• Quand tu fais partie des 10 premières puissances mondiales et que seuls les riches peuvent se soigner correctement !!!

    • #sans-dent : la #macronisation était déjà « en marche » ...

      « Je suis à leur service, les plus humbles, les plus fragiles, les plus pauvres, c’est ma raison d’être. »
      « la fonction présidentielle doit être respectée. (...) Pas pour protéger la personne mais pour protéger nos institutions. »

      (François Hollande en réaction à la sortie de « Merci pour ce moment », livre de son ex-compagne Valérie Trierweiler)

      Je me souviens d’un soir, au sortir d’un repas de Noël passé chez ma mère, à Angers, avec tous mes frères et sœurs, les conjoints, neveux et nièces, vingt-cinq personnes en tout. François se tourne vers moi, avec un petit rire de mépris et me jette :

      – Elle n’est quand même pas jojo, la famille Massonneau…

      Cette phrase est une gifle. Des mois plus tard, elle me brûle encore. Comment François peut-il dire cela de ma propre famille ? « Pas jojo, la famille Massonneau » ? Elle est pourtant tellement typique de ses électeurs.

      J’ai longtemps hésité avant de raconter cette anecdote si révélatrice de ce qu’il est, qui va blesser les miens, eux qui étaient si heureux de le connaître et si fiers de le recevoir. Mais je veux me laver de tant de mensonges, sortir de ce livre sans le poids des non-dits.

      Je vous demande pardon, à vous ma famille, d’avoir aimé un homme capable de ricaner sur les « Massonneau pas jojo ». Je suis fière de vous. Pas un de mes frères et sœurs n’a dévié. Certains ont réussi, d’autres moins, mais nous savons tous tendre les bras et exprimer notre amour, les mots « famille » et « solidarité » ont un sens concret, alors que pour François, ce ne sont que des abstractions. Pas une seule fois il n’a invité son père à l’Élysée, ni son frère. Il se veut un destin hors norme, un Président orgueilleusement seul.

      Mais où faut-il donc être né pour être jojo ? C’est vrai, dans ma famille, personne n’a fait l’ENA ni HEC. Aucun d’entre nous n’a possédé de clinique, ni fait des affaires dans l’immobilier comme son père. Nul n’a de propriété à Mougins sur la Côte d’Azur comme lui. Personne n’est haut fonctionnaire ou célèbre comme les gens qu’il fréquente depuis la promotion Voltaire de l’ENA. Les Massonneau sont une famille de Français modestes. Modestes mais fiers de ce que nous sommes.
      Son expression tellement dédaigneuse me hante maintenant que le charme est rompu, que je suis désenvoûtée de son regard. Il s’est présenté comme l’homme qui n’aime pas les riches. En réalité, le Président n’aime pas les pauvres. Lui, l’homme de gauche, dit en privé « les sans-dents », très fier de son trait d’humour.

      (extrait du témoignage de Valérie Trierweiler née Massoneau)

  • Pas de la dynamite mais du tabac

    Transcription intégrale, accompagné d’une introduction, du dossier contenant les interrogatoires des anarchistes en Suisse romande (parmi lesquels Jean Grave, Élisée Reclus et Jean-Louis Pindy) dans le cadre de la première opération de la police suisse contre les anarchistes. Ce livre est plus amusant qu’il n’y paraît du fait que la police et la magistrature cherchent de la dynamite et trouvent du tabac mais aussi des réponses ironiques et des moqueries des militants les plus expérimentés parmi les interrogés...

    https://www.editions.federation-anarchiste.org

    –—

    Quelques citations :

    « La Confédération helvétique était alors considérée comme une terre de refuge par toute l’Europe. Sa relative tolérance est particulièrement notable par l’absence presque totale de sources de police concernant des villes comme Genève avant les années 1880, ce qui indique l’application d’une vraie démarche libérale, selon laquelle aucun résidant n’était surveillé ni inquiété tant qu’il ne commettait pas un délit de droit commun. La police ne s’occupait donc pas a priori de la surveillance des exilés politiques, même s’ils professaient les idées les plus radicales. » (p.15)

