city:gènes

  • Au moins 25 000 ponts en France sont « en mauvais état structurel »
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/06/27/au-moins-25-000-ponts-en-france-presentent-des-problemes-de-securite_5482062


    Le pont reliant La Rochelle à l’île de Ré, en mai 2018.
    XAVIER LEOTY / AFP

    Selon un rapport sénatorial, la dégradation de nombre d’ouvrages est le fruit d’un « sous-investissement chronique », posant « des problèmes de sécurité et de disponibilité pour les usagers ».

    Deux semaines avant l’effondrement meurtrier du viaduc Morandi, à Gênes, le maire de la petite commune de Beaumontel, dans l’Eure, a constaté au matin du 1er août 2018 qu’un des piliers du pont sur la Risle, entre la mairie et l’église, s’était affaissé et ne soutenait plus rien. Pont fermé, 250 000 euros de travaux. Un mois après la catastrophe italienne, c’est sur l’imposant viaduc de l’île de Ré qu’un câble précontraint rompait en raison de la corrosion. Circulation restreinte, 2 millions d’euros de réparations. La France n’est pas à l’abri d’un accident tragique : au moins 25 000 ponts sont « en mauvais état structurel » et « posent des problèmes de sécurité et de disponibilité pour les usagers », selon un rapport sénatorial rendu public jeudi 27 juin, qui réclame un « plan Marshall » pour « éviter le drame ».

    Dans la foulée de l’écroulement du viaduc italien, le Sénat avait lancé une mission d’information sur l’état des ponts en France, dirigée par le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, le centriste Hervé Maurey, et dotée des moyens d’une commission d’enquête. Le nombre de ponts en France est évalué entre 200 000 et 250 000 – une fourchette étonnamment large. C’est la première surprise du rapport : personne n’est capable de donner le nombre exact de ces ponts routiers, faute d’un recensement du patrimoine des collectivités locales. Une inconnue révélatrice « des lacunes de la politique de surveillance et d’entretien », estime la mission.

    L’Etat possède 24 000 ponts. La moitié, gérée par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, est sans problème. Pour le reste, 7 % présentent des défauts de sécurité et 2 800 d’entre eux, construits après-guerre, arrivent en « fin de vie » et nécessitent une chirurgie lourde. Un audit externe, remis en juin 2018 au ministère des transports, estimait qu’un tiers des ponts de l’Etat avaient besoin de travaux, dont 7 % présentaient « un risque d’effondrement ». Le tableau est plus sombre encore du côté des collectivités territoriales, qui gèrent 90 % des ouvrages : entre 100 000 et 120 000 pour les départements, dont 8,5 % en mauvais état, et de 80 000 à 100 000 pour les communes, dont 18 % à 20 % présentent des défaillances.

    #paywall

  • « Parce que nous ne sommes pas le troupeau de ces vingt seigneurs »

    Incarcéré depuis 4 mois suite au #G20 de #Hambourg, Fabio 19 ans, tient tête à la justice

    Arrêté lors des journées d’émeutes qui ont secoué le G20 de Hambourg les 7 et 8 juillet 2017, Fabio est accusé de jet de projectile et de rébellion. Il est incarcéré depuis 4 mois à la prison de #Billwerder et comparaissait le 7 novembre dernier devant le #tribunal pour mineur d’Altona à Hambourg. Nous reproduisons ici la déclaration qu’il a faite ce jour-là devant ses juges et qui contient plus de vérité, de sincérité et de justesse que tous les solipsismes inconséquents de procureurs.

    Les prochaines audiences de son procès auront lieu les 27 novembre et 7 décembre prochain.

    Madame la juge, messieurs les jurés, madame le procureur, monsieur l’assistant du tribunal pour mineurs.

    Vous, aujourd’hui, vous êtes appelés à juger un homme. Vous l’avez appelé un « criminel agressif » et « irrespectueux de la dignité humaine ». Personnellement je ne prête aucune attention aux appellations que vous m’attribuez. Moi, je suis seulement un garçon de bonne volonté.

    Avant tout je voudrais dire que probablement ces messieurs les politiciens, ces messieurs les commissaires de police et ces messieurs les magistrats pensent qu’en incarcérant et arrêtant quelques jeunes cela puisse arrêter la contestation dans les rues. Probablement ces messieurs pensent que les prisons suffisent à éteindre les voix rebelles qui s’élèvent de partout. Probablement ces messieurs pensent que la répression arrêtera notre soif de liberté, notre volonté de construire un monde meilleur.

    Et bien ces messieurs se trompent. Et c’est l’Histoire qui leur donne tort.

    Parce qu’un nombre incalculable de garçons et de filles sont passés, comme moi, devant un tribunal comme celui-ci.

    En effet aujourd’hui c’est à Hambourg, hier à Gênes et encore avant à Seattle.

    Vous, vous essayez d’empêcher la propagation des voix de la révolte qui s’élèvent partout par n’importe quel moyen « légal », par n’importe quel moyen « procédurier ».

    Quoiqu’il arrive, peu importe la décision qui sera prise par ce tribunal, elle n’aura aucune influence sur notre protestation. Il y aura encore tout autant de garçons et de filles qui, portés par les mêmes idéaux descendront dans les rues d’Europe. Se préoccupant guère de ces prisons que dans un essoufflement, vous vous efforcez de remplir de prisonniers politiques.

    Mais venons-en donc à l’essentiel, madame la juge, messieurs les jurés, madame le procureur, monsieur l’assistant du tribunal pour mineur.

    Venons-en donc à l’essentiel.

    Comme vous pouvez l’imaginer, je veux user de mon droit de ne pas faire de déclarations en rapport avec le fait spécifique pour lequel vous me poursuivez. Toutefois je voudrais porter l’attention sur les motivations qui poussent un jeune ouvrier d’une petite ville reculée des Pré-alpes orientales à venir à Hambourg.

    Pour manifester son propre désaccord avec le sommet du G20.

    G20. Rien que le nom a déjà en soi, quelque chose de pervers.

    Vingt hommes et femmes représentants des vingt pays les plus riches et les plus industrialisés du globe, s’asseyent autour d’une table. Ils s’asseyent tous ensemble pour décider de notre futur. Oui, j’ai bien dit ceci : le notre. Le mien, ainsi que celui de toutes les personnes assises aujourd’hui dans cette salle, tout comme celui des sept milliards de personnes qui habitent cette belle planète Terre.

    Vingt hommes décident de notre vie et de notre mort.

    Évidemment, la population n’est pas invitée à ce joli banquet. Nous, nous ne sommes que le stupide troupeau des puissants de la Terre. Spectateurs totalement soumis de ce théâtre où une poignée de personnes tiennent entre leurs mains l’humanité toute entière.

    Moi, madame la juge, j’ai beaucoup pensé avant de venir à Hambourg.

    J’ai pensé à monsieur Trump et à ses États-Unis d’Amérique qui sous le drapeau de la démocratie et de la liberté s’érigent comme les gendarmes du monde entier. J’ai pensé aux nombreux conflits déclenchés par le géant américain aux quatre coins de la planète. Du Moyen-Orient à l’Afrique. Tout ceci pour s’accaparer du contrôle de telle ou telle ressource énergétique. Peu importe si ceux qui meurent, ce sont toujours les mêmes : civils, femmes et enfants.

    J’ai pensé aussi à monsieur Poutine. Nouveau tsar de Russie, qui dans son pays viole systématiquement les droits de l’Homme et se moque de toute opposition.

    J’ai pensé aux Saoudiens et à leurs régimes fondés sur la terreur avec qui nous, les occidentaux nous faisons des affaires en or.

    J’ai pensé à Erdogan qui torture, tue et emprisonne ses opposants.

    J’ai pensé aussi à mon pays, où à coup de lois-décret chaque gouvernement supprime sans trêve les droits des étudiants et des travailleurs.

    En bref, les voici les protagonistes du somptueux banquet qui s’est tenu à Hambourg en juillet dernier. Les plus grands va-t’en-guerre et assassins que le monde contemporain connaisse.

    Avant de venir à Hambourg j’ai pensé aussi à l’inégalité qui frappe, aujourd’hui, de plein fouet notre planète. Cela me semble presque évident de répéter qu’en effet 1% de la population la plus riche du monde possède la même richesse que les 99% le plus pauvre. Cela me semble presque évident de répéter que les quatre-vingt cinq hommes les plus riches du monde possède la même richesse que 50% de la population la plus pauvre. Quatre-vingt cinq hommes contre trois milliards et demi. Ces quelques chiffres suffisent à donner une idée.

    Ensuite, madame la juge, messieurs les jurés, madame le procureur, monsieur l’assistant du tribunal pour mineurs, avant de venir à Hambourg j’ai pensé à ma terre : à #Feltre. Le lieu où je suis né, où j’ai grandi et où je veux vivre. La citadelle médiévale qui est sertie comme une gemme dans les Pré-alpes orientales. J’ai pensé aux montagnes qui, au crépuscule, se teignent de rose. Aux magnifiques paysages que j’ai la chance de voir depuis ma fenêtre. A la beauté qui traverse ce lieu.

    Puis, j’ai pensé aux fleuves de ma belle vallée, violés par les entrepreneurs qui veulent les concessions pour y construire des centrales électriques, sans se préoccuper des dommages pour la population et pour l’écosystème.

    J’ai pensé aux #montagnes, frappées par le #tourisme_de_masse ou devenues lieu d’entraînements militaires.

    J’ai pensé à ce magnifique endroit où je vis, qui est en passe d’être bradé à des hommes d’affaires sans scrupules, exactement comme d’autres vallées à chaque coin de la planète, où la beauté est détruite au nom du #progrès.

    Dans la lignée de toutes ces pensées, j’ai donc décidé de venir manifester à Hambourg. Pour moi, venir ici était un devoir avant d’être un droit.

    J’ai trouvé cela juste de m’opposer à ces politiques scélérates qui sont en train de pousser le monde vers le gouffre.

    J’ai trouvé cela juste de me battre pour que quelque chose soit au moins un peu plus humain, digne et équitable.

    J’ai trouvé cela juste d’aller dans la rue pour répéter que la population n’est pas un troupeau et qu’elle doit être consultée dans les choix.

    Le choix de venir à Hambourg a été celui d’une prise de parti. Le choix d’être du côté de ceux qui demandent des droits et contre ceux qui veulent leurs en enlever. Le choix d’être du côté de tous les oppressés du monde et contre les oppresseurs. Le choix de combattre les puissants, grands et petits, qui utilisent le monde comme si c’était leur jouet et qui ne se soucient pas du fait que c’est toujours la population qui en fait les frais.

    J’ai fait mon choix et je n’ai pas peur s’il doit y avoir un prix à payer injustement.

    Néanmoins il y a autre chose que je voudrais vous dire, que vous me croyiez ou non : je n’aime pas la violence. Mais j’ai des idéaux et pour ceux-ci j’ai décidé de me battre.

    Je n’ai pas fini.

    Dans une époque historique où partout dans le monde s’érigent de nouvelles frontières, se déroule du nouveau fil barbelé, se dressent de nouveaux murs des Alpes à la Méditerranée, je trouve cela merveilleux que des milliers de jeunes, de chaque coin de l’Europe, soient disposés à descendre ensemble dans les rues d’une seule et même ville pour leur propre futur. Contre chaque frontière. Avec comme seule intention commune, le fait de rendre le monde meilleur par rapport à comment nous l’avons trouvé.

    Parce que madame la juge, messieurs les jurés, madame le procureur, monsieur l’assistant du tribunal pour mineurs, parce que nous ne sommes pas le troupeau de ces vingt seigneurs. Nous sommes des femmes et des hommes qui voulons avoir le droit de disposer de notre propre vie.

    Et pour cela nous combattons et nous combattrons.

    https://lundi.am/fabio-hambourg
    #résistance #justice #injustice #frontières #destruction #richesse #pauvreté #inégalités #centrales_hydroélectriques #violence

    #beau

    ping @_kg_

    • Zurück auf Los

      Der Prozess gegen den G20-Gegner Fabio V. muss wohl von vorn beginnen. Das ist ärgerlich, aber nicht zu ändern.

      Elf Prozesstage sind abgehandelt, rund ein Dutzend Zeugen gehört, unzählige Beweise gesichtet worden – und kurz vor Schluss stellt sich heraus: Es war wohl alles umsonst. Der Prozess gegen den jungen Italiener Fabio V., der sich bei einer Anti-G20-Aktion des schweren Landfriedensbruchs schuldig gemacht haben soll, droht zu platzen. Die Vorsitzende Richterin ist hochschwanger. Nun hat sie sich krankgemeldet, weitere Termine können vorerst nicht angesetzt werden. Bald wird die Frau in den Mutterschutz verabschiedet, wie es dann weitergeht, war bis Redaktionsschluss offen. Womöglich muss der Prozess unter einem anderen Richter komplett neu aufgerollt werden.

      Zurück auf Los. Hätte man das nicht verhindern können?

      Kritik gab es an der Verteidigung: Sie habe den Prozess mit immer neuen Anträgen unnötig in die Länge gezogen, um sich über die Ziellinie des Mutterschutzes zu retten. Denn die Richterin schien zu einer Verurteilung zu tendieren. Zwar nur zu einfachem, nicht zu schwerem Landfriedensbruch, aber eben nicht zu einem Freispruch. Ist also die Verteidigung schuld an diesem unbefriedigenden Ende und dem Mehraufwand, der nun droht? Mitnichten. Es ist ihr gutes Recht, Anträge zu stellen. Nicht wenigen von ihnen wurde stattgegeben.

      Aber war es nicht zu vermeiden, eine schwangere Richterin einzusetzen? Das System lässt bei der Richterauswahl wenig Spielraum. Strafprozesse ausländischer Jugendlicher werden nach Tatort vergeben. Fabio V.s Richterin ist für jenen Altonaer Ortsteil zuständig, in dem V. festgenommen wurde. Dass Richter nicht willkürlich benannt werden, schützt vor Einflussnahme.

      Und warum kann sich nicht ein neuer Richter auf Basis der bereits erhobenen Beweise einarbeiten und dann urteilen? In Strafprozessen gilt die Prämisse: Alle Beweise müssen unmittelbar gewürdigt werden, damit nichts verfälscht wird.

      Das alles ist aufwendig. Es macht das abrupte Ende dieses Prozesses zum Ärgernis. Aber es ist notwendig und richtig.

      https://www.zeit.de/2018/10/g-20-prozess-gegner-fabio-v-neubeginn

      G-20-Prozess gegen Fabio V. geplatzt

      Hamburg. Der Prozess gegen den italienischen G-20-Gegner Fabio V. vor dem Amtsgericht Hamburg-Altona ist geplatzt. Am 3. ­April hat das Gericht die Aussetzung des Verfahrens beschlossen, teilten die Verteidiger von Fabio V., Gabriele Heinecke und Arne Timmermann, am Dienstag gegenüber junge Welt mit. Damit sei »endgültig, dass das Verfahren neu aufgerollt werden muss«. Ende Februar war der Prozess wegen Schwangerschaft der Richterin unterbrochen worden. Fabio V. war am 7. Juli 2017 bei einer Demonstration im Industriegebiet Rondenbarg festgenommen worden, saß viereinhalb Monate in Untersuchungshaft. Ihm wird keine konkrete Tat vorgeworfen, sondern nur die Anwesenheit bei der Demo. Fabio V. ist nach Italien zurückgekehrt. Einen Hinweis des Gerichts, ob und wann das Verfahren neu beginnen kann, gebe es nicht, teilten seine Anwälte mit.

      https://www.jungewelt.de/artikel/330548.g-20-prozess-gegen-fabio-v-geplatzt.html

  • « Changer de système ne passera pas par votre caddie »

    En rendant cheap la nature, l’argent, le travail, le care , l’alimentation, l’énergie et donc nos vies - c’est-à-dire en leur donnant une #valeur_marchande - le capitalisme a transformé, gouverné puis détruit la planète. Telle est la thèse développée par l’universitaire et activiste américain #Raj_Patel dans son nouvel ouvrage, intitulé Comment notre monde est devenu cheap (Flammarion, 2018). « Le capitalisme triomphe, non pas parce qu’il détruit la nature, mais parce qu’il met la nature au travail - au #moindre_coût », écrit Patel, qui a pris le temps de nous en dire plus sur les ressorts de cette « #cheapisation » généralisée.

