur lequel figure la cause du décès, met plusieurs semaines à parvenir au CépiDc, après être passé par les mairies puis les agences régionales de santé.

    Le médecin peut aussi, par le système baptisé #CertDc, remplir sur Internet un certificat de décès électronique qui parvient alors immédiatement au CépiDc. Mais ce système est méconnu, il n’élimine pas totalement la paperasse, alors les médecins l’utilisent peu : aujourd’hui, seuls 20 % des décès sont certifiés par CertDc, presque uniquement des décès à l’hôpital.

    Fin avril, le CépiDc avait reçu un peu plus de 8 000 certificats portant la mention Covid-19. « Je commence seulement à recevoir des certificats papier avec la mention Covid-19, ceux des morts de février », explique Claire Morgand, directrice adjointe du CépiDc, dont les modélisations prédictives, basées sur les certificats déjà reçus, situent le bilan actuel « entre 35 000 et 38 000 décès avec Covid-19 avéré ou suspecté », en incluant les morts à domicile.

    « A tâtons »

    Pour le bilan finalisé de la pandémie en France, prévient-elle, « il faudra attendre entre douze et dix-huit mois après le dernier décès ». Car il faudra, pour cela, avoir reçu tous les certificats et les avoir codés selon un processus chronophage, après avoir décrypté les formulaires remplis à la main par les médecins. Le CépiDc ne compte que quatre #codeurs – ils étaient 12 en 2012, il n’y en aura plus qu’un en 2021, après les départs en retraite non remplacés. Ils sont 50 en Allemagne – où il faut coder 900 000 décès par an, contre 600 000 en France. « Il y a une discordance entre l’importance de notre mission et nos moyens, regrette Claire Morgand. La visibilité finit par arriver, mais beaucoup trop tard. »

    Des chiffres de mortalité précis en temps réel offriraient une vision rapide et plus fine de l’évolution d’un virus, notamment sur le plan géographique, faciliteraient l’organisation des soins – la montée en charge des hôpitaux par exemple – et la réflexion autour de mesures de santé publique telles que le confinement. « Aujourd’hui, les décisions sont prises sur la base des tendances – une hausse, un plateau, une descente. S’ils avaient des indicateurs fiables et immédiats, les politiques prendraient des décisions plus fermes. Là, on voit qu’ils y vont à tâtons », estime Mme Morgand. A ce stade, les modélisations des épidémiologistes sont basées sur une estimation de la létalité du virus (le nombre de décès par rapport au nombre de personnes infectées) : des données réelles leur permettraient d’être plus précis.

    La crise actuelle accélérera-t-elle la dématérialisation de la certification des décès ? Pas sûr, craint Mme Morgand : « On a lancé ce système après la canicule de 2003, où l’on n’avait pas été capables de compter nos morts. On l’a relancé après la grippe H1N1 en 2009. Et puis le soufflé est retombé, on n’a pas mis les moyens nécessaires, et il ne se passe plus rien. Aujourd’hui, on n’est toujours pas capables de compter nos morts. »

    Sans doute est-ce marginal, mais n’y a-t-il pas des imprécisions sur les motifs de décès, qu’ils soient attribués au Covid-19 sans test ou scanner sur la base d’un diagnostique erroné, et, réciproquement, des décès du au Covid-19 attribués à d’autres causes ?

    #Covid_19 #mortalité

  • Peut-on réduire la culture aux pratiques artistiques ? Comment saisir l’action des pratiques et des mouvements culturels dans la résistance et l’émancipation par la culture ? #culture #arts #pratiques_sociales #mouvements_culturels #institutions #sociologie

    https://sms.hypotheses.org/20990

    En France, la sociologie de la culture s’articule autour de deux approches principales : celle des pratiques culturelles d’une part, qui donne lieu depuis les années 1960 à des travaux qui s’intéressent à la distribution inégale des œuvres, des compétences et des pratiques culturelles, mais aussi aux formes multiples d’appropriation des œuvres d’art et des biens culturels ; et celle des politiques culturelles d’autre part, dominée par des approches socio-historiques et/ou territoriales, et qui s’est enrichie ces dernières années de recherches sur la formation et l’action des intermédiaires culturels.

    La limite principale de ces approches est toutefois de reproduire en grande partie les arbitrages institutionnels censés circonscrire les domaines d’action et de financement dévolus, d’un côté, aux activités artistiques et, de l’autre, aux activités sportives et à l’éducation populaire. Le développement de la sociologie de la culture française doit ainsi beaucoup aux commandes publiques engendrées par la création, en 1959, d’un ministère des « Affaires culturelles », où la culture y est principalement envisagée du point de vue des pratiques artistiques, renvoyant du côté de l’infra-culturel tout ce qui n’y correspondrait pas : les folklores, l’éducation populaire, le sport (...)