    « Cependant, les réfugiés en Suisse ne se sentent plus à l’abri des persécutions, et les épisodes d’expulsions se multiplient : l’un des cas les plus célèbres est celui du décret fédéral du 19 janvier 1895, qui décrète l’expulsion de 18 Italiens ’indésirables’ parmi lesquels un anarchiste très connu, #Pietro_Gori (1865-1911), et dont une grande partie échappaient aux lois spéciales du gouvernement réactionnaire de #Francesco_Crispi. A partir de cet épisode, Gori écrit la plus célèbre chanson anarchiste italienne, Addio a Lugano, dont le texte retranscrit précisément la déception des expulsés quand à la fin du mythe de la ’libre Helvétie’, en accusant la Suisse d’agir pour le compte d’autrui :
    Elvezia il tuo governo schiavo di altrui si rende
    di un popolo gagliardo la tradizione offende
    e insulta la leggenda del tuo Guglielmo Tell. » (p.28)

    #anarchisme #livre #Suisse #fédéralisme #histoire #Internationale_antiautoritaire #Saint-Imier #Addio_a_Lugano #Addio_Lugano_bella

  • Lecture d’un extrait du livre « Sous la menace » de Vincent Almendros, paru aux Éditions de Minuit, en 2024.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/sous-la-menace-de-vincent-almendros

    Quentin, un adolescent obsédé par la mort de son père, disparu six ans plus tôt dans un mystérieux accident, accompagne sa mère et sa cousine de 11 ans, Chloé, chez ses grands-parents où il passe un week-end tendu et pesant. Exclu de son collège pour violence, mal dans sa peau, voyant son corps se transformer à cause de la puberté, le jeune garçon a l’impression de « devenir un monstre. » Dans cette réunion de famille qui paraît anodine, entre une mère tout le temps sur son dos, un grand-père amnésique, une grand-mère enfermée dans ses souvenirs et la petite Chloé que l’adolescent malmène, les tensions et les non-dits se révèlent peu à peu. La violence sourde et inquiétante de ce huis clos nous maintient sous la menace des secrets et des failles de cette famille.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Sensation, #Art, #Littérature, #Édition, #Parfums, #odeurs, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_sous_la_menace_vincent_almendros.mp4

    https://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-Sous_la_menace-3422-1-1-0-1.html

  • Amazon révèle une synthèse vocale “de pointe” avec BASE TTS
    https://actualitte.com/article/115810/technologie/amazon-revele-une-synthese-vocale-de-pointe-avec-base-tts

    L’équipe d’une vingtaine de chercheurs ne dissimule pas sa fierté d’avoir mis au point un modèle de synthèse vocale doté d’un nombre impressionnant de 980 millions de paramètres, et « entraîné » à l’aide de 100.000 d’enregistrements vocaux issus du domaine public.

    BASE TTS, ou Big Adaptive Streamable TTS with Emergent abilities (Large modèle adaptatif de synthèse vocale en diffusion continue) est présenté comme une technologie de synthèse vocale « de pointe », capable de prononcer correctement des mots étrangers dans un discours en anglais, de marquer la ponctuation, mais aussi d’exprimer telle ou telle émotion.

    Le modèle fonctionne à partir d’un texte brut, qu’il analyse et interprète selon ses capacités, avec une relative autonomie. Son « entrainement » à partir d’un grand volume de discours et autres extraits de conversation a permis d’affiner la prosodie de BASE TTS, autrement dit sa lecture, mais aussi la manière dont l’outil prononce les mots de manière régulière, en respectant les sonorités et les rythmes.

    Autant de « détails » qui ne passent pas inaperçus, lorsque l’on écoute un texte retranscrit par une synthèse vocale...
    Des livres lus à la pelle ?