    Raj Patel est professeur d’économie politique à l’université du Texas d’Austin. À 46 ans, c’est aussi un militant, engagé auprès de plusieurs mouvements, qui a travaillé par le passé pour la Banque mondiale et l’Organisation mondiale du commerce. Logique, quand on sait qu’il se définit lui-même comme « socialiste », ce qui « n’est pas facile au Texas », nous précise-t-il dans un éclat de rire. Patel a déjà écrit sur les crises alimentaires, dont il est un expert. Il signe aujourd’hui un nouvel ouvrage, Comment notre monde est devenu cheap, co-écrit avec Jason W. Moore, historien et enseignant à l’université de Binghampton.

    Ces deux universitaires hyper-actifs y développent une nouvelle approche théorique pour appréhender l’urgence dans laquelle nous nous trouvons, mêlant les dernières recherches en matière d’#environnement et de changement climatique à l’histoire du capitalisme. Pour eux, ce dernier se déploie dès le XIVème siècle. Il naît donc avec le #colonialisme et la #violence inhérente à l’#esclavage, jusqu’à mettre en place un processus de « cheapisation » généralisé, soit « un ensemble de stratégies destinées à contrôler les relations entre le capitalisme et le tissu du vivant, en trouvant des solutions, toujours provisoires, aux crises du capitalisme ». Une brève histoire du monde qui rappelle, sur la forme, la façon dont Yuval Harari traite l’histoire de l’humanité, mais avec cette fois une toute autre approche théorique, que Raj Patel n’hésite pas à qualifier de « révolutionnaire ».

    Entretien autour de cette grille de lecture, qui offre également quelques perspectives pour sortir de ce que les auteurs appellent le « #Capitalocène », grâce notamment au concept d’ « #écologie-monde ».

    Usbek & Rica : Des scientifiques du monde entier s’accordent à dire que nous sommes entrés depuis un moment déjà dans l’ère de l’#Anthropocène, cette période de l’histoire de la Terre qui a débuté lorsque les activités humaines ont eu un impact global significatif sur l’écosystème terrestre. Mais vous allez plus loin, en parlant de « Capitalocène ». Le capitalisme serait donc la cause de tous nos problèmes ?

    Raj Patel : Si vous avez entendu parler de l’Anthropocène, vous avez entendu parler de l’idée selon laquelle les humains sont en grande partie responsables de la situation désastreuse de notre planète. À ce rythme, en 2050, il y aura par exemple plus de plastique que de poissons dans les océans. Si une civilisation survient après celle des humains, les traces qui resteront de notre présence seront le plastique, la radioactivité liée aux essais nucléaires, et des os de poulet. Mais tout cela n’est pas lié à ce que les humains sont naturellement portés à faire. Il y a quelque chose qui conduit les humains à cette situation. Et si vous appelez cela l’Anthropocène, vous passez à côté du fond du problème. Ce n’est pas l’ensemble des comportements humains qui nous conduit à la sixième extinction. Il y a aujourd’hui beaucoup de civilisations sur Terre qui ne sont pas responsables de cette extinction de masse, et qui font ensemble un travail de gestion des ressources naturelles formidable tout en prospérant. Et ces civilisations sont souvent des populations indigènes vivant dans des forêts.

    Mais il y a une civilisation qui est responsable, et c’est celle dont la relation avec la nature est appelée « capitalisme ». Donc, au lieu de baptiser ces phénomènes Anthropocène, appelons-les Capitalocène. Nous pouvons ainsi identifier ce qui nous conduit aux bouleversements de notre écosystème. Il ne s’agit pas de quelque chose d’intrinsèque à la nature humaine, mais d’un système dans lequel évolue un certain nombre d’humains. Et ce système nous conduit vers une transformation dramatique de notre planète, qui sera visible dans l’étude des fossiles aussi longtemps que la Terre existera.

    Vous établissez, avec votre co-auteur, une histoire du capitalisme fondée sur sept choses « cheap ». Quelles sont-elles, et comment êtes vous parvenus à cette conclusion ?

    Dans ce livre, nous évoquons les sept choses que le capitalisme utilise pour éviter de payer ses factures. C’est d’ailleurs une définition courte du capitalisme : un système qui évite de payer ses factures. C’est un moyen de façonner et de réguler les relations entre individus, et entre les humains et la reste de la vie sur Terre. Ces sept choses sont la nature « cheap », l’argent « cheap », le travail « cheap », le care « cheap », l’alimentation « cheap », l’énergie « cheap » et les vies « cheap ». Nous sommes parvenus à cette conclusion en partie grâce à un raisonnement inductif fondé sur l’histoire, mais aussi en s’intéressant aux mouvements sociaux d’aujourd’hui. Par exemple, le mouvement Black Lives Matter ne proteste pas uniquement contre l’inégalité historique qui résulte de l’esclavage aux Etats-Unis. Ses membres se penchent aussi sur le changement climatique, l’équité entre les genres, le travail, la réforme agraire ou la nécessaire mise en place de meilleurs systèmes alimentaires et de systèmes d’investissement solidaires qui permettraient à des entreprises d’émerger.

    C’est une approche très complète, mais l’idée qui importe dans la structuration des mouvements sociaux est celle d’intersectionnalité. Et on peut identifier nos sept choses « cheap » dans presque tous les mouvements intersectionnels. Tous les mouvements visant à changer l’ordre social se tiennent à la croisée de ces sept choses.

    Vous expliquez que la nourriture est actuellement peu chère, mais que cela n’a pas été le cas à travers l’histoire. Dans votre introduction, vous prenez pour exemple les nuggets de MacDonald’s pour illustrer votre théorie des sept choses « cheap ». Pourquoi ?

    Il n’a pas toujours été possible d’obtenir un burger ou quelques chicken nuggets pour un euro ou deux. Au XIXème siècle, les ouvriers anglais dépensaient entre 80 et 90% de leurs revenus en nourriture. Aujourd’hui, nous consacrons à peu près 20% à l’alimentation. Quelque chose a changé. Et le nugget est devenu un fantastique symbole la façon dont le capitalisme évite de payer ses factures.

    Reprenons nos sept choses « cheap ». La nature « cheap » nous permet de retirer un poulet du monde sauvage et de le modifier en machine à produire de la viande. Cette approche de la nature est assez révélatrice de la façon dont le capitalisme opère. La deuxième chose, c’est le travail : pour transformer un poulet en nugget, il vous faut exploiter des travailleurs. Et partout dans le monde, ces ouvriers avicoles sont extrêmement mal payés. Une fois que les corps de ces ouvriers sont ruinés par le travail à la chaîne, qui va veiller sur eux ? Généralement, cela retombe sur la communauté, et particulièrement sur les femmes. C’est cela que j’appelle le « cheap care ». Les poulets sont eux-mêmes nourris grâce à de la nourriture « cheap », financée par des milliards de dollars de subventions. L’énergie « cheap », c’est-à-dire les énergies fossiles, permet de faire fonctionner les usines et les lignes de production. Et l’argent « cheap » permet de faire tourner l’ensemble, parce que vous avez besoin de taux d’intérêt très bas, et que les grandes industries en obtiennent des gouvernements régulièrement. Et enfin, vous avez besoin de vies « cheap » : il faut reconnaître que ce sont les non-blancs qui sont discriminés dans la production de ce type de nourriture, mais aussi que les consommateurs sont considérés comme jetables par l’industrie.

    Vous insistez sur le fait que le capitalisme est né de la séparation entre nature et société, théorisée notamment par Descartes. Et que cette naissance a eu lieu au XIVème siècle, dans le contexte de la colonisation. On a donc tort de dire que le capitalisme est né avec la révolution industrielle ?

    Si vous pensez que le capitalisme est né au cours de la révolution industrielle, vous êtes en retard de trois ou quatre siècles. Pour que cette révolution advienne, il a fallu beaucoup de signes avant-coureurs. Par exemple, l’idée de la division du travail était déjà à l’oeuvre dans les plantations de cannes à sucre à Madère à la fin du XIVème siècle ! Toutes les innovations dont on pense qu’elles proviennent de la révolution industrielle étaient déjà en place quand les Portugais ont apporté la production de sucre, l’esclavage et la finance à Madère.

    Quant à la division du monde entre nature et société, il s’agit là du péché conceptuel originel du capitalisme. Toutes les civilisations humaines ont une façon d’opérer une distinction entre « eux » et « nous », mais séparer le monde entre nature et société permet de dire quels humains peuvent faire partie de la société, et d’estimer qu’on est autorisé à exploiter le reste du monde. Les colons arrivant en Amérique considéraient ceux qu’ils ont baptisé « Indiens » comme des « naturales ». Dans une lettre à Isabelle Iʳᵉ de Castille et Ferdinand II d’Aragon, Christophe Colomb se désole de ne pouvoir estimer la valeur de la nature qu’il a devant lui aux Amériques. Il écrit aussi qu’il reviendra avec le plus d’esclaves possibles : il voit certains hommes et la nature comme des denrées interchangeables car ils ne font pas partie de la société. Cette frontière entre nature et société est propre au capitalisme, et c’est pourquoi il peut utiliser les ressources fournies par la nature tout en la considérant comme une immense poubelle.

    Le capitalisme fait partie, selon vous, d’une écologie-monde, un concept forgé par votre co-auteur. En quoi ?

    Nous nous inspirons de Fernand Braudel et du concept d’économie-monde. En résumé, l’historien explique que si l’on veut comprendre comment fonctionne le monde, on ne peut pas prendre l’Etat-nation comme unité fondamentale d’analyse. Il faut comprendre que cet endroit est défini par son rapport aux autres endroits, tout comme les humains sont définis par leurs relations aux autres humains. On doit également penser au système dans lequel le pays que l’on étudie se trouve.

    L’économie n’est qu’une façon de penser la relation entre les humains et le tissu du vivant. Par exemple, Wall Street est une façon d’organiser le monde et la nature. Les traders qui y travaillent font de l’argent en faisant des choix, et en les imposant via la finance et la violence qui lui est inhérente. Le tout pour structurer les relations entre individus et entre les humains et le monde extra-naturel. Ce que nous faisons, c’est que nous replaçons tout cela dans son écologie, et c’est pourquoi le concept d’écologie-monde fait sens. Si vous vous intéressez à la façon dont les humains sont reliés les uns aux autres, vous devez choisir la focale d’analyse la plus large possible.

    Vous dites qu’il est plus facile d’imaginer la fin du la planète que la fin du capitalisme. Pourquoi ?

    J’expliquais dernièrement à mes étudiants que nous avons jusqu’à 2030 si l’on veut parvenir à une économie neutre en carbone. Et ils étaient désespérés et désemparés. Ce désespoir est un symptôme du succès du capitalisme, en cela qu’il occupe nos esprits et nos aspirations. C’est pourquoi il est, selon moi, plus facile d’envisager la fin du monde que celle du capitalisme. On peut aller au cinéma et y admirer la fin du monde dans tout un tas de films apocalyptiques. Mais ce qu’on ne nous montre pas, ce sont des interactions différentes entre les humains et la nature, que certaines civilisations encore en activités pratiquent actuellement sur notre planète.

    Je vis aux Etats-Unis, et tous les matins mes enfants doivent prêter serment et répéter qu’ils vivent dans « une nation en Dieu » [NDLR : « One nation under God »]. Mais les Etats-Unis reconnaissent en réalité des centaines de nations indigènes, ce que l’on veut nous faire oublier ! Tous les jours, on nous apprend à oublier qu’il y existe d’autres façons de faire les choses, d’autres possibilités. Cela ne me surprend pas que certains estiment impossible de penser au-delà du capitalisme, même si les alternatives sont juste devant nous.

    Parmi ces alternatives, il y en a une qui ne trouve pas grâce à vos yeux : celle du progrès scientifique, incarnée en ce moment par certains entrepreneurs comme Elon Musk.

    Ce que je ne comprends pas, c’est que ceux que nous considérons comme nos sauveurs sont issus du passé. Beaucoup pensent qu’Elon Musk va sauver le monde, et que nous allons tous conduire des Tesla dans la joie. Mais si on regarde ce qui rend possible la fabrication des Tesla, on retrouve nos sept choses « cheap » ! Les travailleurs sont exploités, notamment ceux qui travaillent dans les mines pour extraire les métaux rares nécessaires aux batteries. Et Musk lui-même s’attache à éliminer les syndicats... Je suis inquiet du fait que l’on fonde nos espoirs sur ces messies.

    Des initiatives comme celle du calcul de son empreinte écologique ne trouvent pas non plus grâce à vous yeux. Pourquoi ?

    Parce qu’il s’agit d’un mélange parfait entre le cartésianisme et la pensée capitaliste. C’est une façon de mesurer l’impact que vous avez sur la planète en fonction de vos habitudes alimentaires ou de transport. À la fin du questionnaire, on vous livre une série de recommandations personnalisées, qui vous permettent de prendre des mesures pour réduire votre empreinte écologique. Qu’est-ce qu’il pourrait y avoir de mal à ça ? Evidemment, je suis d’accord avec le fait qu’il faudrait que l’on consomme moins, particulièrement dans les pays développés.

    Pourtant, présenter le capitalisme comme un choix de vie consiste à culpabiliser l’individu au lieu de condamner le système. C’est la même logique qui prévaut derrière la façon dont on victimise les individus en surpoids alors que leur condition n’a pas grand chose à voir avec leurs choix individuels, mais plutôt avec leurs conditions d’existence. On ne pourra pas non plus combattre le réchauffement climatique en recyclant nos déchets ! Du moins, pas uniquement. En mettant l’accent sur le recyclage, on sous-estime l’immensité du problème, mais aussi notre propre pouvoir. Parce que si vous voulez changer de système, ça ne passera pas par ce que vous mettez dans votre caddie, mais par le fait de s’organiser pour transformer la société. Et c’est l’unique façon dont une société peut évoluer. Personne n’est allé faire les courses de façon responsable pour mettre un terme à l’esclavage ! Personne n’est sorti de chez lui pour acheter de bons produits afin que les femmes obtiennent le droit de vote ! Tout cela dépasse le niveau des consommateurs. Il va falloir s’organiser pour la transformation, c’est la seule façon de combattre.

    C’est pour ça que le dernier mot de votre livre est « révolution » ?

    Si nous continuons comme ça, la planète sur laquelle nous vivons sera en grande partie inhabitable. Si je vous dis que j’ai l’idée révolutionnaire de transformer le monde pour le rendre inhabitable, vous me répondrez qu’il faudrait que j’évite de faire ça. Le problème, c’est que si je vous dis que j’ai l’idée révolutionnaire de se détourner du capitalisme pour vivre mieux qu’aujourd’hui, vous me diriez la même chose. On choisit sa révolution. Soit on essaye de maintenir les choses comme elles sont, avec leur cortège d’exploitation, de racisme et de sexisme, la sixième extinction de masse, et la transformation écologique pour prétendre que tout va bien se passer. Soit on accueille le changement à venir, et on tente de s’y connecter.

    Les systèmes sociaux meurent rapidement. Le féodalisme a par exemple disparu pendant une période de changement climatique et d’épidémies. Plusieurs expériences ont été tentées pour remplacer le féodalisme, et parmi elles, c’est le capitalisme qui a gagné. Ce que je veux dire, c’est que nous pouvons choisir le monde que nous voulons construire maintenant pour être capables de supporter l’après-capitalisme. On peut choisir sa révolution, mais la chose qu’on ne peut pas choisir, c’est de l’éviter. Le capitalisme nous rend aveugles à la révolution qu’il opère lui-même à la surface de la planète en ce moment.

    Donc, selon vous, il faudrait se tourner vers le concept d’écologie-monde pour reprendre espoir ?

    Une partie de ce que l’on voulait faire avec Comment notre monde est devenu cheap, c’était d’articuler théoriquement ce qui est déjà en train d’advenir. Je suis très inspiré par ce que met en place le mouvement paysan La Via Campesina. Ce mouvement international qui regroupe des petits paysans fait un travail incroyable, notamment en Amérique du Sud, en promouvant l’agroécologie.