  • Notes anthropologiques (LII)

    Georges Lapierre

    https://lavoiedujaguar.net/Notes-anthropologiques-LII

    Traité sur l’apparence (VII)
    Notes sur l’irréalité

    Notre époque se caractérise par un fait remarquable qui n’a pas encore attiré toute notre attention : la marchandise se dématérialise de plus en plus, elle perd de la lourdeur, qui était la sienne jusqu’à présent ; elle devient éthérée, ce qui est le propre de l’apparence. La marchandise qui nous attire et fascine désormais est la marchandise qui a trait à la communication. Il s’agit de communiquer, de communiquer toujours plus. La teneur de la communication n’a pas d’importance, elle peut consister dans la photo attendrissante de chatons sur la couette comme dans l’envoi de quelques lignes de réflexion concernant notre réalité.

    Ce qui compte et ce qui a de l’importance, ce n’est pas l’objet de la communication, c’est la communication elle-même. Le sujet de la communication ne fait pas sens ou il n’a le sens que du prétexte, c’est la communication qui fait sens. Cette communication n’est plus celle de l’échange cérémoniel de dons dans lequel des collectivités se trouvent impliquées et engagées, c’est une communication entre individus grâce à tout un attirail de marchandises perfectionnées la permettant. (...)

    #apparence #irréalité #communication #marchandise #représentation #disparition #Hegel #Marx #idéologie #monothéisme

  • En cette journée de célébration des travailleuses et travailleurs, interrogeons les rapports entre risques et travail. Un questionnement d’actualité ! #travail #risques #santé #1erMai

    http://sms.hypotheses.org/7605

    C’est un livre épais, qui fait son poids, doté d’une couverture écarlate, et qui parle du travail… Mais ce n’est pas le Code du Travail édité par Dalloz. Il s’intitule Les Risques du Travail, avec comme sous-titre Pour ne pas perdre sa vie à la gagner . Cet ouvrage collectif, paru aux éditions La Découverte, a été coordonné par quatre chercheurs de disciplines différentes, dont l’auteur de ces lignes. Il prend la suite, à trente ans de distance (1985), d’un ouvrage publié sous le même titre, chez le même éditeur, avec une couverture de la même couleur.

    Ces quelques éléments de signalement – un titre, un volume, une coloration – méritent que l’on y revienne, car cela permet de préciser les objectifs que les auteurs se sont assignés, et la nature des articles que le lecteur y trouvera.

  • Durant trois siècles, l’Amérique du Nord a été sillonnée par des aventuriers français. Et cela a laissé des traces, au-delà de la langue… #Amérique #histoire #langues #France

    https://sms.hypotheses.org/24732

    Durant trois siècles, l’Amérique du Nord est sillonnée par des aventuriers de langue française. Coureurs de bois, trappeurs, interprètes, ces hommes, en quête de fourrures se sont constamment mêlés aux Amérindiens. Des tribus iroquoises ont ainsi adopté un jeune français, des pirogues chargées de peaux de castor ou de bison ont descendu la rivière Missouri… Gilles Havard ressuscite ces hommes qui ont sillonné l’Amérique de 1550 à 1850, à partir du Canada, de Trois-Rivières, vers l’ouest, jusqu’aux montagnes Rocheuses et vers le sud, jusqu’en Floride.

    Il s’agit bien souvent d’« aventuriers déraisonnables et ensauvagés » qui ne cultivent pas la terre et n’érigent pas de clôtures sur des territoires qui ne leur appartiennent pas. Ils sont inaptes au peuplement, à la colonisation et parlement « majoritairement la langue de Molière. » De quoi contredire le schéma américain des colons audacieux qui ne pouvaient qu’être qu’anglophone.

    Gilles Havard révèle une Amérique insoupçonnée, engloutie dans la grande Histoire et dans le puissant imaginaire des westerns. Il nous incite à prendre en compte l’expertise reconnue de ces hommes qui ont une capacité singulière à jouer un rôle d’intermédiaire entre la société coloniale et le monde autochtone. Ses travaux présentent ainsi une autre approche des mondes coloniaux, une approche façonnés par la mobilité et parfois l’éphémère. Il permet aussi de mesurer la place importante de la langue française en Amérique (...)