    Le développement de cet outil par des chercheurs affiliés à Amazon n’est pas anodin, puisque la firme de Seattle mise notamment sur le livre audio pour fidéliser ses clients. Sa filiale Audible a de nombreux concurrents, dont le géant suédois Spotify, et le nerf de la guerre se trouve entre autres du côté de la taille du catalogue.

    Aussi, l’enjeu de la synthèse vocale apparait-il comme crucial : en proposant aux auteurs indépendants, mais également aux éditeurs, un outil performant pour transposer le texte à l’oral, Amazon peut s’assurer un flux de récits et de documents audio continu.

    Amazon Polly, présenté en 2019, constituait un premier pas en ce sens, avec une solution technique simple et efficace pour faire la lecture avec un certain nombre de voix synthétiques. Fin 2023, la multinationale ouvrait même une phase de texte auprès des auteurs indépendants, pour qu’ils puissent aisément exploiter leurs textes au format audio.

    BASE TTS pourrait sans aucun doute améliorer l’expérience des utilisateurs de ces livres audio lus par des voix de synthèse. Pour la plus grande inquiétude des comédiens et comédiennes, déjà secoués par les développements technologiques dans ce domaine.

    Toutefois, le modèle de synthèse vocale restera pour l’instant réservé à d’autres recherches menées en interne, sans mise à disposition du public. Les chercheurs continueront à étudier les améliorations apportées par la fouille massive des données, pour développer d’autres applications de synthèse vocale.

    #Synthèse_vocale #Amazon #Livre_audio

  • Ratures 10 : Entretien avec Alèssi del Umbria - La Grappe
    https://lagrappe.info/?Ratures-10-Entretien-avec-Alessi-del-Umbria-649

    https://lacledesondes.fr/audio/ratures-2024-02-185.mp3

    Dans cet entretien pour la Clé des Ondes autour de son livre « Du fric ou on vous tue ! », Alèssi Dell’Umbria revient sur son expérience dans le groupe Os Cangaceiros. Plus qu’un groupe de hors-la-loi radicalisés, cette association construite autour d’affinités dans la dissidence sociale n’aura de cesse de déstabiliser toutes les formes d’assignation et de domination.

    « Du fric ou on vous tue ! » : j’ignore qui avait pu écrire ça sur un mur, au début des années 1980, à Marseille, mais j’avais bien aimé cette menace de braqueur qui résonnait là comme une injonction plus générale à ceux qui tiennent les cordons de la Bourse. Une association de hors-la-loi révolutionnaires, ainsi pourrait-on qualifier le groupe Os Cangaceiros, qui prit ce nom en hommage aux bandits du Nordeste brésilien. Ce livre raconte l’histoire de cette bande de jeunes qui, refusant d’aller travailler, s’était organisée pour arnaquer les banques et prêter main-forte aux luttes qui secouaient alors les prisons, les usines et les banlieues. Ce récit de première main peut être lu comme une contre-histoire de la décennie 1980, durant laquelle se mit en place le régime de gouvernance que nous subissons depuis.

    #Alessi_Dell'Umbria #années_80 #Os_Cangaceiros #histoire #illégalisme #livre #interview #audio #radio #La_clé_des_ondes

    • Os Cangaceiros - Rapport sur Marseille (1985) - Marseille Infos Autonomes
      https://mars-infos.org/os-cangaceiros-rapport-sur-335

      Il y a trente ans, en janvier 1985, le groupe Os Cangaceiros publiait son premier numéro, dans lequel se trouvait cet article, sobrement intitulé Rapport sur Marseille. Aujourd’hui, en 2015, les stratégies urbanistiques et sécuritaires ont évolué. Mais le fond de la chose reste semblable.

      Marseille n’est pas une ville très civilisée. C’est une ville exclusivement vouée au trafic marchand, et il n’est rien qui n’y soit déterminé par les impératifs du trafic. La cité entière est consacrée à cette activité, et à rien d’autre. C’est la circulation des marchandises qui a édifié cette ville, à sa convenance et à son image. Nulle trace de passé historique, la marchandise ne laisse rien derrière elle, se contentant de passer.