    L’agro-écologie est un moyen de cultiver la terre qui est totalement à l’opposé de l’agriculture industrielle. Au lieu de transformer un champ en usine en annihilant toute la vie qui s’y trouve, vous travaillez avec la nature pour mettre en place une polyculture. Cela vous permet de lutter contre le réchauffement en capturant plus de carbone, et de vous prémunir contre ses effets en multipliant le type de récoltes. Enfin, vous vous organisez socialement pour soutenir le tout et gérer les ressources et leur distribution, ce qui ne peut se faire sans combattre le patriarcat. Voilà un exemple de mouvement fondé autour d’une lutte contre l’OMC et qui a évolué en une organisation qui combat les violences domestiques, le patriarcat et le réchauffement climatique. C’est un exemple concret, et presque magique, d’intersection entre les choses « cheap » que nous évoquons dans notre livre. Et tout cela est rendu possible parce que le mouvement est autonome et pense par lui-même, sans s’appuyer sur de grands espoirs, mais sur l’intelligence de chaque paysan.

    Votre livre compte 250 pages de constat, pour 10 pages de solution. Est-ce qu’il est vraiment si compliqué que ça d’accorder plus de place aux solutions ?

    Il y a déjà des organisations qui travaillent sur des solutions. Mais pour comprendre leur importance et pourquoi elles se dirigent toutes vers une rupture d’avec le capitalisme, on s’est dit qu’il était de notre devoir de regrouper un certain nombre d’idées qui parcourent le monde universitaire et le travail de nos camarades au sein des mouvements sociaux. Notre rôle me semble être de théoriser ce qui se passe déjà, et de nourrir nos camarades intellectuellement. Et ces sept choses « cheap » pourraient être une nouvelle manière d’appréhender nos systèmes alimentaires et tout ce que l’on décrit dans l’ouvrage, mais pas seulement. Le cadre théorique pourrait aussi s’appliquer à la finance, au patriarcat ou au racisme, et permettre aux mouvements en lutte de se rendre compte qu’il faut qu’ils se parlent beaucoup plus. Nous n’avions pas l’objectif de faire un catalogue de solutions, encore moins un programme politique : beaucoup d’acteurs engagés font déjà de la politique, et c’est vers eux qu’il faut se tourner si vous voulez changer les choses maintenant, sans attendre l’effondrement.

    https://usbeketrica.com/article/changer-de-systeme-ne-passera-pas-par-votre-caddie
    #intersectionnalité #mouvements_sociaux #post-capitalisme #capitalisme #alternatives #nature #responsabilité #résistance

    • Comment notre monde est devenu cheap

      « Cheap » ne veut pas simplement dire « bon marché ». Rendre une chose « #cheap » est une façon de donner une valeur marchande à tout, même à ce qui n’a pas de #prix. Ainsi en va-t-il d’un simple nugget de poulet. On ne l’achète que 50 centimes, alors qu’une organisation phénoménale a permis sa production : des animaux, des plantes pour les nourrir, des financements, de l’énergie, des travailleurs mal payés…
      Déjà, au XIVe siècle, la cité de Gênes, endettée auprès des banques, mettait en gage le Saint Graal. Christophe Colomb, découvrant l’Amérique, calculait ce que valent l’eau, les plantes, l’or… ou les Indiens. Au XIXe siècle, les colons britanniques interdisaient aux femmes de travailler pour les cantonner aux tâches domestiques gratuites. Jusqu’à la Grèce de 2015, qui remboursait ses dettes en soldant son système social et ses richesses naturelles.
      Le capitalisme a façonné notre monde : son histoire, d’or et de sang, est faite de conquêtes, d’oppression et de résistances. En la retraçant sous l’angle inédit de la « cheapisation », Raj Patel et Jason W. Moore offrent une autre lecture du monde. De cette vision globale des crises et des luttes pourrait alors naître une ambition folle : celle d’un monde plus juste.

      https://editions.flammarion.com/Catalogue/hors-collection/documents-temoignages-et-essais-d-actualite/comment-notre-monde-est-devenu-cheap

      #livre

  • Entretien des #ouvrages_d'art_routiers : un nouveau guide technique destiné aux communes
    https://www.caissedesdepotsdesterritoires.fr/cs/ContentServer?pagename=Territoires/Articles/Articles&cid=1250281602071

    L’effondrement du pont Morandi, à Gênes, en Italie, le 14 août dernier, a alerté sur l’état des ouvrages d’art routiers en Europe. En France, le ministère des Transports a rendu public, suite à cette catastrophe, un audit portant sur le réseau routier national qui estime qu’un tiers des 12.000 ponts du réseau national nécessitent des réparations et que dans 7% des cas, un risque d’effondrement peut se produire à terme si rien n’est fait.
    Mais les enjeux d’entretien portent aussi largement sur le réseau routier communal qui concentre l’essentiel des ouvrages d’art du pays (près de 100.000 sur un total de 250.000). C’est ce qui a conduit le #Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) à publier un guide technique destiné aux communes sur la surveillance et l’#entretien_courant de leurs ouvrages d’art routiers.

  • Question d’actualité 18 août 2018. CATASTROPHE EN ITALIE - François Asselineau analyse les enseignements de l’effondrement du viaduc de Gênes (UPR)
    https://www.crashdebug.fr/diversifion/15060-question-d-actualite-18-aout-2018-catastrophe-en-italie-francois-as

    30% des ponts à risque en France et 8% qui seraient dans un état critique, faute d’investissement, c’est une des données dont vous prendrez connaissance en visionnant cet entretien d’actualité, et plus important que ces chiffres, vous comprendrez les raisons de ces sous-investissements, qui touchent tous les pans de notre pays comme nous l’avions vu ce matin...

    Source : UPR.fr

    Informations complémentaires :

    Crashdebug.fr : Scandale à Gênes : les ambulances devaient payer le péage

    Crashdebug.fr : Les Français jugent durement la mondialisation...

    Crashdebug.fr : François Asselineau explique le programme d’Emmanuel Macron en 1mn

    Crashdebug.fr : Nouvel Ordre Mondial : La « stratégie du choc » avance implacablement en Europe...

    Crashdebug.fr : Étienne Chouard - Chouard brise (...)

  • Scandale à Gênes : les ambulances devaient payer le péage
    https://www.crashdebug.fr/international/15055-scandale-a-genes-les-ambulances-devaient-payer-le-peage

    GENES : ... Les ambulances devaient payer le péage = Etat en faillite + privatisation

    = Privatisation, hausse des tarifs,, 1 milliard versé aux actionnaires, non ré-investissement, délabrement/panne/accident, puis ils exigent que l’Etat/contribuable refinancent via une éco-taxe

    Contributeur anonyme

    La société Autostrade per l’Italia, gestionnaire du pont effondré à Gênes et vivement attaquée par le gouvernement, a annoncé jeudi que les ambulances ne paieraient plus le péage sur l’ensemble de son réseau, qui englobe près de la moitié des quelque 6000 km d’autoroutes en Italie. "Pour favoriser l’organisation des précieuses activités de secours, Autostrade per l’Italia annonce que les ambulances ne paieront plus le péage sur son réseau. La décision prend effet (...)

  • Économie | Gênes : 1 milliard d’euros de dividendes versé en 2017 aux actionnaires du viaduc autoroutier effondré | La Provence
    https://www.laprovence.com/actu/en-direct/5110516/genes-1-milliard-deuros-de-dividendes-verse-en-2017-aux-actionnaires-du-


    La cupidité tue

    Le groupe Atlantia qui possède le gestionnaire d’autoroute italien Autostrada per l’Italia dont une portion de viaduc s’est effondrée ce mardi à Gênes plonge de 20% en bourse actuellement. Sous le feu de vives critiques, le groupe Atlantia est menacé par le gouvernement italien de perdre la concession octroyée à Autostrada per l’Italia sur le tronçon où se trouve le pont effondré.

    Sur les 6 premiers mois de l’année 2018, le groupe Atlantia a déjà versé 654 millions d’euros de dividendes à ses actionnaires, et 994 millions d’euros en 2017 (source investing.com).

    • Benetton
      https://seenthis.net/messages/715776

      . . . . .
      La concession de l’autoroute Milan-Gènes a été accordée en 2007 au groupe #Benetton soit sous le gouvernement de #Silvio_Berlusconi. Cette privatisation s’est faite dans des conditions discutables. Ainsi, le contrat de concession ne fut jamais rendu public et il est même couvert par le secret d’Etat[2].

      Symbole donc de cette mise en concession des infrastructures autoroutières, la situation du #pont_Morandi est complexe. La société concessionnaire (jusqu’en 2038) est #Autostrade Per l’Italia une société qui est la propriété à 88% du consortium Atlantia[3]. Ce consortium détient près de 50% du réseau autoroutier de l’Italie, et de nombreuses autres #infrastructures (dont les aéroports de #Nice et de #Cannes en France). Ce consortium a lui-même une structure de propriété assez complexe.
      Graphique 1

      Près de 45,5% des actions sont sur les marchés financiers. Sur les 54,5% restant, le principal actionnaire est #Sintonia (Edizione) qui appartient à la famille Benetton. Cette dernière est donc bien la responsable en dernier ressort.
      Par ailleurs, Atlantia a acquis des sociétés en #France, en #Pologne, au #Brésil et en #Inde, ainsi que, récemment, en #Espagne. Elle a ainsi acquise le groupe espagnol #Abertis qui a nommé comme l’un de ses directeurs en novembre 2016 M. Enrico Letta, qui fut le Président du Conseil italien en 2013-2014[4].

      La confusion des genres est ainsi évidente entre le monde des affaires (la famille Benetton), les banques et l’élite politique italienne. Mais, au-delà de cette collusion, on voit apparaître la responsabilité de l’#UE qui a fait de multiples pressions, directes (au nom de la sacro-sainte #concurrence) ou indirecte (en pressant l’Italie de réduire son déficit) pour que l’on arrive à cette situation où les #autoroutes sont, de fait, en gestion privée, et cela dans des conditions d’#opacité peu communes.
      . . . . .

    • #mafia
      En france, les potes qui ont une grosse entreprise d’élagage ont perdu l’entretien des autoroutes ASF au profit de « gars qui bossent pour moins cher mais dans des conditions de sécurité inacceptable en utilisant des sous traitants qui n’hésitent pas à recourir au travail au noir »
      #it_has_begun

  • Ponts, routes, rail : un inquiétant manque d’entretien en France (titre qui a remplacé « Route, rail, canaux… La grande souffrance des infrastructures françaises »), Grégoire Allix et Philippe Jacqué, Le Monde 17/08/2018
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/08/17/route-rail-canaux-la-grande-souffrance-des-infrastructures-francaises_534328

    Un récent audit commandé par le ministère des transports a rappelé que le patrimoine routier français était, lui aussi, fragilisé par des décennies de manque d’entretien.

    Un tiers des ponts du réseau routier national à réparer, dont 7 % présentent un « risque d’effondrement »… Après l’écroulement catastrophique du viaduc Morandi à Gênes, mardi 14 août, la France n’est pas épargnée par les débats qui divisent l’Italie concernant le mauvais état des infrastructures routières.

    Si le réseau italien, avec une dizaine de ponts écroulés ces cinq dernières années, apparaît particulièrement vulnérable, un récent audit commandé par le ministère des transports a rappelé que le patrimoine routier de l’Hexagone était, lui aussi, fragilisé par des décennies de manque d’entretien.

    C’est la maladie des infrastructures de transports en France : tout comme la route, le rail et les canaux souffrent d’un sous-investissement chronique, qui a entraîné pendant des années un manque de maintenance aux conséquences potentiellement dramatiques. Tour d’horizon des réseaux les plus vulnérables, alors que le gouvernement doit annoncer, à la rentrée, une loi de programmation des infrastructures.

    Un réseau routier qui se dégrade

    Rendu public par le ministère des transports en juin, l’audit réalisé par deux sociétés suisses sur les 10 000 km et les 12 000 ponts du réseau routier national non concédé au privé est passé relativement inaperçu jusqu’à la catastrophe de Gênes. Ses conclusions sont pourtant alarmistes : un pont sur trois à réparer, 17 % des chaussées qui nécessitent des réparations structurelles, des équipements menacés de vétusté…

    Surtout, les budgets ne suivent pas. La France investit 50 000 euros par kilomètre dans son réseau chaque année, quand le Royaume-Uni y consacre 80 000 euros. Dans l’Hexagone, un pont n’est réparé en moyenne que vingt-deux ans après l’apparition des premières dégradations, souligne l’audit.

    Quant aux 380 000 km de routes départementales, aucune raison de penser qu’elles sont en meilleur état, vu les baisses de dotations auxquelles les collectivités sont confrontées. « On est dans des pourcentages de mauvais entretien similaires à ceux des routes nationales révélés par l’audit suisse », estime-t-on à l’Observatoire national de la route, qui mène actuellement une analyse de l’état de ce patrimoine.

    « Le réseau routier français est plutôt très performant, mais il se dégrade très rapidement. D’année en année, il y a un sous-investissement de 200 millions à 300 millions d’euros », note Matthieu Orphelin, député La République en marche (LRM) du Maine-et-Loire et membre du Conseil d’orientation des infrastructures (COI).

    « Cela remonte à quinze ans, estime le président du COI, l’ancien député (PS) du Calvados Philippe Duron. Il y a d’abord la disparition du ministère de l’équipement, qui fait passer cette priorité au second plan. Puis le déni de la route à partir des années 2000, renforcé par le Grenelle de l’environnement. Et enfin les politiques de restriction budgétaire. »

    Pas de péril imminent, à en croire les experts. « Il n’y a pas d’urgence absolue dans les cinq ans qui viennent et, étant donné les inspections auxquelles les ouvrages sont soumis en France, le risque n’est pas forcément que les ponts s’effondrent, mais plutôt qu’on soit obligés de les fermer. Mais plus on attend pour réaliser ces travaux de maintenance, plus il y aura urgence et plus ça coûtera cher », prévient Jean-Michel Torrenti, ingénieur des ponts et directeur du département matériaux et structures de l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (Ifsttar).

    Un effort tardif sur le rail

    Le réseau ferré national a été le premier à sonner l’alarme, en 2005. Alors que la France s’enorgueillissait à l’époque de ses succès sur la grande vitesse, qui concentrait l’essentiel des investissements, les gros nœuds ferroviaires, qui accueillent l’immense majorité des passagers, étaient jugés en voie d’obsolescence par Robert Rivier, le rapporteur d’un audit. « Si la situation actuelle devait perdurer, ne subsisterait à l’horizon 2025 qu’un tiers des 50 000 kilomètres du réseau », insistait l’ingénieur suisse dans cette étude.

    « Sur le rail, ça a longtemps été la folie des grandeurs, le mythe du TGV partout, au détriment de la mobilité du quotidien, rappelle Matthieu Orphelin. Résultat : des nœuds ferroviaires congestionnés, avec des trains qui arrivent en retard et repartent encore plus en retard ».

    Depuis ce rapport-choc, les gouvernements successifs ont augmenté les budgets alloués à la régénération du réseau. Ils sont passés de moins de 800 millions d’euros en 2004 à une fourchette de 2,5 milliards à 3 milliards d’euros par an aujourd’hui. Un effort trop tardif pour empêcher, en juillet 2013, l’accident ferroviaire de Brétigny-sur-Orge (Essonne), qui a fait sept morts et une trentaine de blessés, et les multiples incidents qui compliquent les trajets des passagers.

    Sur le front de la régénération et de la modernisation du rail, l’Etat devrait aller plus loin en portant les moyens de rénovation à près de 3,6 milliards d’euros par an. Et à partir de 2022, il vient de s’engager à ajouter encore 200 millions d’euros par an.