  • Vers le patrimoine 2.0 ? Quels dispositifs numériques mettre en place pour les acteurs du patrimoine, les publics et les chercheurs ? https://sms.hypotheses.org/24726 #patrimoine #numérique #histoire #culture

    https://sms.hypotheses.org/24726

    Quoi de plus éloigné d’un site internet qu’une procession religieuse ou une chanson occitane ? Si le premier appartient à la sphère de la modernité, des « nouveaux médias » et de la technologie, les autres relèvent du patrimoine culturel immatériel, synonyme de culture, d’identité et de tradition. Or le patrimoine culturel immatériel peut être difficile à appréhender pour les publics et à analyser pour les chercheur.ses. C’est alors que le recours au numérique devient pertinent en raison de ses potentialités. En effet, il permet de concevoir, construire et faire fonctionner des outils sur-mesure, comme le montre le cas aquitain développé ici.

    Le patrimoine culturel immatériel (PCI) est complémentaire du patrimoine culturel matériel qui regroupe les monuments et les collections d’objets. L’UNESCO le définit comme « les traditions ou les expressions vivantes héritées de nos ancêtres et transmises à nos descendants, comme les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, rituels et événements festifs, les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ou les connaissances et le savoir-faire nécessaires à l’artisanat traditionnel ».

    De nombreux acteur.trices interviennent dans ce milieu : des chercheur.ses universitaires, des services de l’inventaire, des collectivités territoriales, des associations, des médiateur.trices… et des publics. Mais alors, quels dispositifs numériques mettre en place et comment faire avancer conjointement la recherche sur le PCI et sa médiation auprès des publics ? Quels enseignements tirer des premières expérimentations ? (...)

  • Masques, tests, consignes peu claires : les agences régionales de santé, boucs émissaires de la crise sanitaire
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2020/04/25/les-ars-bouc-emissaire-de-la-crise-sanitaire_6037745_3244.html

    En première ligne dans la gestion de l’épidémie, les agences régionales de santé font face à diverses critiques. Enquête sur ces administrations contestées depuis leur création en 2010.

    Pénurie de masques, médecins généralistes sans boussole, Ehpad en déshérence, difficultés dans le lancement des tests… Le coupable de tous les maux de la crise du Covid-19, pour les élus comme pour les soignants, est souvent tout désigné : les ARS. Il y a quelques semaines, ces trois lettres familières des professionnels du secteur l’étaient encore peu du grand public. Créées voilà dix ans, les Agences régionales de santé sont en première ligne de l’organisation sanitaire. Pour le meilleur, parfois. Pour le pire, aussi, si l’on en croit les critiques qui fleurissent.

    « L’ARS est débordée, ça ne suit pas », cingle ainsi le maire (LR) de Reims, Arnaud Robinet. « L’ARS forme une élite qui ne rend de comptes à personne et qui prend des décisions technocratiques, loin des besoins concrets des territoires » , raille Syamak Agha Babaei, médecin urgentiste à Strasbourg et élu écologiste. La charge est lourde, répétée, polyphonique, trouvant des artilleurs dans tous les partis, jusque dans la majorité. « Les ARS ont trop de pouvoir et ne sont pas soumises au contrôle parlementaire », ajoute Sacha Houlié, député (La République en marche, LRM) de la Vienne.

    Boulets de la crise pour leurs contempteurs, les ARS sont plutôt un bouc émissaire, estiment d’autres voix. L’ancienne ministre de la santé #Marisol_Touraine (PS) joue les avocats de la défense. « Je suis frappée par cet “ARS bashing”. Je n’en comprends pas le sens ni les enjeux. Moi j’en ai un avis plutôt positif, même si on peut toujours s’améliorer. Elles ont fait au mieux dans cette crise. Je ne sais pas si elles étaient dimensionnées pour, mais rien ne l’était. Je trouve ces critiques excessives et injustes » , juge-t-elle. « C’est facile de s’en prendre aux ARS. Elles font ce qu’on leur demande de faire. Les ARS, c’est l’Etat » , constate quant à lui Thomas Mesnier, député LRM de Charente et urgentiste.

    Tour de force logistique

    De fait, à quoi servent ces agences, face au coronavirus ? A énormément de choses. Trop, peut-être. « On doit décliner sur le terrain la gestion de la crise sanitaire. Nous sommes un chef d’orchestre » , détaille Pierre Pribile, le directeur général de l’ARS Bourgogne-Franche-Comté. Et d’énumérer l’étendue de ses récentes missions : « Il a fallu multiplier par deux les capacités en réanimation des hôpitaux, faire la passerelle public-privé, assurer un soutien opérationnel des Ehpad avec les conseils départementaux, mobiliser la médecine de ville, les kinés, infirmiers libéraux, les équipes mobiles, veiller aux équipements de protection, au soutien gériatrique… » [comme si ça avait été fait, ndc]

    Cette longue liste n’est pas exhaustive. Des ARS ont aussi organisé les spectaculaires évacuations sanitaires qui ont permis d’envoyer, par train, autocar ou avion, des malades hors d’Ile-de-France ou du Grand-Est. Un vrai tour de force logistique. « Les ARS viennent de montrer qu’elles sont capables ! Qu’il y ait eu des ratés ici ou là, certainement, ça me paraît inévitable. Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain » , demande #Roselyne_Bachelot, ancienne ministre de la santé à l’origine de leur création en 2010. Elle déplore des critiques « récurrentes », remises opportunément au goût du jour.