      #Marseille

  • #Roma_coloniale

    Sul colonialismo italiano pesa il torto di una rimozione storica, culturale e politica, ancora inspiegabile: un buco nel registro delle morti del Novecento, pagine bianche nei manuali di storia nazionale.
    Il Colonialismo spiega, più di quel che si è portati a credere, il pregiudizio razzista che ancora oggi pervade le piaghe più nascoste della società italiana; un razzismo ordinario, che può esplodere, a certe condizioni, in episodi terribili, oppure continuare a covare sotto la cenere.

    Roma è una città distratta. Le tracce coloniali, incomprese, sono ovunque: viali, piazze, obelischi, cinema, statue, targhe, tutti omaggi dedicati all’impero. Si incontrano a Villa Borghese, al Circo Massimo, alla Stazione Termini, a San Giovanni, al Foro Italico, a Garbatella, a Casalbertone. E in un intero quartiere: quello Africano.
    Forse è venuto il momento di discuterne, di ricercarle e assegnare loro un significato storico più doloroso e più giusto, senza continuare a sperare nell’oblio.

    https://lecommariedizioni.it/prodotto/roma-coloniale
    #Rome #colonialisme #Italie #Italie_coloniale #colonialisme_italien #livre #traces #toponymie #toponymie_politique #toponymie_coloniale #noms_de_rue #liste #inventaire

    –-

    ajouté à la métaliste sur le colonialisme italien :
    https://seenthis.net/messages/871953

  • Lecture d’un extrait du livre « L’appel des odeurs, » de Ryōko Sekiguchi, paru aux Éditions P.O.L., en 2024.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/l-appel-des-odeurs-de-ry%C5%8Dko-sekiguchi

    La narratrice a une forme d’addiction pour les odeurs, elle les consigne depuis sa jeunesse dans un carnet, recopiant des extraits d’ouvrages ou des phrases entendues sur ce sujet, notant ses sensations sur les effluves, les émanations et les parfums tout autour d’elle, dans les jardins comme que dans les musées, dans les cuisines et les bibliothèques. Ses notes se transforment peu à peu en récits, au point où de se demander si elle n’invente pas toutes ces histoires. « Lorsqu’on dit sentir une présence, que sent-on en réalité ? » Les odeurs sont les personnages centraux du livre, dotées d’une présence, d’un langage. Elles se développent à travers différents lieux et des époques variées.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Sensation, #Art, #Littérature, #Édition, #Parfums, #odeurs, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_l_appel_des_odeurs_ryoko_sekiguchi.mp4

    https://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-8180-6011-7

  • #Des_Livres_en_Communs lance son appel à publication 2024
    https://framablog.org/2024/02/09/des-livres-en-communs-lance-son-appel-a-publication-2024

    Rappelez-vous, il y a deux ans (déjà !) nous vous avions annoncé le lancement de notre maison d’édition version 2 qui succède à Framabook. #des_livres_en_communs avait alors lancé deux propositions : un modèle alternatif radical (et anticapitaliste) à l’édition, … Lire la suite­­

    #Communs_culturels #Commun #DLeC #édition #licence_libre #Livre #Projet

  • Des treillis dans les labos. La recherche scientifique au service de l’#armée

    Dans une envolée rare, les dépenses militaires européennes ont atteint leur niveau de la fin de la Guerre froide. En #France, troisième exportateur mondial d’armes, le complexe militaro-industriel mobilise #entreprises et #chercheurs civils pour concevoir et fabriquer les armes de demain.
    Grenoble, spécialisée en #semi-conducteurs, constitue le « cerveau de l’armement » national.

    http://www.lemondealenvers.lautre.net/livres/des_treillis_dans_les_labos.html
    #armes #industrie_de_l'armement #recherche #Grenoble #complexe_militaro-industriel #exportations #livre

  • Le Mensonge #Total. Enquête sur un criminel climatique

    L’année 2023 a été la plus chaude jamais enregistrée. C’est aussi celle où #TotalEnergies a annoncé le plus gros #bénéfice de son histoire : 19 milliards d’euros. Alors que le géant pétrolier rejette chaque année plus de gaz à effet de serre que l’ensemble des Français, il veut nous faire croire, à coups de vastes opérations de #greenwashing, qu’il est devenu un acteur majeur de la transition écologique.