    Si les sommes sont remarquables, cela pourrait ne pas suffire. En 2018, un quart des lignes sont au-delà de leur durée de vie théorique, contre 10 % à 20 % en 2012. En début d’année, Jean-Cyril Spinetta, auteur d’un rapport sur la SNCF, prévenait : « Si l’investissement reste constant, près de la moitié des 9 000 km de “petites” lignes pourraient être fermés aux voyageurs d’ici à 2026 en raison de leur obsolescence. »

    Des canaux prometteurs, mais négligés

    Le secteur ne fait jamais parler de lui. Pourtant, les canaux constituent l’un des réseaux de transport les plus prometteurs. Et les plus négligés. « Les plus mal lotis, ce sont les voies d’eau, confirme Philippe Duron. Beaucoup de gens ont cru que le fluvial n’avait pas d’avenir. Or il connaît une croissance à deux chiffres depuis quelques années, mais l’état préoccupant des infrastructures pourrait entraîner des pépins. »

    Avec 6 700 km de voies d’eau (canaux, fleuves, rivières) et quelque 4 000 ouvrages installés (écluses, déversoirs, ponts, aqueducs, etc.), gérés par Voies navigables de France (VNF) et ses 4 300 agents, ce patrimoine est essentiel pour le pays à l’heure de la transition énergétique. Deux audits remis début 2018 au gouvernement soulignent le sous-investissement chronique et l’extrême fragilité de ce réseau.

    Alors que VNF investissait encore, en 2013, 157 millions d’euros dans ses infrastructures, il n’en a investi que 136 millions en 2017. Or, selon ces audits, il faudrait dépenser plus du double pour les dix ans à venir pour maintenir un réseau, dont de nombreuses voies sont aujourd’hui déclarées impropres à la navigation.

    Problème : VNF, doté d’un budget de 500 millions d’euros, ne dispose que de 8 % de ressources propres, trop peu aujourd’hui pour espérer investir davantage. Le COI encourage le gouvernement à investir, pour ce seul réseau, 150 % de plus qu’aujourd’hui.

    #infrastructures #routes #ponts #rail #canaux #transports

  • VINGT ANS APRÈS SA MORT, LE SUD CHANTE À NOUVEAU NINO FERRER
    Jean-Manuel Escarnot, Liberation, le 9 août 2018
    http://next.liberation.fr/musique/2018/08/09/vingt-ans-apres-sa-mort-le-sud-chante-a-nouveau-nino-ferrer_1671832

    #paywall alors :

    De nombreux artistes se réuniront lundi à Montcuq, dans le Lot, pour rendre hommage au chanteur, vingt ans après sa mort.

    C’est une belle bâtisse fortifiée datant du XVe siècle plantée sur le sommet d’une colline du Lot, surplombant le petit village de Saint-Cyprien. La lourde porte en chêne massif de la demeure s’ouvre sur une cour carrée, desservant les pièces aux larges murs de pierres blanches. La lumière du soleil couchant du mois d’août illumine la façade. Autour, le parc planté de cèdres centenaires au milieu duquel trône une grande table dressée pour une vingtaine de convives. De la grange attenante à la bastide s’échappe le son rond comme une caresse d’un orgue Hammond et celui des cuivres accompagnant la voix d’une chanteuse. Quand elle se tait, on entend le chant des cigales.

    Nous sommes à la Taillade, le domaine acheté par Nino Ferrer - né Nino Agostino Ferrari le 15 août 1934 à Gênes - avec les royalties d’un de ses plus grands succès : le Sud, vendu à plus d’un million d’exemplaires en 1975, date de sa sortie en 45-tours. Un titre que Magali Pietri, ex-choriste de Nino Ferrer, a choisi d’interpréter pour le concert organisé lundi à Montcuq (Lot). Vingt ans jour pour jour après le suicide du chanteur le 13 août 1998, c’est ainsi que sa famille a voulu lui rendre hommage. Sans fleur ni couronnes mais avec de la musique et de la lumière : au pied de la tour cathare de Montcuq, une smala d’artistes parmi lesquels Eric Lareine, Matthieu Chedid et Sanseverino, y reprendront son répertoire sur la scène en plein air installée pour l’occasion.

    En 1977, l’auteur de Mirza, du Téléfon, des Cornichons, ou encore de Oh ! Hé ! Hein ! Bon ! décide de « s’exiler » avec sa femme, Jacqueline Monestier, dite Kinou, avec qui il aura deux fils, Pierre, né le 5 septembre 1973, et Arthur, né le 14 février 1979. A la Taillade, loin de Paris et du show-business qu’il déteste, Nino mène sa barque à sa manière, exigeant, indépendant, parfois colérique. Il élève des chevaux. Dans le studio installé dans le salon de sa forteresse, il enregistre et produit cinq albums concept, explorant des pistes rhythm ’ n’blues et rock progressif, à milles lieues de l’image de « chanteur rigolo » qui lui colle à la peau. Il se remet aussi à la peinture, des tableaux surréalistes peuplés de femmes nues, de serpents et de ciels bleus parfois traversés par des nuages radioactifs de mauvais augure… Certains d’entre eux sont exposés à la mairie de Montcuq. D’autres, plus anciens, - des gouaches « redécouvertes » par Kinou « en fouillant dans les cartons rangés dans le grenier » - sont présentés à la galerie du Lion d’or, dans le centre du village. Des criques du bout du monde, des souvenirs de séjours en Nouvelle-Calédonie où, diplômé d’archéologie, le jeune « capitaine Nino », tel que l’avait dessiné Hugo Pratt dans l’une des aventures de Corto Maltese, se voyait en explorateur avant de devenir chanteur à succès. Sur l’un des murs de la galerie, une série d’autoportraits au fusain et crayon, réalisés par Nino quatre ans avant sa mort, révèle un visage figé au regard perçant. « Un regard dur sur le monde, dit Pierre, son fils aîné, décorateur de cinéma. Son visage est très animal. On le sent de façon très forte. Quand il peignait, il était calme et serein. Il pouvait s’exprimer seul, de façon plus simple et plus immédiate que dans la musique, sans luttes quant au contrôle final sur son travail. »

    Retour dans la grange de la Taillade, transformée en studio de répétition. Des copains d’Arthur forment le groupe qui accompagne les artistes. Eric Lareine, natte d’Indien cheyenne et voix grave de fumeur de blondes, a choisi d’interpréter Je voudrais être noir pour rendre hommage à Nino : « Il a fait cette chanson en 1966 au moment de la lutte des Noirs pour leurs droits civiques aux Etats-Unis. Il y a de la sueur, du groove, c’est James Brown ! Il était inscrit dans son temps. C’est la même chose pour les Cornichons, c’est les vacances mais c’est aussi la bouffe, l’accumulation de biens terrestres. » Dans un registre plus jazzy, Magali Pietri reprend le Sud. « J’avais 16 ans lorsque j’ai rencontré Nino à la Taillade, lors d’une visite avec ma mère et son compagnon. Je jouais de la guitare et je chantais. Il m’a demandé de lui jouer quelque chose. J’ai repris un morceau de Crosby, Stills, Nash and Young. Il m’a proposé de devenir sa choriste. C’était magique. Mes parents m’ont donné leur accord et je suis partie en concerts avec lui, puis j’ai participé à trois de ses albums. C’était quelqu’un de généreux dans ce qu’il donnait, de ce qu’il était et dans ce qu’il nous amenait à donner. Par moments, il semblait relié à quelque chose de plus vaste, un endroit plus grand que ce monde », se souvient-elle en souriant.

    Venu « en voisin », Jean-Jacques Lala, chanteur d’opéra, reprend Agata, un tango : « Nino, c’est l’icône de la région. Quand j’étais gamin, on savait qu’il habitait là. C’était un énorme musicien. C’est très technique. J’ai bossé ce morceau comme un opéra sauf que je n’ai pas la partition. J’ai travaillé à l’oreille. J’ai pris beaucoup de plaisir à m’approprier cette chanson. Ça représente la richesse de Nino. C’est ce que je retiens de lui : cette bonté, cette générosité dans son répertoire et chez les gens qui sont là. C’est aussi ce que respire ce lieu où il a vécu. » Dans le parc, une brise d’été accompagne la fin de journée. La nuit tombée, le soir autour de la table, on entend des rires.

    Concert hommage au pied de la tour de Montcuq (Lot). Lundi 13 août à 20 h 30.

    =======================

    Et aussi :

    Nino Ferrer, le mal-aimé de la chanson française
    Brice Miclet, Slate, le 11 août 2018
    https://seenthis.net/messages/714408

    #Nino_Ferrer #Musique

  • Poste de documentation pour mon prochain patriarche - Le Marchand. Qui sera sur le marché de l’art.

    Podcat avec quelques généralités sur le sujet.

    Le marché de l’art expliqué simplement | Le Collectionneur Moderne
    https://lecollectionneurmoderne.com/guide/le-marche-de-lart-explique-simplement/#1/7

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    Le marché de l’art contemporain 2017
    https://fr.artprice.com/artprice-reports/le-marche-de-lart-contemporain-2017/vers-la-parite-du-marche-de-lart

    La valeur d’une signature serait-elle une histoire de sexe ? Avec 14% de femmes dans le Top 500, le marché contemporain reste dominé par les hommes. La proportion atteint cependant 31% pour la génération des artistes nés après 1980. Si la féminisation du marché de l’art est en cours, le déséquilibre est toujours prégnant.

    –----
    Thierry Ehrmann
    https://www.challenges.fr/finance-et-marche/marche-de-l-art-contemporain-le-constat-accablant-de-thierry-ehrmann-pour

    –----
    Conférence Patron de Sothby’s et Fabrice Hybert -
    #know_your_ennemy
    https://www.franceculture.fr/conferences/audencia-nantes/conference-disegoria-marche-de-lart-mutations-mondiales-et-enjeux-pour

    L’enregistrement est pourris. Inaudible
    –----

    Fiac : art du marché ou marché de l’art ? ( ca commence à 1h09)
    https://www.franceculture.fr/emissions/les-matins/fiac-art-du-marche-ou-marche-de-lart


    Un des intervenants (tous masculins) dit qu’il est à la Fiac car : « il voulait se confronté à des confrères qui étaient plus fort que lui ». Je relève pour la coté mâle-alphiste ; force et confrontation. Les consœurs sont hors concours.

    ___
    Artistes à l’oeuvre (3/4) LSD
    Au marché de l’art vivant !
    https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/artistes-a-loeuvre-34-au-marche-de-lart-vivant


    Il est question de « Jim Crow » de Basquiat


    • L’Art est en danger, éd. Allia, 2012, 9€
      http://www.editions-allia.com/fr/livre/573/l-art-est-en-danger

      Voilà donc quelque septante-cinq pages de liberté d’esprit, de révolte politique, d’exigence éthique et esthétique. Un antidote en façon d’antidoxe. A 87 ans de distance, ces artistes qui habitaient l’Histoire exhortent encore à refuser de tenir pour sain l’air intellectuel du temps, vicié, pollué, immonde. Ils exhortent à refuser cette résignation qui, comme un trottoir roulant vers l’abattoir, emmène des peuples anesthésiés vers le pire – ce à quoi conspirent aussi les imbécillités qui s’entassent en nombre dans les musées et galeries. Car, avançaient alors les auteurs, il s’agit d’« exercer une influence essentielle sur les événements ainsi que l’avaient fait en leur temps les encyclopédistes ». Face à l’urgence de l’Histoire, ils nous enseignent enfin qu’il y a plus important que ce narcissique culte romantique dans quoi est vautré l’art depuis maintenant bien trop longtemps : « Le culte de l’individualité et de la personnalité qu’on entretient autour des peintres et des poètes et qu’eux-mêmes, chacun selon ses dispositions , amplifient à la manière des charlatans, est l’affaire du marché de l’art ».
      A l’aune des fascinantes et terribles années 20, ces essais invitent bien malgré eux à prendre le pouls de l’époque présente. Et à choisir son camp.

      http://toutelaculture.com/livres/reedition-pamphlets-grosz-avant-gardes

      #Günther_Anders #George_Grosz #John_Heartfield
      #Wieland_Herzfelde #pamphlets #marché_de_l'art

    • Agora des Savoirs - Nathalie Heinich - L’art contemporain : une révolution artistique ?
      https://www.youtube.com/watch?v=xhclwyYYbtY


      Celle là est tres interessante. Elle donne une vision assez globale et synthétique du problème.
      Je relève à la fin lors des questions une division très genrée des prises de paroles. Les hommes pour la plus part (2 sur 3) s’autocongratulent et ne posent pas de question mais exposent leurs conception sans aucune recherche de dialogue.

      Sinon pour la conf. Elle distingue 3 paradigmes dans l’art actuel
      – Art classique (celleux qui sont des artisan·nes, ont un savoir faire. Une posture défendu souvent sur @seenthis. Art plutot narratif - travail d’atelier avec transmission d’un savoir faire type Artemisa, Viglé-Lebrun)
      – Art moderne ( les mouvements d’avant-garde, l’artiste comme singularité romantique type Camille Claudel, Frida Khalo - représenter le monde hors de l’académie - caractérisé par des pièces uniques)
      – Art contemporain ( orienté sur le marché et le discours - minimalisme, conceptuel. pièces multiples propices à la spéculation - axé sur les questions de ce qui fait l’oeuvre et sa valeur - type Sophie Calle, Cindy Sherman - on retrouve des ateliers mais sans que l’artiste intervienne et sans transmission de savoir faire)

      Elle parle d’un déplacement des pôles dans les 4 cercles de reconnaissances de l’art.
      Pour l’art moderne =
      1 - reconnaissance des autres artistes
      2 - reconnaissance critique
      3 - reconnaissance du marché
      4 - reconnaissance du grand public (en général plus long, environ 50 à 100 ans de retard sur les artistes et critiques comme c’est le cas pour les impressionnistes, cubistes... )

      Dans l’art contemporain la reconnaissance du marché est passé devant celle des critiques.
      1 - reconnaissance des autres artistes
      2 - reconnaissance du marché
      3 - reconnaissance critique
      4 - reconnaissance du grand public

      L’art contemporain à du succès avec les enfants et le grand public car le manque de culture est propice a son appréciation. L’art classique demande au contraire beaucoup de culture et il est d’ailleurs souvent rébarbatif pour les enfants et l’art moderne est entre les deux.

    • Quel sera le Lascaux, le Chauvet émergeant de notre temps ? Quelle sera même la trace que laissera notre civilisation dans quelques millénaires ? Rien, nada, que dalle…

      S’il est vrai que la plus grande preuve de civilisation réside dans les monuments qu’une société produit et dans leur pérennité, nos descendants n’auront pas grande opinion de nous. Nous ressemblons à des gens qui ont perdu tout désir d’inspirer les autres parce que nous n’avons rien d’inspirant.

      Lors de l’effondrement du viaduc Morandi à Gènes, les étranges lucarnes se sont fait l’écho de cette triste réalité en montrant en parallèle au pont effondré notre Pont du Gard, conçu lui aussi par les Italiens de l’époque mais qui, vingt siècles plus tard étonne et enchante toujours tous ceux qui le voient. Les réalisations de béton correspondent à notre siècle du « jetable ». Cette matière, si elle permet la réalisation de bâtiments gigantesques et parfois esthétiques, comme le viaduc de Millau, se dégrade très vite et sa pérennité n’atteint pas le siècle. Il ne restera donc rien de nos réalisations. Rien, nada, que dalle…

      Nos Praxitèle et Michel-Ange d’aujourd’hui s’appellent Christo, « l’artiste » qui emballe les monuments ou Jeff Koons, « l’artiste » qui réalise d’énormes estrons qu’il prétend vendre à la mairie de Paris (entre autres pigeons) à des prix astronomiques… Les « artistes » contemporains ont renoncé à toute ambition vers le beau, vers le vrai, vers le sublime pour se contenter de dire à leur public : « Vous voyez, je patauge dans la même merde que vous… ». Que restera-t-il de « l’art contemporain » dans deux millénaires, que dis-je, dans un siècle ? Rien, nada, que dalle…

      Le XXe siècle témoigna assurément d’une évolution des ambitions artistiques et des attentes du public. Cela se vit à la façon dont le rapport à l’art changea, le spectateur passant de l’admiration (« J’aimerais pouvoir en faire autant ! ») au dédain assumé (« Un enfant en ferait autant ! ») voire au mépris (« J’en voudrais pas, même dans mes chiottes »). L’ambition technique diminua de manière significative, puis finit par complètement disparaître. L’ambition morale suivit la même trajectoire. On pourrait en rendre Marcel Duchamp et sa sculpture Fontaine (un pissoir) responsables. Mais le fait que la sphère artistique européenne l’ait en grande partie suivi laisse penser que Duchamp, en réalité, n’avait fait qu’ouvrir une voie que d’aucuns souhaitaient depuis longtemps emprunter. Finalement, on n’a que l’Art que l’on mérite.