    La naissance des ARS, en effet, ne s’est pas faite sans heurts, comme leur parcours depuis. Elles ont succédé, avec un champ de compétences beaucoup plus vaste, aux Agences régionales de l’hospitalisation (ARH). Elles sont chargées de mettre en œuvre la politique de santé publique dans les régions, ont un rôle central de coordination territoriale mais aussi de « rationalisation » de l’offre de soins. Autrement dit, elles jouent au quotidien le rôle du marteau et de l’enclume. Elles fixent les objectifs, font appliquer des normes sévères, tout en tenant fermement les cordons de la bourse. Une quadrature du cercle, parfois.

    Elles ont aussi été conçues pour reprendre le pouvoir aux « mandarins », chefs de service alors omnipotents dans les hôpitaux. « Il y avait des rivalités, une gestion à améliorer. Mais le pouvoir est totalement passé dans les mains des administratifs, avec les directeurs d’hôpitaux, et derrière eux les ARS. C’est allé trop loin. Aujourd’hui les chefs de service n’ont plus rien à dire » , estime Philippe Chalumeau, député LRM d’Indre-et-Loire et médecin. Il reconnaît à ces agences d’avoir amené « une culture qualité qui n’existait pas » . Au prix de nouvelles tâches parfois mal acceptées, protocoles et autres tableaux à remplir.

    Du côté des élus, comme à l’hôpital, les tensions ne datent pas d’hier. Maires, présidents de département, de région, députés, se heurtent souvent à cette administration, qui applique sans état d’âme la ligne officielle. Ainsi, récemment, quand des collectivités ont décidé d’acheter des masques, elles ont été rappelées à l’ordre par les gendarmes régionaux de la santé : priorité aux soignants, comme le veut la doctrine du gouvernement.

    Cette logique a été poussée à son paroxysme sur le tarmac de l’aéroport de Mulhouse, où une cargaison destinée à la région Bourgogne-Franche-Comté a été réquisitionnée le 5 avril, sur ordre du préfet, créant un petit scandale. « Pour les masques, les ARS suivent logiquement la ligne du gouvernement… et il est logique que les élus s’en agacent. Quand j’étais ministre, je répétais aux ARS “vous avez la responsabilité du dialogue avec les élus”, ce n’est pas toujours dans leur culture, contrairement à celle des préfets, qui l’ont appris », raconte [pipote ?] Marisol Touraine.

    A l’époque, entre 2012 et 2017, des élus lui faisaient déjà remonter des piles de doléances. Deux ans plus tard, c’est Agnès Buzyn qui a pu mesurer le mécontentement. Lors de la crise des « gilets jaunes », des maires, des députés, des sénateurs sont remontés à la charge contre ces administrations jugées trop verticales, inhumaines. Dans leur viseur, les fermetures de services, urgences ou maternités, qui mobilisent les habitants contre l’Etat… et contre des élus de la majorité, qui jouent sur de tels dossiers leur réélection.

    Institution « inopérante »

    Emmanuel Macron lui-même semble avoir entendu le message. En 2019, le chef de l’Etat s’est opposé deux fois à des décisions de fermeture de maternités décidées par des ARS, à Guingamp (Côtes-d’Armor) et à Creil (Oise) [mais les suppressions de lists hospitaliers continuent en ce moment mêm, ndc] . L’Elysée vient aussi de limoger le 8 avril, sans sourciller, le patron de l’agence du Grand-Est, Christophe Lannelongue, dans l’une des régions les plus touchées par le Covid-19. Ce haut-fonctionnaire a poussé la logique administrative jusqu’à la faute politique : alors que les blouses blanches étaient en première ligne face au coronavirus, il a assuré que la restructuration du CHRU de Nancy allait se poursuivre… .

    Au-delà des jeux de rôles classiques entre élus, médecins et Etat, des problèmes très concrets sont venus ajouter ces dernières semaines aux ressentiments. « A un moment, il n’y avait plus de gel hydroalcoolique. On s’est tourné vers l’ARS. Ils nous ont dit “pas de problème, on en a plein”. Ils en avaient plein, mais on n’en avait pas , raconte ainsi Delphine Bagarry, députée (ex-LRM) des Alpes-de-Haute-Provence et médecin. Ils sont sympas [...] , c’est une institution nécessaire… mais elle est inopérante. »

    Autre souci, d’une ARS à l’autre les réponses peuvent différer sur une même question. Lorsque des médecins libéraux ont décidé de créer des centres de détection des malades du Covid-19, hors hôpitaux, ces initiatives ont été accompagnées… ou non. « Certaines ARS considèrent qu’il n’y a pas lieu d’aider les professionnels de santé libéraux. A part en Ile-de-France, en Bretagne et en Auvergne Rhône Alpes, il n’y a pas eu d’aides pour ceux qui ont mis en place des centres de dépistage » , explique Jacques Battistoni, président de #MG_France, le premier syndicat chez les médecins généralistes.