    À partir d’enquêtes solides et accablantes, Mickaël Correia décrit dans ce livre l’arsenal des stratagèmes déployés par le fleuron industriel français pour continuer à nous submerger d’énergies fossiles : gaz faussement « neutre en carbone » ; forage de 400 nouveaux puits de pétrole en #Ouganda ; plantation d’une forêt en République du Congo pour s’acheter une image verte au détriment de paysans expropriés ; torpillage de politiques climatiques ; entrisme jusqu’au coeur de l’Élysée, etc.

    Comment stopper l’entreprise dans sa course climaticide vers toujours plus de profits ? Faut-il aller jusqu’à nationaliser voire démanteler cette multinationale privée qui pourrait à elle seule faire dérailler les accords mondiaux sur le climat ?

    https://www.seuil.com/ouvrage/le-mensonge-total-mickael-correia/9782021555141
    #livre #énergie #énergies_fossiles #pétrole

  • Forteresse Europe : Enquête sur l’envers de nos frontières

    Aux frontières de l’Europe, murs et barrières poussent comme des champignons. Une épidémie de barbelés, symptôme d’une vision du monde xénophobe : les personnes migrantes menaceraient le monde occidental et seraient une nuisance à endiguer coûte que coûte, y compris au prix de leurs vies. Pourtant, le seul tort de ces voyageurs stigmatisés, hommes, femmes et enfants venus d’Afghanistan, du Sénégal, de Syrie, du Maroc, du Bangladesh ou du Soudan, est d’être en mouvement vers un nouveau destin. Leur opposer une forteresse, ruineux délire parano au service du repli identitaire, c’est aussi ignorer les mécanismes des migrations, dont l’Europe a tant profité. Il est temps d’inverser la focale, plaide l’auteur.

    Dans cette enquête au long cours, menée des deux côtés de la Méditerranée, Émilien Bernard montre la réalité des frontières européennes dressées contre ces « indésirables » qui tentent de les franchir. De Laâyoune à Melilla en passant par Lampedusa, Belgrade ou Calais, la succession d’obstacles, aussi divers qu’inutiles, sert à repousser et invisibiliser celles et ceux qui veulent simplement se construire une vie ailleurs.