      Mais cet « Art » merdique du parasitisme et de la roublardise, s’il ne produit aucune richesse artistique, génère par contre beaucoup de valeur financière ! N’est-ce pas Pinault ? N’est-ce pas Arnault ?

      François Pinault, ce marchand de bois breton a fait fortune de manière pas toujours claire. Ainsi il a eu affaire à la justice pour avoir triché sur les dimensions des planches qu’il vendait ! Il connaît aussi les affres des redressements fiscaux et les douceurs des paradis fiscaux. Puis il se spécialise, comme Tapie, dans le « sauvetage »-pillage des entreprises en difficultés. On l’appelle le « dépouilleur d’épaves ». Puis il grenouille en politique d’abord dans le sillage de Giscard mais aussi Le Chevalier qui sera maire Front national de Toulon. Il continue autour de Chirac, Madelin, Aillagon. Puis Sarko et même Hollande. C’est bon pour les affaires tout çà ! Surtout avec des milliards d’argent public… (lien)

      Dès lors plus rien ne lui résiste. Il rachète Le Printemps, La Redoute, la FNAC, le magazine Le Point, etc. Puis il se lance dans le luxe. Avec talent et succès il faut bien le reconnaître. Il possède avec Kering – un nom bien de chez nous - les marques Gucci, Yves Saint-Laurent, Boucheron, Bottega Veneta, Alexander McQueen.

      On ne s’enrichit pas ainsi sans démêlés fiscaux. Il profite de l’achat du Point pour ne pas payer l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) grâce à un artifice comptable. Il a aussi utilisé des sociétés écrans situées dans un paradis fiscal des Antilles néerlandaises pour cacher un quart de sa fortune pendant une vingtaine d’années, évitant ainsi d’être assujetti à l’impôt sur le revenu jusqu’en 1997 !

      Le marchand de bois s’intéresse aussi à l’art ! Pourquoi pas. C’est un riche collectionneur d’art contemporain qui possède une collection estimée à 1,4 milliard de dollars. Il a pris goût à "l’art" moderne et contemporain à la fin des années 1980. Il constitue dans les années 1990 une importante collection privée d’art contemporain en France. En 1998, il réalise l’acquisition de la maison britannique de ventes aux enchères Christie’s pour 1,2 milliard d’euros (lien).

      Dès lors, Pinault fait ou défait les « artistes ». Si le proprio de Christie’s achète une « œuvre » d’un de ces charlots, sa côte monte, enrichissant d’autant celui qui a eu le nez de l’acheter. Pinault est ainsi en position de manipuler le marché de « l’art » contemporain. Et de s’en mettre plein les fouilles. Le marché se fout de la qualité d’une œuvre, ce qui compte c’est sa côte et le bénéfice qu’on peut en attendre. C’est la loi de l’offre et de la demande. Ainsi des merdes entourées de papier doré se vendent des fortunes, ont une valeur, mais reste cependant, au niveau de la richesse artistique des merdes !

      Parvenu à ce niveau, il lui faut évidemment une Fondation ! C’est bon ça Coco les fondations. Ça soutient les maisons mais ça permet aussi et surtout de planquer du pognon à l’abri du fisc (merci Fabius !). Et de se donner des airs de mécène généreux, de protecteur éclairé des arts, de bienfaiteur de la culture, de soutien des artistes. D’autant plus que le pognon mis par les pleins de thunes comme Pinault ou Arnault, c’est à 60 % le nôtre puisque les fondations sont exonérées d’impôts dans cette proportion. Ça vous intéresse ? Des officines s’occupent de tout pour vous (lien). Ainsi quand un « mécène » crée un bâtiment à sa gloire (François Pinault investira la Bourse du Commerce à Paris en 2019) près des deux-tiers de la dépense viennent de l’exonération d’impôts… que l’État doit bien aller chercher ailleurs, c’est-à-dire dans nos poches ! C’est le cas de la Fondation Louis Vuitton – du compère ennemi Bernard Arnault – au bois de Boulogne. C’est le cas de toutes les fondations. Les pleins de thunes lancent des « artistes » bidons, spéculent sur des « œuvres » nullissimes et travaillent ainsi pour leur « gloire » avec notre fric.

      Ça pourrait s’appeler de l’escroquerie, non ?

      https://blogs.mediapart.fr/victorayoli/blog/030918/l-art-contemporain-une-escroquerie-qui-nous-coute-cher

      –-------

      Qu’est-ce que le talent ? Éléments de physique sociale des différences et des inégalités - Pr Menger

      http://www.college-de-france.fr/site/pierre-michel-menger/course-2017-01-20-10h00.htm

      #talent

      –-------
      La création, à quel prix ? avec Pierre-Michel Menger
      https://www.youtube.com/watch?v=hwpTnIV56DM

    • Un marchand grandeur nature (140x220) merci @mad_meg pour ce grand tableau que j’aimerai bien admirer grandeur nature. Pour l’instant ton site et l’effet loupe pallie à ma frustration. J’ai découvert ici-même avec un billet de @arno les dessins de Nina Bunjevac.
      https://seenthis.net/messages/773075
      Elle utilise la même technique que la tienne (hachures, pointillé, noir/blanc, lumière...) superbe aussi. Du coup, j’ai acheté Bezimena les yeux fermés pour les écarquiller devant tant de beauté.
      Encore #merci.


      http://ninabunjevac.com
      http://www.icimeme-editions.com/categorie-produit/nina-bunjevac

    • j’étais un peu dérouté par son histoire aussi. Quelques réponses dans l’épilogue :

      Nina Bunjevac dédie ce livre à toutes les victimes oubliées
      et anonymes qui ont subi des abus sexuels.
      Puissiez-vous trouver la paix, puissiez-vous trouver la lumière, et dissiper les ténèbres qui vous enveloppent.

      un livre à la beauté vénéneuse.

    • L’épilogue est à mon avis le pire du bouquin. Ayant subit des violences sexuelles et non des ABUS, sa dédicace je la prend pas. C’est pas un livre à la beauté vénéneuse, c’est un étalage de culture du viol, avec inversion des responsabilités agresseur-victimes, point de vue sexualisé de l’agresseur sur les viols et les meurtres de petites filles et tout ca en plus très stéréotypé, convenu, prévisible avec une dose de mysticisme abscons que j’aime pas non plus. C’est très bien dessiné, il y a beaucoup de travail, mais voire toute cette délicatesse au service des fantasmes des violeurs pédocriminels je suis pas fana. En faisant des recherches sur ce livre après l’avoir lu et passé 2 ou 3 nuits de remontées traumatiques, j’ai vu que la BD était la plus part du temps vendu aux rayons érotique des librairies...

    • Je n’ai pas vraiment acheté ce livre les yeux fermés @mad_meg Disons que d’un œil, avant, j’ai regardé sur son site pour voir de quoi ça retournait. Il n’était pas dans les rayons de la librairie où je le cherchais, nulle part, pas même au rayon érotique. Tout juste si le vendeur connaissait les éditions ici-même et encore moins Nina Bunjevac . Il a fini par me le commander et quand je suis retourné le chercher, il était encore sous cellophane. Sans ça, peut-être que je me serai contenté de le lire directement dans la librairie.
      J’ai commencé à le feuilleter à une terrasse de bistrot, surpris par le graphisme de Nina Bunjevac et la mise en page d’ici-même. J’ai lu l’épilogue avant de lire complètement ce conte noir pour adultes. Pour ce qui est du côté mystique, abscons où pas, je n’ai pas les yeux fermés mais carrément des œillères. Sans l’épilogue, la narration de son histoire est plutôt solide, son livre ne serait qu’un conte illustré de plus. Un conte très noir et lourd de sens pour son auteure qui dit aussi :

      Rétrospectivement, je me dis que mon départ au Canada m’offrit une évasion commode. Si j’avais parlé de cet épisode à d’autres camarades, si je n’avais pas si facilement abandonné l’idée de dénoncer Kristijan et Snezana dès le début, il n’y aurait pas eu autant de victimes. Pour cela, je ne me pardonnerai jamais, et je vivrai avec ce poids pour le restant de mes jours.

      En lien, cet article d’Emilien Bernard publié dans CQFD en2017
      http://cqfd-journal.org/Visegrad-La-ville-qui-a-coupe-le#nh4

      Maintenant que j’ai acheté Bezimena je pourrai le relire, le prêter ou l’offrir. Par contre je n’ai vu qu’une seule fois le film de Jasmila Žbanić - Femmes de Višegrad ou certains vivent encore très bien
      du sang de tous leur crimes.

      Assez d’horreur pour aujourd’hui et je ne vais pas trop m’attarder sur seenthis ou il y a beaucoup d’actualité tout aussi horrifiques les unes que les autres.

  • Black Blocs : de Macron au capitalisme, les raisons de la colère
    Christian Losson , Willy Le Devin et Laure Bretton, Libération, le 2 mai 2018
    http://www.liberation.fr/france/2018/05/02/black-blocs-de-macron-au-capitalisme-les-raisons-de-la-colere_1647382

    « Qui nous sommes est moins important que ce que nous voulons. Et nous voulons tout, pour tout le monde » : c’est l’un des slogans les plus connus des actions Black Bloc. Apparues dans les années 80 en Allemagne, ces opérations ont connu leur apogée médiatique lors des grands sommets internationaux des années 2000. En France, ce sont les manifestations contre la loi travail en 2016 qui leur ont offert une nouvelle vitrine.

    Quel mot d’ordre a été passé avant la manifestation de mardi ?

    C’est essentiellement sur les réseaux sociaux ou des forums identifiés que les consignes de formation du Black Bloc de mardi ont été diffusées. Cinquante ans après Mai 68, à l’heure où les mouvements sociaux se multiplient en France, certains collectifs comme Génération ingouvernable, né début 2017 pour contester la présidentielle, entendaient faire de cette fête des travailleurs un « 1er Mai révolutionnaire », voire une « journée en enfer ». L’appel relayé sur Facebook expliquait que « manifester entre Bastille et République a[vait] largement montré ses limites ». Par conséquent, « nous devons nous attaquer directement à ceux qui sont responsables de notre situation. Ils sont au nombre de trois : les partis politiques, les banques, les multinationales. […] Vous devez réaliser des opérations coup-de-poing par petits groupes de 3 ou 4 personnes maximum », pouvait-on lire dans le texte.

    Début avril, un autre texte publié sur Lespaves.net et traduit en huit langues incitait les militants, français ou étrangers, à « converger » vers Paris à l’approche de ce mai anniversaire. Le texte dénonçait « un monde plus malade qu’il ne l’a jamais été », rongé par l’ubérisation, le capitalisme vert, les migrants fuyant les guerres ou les destructions climatiques, les écosystèmes détruits. « Ils commémorent, on recommence » résonnait comme le mot d’ordre général.

    Citant tour à tour l’expulsion de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, les opérations policières contre les facs occupées depuis le début du printemps, les comités de soutien aux migrants, la grève à la SNCF, un communiqué appelait à « transformer ces différents foyers de révolte en une seule vague insurrectionnelle pour faire chuter ce régime détestable ». « C’est un mélange de colère contre Emmanuel Macron et la crise de la politique, et une logique de longue durée contre le capitalisme et le néolibéralisme », analyse le chercheur en science politique canadien Francis Dupuis-Déri, auteur du livre les Black Blocs : quand la liberté et l’égalité se manifestent.

    A quand remonte la première action Black Bloc ?

    Probablement à des actions d’autonomes allemands au début des années 80, quand Berlin-Ouest lance une offensive contre les squats et que s’y oppose un Schwarzer Block. On retrouve ces Autonomen un an plus tard, quand ils se mobilisent contre les néonazis ou le nucléaire. Un tribunal de Francfort veut alors faire condamner des manifestants « membres de l’organisation terroriste Black Bloc ». C’est encore eux qui prennent la rue en 1986 à Hambourg pour lutter contre la traque des squats. Ou leurs camarades qui dénoncent la guerre du Golfe en 1991 à Washington ou ailleurs.

    Ils explosent médiatiquement lors du sommet de l’OMC à Seattle, en 1999, où se multiplient les zones autonomes temporaires. Au sommet du FMI à Prague en 2000, ils seront près de 3 000 activistes, et à Gênes, l’année suivante, la répression policière fait un mort, un jeune altermondialiste, Carlo Giuliani, abattu d’une balle dans la tête. Tous les sommets internationaux des années 2000 sont marqués par une montée en puissance de la violence. On les retrouve ensuite lors du « printemps érable » à Montréal en 2012, lors du printemps arabe en Egypte en 2013, et même au Brésil contre la corruption. Si les actions se concentrent toujours contre les sommets diplomatiques, la focale s’est rapprochée ces dernières années des mouvements sociaux. En France, les Black Blocs ont pris leurs marques dans les ZAD, à Sivens ou à Notre-Dame-Des-Landes, et noyauté les manifestations de soutien à Nantes et à Rennes en 2014. Et la loi travail en 2016 a fait naître une nouvelle génération de Black Blocs français.

    Ce 1er Mai français était-il différent des autres mobilisations des Black Blocs ?

    Les modes opératoires - une apparition massive et instantanée, des tenues noires, des foulards, des bombes incendiaires - et les cibles de ces militants - les symboles de la « pourriture capitaliste » - n’ont pas changé. Les chercheurs s’accordent cependant sur une nouveauté bien française avec la pratique du « cortège de tête » dans les manifestations depuis la mobilisation contre la loi travail. Au prix d’altercations musclées avec les services d’ordre des syndicats, certains manifestants radicaux ont en effet réussi à se placer à l’avant des manifestations sociales depuis deux ans.

    Mardi à Paris, selon la préfecture de police, il y avait trois mouvements : le cortège des partis et syndicats traditionnels (20 000 personnes), un « cortège de tête » (14 500 militants) et 1 200 militants radicaux. « Réussir à se positionner en tête et avec une telle densité, c’est du jamais vu », estime Francis Dupuis-Déri. Selon le professeur à l’Université du Québec à Montréal (UQAM), « cette pratique du cortège de tête où se mêlent des militants radicaux non cagoulés avec des Black Blocs offre à ces derniers des marges de manœuvre tactique face aux forces de l’ordre ». Plus que de la tolérance, c’est donc un appui qui s’exprime désormais physiquement. « Ce mode opératoire rend les Black Blocs encore plus visibles, abonde Hugo Melchior, doctorant en histoire contemporaine à Rennes-II et spécialiste des mouvements de jeunesse révolutionnaires. Mardi, les Black Blocs étaient enchâssés dans le cortège de tête, qui leur fournissait une protection, une clôture face aux forces de l’ordre. »

    Existe-t-il une idéologie Black Bloc ?

    Renvoyer les Black Blocs à des casseurs sans vergogne ou des voyous sans idéaux est systématique. Ils sont condamnés par les responsables politiques, la plupart des syndicalistes et des médias, et bien des intellectuels de droite comme de gauche. S’ils rejettent toute forme de catégorisation, les participants à ces actions instantanées sont au contraire très politisés. Libertaires, anars, autonomes… le mouvement est loin d’être homogène mais recrute uniquement dans les rangs de l’extrême gauche. « Ils sont tous radicalement antifascistes », précise Francis Dupuis-Déri. Ainsi, certains militants écologistes, queer ou LGBT ont parfois recours à ce type d’action, par envie de dénoncer l’ineptie et la brutalité du système. L’idée est de s’opposer au monopole de la violence « légitime » de l’Etat. « Leur dénominateur commun, c’est la critique radicale de l’ordre établi, de la société capitaliste et consumériste et leur volonté de la subvertir, explique le chercheur Hugo Melchior, ancien militant de la LCR. Parmi les Black Blocs présents mardi, nombreux sont ceux qui défendent le principe de créer une, deux, trois nouvelles ZAD, c’est-à-dire autant de zones libérées du règne de la marchandise. Ils ne croient plus au mythe de la grève générale, qui leur semble hors de portée avec la fragmentation accélérée du salariat. »

    Ce qui les rassemble aussi, c’est d’être hors système, hors partis, hors conformisme, mais agoraphiles, égalitaristes, horizontaux, utopistes. Il y a l’idée de mener une « guérilla imprévisible », une « contre-attaque aux oppressions » contre l’Etat et ses relais, contre la guerre économique qui « fabrique de l’hyperpauvreté », contre les « autoritarismes ».