    « Les ARS sont restées hospitalo-centrées » , appuie le député LRM Philippe Chalumeau. Dans les Ehpad, des résidents sont morts étouffés, sans accompagnement médical, faute de moyens ou de savoir-faire. Et les ARS n’ont, parfois, pas entendu les cris d’alarme des familles. « Dans l’Ehpad où je travaille, à Tours, on a voulu créer une structure Covid, pour les onze malades. Cela revient à créer un petit hôpital. On a demandé à l’ARS comment faire. Ils nous ont dit de voir avec le service de gériatrie de l’hôpital, qui n’en avait pas les moyens. On a donc fait seuls. Les ARS n’ont pas la culture du médico-social » , poursuit M. Chalumeau.

    La gestion de la crise dans les Ehpad souligne aussi une autre faiblesse des ARS : un ancrage local insuffisant, une entente aléatoire avec les conseils départementaux. Lorsque le politique et l’administratif ne s’accordent pas, l’orchestre joue faux. « Si les directeurs régionaux tiennent la route face aux préfets de région, ce sont des profils plus divers au niveau départemental. C’est problématique, car la réponse aux élus se fait beaucoup à cette échelle » , pointe Marisol Touraine.
    En matière d’organisation, les ARS ont également souffert de la réforme territoriale de 2015 de François Hollande. L’Etat a réduit le nombre de régions, imposé une restructuration paralysante. Les salaires, par exemple, n’étaient pas partout les mêmes. Pas facile, dès lors, de fusionner les agences. Le chantier a consommé beaucoup d’énergie. « Sur une organisation encore juvénile, cette réforme inutile a eu un effet délétère », estime Roselyne Bachelot.

    Faut-il désormais, pour plus d’efficacité, une redistribution des rôles pour gérer les risques sanitaires ? Certains poussent dans cette direction. « La préfecture doit reprendre la main, en faisant le lien entre les ARS, les départements et les intercommunalités », propose Philippe Chalumeau. Une piste qui ne plaît guère à Marisol Touraine, qui y voit le retour de vieilles lunes. « L’idée des ARS, c’est de coordonner, de rassembler les politiques de santé à l’hôpital, en ville, dans le médico-social. Cette politique spécifique ne peut pas être portée par les préfets. Les préfectures n’ont en pratique pas le temps de s’occuper des politiques médico-sociales. Il y a une frustration des préfets et du ministère de l’intérieur, qui cherchent à pousser leurs pions » , considère l’ancienne ministre.

    Rivalité au quotidien

    Cette rivalité, entre représentants de l’Etat, date du premier jour. Et elle se vit au quotidien. « Lors de l’inauguration d’une maison de santé, vous avez deux discours, celui du directeur de l’ARS et celui du préfet, qui ne disent pas forcément la même chose. Qui parle en dernier ? Qui est le chef ? » , demande le député Thomas Mesnier.

    La crise du coronavirus a fait bouger beaucoup de lignes, montrant les forces, soulignant les failles. « Avec cette crise, l’hôpital revient à sa vocation première, qui est de soigner des patients. Les finances et les exigences budgétaires sont souvent loin du médical. Lorsqu’on est sur le soin, ça râle moins… » , observe Bernard Dupont, directeur général du CHRU de Nancy.

    En filigrane, la question-clé reste donc posée : celle des moyens. Des budgets ont été débloqués pour contrer le Covid-19. Et après ? Les ARS se sont abîmées, aux yeux des soignants, à incarner de longues années de politique d’austérité dans les hôpitaux, dont elles ont été les exécutrices zélées. « Les ARS ont un défaut de conception. On a construit un gros machin avec pour objectif de réduire les dépenses de santé, de rationaliser, c’est un outil conçu pour faire fermer des lits, pas pour gérer des crises », estime ainsi Ugo Bernalicis, député (La France insoumise) du Nord.

    La question des moyens ne s’arrête pas aux hôpitaux. Pour Roselyne Bachelot, un péché originel explique en partie les difficultés des ARS lors de la gestion de la crise sanitaire dans les Ehpad : « Dans leur feuille de route, il y avait au départ d’affronter la problématique du grand âge. Mais j’ai échoué à obtenir la réforme de la prise en charge de la dépendance. J’ai perdu l’arbitrage. Et tout le monde s’est retrouvé les bras ballants. » La réforme enterrée par Nicolas Sarkozy, qui l’avait pourtant érigée en priorité, est toujours un projet dix ans plus tard.