    https://luxediteur.com/catalogue/forteresse-europe

    #livre #Emilien_Bernard #migrations #asile #réfugiés

    • Vous avez dit forteresse ? Enquête sur l’envers de nos frontières

      Aux frontières de l’Europe, murs et barrières poussent comme des champignons. Une épidémie de barbelés, symptôme d’une vision du monde xénophobe : les personnes migrantes menaceraient le monde occidental et seraient une nuisance à endiguer coûte que coûte, y compris au prix de leurs vies. C’est dans ces lieux de mort et de vies mutilées, des deux côtés de la Méditerranée, de Laâyoune à Melilla en passant par Lampedusa, Belgrade ou Calais, qu’Émilien Bernard est allé enquêter pendant de longs mois. Le livre qu’il tire de cette enquête, intitulé Forteresse Europe. Enquête sur l’envers de nos frontières, est accablant mais salutaire. Du véritable ensauvagement de notre continent, de ses élites et de ses agents, il propose une description minutieuse et une analyse critique approfondie qui constituent, ensemble, la meilleure des alertes éthiques et politiques. On ne pourra pas dire que l’on ne savait pas : nos politiques sont meurtrières, et vouées à le demeurer indéfiniment tant qu’on laissera faire. Car la multiplication des obstacles et des périls n’a jamais dissuadé, ne dissuade toujours pas, et ne dissuadera jamais les exilés de tenter leur chance. Elle ne fera qu’allonger les listes de victimes « du sort », sur lesquels nos gouvernants ne verseront que rarement, et sans doute de plus en plus rarement, une larme de crocodile. À ces victimes de nos délires xénophobes, Émilien Bernard a l’insigne mérite d’accorder une attention, une considération et une légitimité qui manquent singulièrement dans nos « débats » parlementaires ou télévisuels. Il nous rappelle avec force que les dits « migrants », qu’ils ou elles viennent d’Afghanistan, du Sénégal, de Syrie, du Maroc, du Bangladesh, du Soudan ou d’ailleurs, sont, avec toutes leurs différences et leurs singularités, nos semblables, et qu’ils et elles font ce que nous ferions toutes et tous à leur place. Leur seul crime, mais qu’ils payent si cher, est « d’être en mouvement vers un nouveau destin ». De ce livre important, nous proposons, en guise d’aperçu et d’invitation à lire l’ensemble, quelques-unes des premières pages.

      Pour qualifier la multitude effarante de barrières physiques, technologiques, légales, administratives, idéologiques ou politiques par lesquelles l’Europe se cadenasse face à des populations dites indésirables, le terme ne fait pas sens. Il s’est pourtant imposé, ripoliné, animé d’une seconde jeunesse. Utilisée durant la Seconde Guerre mondiale aussi bien par les Alliés que par l’occupant nazi, l’expression « forteresse Europe » s’est de nouveau immiscée dans le débat public. Ses partisans ne proclament pas fièrement son existence, hormis chez les plus racistes ou protectionnistes, mais ladite forteresse est bien là, dans les écrits et discours, sémantiquement entérinée. Sans doute parce que l’expression est malléable, polysémique. D’un côté, elle valide en douce une réalité : c’est bien une guerre qui est menée, aussi laide et meurtrière que les étripages féodaux. De l’autre, elle recoupe, par sa dimension totale, un champ plus large que celui des simples murs physiques se dressant à l’intérieur et aux frontières de l’Europe : la forteresse comme multitude infinie de barrières et d’aspirateurs à données, débordant de toutes parts, recouvrant chaque parcelle de territoire humain.

      Pour entériner cette idée de muraille européenne dressée contre les personnes en exil, il faut alors imaginer une construction allant pour tout un pan à contresens de l’imaginaire de vieilles pierres pesantes et de forts surveillant les poussières des no man’s land. Au Désert des Tartares, substituer celui des barbares – nous et notre cohorte technologique. À l’horizon 2023, la forteresse s’est donc faite légère et tentaculaire, horizontale. Elle se niche aussi bien sur les crêtes des vagues en ­Méditerranée que dans les loquets des portes du centre de rétention administrative (CRA) de Vincennes, les caméras thermiques des barrières séparant la Serbie de la Hongrie ou les raids antimigrants de policiers marocains à Laâyoune. Après tout, il y a déjà eu des « forteresses volantes », les bombardiers Boeing B-17 américains utilisés sur les fronts de la Seconde Guerre mondiale. On postulera donc l’existence de « forteresses mouvantes », capa­bles de muter et de se démultiplier pour devenir omniscientes. Au point de transformer tous les espaces arpentés par les personnes migrantes en véritables territoires de chasse.

      Dans cette configuration, la frontière se diffuse à tout vent et de manière plus ou moins floue, presque virale, dans et hors de l’espace Schengen, créant un borderscape (paysage de frontière) généralisé. C’est particulièrement perceptible à certains points clés des trajectoires migratoires, comme à Calais où les fronts sont partout dans la ville et ses périphéries, pas seulement aux abords des impressionnants murs ceinturant le terminal maritime donnant accès aux ferries et trains en partance pour l’Angleterre. Au point que certains sur place n’hési­tent pas à parler de « zone de guerre » ou de « siège militaire ».