    Il n’y a évidemment pas de théoricien ou de gourou qui ait inspiré le Black Bloc, mais des influences multiples, piochées ici ou là. Comme Hakim Bey, auteur de TAZ : zone autonome temporaire, anarchie ontologique, terrorisme poétique, paru en 1991. Ou encore le Communiqué au sujet des tactiques et de l’organisation, un manuel de combat publié quelque part dans le Midwest américain en 2001. Selon le chercheur canadien Francis Dupuis-Déri, cet ouvrage est au Black Bloc ce que sont l’Art de la guerre de Sun Tzu et De la guerre de Carl von Clausewitz à toute armée conventionnelle.

  • Mélenchon mise sur la gauche radicale italienne
    https://www.mediapart.fr/journal/international/030318/melenchon-mise-sur-la-gauche-radicale-italienne

    Distribution de tracts d’une militante de #Potere_al_Popolo !, à Gênes en février 2018. © Amélie Poinssot. Potere al Popolo ! est une coalition de #mouvements_sociaux et de petits partis de gauche née de la mobilisation d’un centre social à Naples. Elle devrait réaliser un score confidentiel aux législatives, ce dimanche 4 mars. Mais elle a pu compter sur un soutien de poids pendant sa campagne : Jean-Luc Mélenchon. Explications.

    #International #insoumis #Italie #Jena-Luc_Mélenchon #Libres_et_égaux

  • Aux législatives italiennes, Mélenchon mise sur la gauche radicale
    https://www.mediapart.fr/journal/international/030318/aux-legislatives-italiennes-melenchon-mise-sur-la-gauche-radicale

    Distribution de tracts d’une militante de #Potere_al_Popolo !, à Gênes en février 2018. © Amélie Poinssot. Potere al Popolo ! est une coalition de #mouvements_sociaux et de petits partis de gauche née de la mobilisation d’un centre social à Naples. Elle devrait réaliser un score confidentiel aux législatives, ce dimanche 4 mars. Mais elle a pu compter sur un soutien de poids pendant sa campagne : Jean-Luc Mélenchon. Explications.

    #International #insoumis #Italie #Jena-Luc_Mélenchon #Libres_et_égaux

  • A #Gênes, pour comprendre l’affaissement du Parti démocrate
    https://www.mediapart.fr/journal/international/250218/genes-pour-comprendre-laffaissement-du-parti-democrate

    À Gênes, ultradroite et néofascistes tentent de faire une percée sur fond d’abstention grandissante. Mais les collectifs citoyens se ressaisissent. Une semaine avant les #élections_législatives italiennes, reportage dans une ville considérée par beaucoup comme un laboratoire politique. Distribution de tracts à la sortie de l’usine de Ficantieri, dans les quartiers ouest © AP

    #International #Forza_Italia #immigration #Italie #Liberi_e_Uguali #Ligue_du_Nord #Ligurie #M5S #PD #Potere_al_Popolo

  • Une aventure navale qui coûte cher

    La #Suisse n’est pas au bord de la mer, elle ne possède ni grands ports, ni marine. Elle est cependant une nation maritime et souhaite le rester, au moins pour quelques années encore.

    http://www.revue.ch/fr/editions/2017/05/detail/news/detail/News/une-aventure-navale-qui-coute-cher
    #flotte_navale #flotte_hauturière #Hansjürg_Grunder #armateurs #marine_marchande #Swiss-Cargo-Line #SCL_Bern
    cc @simplicissimus @reka

    • Traduit un peu vite…

      2008 a aussi mis en difficulté pas mal d’autres armateurs, notamment allemands.

      (remarque perso : à un moment de sa carrière, au début des années 1980, mon père avait regardé les éventuelles possibilités d’emploi dans la marine suisse, je crois qu’il avait été question d’un poste à Gênes)

  • Un document signé Jacques Foccart établit la pratique des assassinats ciblés de l’Etat français

    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2017/09/05/enquete-sur-un-permis-de-tuer-signe-jacques-foccart_5181120_1653578.html

    Un document extrait des archives du conseiller du général de Gaulle montre comment, pendant la guerre d’Algérie, un ingénieur allemand s’est retrouvé dans la mire des services extérieurs.

    Au cœur de l’été 1958, dans le plus grand secret d’un pouvoir gaulliste tout juste sorti de sa traversée du désert grâce au putsch d’Alger du 13 mai, la France n’entend négliger aucun moyen, même les plus illégaux, pour mener une guerre qui va encore durer quatre ans. Si certaines forces françaises ont recours à la torture sur le sol algérien, le dernier gouvernement de la IVe République, dirigé par le général de Gaulle, ordonne, de son côté, des opérations clandestines dans le reste du monde contre ceux qui menacent ses intérêts en Algérie. Assassinats ciblés, attentats, avertissements sous forme d’agressions, ces pratiques sont monnaie courante – « des centaines », dira Constantin Melnik, coordinateur des services de renseignement de 1959 à 1962.

    Considérant agir en toute légitimité même s’il est en totale infraction avec le droit international ou domestique, l’Etat français, que ce soit en 1958 ou en 2015, sous la présidence de François Hollande, s’est toujours réservé cette liberté, marquant ainsi les limites du contrôle de l’usage de la force, y compris dans les plus grandes démocraties. Levant un tabou, M. Hollande l’a même confirmé, oralement, dans plusieurs ouvrages, fin 2016. Mais il n’existait aucune trace écrite de ces décisions, du moins jusqu’à la découverte d’un document unique dans le fonds d’archives de Jacques Foccart, l’homme des services secrets et des basses œuvres du gaullisme, également connu comme le père de la Françafrique.

    Daté du 1er août 1958 et annoté de la main de Foccart, ce document non seulement livre les détails d’une condamnation à mort « d’un sujet allemand, (…) dont l’action est très néfaste aux intérêts français en Algérie », mais donne également les identités de la cible et de tous ceux ayant concouru au feu vert donné à son élimination physique. La lecture de cette pièce offre, enfin, une connaissance du processus d’autorisation qui fait intervenir les plus hautes autorités du pays et pose, même soixante ans plus tard, la question de la responsabilité d’un Etat.

    « Le traiter discrètement par toxique indétectable »

    Le Monde a reconstitué l’histoire de cet homme et les raisons qui ont conduit la France à vouloir le tuer. Cette plongée permet de découvrir un épisode méconnu de la guerre d’Algérie : l’action d’un réseau germanophone de soutien au FLN, qui a organisé la désertion de plus de 4 000 légionnaires, via Tétouan, au Maroc. Elle lève aussi le voile sur une guerre secrète qui a opposé la France et l’Allemagne de l’Ouest (la RFA), sur fond de fin de l’empire colonial français, alors qu’au grand jour ces deux pays unissaient leurs voix pour bâtir une Europe pacifique après deux conflits mondiaux meurtriers.

    Intitulée « Fiche relative à la désignation d’un objectif », la note est directement adressée par le service action du Sdece (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage) à Jacques Foccart, qui est, à Matignon, conseiller technique du général de Gaulle – président du conseil pendant six mois avant de faire entrer la France dans la Ve République et de s’installer à l’Elysée. « Schulz-Lesum, sujet allemand, résidant à Tétouan, dit la note, est le chef d’une organisation de désertion de légionnaires français. (…) A la suite d’une mission de reconnaissance, un contact commercial a été établi avec Schulz-Lesum. Ce contact entretenu par correspondance doit nous permettre d’attirer l’objectif dans un lieu favorable au Maroc et de le traiter discrètement par toxique indétectable et à effet différé. »

    La « fiche relative à la désignation d’un objectif », annotée de la main de Jacques Foccart, qui commandite l’élimination de l’ingénieur allemand Wilhelm Schulz-Lesum. DR
    « Reçu le 3 août 1958, ai donné accord de principe », écrit, dans un premier temps, Jacques Foccart. Dans un second temps, de la même encre bleue, il ajoute, « accord de l’amiral Cabanier le 4 août, transmis aussitôt au colonel Roussillat », avant d’apposer son paraphe, identifiable sur de nombreux autres documents officiels. On relève que le ministre de la défense n’apparaît pas dans le circuit de décision. Le document mentionne que c’est le chef d’état-major général de l’armée, Paul Ely, qui a demandé cette élimination au Sdece. L’amiral Cabanier n’est autre que le chef d’état-major de la défense nationale attaché au général de Gaulle à la présidence du conseil. Le colonel Robert Roussillat est alors le chef du service action du Sdece, chargé de mettre en œuvre cette décision.

    Désertions de légionnaires

    Selon l’historien autrichien Fritz Keller, qui est l’un des rares à mentionner son nom dans ses travaux sur les réseaux d’aide au FLN, la cible, Wilhelm Schulz-Lesum, est née en 1896. D’après le Sdece, il serait alors « à Tétouan, depuis de nombreuses années ». Ingénieur de formation et officiellement responsable d’une société d’import-export, il agit, en réalité, pour le compte des autorités ouest-allemandes. Ses contacts avec la diplomatie de Bonn au Maroc et en Espagne sont avérés et fréquents.

    Son rôle est au cœur d’un rapport transmis, le 31 octobre 1957, par le chef des Renseignements généraux (RG) à Oran au général Salan, commandant la 10e région militaire. Largement nourrie par les informations des RG de Sidi Bel Abbès, où est implanté le quartier général de la Légion, cette enquête est adressée, en copie, au chef du Sdece. « Il s’avère que l’officine mise sur pied en vue de favoriser la désertion des légionnaires allemands existe effectivement. Elle a pour responsable un certain Schulz-Lesum, non identifié, ingénieur à Tétouan, représentant de l’ambassade allemande de Madrid, titulaire de nombreuses décorations honorifiques de la République fédérale de Bonn », y est-il précisé.

    En 1957, les Français assurent que le dénommé Schulz-Lesum est chargé de réceptionner les légionnaires déserteurs à Tétouan et de les diriger sur Madrid via Ceuta et Algésiras. Pour ce faire, il leur fournit des titres de transport et une attestation d’identité contre l’engagement de rembourser la totalité des frais de rapatriement. « Il ressort que des contacts auraient été décelés entre légionnaires allemands et émissaires du FLN à Saïda [Algérie]. Ces contacts seraient pris dans cette ville à l’intérieur du Café des Sports », poursuit le rapport des RG de Sidi Bel Abbès.

    « Révolutionnaire au prestige extraordinaire »

    Le service de rapatriement des légionnaires déserteurs a été créé en octobre 1956 par le Conseil national pour la révolution algérienne (CNRA), et son installation à Tétouan a été confiée à Abdelhafid Boussouf, alias « Si Mabrouk », ex-chef de la wilaya (circonscription administrative) V, perçu par le Sdece comme un « révolutionnaire au prestige extraordinaire, plus proche des combattants du maquis que de l’aile bourgeoise du Front ». En 1953-1954, la Légion comprend 55 % d’Allemands, chiffre qui descend à 35 % entre 1956 et 1962, selon l’historienne Mathilde von Bulow, auteure d’un ouvrage sur l’Allemagne de l’Ouest au temps de la guerre froide et de la guerre d’Algérie. Un bon tiers a moins de 21 ans, et beaucoup ont même moins de 18 ans.

    Le but, pour le FLN, est de structurer un phénomène de désertions croissant. Le 23 août 1955, le général Lorillot, prédécesseur de Salan au commandement de la 10e région militaire, écrit ainsi au ministre de la défense pour lui faire part de « l’augmentation sensible des désertions dans les unités de la Légion étrangère ». Mais il se veut alors rassurant. Cela ne serait dû, selon lui, qu’à « la fin des opérations actives en Indochine », à « la modicité de la solde en Afrique du Nord par rapport aux soldes en Extrême-Orient » et « à la situation de demi-repos (…) propice aux tentatives de fugue ». Néanmoins, il estime nécessaire de « suivre de très près les questions de sécurité interne ».

    L’inquiétude s’accroît pourtant vite. Le 22 octobre 1956, l’interception de l’avion transportant cinq chefs du FLN permet aux Français de trouver sur l’un des leaders, Mohamed Boudiaf, un extrait d’interrogatoire réalisé par les autorités espagnoles d’un légionnaire allemand déserteur âgé de 23 ans, Ludwig Trapp. On peut y lire des informations précieuses sur l’organisation et la sécurité interne de la Légion, ses lieux d’implantation en Algérie. Le 14 décembre 1956, le ministre résident en Algérie assure au secrétaire d’Etat aux affaires étrangères que « les ingérences espagnoles dans la rébellion en Afrique du Nord sont indéniables ».

    Réseaux de solidarité

    Le même 14 décembre 1956, le légionnaire Manfried Kober, de la 5e compagnie du 1er régiment étranger d’infanterie, rejoint ainsi dans le maquis une unité du FLN avec vingt camarades, avec armes et équipements. Ils sont pris en charge pendant vingt et un jours, avant d’être acheminés vers le Sud marocain, en territoire espagnol. Par bateau, ils font ensuite le trajet Ifni-Tétouan. Schulz-Lesum leur fait gagner Tanger, puis Madrid par avion. Kober est accueilli par le consul d’Allemagne dans la capitale espagnole, qui lui remet une somme d’argent, un passeport et un billet d’avion.

    A Berlin, Kober est reçu par un pilier de cette filière de rapatriement, membre du « Nordafrikanischer Club », un certain Lindemann, qui lui demande le remboursement des 600 marks, prix de son retour au pays. L’hebdomadaire Jours de France, en juillet 1957, évoque l’existence de ce réseau allemand, à Berlin. Dirigé par Hans-Peter Rullman, converti à l’islam et membre d’un mouvement pour la réunification de l’Allemagne patronné par la CDU (Union chrétienne démocrate) du chancelier Adenauer, il se livre à l’achat et à la livraison d’armes pour la « résistance algérienne ». Mais son activité principale reste l’organisation de la désertion des légionnaires allemands en Afrique du Nord.

    M. Lindemann, qui prétend avoir 3 200 désertions à son actif, affirme même envoyer des émissaires qui, une fois introduits dans la Légion, endoctrinent des jeunes recrues et les incitent à déserter. De nombreux réseaux de solidarité se montent par ailleurs en Allemagne, dans les milieux étudiants, catholiques, protestants, communistes, trotskistes et syndicaux. Hans-Jürgen Wischnewski, député SPD (Parti social-démocrate), est la figure politique de ce mouvement de soutien. Adenauer, qui ne veut pas laisser la main au parti de l’opposition SPD, laisse faire, persuadé qu’un jour l’Algérie sera indépendante.

    Tétouan, centre de transit

    Le FLN a confié à Abdelkader Chanegriha la coordination de quatre brigades spéciales, chargées du franchissement de la frontière. Deux voies principales d’exfiltration sont empruntées jusqu’à Nador par les déserteurs allemands, vers le sud, puis à l’ouest, suivant l’itinéraire El Aricha, Berguent, Oujda, à pied, puis de Nador à Tétouan, en taxi. Une seconde officine existe à Mascara, le trajet des légionnaires étant alors Dublineau, Tlemcen, Oujda, puis de Nador à Tétouan. « A Nador, ils seraient pris en compte par le gouverneur civil de ce centre puis dirigé sur Tétouan où Schulz-Lesum se chargerait de leur acheminement sur l’Allemagne », conclut le rapport des RG de Sidi Bel Abbès. Le centre de transit de légionnaires déserteurs à Tétouan est établi dans le quartier de Malaga, à une centaine de mètres du cinéma Le Victoria.

    La base de Nador, située au bord de la mer, à l’extrémité est de l’ex-Maroc espagnol, à près de 100 kilomètres de la frontière algéro-marocaine, est le siège de l’état-major rebelle du Comité de libération du Maghreb arabe, mais aussi la plaque tournante du trafic d’armes et du regroupement des Algériens et Marocains partant combattre dans les maquis d’Algérie. « Il existe des ateliers à Nador où des spécialistes (parfois d’anciens légionnaires) fabriquent des grenades et des mines, dit le renseignement militaire. Une usine de fabrication de grenades et de mines se serait récemment montée à Tétouan, à l’embranchement de l’ancienne et de la nouvelle route de Ceuta, sous la direction de deux ingénieurs allemands. »

    Contacté en Algérie par Le Monde, Mohammed Lemkami, ex-membre des renseignements du FLN, se souvient des activités de ces Allemands de Tétouan, notamment de Winfried Müller, devenu officier de l’Armée de libération nationale (ALN) sous le nom de Si Mustapha Müller, dont seul le nom restera dans l’histoire du rapatriement des légionnaires. Son bac en poche en 1954, Lemkami devient instituteur dans son village natal de Khemis, à 45 kilomètres de Tlemcen. Petite main du FLN, il participe peu à peu à des missions de convoyage d’armes à la frontière algéro-marocaine et escorte des chefs de l’ALN avant d’intégrer le ministère de l’armement et des liaisons générales (MALG, le service de renseignement du FLN), créé en 1957 par Boussouf.