    #ARS #hôpital #offre_de_soin #territoires #santé

  • L’érosion du littoral a des causes humaines et non humaines. Mais comment sensibiliser les citoyens et les politiques à ce phénomène ? Diffusé avec CNRS Images #environnement #écologie #océans #littoral #citoyens

    https://sms.hypotheses.org/20242

    Les chercheurs le répètent depuis longtemps : le littoral s’érode inexorablement sous l’effet conjugué de causes diverses, « humaines » et « non-humaines ». Avec ses 5850 km de côtes, la France métropolitaine est malheureusement « très » concernée, puisque 27% de ses côtes sont en érosion. En outre, la vulnérabilité de ces zones, qui s’accroît au fil du temps, est devenue particulièrement inquiétante ces dernières années.

    Avec une partie croissante de la population française – mais aussi mondiale – qui vit sur le littoral ou à moins de 25 km, les interrogations se multiplient, bien au-delà des seuls problèmes – au demeurant bien réels – d’érosion et de recul des côtes. En fait, ce sont des questions sociétales majeures qui sont désormais posées.

    Le film Entre mer et terre se propose de sensibiliser des publics larges à ces interrogations complexes, notamment à travers les paroles de chercheurs relevant de plusieurs disciplines, mais aussi d’experts, d’élus, de citoyens (...)

  • Les super-héroïnes (Catwoman, Wonder woman...) au cinéma entre violence et émancipation. Quels rôles, récits et intrigues pour ces personnages féminins ? #genre #femmes #cinéma #culture #vidéo

    https://sms.hypotheses.org/24740

    Ces dernières années, plusieurs films inspirés de comics américains ont porté à l’écran des super-héroïnes. Les salles de cinéma ont ainsi projeté des films sur Catwoman, Black Widow ou Wonder Woman. Que ces films soient issus des univers Marvel Comics ou de DC Comics, ils sont l’occasion de montrer une chose rare au cinéma : la violence des femmes.

    Travailler sur la violence dans les films de super-héros n’est pas sans présenter quelques difficultés. Quel rôle lui accorder ? La violence des femmes est-elle identique à celle des hommes ? Est-elle un moyen d’émancipation ? Pour répondre à ces questionnements, Maxime Lerolle étudie comment le cinéma américain présente les super-héroïnes des années 2000 à aujourd’hui, comment il parvient à légitimer leur violence, et revient sur le pouvoir émancipateur que cette dernière leur confère.

    Pour y parvenir, l’auteur étudie 6 héroïnes différentes (...)

  • « La Peste écarlate », de #Jack_London : le feuilleton littéraire de Camille Laurens

    https://www.lemonde.fr/critique-litteraire/article/2020/04/23/la-peste-ecarlate-de-jack-london-le-feuilleton-litteraire-de-camille-laurens

    COMME L’ÉCUME

    Certaines lectures sont très dépendantes du contexte dans lequel elles ont lieu. Pour avoir lu La Peste écarlate, de Jack London (1876-1916), lorsque j’étais adolescente, au début des années 1970, et l’avoir relu ces jours-ci, je ne peux que le constater. Ce « roman d’anticipation », comme on a coutume de l’étiqueter, paru en feuilleton 1912, s’il débute en 2073, est en grande partie le récit d’une pandémie qui ravagea le monde soixante ans plus tôt, en 2013, donc. Lorsque l’écrivain américain s’y attela, il se projetait à un siècle de distance, imaginant par exemple qu’au recensement de 2010 la Terre compterait « huit milliards » d’habitants, dont « dix-sept millions à New York » et « quatre » à San Francisco, ce qui était excessif, certes, mais pas dément. Quand je l’ai lu en 1970, 2013 était encore un lointain horizon et j’ai pu savourer ce livre catastrophe comme les films du même genre qui commençaient à fleurir – le roman, dans la précision de l’horreur, a d’ailleurs quelque chose de très cinématographique. Ma peur s’amusait, et je ne croyais pas plus à ce conte d’inspiration prophétique que ne le font les enfants du roman à qui leur grand-père raconte l’histoire – « radoteur », « faible d’esprit », pensent-ils.