      Cette offensive retorse oscille entre basse intensité et haute létalité selon les territoires. Elle est en tout cas totale, puisqu’elle a vocation à se diffuser partout, dans les rues, les flots et les airs. Sous la houlette des technocrates qui mènent la charge, l’Europe contrôle, fiche, filme, met à l’écart, « gère les flux », en usant d’un attirail sécuritaire et techno­logique en pleine croissance. Mais le conflit pioche aussi dans les bonnes vieilles recettes bétonnées : il s’accompagne en parallèle d’une inflation de murs physiques dressés aux frontières de l’Europe.

      Des murs et barrières, donc, basiques autant que perfectionnés. C’est peu dire qu’ils se multiplient sur le continent, épidémie sécuritaire illustrant la psychose qui s’est emparée de l’Union européenne (UE). Rappelons pourtant que jusqu’à la fin des années 1990, et dans l’élan provoqué par la création de l’espace Schengen, cette même Union profes­sait encore la nécessité d’accueillir ceux qui fuyaient les drames [1]. La chute du mur de Berlin le 9 novembre 1989 a bien été fêtée comme une victoire universelle. Et le discours médiatique dominant dans les années suivantes prônait le démantèlement des frontières en Europe. Cela semble un siècle.

      À l’heure où cet ouvrage était commencé, le dernier mur en date était celui bâti entre la Pologne et la Biélorussie, inauguré le 30 juin 2022 par le premier ministre polonais. Coût estimé : 350 millions d’euros. Un rempart d’acier s’étirant sur 186 kilo­mètres, haut de plus de 5 mètres, et hérissé de ces bar­belés concertina si avides de chairs humaines [2]. Pour l’accompagner, un attirail technologique dernier cri, mêlant vidéosurveillance, drones et capteurs de mouvements. Ce mur a depuis été rejoint par une barrière entre la Lituanie et la Biélorussie et un début de clôture à la frontière Macédoine-Serbie, tous deux entamés à la fin de l’été 2022. Signalons aussi les premières portions de mur que la Grèce (le « bouclier de l’Europe », selon la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen) a inaugurées lors de l’été 2021 à sa frontière avec la Turquie, notamment en bordure de la rivière Evros. Pour épauler ces 37,5 kilomètres de hautes barrières, que le premier ministre grec Kyriákos Mitsotákis a promis en avril 2023 d’étendre de 40 kilomètres, des « canons à son » présentés comme le nec plus ultra en matière de gestion des abords frontaliers. Et s’il fallait désigner le plus « abouti » d’entre tous, c’est celui de Melilla qui s’imposerait, entre l’Espagne et le Maroc, dans la région du Rif oriental, tellement vertigineux et sophistiqué qu’il a causé la mort de plus d’une trentaine de personnes issues de pays subsahariens le 24 juin 2022.

      Selon les soubresauts de l’actualité, il y a des murs plus ou moins médiatisés. Les événements de juin 2022 ont ainsi mis en lumière pour une brève période celui de Melilla. De même qu’on a beaucoup parlé, fascination pour l’ogre Trump oblige, de ces murailles dressées à la frontière entre le Mexique et les États-Unis, n’arrêtant pas les passages, tout en provoquant par ricochets morts et blessures. Mais il y en a beaucoup d’autres dont on ne parle pas, qu’ils soient en chantier ou déjà bâtis. Mille huit cents kilomètres aux frontières de pays européens, comptabilisait en décembre 2021 une solide infographie du Telegraph. Un rapport du Parlement européen publié en octobre 2022 actualisait le chiffre, reconnaissant que l’on en était à 2 035 kilomètres, contre 315 en 2014. C’est de toute évidence loin d’être fini, des pays comme la ­Finlande ayant annoncé qu’ils souhaitaient eux aussi se barricader derrière des murs dernier cri.

