#debbie_cameron

  • Convergences et divergences entre le féminisme radical et la théorie queer | Cairn.info
    https://www.cairn.info/revue-nouvelles-questions-feministes-2014-2-page-80.htm

    Je trouve cet article (datant de 10 ans… trad fr en 2013) très clair, écrit sobrement, sur la distinction entre la définition du mot « genre » pour la tradition radfem VS pour la philosophie queer. Définition différente, qui aboutit à un avis différent sur les causes, et donc à un avis différent sur les stratégies prioritaires pour changer vers du mieux.

    De nos jours, les conversations sur le « genre » achoppent souvent sur des problèmes parce que les personnes qui en parlent emploient le même mot en lui donnant en gros la même signification, alors qu’en y regardant de plus près, elles ne parlent pas des mêmes questions à partir de la même approche. Par exemple, quand nous avons lancé l’anthologie The Trouble & Strife Reader à la Foire du livre radical d’Édimbourg, des étudiantes sont venues nous dire leur satisfaction de voir ce livre publié, mais aussi leur surprise qu’il y soit si peu question du genre. Pourtant, ce livre ne parle que de cela, du genre, au sens féministe radical du mot, soit les relations de pouvoir entre femmes et hommes, de sorte qu’à nos yeux, cette réaction était assez surprenante. Joan ne la comprenait tout simplement pas au départ. Pour ma part, j’ai saisi ce qu’elles voulaient sans doute dire car je suis toujours universitaire, et à l’université, on entend beaucoup le mot « genre » utilisé de cette manière.

    Voici la clé de l’énigme. Pendant les années 1990, les théoriciennes et les activistes queer ont élaboré une nouvelle façon de parler du genre. Leur approche présentait bien sûr des points communs avec le vocabulaire féministe plus établi, mais elle présentait un accent différent ; une théorie différente la sous-tendait. Il s’agissait au fond de la théorie postmoderniste de l’identité, associée à la philosophe Judith Butler, bien que je doute que Butler elle-même dirait que les féministes n’avaient pas d’analyse critique du genre. Il découla de cette nouvelle approche des choix de politiques très différents.

    Publié avant NQF dans Sisyphe en deux :
    http://sisyphe.org/spip.php?article4426
    http://sisyphe.org/spip.php?article4430

    #philosophie #genre #féminisme #matérialisme #queer #politique #stratégie #identité #constructivisme #Debbie_Cameron #Joan_Scanlon

  • #Debbie_Cameron : Quelles leçons de vie reçoivent les filles à l’école ?
    https://tradfem.wordpress.com/2020/09/22/lecons-de-vie

    En classe, les garçons parlent du corps des filles et de ce qu’ils « leur feraient », lancent des gémissements sexués féminins aux enseignantes et aux filles, demandent aux filles de la classe si une photo particulière les représente, si elles se sont fait raser la vulve, à quoi elle ressemble (Témoignage d’une enseignante du secondaire)

    Certains des garçons font des commentaires sur beaucoup de filles de nos années et les filles doivent simplement faire la sourde oreille parce que personne ne pense que c’est un problème (Étudiante)

    Dans les écoles secondaires, l’utilisation d’un langage sexiste et misogyne n’est plus, si tant est qu’elle ne l’ait jamais été, une activité réciproque et égalitaire : il s’agit en grande majorité de garçons qui ciblent les filles avec des commentaires ouvertement sexuels. Et l’effet sur les filles n’est pas négligeable. Selon l’organisation Girl Guiding UK, qui mène une enquête annuelle auprès d’un échantillon de filles âgées de 11 à 16 ans, la crainte d’attirer ces commentaires de la part des garçons fait que de nombreuses filles hésitent à attirer l’attention sur elles ; environ un quart d’entre elles déclarent essayer de garder le silence en classe. Même si la plupart des filles se refusent à cette autocensure, pourquoi devrait-on s’attendre à ce qu’une fille (ou même n’importe qui) doive passer plus de 30 heures par semaine dans un environnement où la violence verbale est un phénomène quotidien ? Au-delà de ses effets sur l’éducation scolaire des filles, quelles leçons de vie cette expérience leur enseigne-t-elle ?

    Traduction : #Tradfem
    Version originale : https://public-api.wordpress.com/bar/?stat=groovemails-events&bin=wpcom_email_click&redirect_to=htt
    #éducation_sexiste #violences_masculines #école

  • #Debbie_Cameron : Nous devons parler du viol.
    https://tradfem.wordpress.com/2019/11/26/debbie-cameron-nous-devons-parler-du-viol

    Par exemple, les enseignants qui avaient abusé de leur position d’autorité ont été très souvent considérés “comme ayant eu des relations sexuelles” avec les élèves adolescentes qu’ils avaient sollicitées ; parfois on disait qu’ils avaient eu “une liaison” ou “une aventure”. Le langage, en d’autres termes, était issu du registre généralement utilisé pour parler de sexe ou de relation amoureuse entre deux adultes consentants – même quand le professeur était un prédateur en série, agressant des élèves n’ayant pas plus de 13 ans, et cela même dans des articles après qu’il ait été condamné.