    #littérature #covid-19

  • Autrefois, les révoltes urbaines avaient pour cibles les usines et les patrons. Désormais, elles s’en prennent aux institutions publiques. Que s’est-il passé entre temps ? #urbain #banlieues #révoltes

    https://sms.hypotheses.org/24721

    Dans quelle mesure les formes de radicalités politiques rencontrées dans les quartiers populaires sont-elles nouvelles ? Qu’est-ce qui sépare ou rapproche les insurrections ouvrières de l’entre-deux-guerres des révoltes urbaines d’aujourd’hui ? À quoi correspondent les comportements violents attribués aux jeunes des quartiers populaires ?

    Si dans l’entre-deux-guerres les insurrections ouvrières attribuées au parti communiste sont récurrentes et avaient pour cible les usines et le patronat, les révoltes urbaines actuelles montrent du doigt les institutions républicaines comme la police et l’État. Questionner la métamorphose des conflits dans les banlieues populaires, du monde ouvrier en particulier et des classes populaires en général, est essentielle pour comprendre les nouvelles formes de radicalisation politique.

    Certes, les ouvriers sont encore nombreux sur le marché du travail (...)

  • https://twitter.com/Nordengail/status/1253057150655528960

    Aujourd’hui on a commencé les premières contestations d’amendes reçues 135 € (attestations) et c’est une honte

    Un qui allait apporter des médicaments à son ami malade : 135 € d’amende parce que « son ami n’a que se débrouiller » (il y a une case pour ça sur l’attestation et l’ami n’a pas de famille en France)

    Le deuxième est analphabète. « Attestation mal remplie »

    Il est analphabète mais très intelligent : il a gardé toutes ses attestations depuis le début, je vais envoyer tout le paquet avec la contestation, histoire qu’ils voient qu’il ne sait pas écrire son nom, comment ils osent lui mettre une amende

    Je vous réponds ici si d’autres se posent la question : il faut attendre de recevoir l’amende par courrier à votre adresse, ne pas payer et envoyer un courrier de contestation à l’adresse indiquée

    Lien vers http://lesaf.org/wp-content/uploads/2020/04/Guide-pratique-2-sur-les-contraventions-relatives-aux-re%CC%80gles-de-confine

    #arbitraire #confinement #violences_policières

  • Les Cafés Géo » Le Groenland dans la politique #arctique du Danemark
    http://cafe-geo.net/le-groenland-dans-la-politique-arctique-du-danemark

    Un "café géographique" particulièrement intéressant sur le Groenland.

    En août 2019, une nouvelle a fait la une des médias à l’échelle internationale : par un tweet, le président des Etats-Unis, Donald Trump, souhaitait négocier l’achat du Groenland au Danemark. Cette demande incongrue a donné lieu à un florilège de caricatures.

    Mette Frederiksen, Première Ministre du #Danemark a répondu vivement au Président des #Etats-Unis « Le Groenland n’appartient pas au Danemark. Le Groenland appartient aux Groenlandais ».

    L’intérêt du président des Etats-Unis pour un territoire arctique, le #Groenland, a mis en évidence l’importance géopolitique de l’Arctique à l’échelle mondiale. La réponse de Mette Frederiksen est révélatrice des relations entre le Danemark et le Groenland en rappelant la situation particulière du Groenland : si le Groenland dépend de la Couronne du Danemark, il jouit d’une autonomie renforcée.

    Benoît Raoulx se propose d’organiser son propos en trois parties : dans un premier temps, souligner les nouveaux enjeux de l’Arctique à l’échelle mondiale ; dans un deuxième temps, rappeler les relations dans le temps long entre le Groenland et le Danemark pour comprendre la place du Danemark en Arctique et dans un troisième temps, rendre compte des évolutions en particulier de la société groenlandaise par une étude à l’échelle locale de la région de Thulé.

  • Communication et gestes barrières : comment s’y prendre pour que les messages sanitaires soient « mieux » entendus des publics auxquels ils s’adressent ? #santé #communication #publics #engagement #psychologie

    https://sms.hypotheses.org/24711

    L’information et la communication sont des activités sociales tellement partagées que chacun, surtout en temps de crise, développe plus ou moins l’idée d’une compétence personnelle. Il rejoint alors les rangs des experts. Lors des crises sanitaires, les experts en médecine, les journalistes, les gouvernants (…) sont amenés à participer très activement à la conception, la réalisation et la diffusion de messages persuasifs. Ceux-ci peuvent être à visée préventive ou bien liés aux traitements et médications. Ils peuvent aussi inviter à respecter une hygiène de vie, de « bons » comportements (par exemple, des gestes barrières), de « bonnes » habitudes afin de se protéger soi-même et de protéger les autres.