    « Ils ont été efficaces »

    « Les contacts avec les légionnaires se faisaient à l’intérieur du pays et ont été initiés par le FLN, se souvient-il. Parfois, en un seul jour, une petite dizaine d’entre eux désertaient, parfois personne. Certains légionnaires venaient avec leurs armes. Ils nous donnaient des informations sur les activités de la Légion, qui était la plus crainte au sein de l’armée française. On leur faisait passer la frontière et on les conduisait dans une ferme à Tétouan. C’est là que le réseau de Si Mustapha Müller prenait le relais pour les rapatrier. Ils ont été efficaces, car il y avait beaucoup d’Allemands et d’Autrichiens dans la Légion. »

    Mohammed Lemkami œuvre alors également au sein du contre-espionnage du MALG. « En 1957, on a intercepté deux hommes du Sdece à la frontière marocaine, se remémore-t-il. Ils se faisaient passer pour des légionnaires déserteurs. S’ils ne répondaient pas à nos questions, ils mourraient, alors ils nous ont donné tout ce qu’ils savaient sur le Sdece au Maroc et en Algérie. Ils nous ont donné les noms des Marocains et des Algériens qui travaillaient pour eux. » Le renseignement est une priorité du FLN. Le Sdece signale, le 29 août 1958, qu’un légionnaire artificier ayant participé à la pose de mines et du réseau électrifié dans la région de Port-Say « aurait déserté et aurait donné tous les plans du réseau ».

    Pour ses activités, Wilhelm Schulz-Lesum est décoré, en 1957, par le président allemand, Theodor Heuss, de la croix fédérale du mérite. Le 2 avril 1958, la présidence autrichienne l’honore également pour son rôle dans le retour de légionnaires autrichiens, qu’il négocie avec l’ambassadeur d’Autriche à Madrid. Dès le 7 février 1957, le Sdece a informé la présidence du Conseil sur « la position autrichienne [qui] risque d’être influencée par l’esprit anti-colonialiste de certains secteurs socialistes. Dans ces conditions, il y a lieu de prévoir soit l’abstention de l’Autriche, soit l’alignement sur l’attitude des Etats-Unis ». Karl Blecha, futur ministre de l’intérieur autrichien, alors président de l’Union des étudiants socialistes, se rend, en 1958, en Afrique du Nord pour rencontrer des membres du FLN.

    Maquiller les opérations

    Reimar Holzinger, un socialiste autrichien né en 1921, qui a rencontré Si Mustapha Müller en 1955, est devenu son alter ego et s’occupe de l’exfiltration des déserteurs autrichiens. Il prend également en charge les Hongrois qui ont intégré la Légion après les événements de 1956 à Budapest. Bruno Kreisky, alors ministre des affaires étrangères autrichien, soutient le gouvernement algérien en exil et le réseau Holzinger. « Quand un Autrichien désertait, le service de rapatriement contactait l’ambassade d’Autriche à Madrid, laquelle se chargeait d’organiser le transfert en bateau de Barcelone à Gênes et de là vers l’Autriche », a rapporté Holzinger à l’historien Fritz Keller.

    C’est dans ce contexte que le service action du Sdece va tenter de mettre en œuvre l’ordre d’éliminer Wilhelm Schulz-Lesum. Pour maquiller ce type d’opération, la France étant déjà critiquée au sein de l’ONU pour sa politique algérienne, le Sdece fait croire qu’un groupe mystérieux appelé La Main rouge opère de manière autonome et mène, seul, des actions contre les soutiens actifs au FLN. Un grand nombre d’opérations étant perpétrées en Allemagne de l’Ouest, il s’agit aussi de ne pas heurter l’allié allemand. Selon un ancien du 11e régiment parachutiste, bras armé du Sdece, l’opération d’approche mentionnée dans la note Foccart auprès de Schulz-Lesum était la spécialité d’un groupe d’agents du Sdece mené par Jean-Pierre Lenoir, expert dans la traque des trafiquants d’armes et très actif en Espagne.

    Le rôle de faux nez joué par La Main rouge n’a guère trompé les autorités allemandes, qui mènent, de leur côté, un double jeu. Dans leur Histoire des services secrets allemands (Nouveau monde, 2009), Michael Mueller et Erich Schmidt-Eenboom indiquent que le BND, l’équivalent allemand du Sdece, disposait d’un bureau au siège des services français, à Paris, et qu’il prêtait main-forte dans la traque aux réseaux de soutien au FLN, y compris sur le sol allemand.

    Quand l’Allemagne équipait le FLN

    Mais, à la fin des années 1950, pour s’attirer les faveurs de pays arabes tout juste sortis du joug colonial, la RFA envoie aussi ses agents du BND former les services de sécurité de la Syrie, du Soudan et de l’Egypte, pays où les renseignements allemands dialoguent avec le FLN et son gouvernement provisoire. La RFA considérait favorablement le rapatriement de légionnaires allemands, estimant que leur présence dans cette force coloniale française était une atteinte à sa souveraineté et à son image. En 1958, un agent expérimenté du BND, Richard Christmann, lui-même ex-légionnaire, se rend d’ailleurs à Sidi Bel Abbès pour rendre compte des activités du réseau.

    Les menaces du Sdece n’ont pas été sans effet. Le BND semble avoir prévenu Wilhelm Schulz-Lesum du danger. Lorsque la sentence mortelle est prononcée à son encontre, le 4 août 1958, dans le secret du bureau de Foccart, l’homme est déjà en partance vers Madrid. Le Sdece relève d’ailleurs, le 4 juin 1958, que les déserteurs sont désormais accueillis, à Tétouan, par un autre Allemand, Otto Berger, également agent consulaire de la République fédérale allemande.

    Tétouan, terre d’espions et point d’observation régional au cœur de l’empire colonial français en train de s’affaiblir, intéresse alors tous les services secrets étrangers. D’après l’historien Kader Benamara, qui a travaillé avec M. Keller sur les réseaux de solidarité autrichiens en faveur du FLN, « Si Mustapha Müller avait été contacté par la CIA pour connaître le rôle du Parti communiste au sein de la rébellion algérienne ». Le FLN était, selon le renseignement militaire français, équipé d’« appareils portatifs de fabrication américaine » fournis par l’Allemagne.

    « Déviance titiste »

    Le même Müller avait déserté, pendant la seconde guerre mondiale, la Wehrmacht pour rejoindre l’Armée rouge, au sein de laquelle il a joué un bref rôle de propagandiste communiste à destination des soldats allemands. Exclu d’une école de cadres communistes, en 1950, pour « déviance titiste », il tente, en vain, d’entrer dans la Légion étrangère, le 2 février 1951, à Landau, en Allemagne, puis débarque à Paris, en 1953, où il devient chef du protocole d’un diplomate sud-américain dont la femme ne saura jamais que sous son lit étaient cachés des lots de grenades destinés aux amis du FLN. Repéré par les services français, il fuit vers le Maroc en 1956, où il noue vite des relations étroites avec les représentants consulaires et diplomatiques de la République fédérale allemande.

    Les Soviétiques, proches alliés du FLN, étaient également présents à Tétouan et n’ont pas perdu le contact avec Müller. Un télégramme du 26 mai 1959 du consulat général de France de Tétouan à son ministère à Paris indique, laconique, qu’un « service commercial russe aurait loué des bureaux par l’intermédiaire de M. Garcia Rivera, vente de produits agricoles ». La tête de Müller est mise à prix 50 000 marks, mais il est moins facile à atteindre que Schulz-Lesum. Il échappe à un explosif caché dans un livre envoyé du Caire qui l’attend à la poste de Tétouan. Quatre gardes du corps le suivent en permanence et des chiens protègent sa maison, à Tétouan, des agents de La Main rouge.

    La vindicte est retombée

    Comme bon nombre d’opérations commandées au Sdece à cette époque, finalement avortées ou abandonnées, celle ayant visé Wilhelm Schulz-Lesum paraît ne pas avoir été menée à son terme. Après des recherches en Algérie, au Maroc, en Allemagne et en Autriche, Le Monde a finalement retrouvé sa trace, en juin 1965, à Madrid, où l’ingénieur de 69 ans a renoué avec ses premiers centres d’intérêt. Il y dépose, le 1er juin 1965, un brevet technique sur un extincteur d’incendie. Il a retrouvé une vie normale. La vindicte française est retombée.

    Trois ans plus tôt, en effet, le 15 septembre 1962, Si Mustapha Müller a annoncé la fin des activités du service de rapatriement de légionnaires déserteurs « eu égard au rétablissement de l’indépendance de l’Algérie et compte tenu de l’accord franco-algérien d’Evian ». Parmi les 4 111 légionnaires déserteurs rapatriés par le réseau figurent 2 783 Allemands, 489 Espagnols, 447 Italiens, 137 Hongrois, 87 Yougoslaves, 41 Belges, 35 Suisses, 31 Autrichiens, 16 scandinaves, 19 Hollandais, 7 Luxembourgeois, 3 Grecs, 9 Britanniques, 2 Américains, 3 Latino-Américains, 1 Coréen et 1 Bulgare.

    Wilhelm Schulz-Lesum redevient l’un des acteurs anonymes d’une aventure collective tombée dans l’oubli, qui fut résumée, en avril 1961, par le journal américain de Francfort The Overseas Weekly sous un titre évocateur : « Le service qui a volé une brigade entière de la Légion étrangère sans tirer un coup de fusil ».

  • http://www.zones-subversives.com/2017/07/sophie-wahnich-et-la-democratie.html

    La gauche intellectuelle et politique apparaît comme un tas de ruines. L’histoire et l’imaginaire universaliste de la Révolution française peuvent lui donner un nouveau souffle. Mais ce sont uniquement les luttes sociales qui permettent de transformer le monde.


    https://www.editions-lignes.com/LE-RADEAU-DEMOCRATIQUE.html
    @vacarme #Zones_subversives #mouvements_sociaux #éditions_lignes

    • La « gauche » en ruine c’est le PS ? Parceque je trouve qu’en ce moment la gauche intellectuelle et politique se porte plutôt mieux qu’il y a quelques années mais c’est probablement une déformation causé par ma fréquentation de seenthis.

      Édit : j’ai fini par lire l’article que je commentais. C’est vraiment dommage que cette historienne fasse une impasse total sur la question des femmes. Je suis aussi un peu gêné par cette affirmation « Mais l’historienne reste pourtant distante d’une gauche autoritaire à la Mélenchon. »
      L’historienne parle de nuit debout comme d’un renouveau, il me semble que c’est chez les Insoumis qu’on retrouve ce mouvement et que Mélanchon a su mettre d’autres que lui en avant lors de la dernière campagne présidentielle et surtout aux législatives.


    • http://tempscritiques.free.fr/spip.php?page=ouvrage&id_ouvrage=10

      La première édition de ce livre date de 1987.(Nautilus)
      Dans une première partie, l’auteur mettait en évidence l’échec de la théorie du prolétariat à saisir les transformations du rapport social et la crise de représentation de ce prolétariat par ses médiations traditionnelles (syndicats, partis, références aux pays du bloc socialiste). Ceci était analysé à l’aune de la défaite du dernier assaut révolutionnaire de notre temps (1968-1978). Dans une seconde partie, il cherchait à mettre en rapport ce contexte et le phénomène de la lutte armée tel qu’il s’est développé, en RFA et en Italie surtout, mais aussi en France, comme réponse à ce vide politique.
      On pourrait penser ces questions dépassées, aujourd’hui que l’idée même de révolution semble avoir été enterrée. Nous pensons qu’il n’en est rien et cela pour au moins deux raisons : la première est que si ces mouvements de lutte armée ont été défaits, ils ont posé à leur manière et dans leurs limites la question du rapport entre mouvement de lutte, légalité et violence sociale ; la seconde est que l’Etat lui-même relance sans arrêt la question de ce niveau de violence légitime, mais à son profit cette fois, en criminalisant la moindre lutte (anti-G8 à Gênes, arrachage d’OGM, « affaire Tarnac », « usagers pris en otage » par les grévistes des transports publics) et en répandant partout la peur des nouvelles classes dangereuses.

      Préface : http://tempscritiques.free.fr/spip.php?article249#_ftn26
      #ultra_gauche #anarchisme #autogestion #gauchisme
      #École_de_Francfort
      source : http://blog.tempscritiques.net/archives/1897#footnote_6_1897

  • (20+) G8 à Gênes : des manifestants ont été torturés, admet le chef de la police italienne - Libération
    http://www.liberation.fr/planete/2017/07/20/g8-a-genes-des-manifestants-ont-ete-tortures-admet-le-chef-de-la-police-i

    « La gestion de l’ordre public au G8 de Gênes fut tout simplement catastrophique. » Il aura fallu seize ans presque jour pour jour après la mort du jeune manifestant Carlo Giuliani, le 20 juillet 2001, pour que les autorités italiennes reconnaissent officiellement leurs responsabilités. Dans une interview au quotidien la Repubblica ce mercredi, le chef de la police Franco Gabrielli, en poste depuis avril 2016, a ainsi admis que « les excuses a posteriori » n’étaient pas suffisantes et qu’il fallait aujourd’hui affronter sans détour les brutalités commises, durant plusieurs jours, au cours et en marge du sommet international – le premier en Italie après le retour au pouvoir de Silvio Berlusconi. « A Gênes, un nombre incalculable de personnes innocentes ont subi des violences physiques et psychologiques qui les ont marquées à vie, a reconnu Franco Gabrielli. Si aujourd’hui encore, seize ans plus tard, c’est un motif de douleur, de rancœur, de défiance [envers la police], cela signifie que la réflexion n’a pas été suffisante. »

    Franco Gabrielli va plus loin en parlant aussi des sévices infligés aux manifestants conduits à la caserne de Bolzaneto, transformée selon lui en « Garage Olimpo », en référence au sinistre centre d’interrogatoire de la dictature argentine. « A Bolzaneto, il y a eu des actes de torture », s’indigne Gabrielli, qui va jusqu’à affirmer que son prédécesseur de l’époque, Gianni De Gennaro, aurait dû assumer ses responsabilités et démissionner. « Il l’a fait, mais j’ai refusé sa démission », a précisé en réaction Claudio Scajola, le ministre de l’Intérieur de l’époque, qui a finalement admis lui aussi qu’il est « indéniable qu’à Gênes, il y a eu certaines actions des forces de l’ordre sévèrement condamnables ». De son côté, le secrétaire national de la Gauche italienne et ancien leader des anti-G8, Nicola Fratoianni, a salué « l’interview courageuse de Gabrielli. Malheureusement, nous avons dû attendre seize ans pour entendre ces paroles. »

    #Gênes #Police #Autoritarisme

  • G8 à Gênes : des manifestants ont été torturés, admet le chef de la police italienne - Libération
    http://www.liberation.fr/planete/2017/07/20/g8-a-genes-des-manifestants-ont-ete-tortures-admet-le-chef-de-la-police-i

    « A Gênes, un nombre incalculable de personnes innocentes ont subi des violences physiques et psychologiques qui les ont marquées à vie, a reconnu Franco Gabrielli. Si aujourd’hui encore, seize ans plus tard, c’est un motif de douleur, de rancœur, de défiance [envers la police], cela signifie que la réflexion n’a pas été suffisante. »

    Il revient en détail sur les exactions policières commises dans une école de Gênes le samedi 21 juillet au soir, quasiment à l’issue du G8, lorsque des unités d’élites prirent d’assaut l’établissement où dormaient des dizaines de manifestants. Prétextant la présence de militants violents, assurant avoir trouvé des cocktails Molotov – que les policiers avaient en réalité amenés eux-mêmes sur place –, l’assaut s’est transformé en une « boucherie », selon les confessions de l’un des vingt-huit agents qui seront ensuite inculpés. « En tant que dirigeant des opérations spéciales de la police, je me serais probablement retrouvé dans la cour de l’école Diaz », note Gabrielli qui « par chance » était resté à Rome pour préparer l’arrivée du président Bush. Pensant qu’en « contrepoids aux dévastations [dans la ville], il fallait un nombre significatif d’arrestations », les responsables de l’Intérieur ont « par malheur » décidé l’irruption à l’école Diaz, admet-il aujourd’hui.