    Pourquoi les comptes-rendus des cas concernant des enfants sont-il si frileux quant à l’usage des termes “viol”, “agression” ou “abus” ? Je me suis alors vraiment demandée si ce n’était pas parce qu’il s’agissait vraiment d’accusations de viol dans la plupart de ces cas (les atteintes contre les mineur.es sont désignées différemment, par exemple comme “relations sexuelles avec enfant”). Mais à la réflexion j’ai conclu que l’accusation n’était pas l’enjeu : l’évitement était plus en rapport avec deux autres facteurs.

    L’un d’eux est la réticence à utiliser des mots impliquant la violence dans des cas où l’agresseur a usé de manipulation psychologique et affective plutôt qu’à de force ou de menaces. C’est ainsi que beaucoup d’agresseurs d’enfants opèrent. Dans une émission télévisée récente au cours de laquelle j’ai entendu parler du cas de Larry Nassar, entraineur sportif qui a abusé des centaines de filles pendant une vingtaine d’années, la journaliste Lindsey Smith (qui avec sa collègue Kate Wells a fait un reportage pour la radio publique du Michigan, et a poursuivi avec des récits des survivantes, dans le podcast primé “Believed” [“On vous croit”]), a expliqué que les raisons principales de l’impunité prolongée de Nassar était sa capacité a gagner la confiance à la fois de ses victimes, de leurs parents et de leurs entraineurs.

    Traduction : Annick B. (et Yeun L-Y) de Tradfem
    Version originale : https://debuk.wordpress.com/2019/10/25/we-need-to-talk-about-rape
    #viol #violences_masculines #pédophile #justice #mobilisations_féministes

  • #Debbie_Cameron : Une brève histoire du « genre »
    http://tradfem.wordpress.com/2017/01/02/debbie-cameron-une-breve-histoire-du-%E2%80%89genre%E2%80%89

    À New York en 1999, j’ai assisté à une allocution de Riki Anne Wilchins (qui se décrit comme « menace transsexuelle » et est présentée dans le Gender Variance Who’s Who comme « l’une des personnes transgenres emblématiques des années 90 ») dans lequel elle déclarait que les féministes n’avaient pas d’analyse du genre. J’ai pensé, « De quoi parle-t-elle ? Il est pourtant clair que ce sont les féministes qui ont créé le concept de genre ! »

    Avance rapide de dix ans, en 2009, quand je me suis rendue à une foire du livre à Édimbourg pour parler de The Trouble & Strife Reader, une anthologie des principaux articles d’une revue féministe à laquelle j’ai participé dans les années 1980. Deux jeunes femmes sont venues me voir après mon exposé. Le livre semble intéressant, m’ont-elles dit, mais pourquoi n’y trouve-t-on rien à propos du genre ?

    De mon point de vue, ce livre était tout entier à propos du genre, que j’interprète, pour reprendre la formule créée par Gayle Rubin en 1975, comme « la division socialement imposée des sexes ». Les féministes de ma génération comprenaient le genre comme faisant partie de la mécanique patriarcale, à savoir ce système social, élaboré à partir de la base biologique du dimorphisme sexuel humain, qui assigne différents rôles, droits et responsabilités aux êtres humains de sexe masculin et féminin. Mais en 2009, je savais que ce n’était plus ce que le mot « genre » signifiait pour tout le monde. Pour ces jeunes femmes à la foire du livre, le « genre » désignait une forme d’identité, logée en chaque individu et affirmée par eux et par elles plutôt que de leur être imposée de l’extérieur. Le genre n’était pas seulement un concept distinct du sexe, il n’avait aucun lien nécessaire avec lui. Et ce n’était pas une division binaire : il y avait plusieurs genres, et pas seulement deux.

    Avance rapide encore, pour octobre 2016, lorsque le pape François, au cours d’une visite spirituelle en Géorgie, a dénoncé la « théorie du genre » comme une menace pour les enseignements de l’Église catholique romaine. Le correspondant de l’agence Reuters qui a reproduit ses propos a expliqué ce qui suit :

    La théorie du genre est, au sens large, le concept selon lequel, même si une personne peut être biologiquement masculine ou féminine, elle a le droit de s’identifier comme homme, femme, les deux à la fois ou aucun des deux.

    J’ai pensé : « Je me souviens de l’époque où les études de genre menaçaient les enseignements de l’Église en suggérant que les rôles traditionnels des femmes n’étaient pas ordonnés par Dieu et par la nature. » Je me suis aussi dit : « OK, on a atteint le point de bascule. »

    Traduction : #Tradfem
    Version originale : http://debuk.wordpress.com/2016/12/15/a-brief-history-of-gender
    #genre #histoire #Trouble & Strife