    Cette surexposition des publics aux messages persuasifs est-elle « efficace » ? Hors contexte de crise, le livre blanc de la Fondation Concorde L’observance des traitements : Un défi aux politiques de santé (2014) constatait le non-respect des consignes sanitaires et évaluait son « coût » : « Un Français sur deux ne respecte pas son traitement. Le coût humain est de 8000 décès par an et le coût financier de 2 milliards d’euros par an, avec 1 million de journées d’hospitalisation induites ». En 2020, au moment de la crise du Covid-19, les coûts humains et financiers sont bien évidemment très au-delà de ce qui pourrait paraître imaginable à la lecture de ce livre blanc (...)

  • Quand on cherche les traces de la Résistance dans des récits oubliés ou peu connus, on rencontre des visions de la Résistance éloignées des clichés. Ils sont le hors-champ de nombreux livres d’histoire #histoire #récits #résister #Résistance

    http://sms.hypotheses.org/10339

    Fin 1945, Charles Perret, maire d’Étobon, petit village protestant niché au pied des Vosges, publie un récit de quelques pages des derniers temps de l’Occupation : Les crimes du fascisme nazi. Étobon, village de terroristes. Il raconte le massacre le 27 septembre 1944 de 39 habitants parmi 67 hommes âgés de 16 à 60 ans rassemblés au centre du village. Parmi ceux-ci figure Charles Nardin, alors maire du village, dont le successeur précise qu’il « avait connu et favorisé l’existence et les actions du groupe local de Résistance. Il n’a dénoncé personne. »

    Autre lieu, même scénario. Au début des années 1950, Paul Laval, instituteur de Sousceyrac (Lot), parcourt les bourgs du Ségala pour recueillir des renseignements sur l’implantation des maquis. Au fil des pages, sa chronique se transforme en un macabre inventaire des exactions commises par les occupants dans toute la région de Figeac entre avril et juillet 1944. Il s’attarde sur les petites communes traversées par les Waffen SS du régiment « Der Führer » de la division Das Reich les 11 et 12 mai 1944 : Cardaillac, Linac, Latronquière, Bagnac… » (...)

  • En 1789, « les hommes ont pris la Bastille, les femmes ont pris le roi ». Quelques lieux communs sur la place et le rôle des femmes dans la Révolution française... #genre #histoire #femmes #révolution #1789

    https://sms.hypotheses.org/22395

    L’historien Jules Michelet écrivait dans son Histoire de la Révolution française « Les hommes ont pris la Bastille, les femmes ont pris le roi », soulignant ainsi le rôle moteur des femmes dans les événements révolutionnaires. Si de grandes figures comme Olympe de Gouges, Charlotte Corday, Madame Roland et Théroigne de Méricourt sont restées dans les mémoires, elles ne résument pas à elles seules la condition féminine et les attentes sociales et politiques des femmes pendant cette période. L’ouvrage de Christine Le Bozec Les femmes et la Révolution (1770-1830), permet de revenir sur certains lieux communs à propos de la place et du rôle des femmes au cours de la Révolution française.

    Le premier cliché concernant cette période renvoie à une supposée liberté des femmes du XVIIIe siècle que les révolutionnaires auraient cherché à réduire : « Il est courant, voire banal, […] d’affirmer qu’au XVIIIe siècle les femmes étaient libres, pour ne pas dire libérées. La Révolution française les aurait privées de leurs droits, de leurs acquis et des avancées dont elles pouvaient se prévaloir » (...)

    • L’année 1793 constitue un tournant : elle est à la fois l’apogée du mouvement féminin, alors en pleine structuration et en pleine affirmation, et le début de l’exclusion progressive des femmes de l’espace public. Partiellement le fruit d’une vision machiste de la société, cette exclusion est en réalité très complexe : elle s’intègre à la lutte que mène la Convention nationale contre les sans-culottes et les plus radicaux, perçus comme d’éventuels concurrents dangereux.

      Or les mouvements féminins sont très liés aux plus radicaux des révolutionnaires. Les militantes féminines sont perçues comme l’élément le plus faible du mouvement radical, du fait de préjugés sexistes largement partagés dans la société, y compris chez leurs alliés masculins. Ce sont donc elles que visent d’abord les députés avant de s’en prendre, quelques mois plus tard, à leurs homologues masculins. À l’automne 1793, la Convention décide ainsi de dissoudre tous les clubs et toutes les sociétés de femmes.

      Le processus de relégation des femmes de la sphère publique est lancé. Les militantes tentent de résister mais la répression politique a progressivement raison de leur opposition. Signe, parmi d’autres, de cette exclusion, les gouvernements favorisent l’emploi de « Madame » ou « Mademoiselle » au détriment de « citoyenne » : les premiers renvoient au statut marital des femmes alors que le second est trop politique. Ce processus s’accompagne d’un net recul des droits des femmes, particulièrement pendant la Restauration. Les années 1830 voient cependant de nouvelles revendications féminines éclore autour, notamment, de l’obtention de droits politiques et de l’accès à la citoyenneté.