    Franco Gabrielli va plus loin en parlant aussi des sévices infligés aux manifestants conduits à la caserne de Bolzaneto, transformée selon lui en « Garage Olimpo », en référence au sinistre centre d’interrogatoire de la dictature argentine. « A Bolzaneto, il y a eu des actes de torture », s’indigne Gabrielli, qui va jusqu’à affirmer que son prédécesseur de l’époque, Gianni De Gennaro, aurait dû assumer ses responsabilités et démissionner. « Il l’a fait, mais j’ai refusé sa démission », a précisé en réaction Claudio Scajola, le ministre de l’Intérieur de l’époque, qui a finalement admis lui aussi qu’il est « indéniable qu’à Gênes, il y a eu certaines actions des forces de l’ordre sévèrement condamnables ». De son côté, le secrétaire national de la Gauche italienne et ancien leader des anti-G8, Nicola Fratoianni, a salué « l’interview courageuse de Gabrielli. Malheureusement, nous avons dû attendre seize ans pour entendre ces paroles. »

    #police #violence_policières #torture #G8_Gênes

  • 20 juillet 2001, Carlo Giuliani est tué par la police à Gênes
    https://rebellyon.info/20-juillet-2001-le-jeune-Carlo-Giuliani

    En juillet 2001, le gouvernement italien organise le G8, les manifestations de protestation se succèdent sur plusieurs journées. L’assassinat de Carlo Giuliani marqua les manifestations anti-G8 de Gênes en Italie. Il nous marque encore. Voir Gênes 2001/2011 : c’est vous les morts.

    #Mémoire

    / #Répression_-_prisons, Une

  • QUE PENSER DU BLACK BLOC ? De Gênes à Hambourg, une tradition méconnue. - SERPENT - LIBERTAIRE
    http://serpent-libertaire.over-blog.com/2017/07/que-penser-du-black-bloc-de-genes-a-hambourg-une-tradi

    <b>Ma noi ci saremo</b><p>La Chambre Internationale de Commerce reconnaît à quel point la société a changé, les citoyens exprimant leurs profondes …

  • Alerte sur les microalgues toxiques

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/01/02/alerte-sur-les-microalgues-toxiques_5056566_1650684.html

    Morts en masse de saumons, de sardines, de baleines, de coquillages et marées rouges à répétition : le Chili a connu une succession de catastrophes en 2016 dues à des microalgues toxiques. Leur prolifération tend à devenir plus fréquente, plus dense, et à s’étendre en mer ainsi que dans les plans d’eau douce. Avec la Société internationale pour l’étude des algues nuisibles, la Commission océanographique intergouvernementale de l’Unesco a publié un inquiétant état des lieux.

    A priori invisibles à l’œil nu, les microalgues sont composées d’organismes marins unicellulaires de 20 à 50 microns à peine. Mais leur concentration est parfois si dense que leur biomasse teinte l’eau en rouge franc, dessine des traces bleues ou brunes observables sur les images satellitaires. Ces phénomènes d’efflorescences (blooms en anglais) ont des effets redoutables. Les micro­algues peuvent décimer des stocks de poissons sauvages et ruiner les élevages conchylicoles, attaquer le système neurologique des oiseaux de mer ou le caractère imperméable de leurs plumes, intoxiquer homards, tortues de mer, dauphins, phoques, et même entraîner l’échouage de baleines. Elles sont aussi responsables de pathologies chez les humains, parfois létales.

    Quatre chercheurs de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) – Patrick Lassus, Nicolas Chomérat, Philipp Hess et Elizabeth Nézan –, biologistes marins et chimistes, ont compilé des milliers d’études et de rapports, répertoriés les principaux événements de toxicité majeure survenus dans le monde pour produire l’inventaire de l’évolution de ces floraisons au cours des trente dernières années. « Nous avons souhaité profiter des savoirs acquis pendant quatre décennies par le docteur Patrick Lassus et réaliser une mise à jour pour informer les gouvernements et les acteurs socioéconomiques », résume Philipp Hess, chercheur au laboratoire Phycotoxines du centre Ifremer de Nantes.

    Leur ouvrage bilingue, Microalgues toxiques et nuisibles de l’océan mondial (Guides et manuels de la commission océanographique intergouvernementale, n° 68, 523 p., 37 euros), recense des données identifiant 174 algues nuisibles autour du globe, dont 100 produisent des toxines susceptibles d’entraîner, chez les humains, diarrhées, réactions cutanées, amnésie, paralysie… Certains de ces dinoflagellés et diatomées néfastes épargnent l’homme, mais mettent en danger à la fois la faune et la flore marines en se concentrant si intensément qu’ils réduisent l’oxygène dans l’eau. D’autres encore obligent à interrompre la production d’eau potable dans les usines de dessalement, à fermer des plages…

    Troubles respiratoires

    Dès le début du XXe siècle, les taxinomistes avaient répertorié un grand nombre d’algues microscopiques. « Nous disposons de longues séries de données sur certaines espèces, comme Karenia ­brevis, qui est suivie sur les côtes de Floride depuis 1848, rapporte Philipp Hess. Ce dinoflagellé peut à la fois contaminer des coquillages puis ceux qui vont les manger et susciter par aérosol des maux de gorge, des crises d’asthme ou d’eczéma chez les gens sur le rivage… »

    Las, les scientifiques soupçonnent une probable amplification de ces blooms. Pour certaines parties du monde, ils en sont sûrs. « Dans la rade de Brest, avant le début des années 1990 nous n’avions observé que quelques cellules d’Alexandrium minutum contenues dans des sédiments, témoigne le chercheur. Puis il y a eu un grand bloom en 2012. » Depuis, les concentrations de ce phytoplancton potentiellement paralysant sont devenues récurrentes.

    De son côté, l’ouest de la Méditerranée connaît une forte augmentation d’Ostreopsis, un dinoflagellé repéré en 1972, habitué des eaux tropicales, suffisamment toxique pour susciter des états grippaux et des troubles respiratoires par inhalation des gouttelettes transportées par le vent. « En 2005, à Gênes, 200 personnes ont été contaminées, 40 ont dû être hospitalisées », souligne Philipp Hess.

    L’intoxication à la ciguatera, de funeste réputation en Polynésie et dans l’océan Indien, n’est plus l’apanage de ces régions. Les ciguatoxines produites par les micro­algues du genre Gambierdiscus atteignent désormais les îles Canaries, dans l’Atlantique. Dans le monde, elles rendent malades 25 000 à 50 000 personnes par an.

    Le réchauffement de l’océan joue probablement un rôle dans cette expansion. D’autres facteurs y contribuent : l’explosion du transport maritime et la diffusion des eaux de ballast, la construction d’infrastructures qui favorisent le confinement de l’eau et en modifient les modèles de circulation, la surpêche qui déstabilise la chaîne alimentaire, plus les rejets massifs de nitrates, phosphates et déchets en tout genre.

    « L’eutrophisation d’une baie joue toujours en faveur des microalgues, toxiques ou non », note Philipp Hess. Il souligne les progrès constatés là où des efforts sont réalisés pour traiter les eaux usées. S’il espère voir leur travail servir d’alerte, il attend aussi que cette publication incite les experts du monde entier à mettre en commun leurs bases de données.

  • D’Alep à Paris | Actes Sud
    http://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature-etrangere/dalep-paris

    Hanna Dyâb, chrétien maronite d’Alep, fait le récit du voyage effectué dans sa jeunesse en compagnie du Français Paul Lucas, au début du xviiie siècle. Son texte en arabe nous est parvenu sous la forme d’un manuscrit unique, inédit à ce jour, conservé à la Bibliothèque vaticane.
    Le périple conduit l’auteur d’Alep à Tripoli, Saïda, Chypre, puis en Égypte, d’où il rejoint la Libye, puis Tunis. De là il passe à Livourne, Gênes et Marseille, avant de gagner Paris, où son séjour culmine avec sa réception à Versailles dans les appartements de Louis XIV. Sur le chemin du retour, il passe par Smyrne et Constantinople, d’où il rejoint Alep en traversant l’Anatolie en caravane.
    Conteur hors pair, Hanna Dyâb fut l’informateur d’Antoine Galland pour une douzaine de contes des Mille et Une Nuits, notamment Aladin et Ali Baba. Extrêmement vivant, son récit relate rencontres et conversations, déplacements en caravane, tempêtes et attaques de corsaires en mer. Il décrit précisément l’horloge astronomique de l’église Saint-Jean à Lyon, la vie sur les galères, le Grand Hiver de 1709, le supplice de la roue ou une représentation d’Atys de Lully à l’Opéra. Il entrecoupe son récit d’histoires plus ou moins légendaires, inspirées de vies de saints, de contes populaires, de faits divers.
    Le regard vif et original d’un “Oriental” sur le monde méditerranéen et la France au temps de Louis XIV.

    Hannah Dyab, d’Alep à Paris : les pérégrinations d’un jeune Syrien au temps de Louis XIV avec Bernard Heyberger ( EPHE)
    20.11.2016
    https://www.franceculture.fr/emissions/chretiens-dorient/hannah-dyab-dalep-paris-les-peregrinations-dun-jeune-syrien-au-temps-d


    http://rf.proxycast.org/1233849209459843072/10492-20.11.2016-ITEMA_21141322-0.mp3

  • Les communistes arabes et la lutte contre le fascisme et le nazisme | Aggiornamento hist-geo
    https://aggiornamento.hypotheses.org/3497

    Dès l’entrée en scène du fascisme, puis du nazisme, en Europe, les partis communistes des pays arabes prirent une position nette vis-à-vis d’eux, mettant en garde contre leurs ambitions et leurs politiques agressives. Cette prise de position plaça les communistes arabes à contre-courant de certains secteurs de l’opinion publique arabe, influencés par la propagande du fascisme et du nazisme et qui voyaient dans l’Italie et l’Allemagne des alliés potentiels dans leur lutte contre la Grande-Bretagne et la France, puissances coloniales dans la majorité des pays arabes.

    C’est peu dire que cette Historie est mal connue. Quant à imaginer qu’il y avait encore, il y a moins d’un demi-siècle, pléthore de puissants mouvements communistes dans le monde arabe, on a du mal à le faire...

    • C’est loin, mais il en reste des traces. Je connais certaine librairie d’Amman où on trouve les œuvres complètes de Lénine, édition des années 60. Dans la Jordanie d’aujourd’hui, ces livres sont des objets si incongrus. Et tout est devenu si compliqué qu’on se demande par quel bout on reprendrait les choses, si on en avait la possibilité.

      Et dire aussi que la dernière guérilla communiste dans le « tiers monde » (on disait comme ça à l’époque), ça se passe... dans le Golfe, en Oman, avec le front de libération des pays du Golfe, jusqu’en 1975 - le sujet du roman de Sonallah Ibrahim, Warda, et d’un livre récent « Monsoon revolution » de Abdelrazzaq Taqriti. Espérons que cela reviendra, dès qu’on en aura fini avec ce que vous nommez si justement cette catastrophe arabe.

    • Solidarité avec l’URSS et lutte universelle contre le nazisme

      A la suite de la signature, par les démocraties occidentales, du traité de Munich avec l’Allemagne, fin septembre 1938, le pouvoir soviétique, redoutant de voir les troupes germaniques envahir son territoire, donna son accord, le 23 août 1939, pour signer un traité de non agression avec l’Allemagne nazie. En dépit de l’embarras que cette décision soudaine de l’URSS provoqua dans les rangs des communistes arabes, ils n’en ont pas moins soutenu cette dernière, dans la conviction qu’il fallait à tout prix soutenir l’« État socialiste unique ».

      L’agression allemande contre l’URSS, en juin 1941, a conduit toutefois les communistes du monde, dont les communistes arabes, à considérer le soutien de l’URSS comme une tâche primordiale. C’est alors que les communistes arabes se sont mis à organiser des campagnes de solidarité avec les peuples soviétiques et à créer des comités, ad hoc, pour les assister.

      à propos de la note : [2] Ercoli [Palmiro Togliatti], « Les tâches de l’Internationale Communiste en liaison avec les préparatifs d’une nouvelle guerre mondiale par les impérialistes », in Résolutions et décisions du VIIème congrès de l’Internationale Communiste, Paris, Bureau d’éditions, s.d., p. 24-32.
      Palmiro TOGLIATTI écrit des textes de propagande sous le nom de plume d’Ercole Ercoli jusqu’en 1926, époque où le régime fasciste l’expulse du pays. En exil à Moscou, il participe aux activités du #Komintern et coordonne l’action clandestine du #Parti_communiste_italien. En août 1936, il signe avec tout le comité central du PCI émigré en France,
      l’« #Appel_aux_fascistes »
      Titre original : Per la salvezza dell’Italia riconciliazone del popolo italiano (publié par Lo Stato Operaio, Aout 1936, n°8, Paris revue du PCI) , qui proclame entre autres :

      « Les communistes adoptent le programme fasciste de 1919, qui est un programme de paix, de liberté, de défense des intérêts des travailleurs. (...) Nous proclamons que nous sommes prêts à combattre avec vous et tout le peuple italien pour la réalisation du programme fasciste. (...)
      Nous devons unir la classe ouvrière et faire autour d’elle l’unité du peuple et marcher unis, comme des frères. Donnons-nous la main, fascistes et communistes, catholiques et socialistes, hommes de toutes les opinions. Donnons-nous la main et marchons l’un à côté de l’autre pour arracher le droit à être des citoyens d’un peuple civilisé comme le nôtre. »

      Ce texte, daté d’août 1936,a été écrit par Palmiro TOGLIATTI, secrétaire général du parti communiste italien, et signé par le comité central au complet ainsi que par des dizaines de dirigeants du parti.
      Ce document qui est à la fois étonnant et significatif a été soustrait furtivement au jugement des communistes et des révolutionnaires : il n’a jamais été republier intégralement et il n’est que très rarement mentionné par les historiens.
      On ne peut s’empêcher d’éprouver un profond malaise à la lecture de cet appel qui suscite toujours une vive inquiétude quatre-vingts ans après sa rédaction, non seulement par ce qui est dit littéralement, mais surtout par la « tactique » utilisée par le parti communiste.
      Celle-ci, qui consiste en une alliance conjoncturelle avec les forces les plus réactionnaires du moment, s’intègre en fait dans un système plus complexe de compromission, de manipulation et de collaboration de classe contribuant à l’élaboration du #totalitarisme.
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Palmiro_Togliatti
      http://cgecaf.com/mot173.html
      http://archive.wikiwix.com/cache/?url=http%3A%2F%2Fcgecaf.com%2Farticle1846.html

      #Palmiro_TOGLIATTI naît à Gènes, le 26 mai 1893. Rédacteur aux côté de #Gramsci du journal « L’ORDINE NUOVO », dans les années vingt, il est l’un des fondateurs du parti communiste italien ; il en sera même l’un de ses plus haut dirigeants jusqu’à sa mort. Pendant la #période_fasciste, il a de très nombreuses responsabilités au sein de l’internationale communiste ou il sera l’interprète fidèle et zélé des directives de Moscou. En 1937, il est envoyé en Espagne par le Komintern pour « renforcer » l’activité du #parti_communiste_espagnol dont il deviendra ¬ en coulisse ¬ le secrétaire. Après la seconde guerre mondiale, durant laquelle il séjourne en URSS, il revient en Italie pour reprendre aussitôt la direction du parti communiste italien (PCI).
      En 1946, il est ministre de la justice ; il marquera cette période par un décret d’amnistie « d’une très grande générosité » envers tous les fascistes. Il accueille très tièdement le « revirement » du XXͤ congrès du PCUS ; Il meurt à Yalta, le 21 aout 1964.