      Cerise sur le barbelé, les 27 pays composant l’Union européenne se sont engagés les 9 et 10 février 2023 à Bruxelles dans un processus visant à « immédiatement mobiliser des fonds européens substantiels et des moyens pour aider les États membres à renforcer les capacités et les infrastructures de protection des frontières, les moyens de surveillance, notamment aérienne, et les équipements ». Une demande formulée par les pays les plus réactionnaires de l’UE, notamment ceux du groupe de Visegrád [3], à commencer par la Hongrie d’Orbán, précurseur en matière de murs, lui qui dès 2015 inaugurait sa propre muraille.

      Victoire pour les partisans d’une Europe repliée sur ses pulsions identitaires : non seulement les murs prospèrent, mais à partir de 2024 il y a des chances que l’UE les finance [4]. Véritables effets d’aubaine pour des industriels de l’armement qui se sont jeté sur l’opportunité avec l’avidité des vautours sur une charogne, ces édifices n’ont pas qu’une fonction guerrière, militaire et stratégique. Fronts matérialisés de la forteresse Europe, ils sont autant une barrière physique, souvent inefficace, qu’une mise en scène des politiques européennes. « Le contrôle des frontières est un spectacle rituel, écrit Peter Andreas, auteur de nombreux travaux sur la frontière États-Unis–Mexique. Quand l’échec des efforts de dissuasion met le spectacle en crise, ses auteurs essaient de sauver la face en promettant un show plus grandiose que le précédent. »

      La forteresse ici est avant tout message. Bar­belés, capteurs thermiques, drones de Frontex et canons soniques ont de terribles effets sur les humains, mais ils existent d’abord parce qu’ils sont porteurs d’une vision du monde que les politiques européennes ont désormais entérinée. Il s’agit de se barricader et de le proclamer par la hauteur des murs. Et tant pis si ces barrières finissent toujours par dévoiler des brèches et fissures où s’en­gouf­frent les personnes en exil. C’est pour répondre à cette faillibilité des murs qu’a été engagée au niveau européen une politique dite d’« externalisation du contrôle des frontières ». Prosaïquement : une sous-traitance rémunérée de la prise en charge des populations indésirables par des pays souvent peu scrupuleux en matière de droits de l’homme.

      Un processus que l’on retrouve en de nombreux points clés des parcours migratoires, de la Serbie à la Libye en passant par la Turquie, la ­Tunisie ou le Maroc. Depuis que l’idée d’externalisation des frontières s’est progressivement diffusée dans les années 2000, formalisée notamment par deux documents de la Commission européenne, « Approche globale de la question des migrations et de la mobilité » (2011) et « Nouveau cadre de partenariat avec les pays tiers dans le cadre de l’Agenda européen en matière de migration » (2016), l’UE et ses 27 pays membres se sont employés à la généraliser, tissant sa toile vers le sud et vers l’est.

      Rembobinons : l’espace Schengen est officiellement instauré en mars 1995. Il entérine la suppression des contrôles aux frontières intérieures ainsi que la libre circulation des biens et personnes en Europe. En réponse, les pays membres de l’UE ne tardent pas à mettre en place des politiques visant à créer par-delà leurs frontières des obstacles aux migrations. Quelques épisodes servent de déto­nateurs, notamment les vagues migratoires ayant suivi les premières révoltes des Printemps arabes en 2011, puis les exodes syrien et afghan en 2015. Autres accélérateurs, les attentats terroristes islamistes qui ont entériné les replis sécuritaires, à l’image de ceux du 13 novembre 2015 en France.

      Schengen bridant le cadenassage du continent, les pays européens choisissent alors d’exporter l’approche sécuritaire et confient à des pays lointains la tâche de repousser les candidats à l’exil. C’est par exemple toute la logique du processus de Khartoum, lancé en 2014, visant à faire des pays d’Afrique de l’Est (Soudan, Érythrée, Kenya…) des acteurs majeurs de la lutte contre l’immigration irrégulière.

      Dans ce processus, une date importante, le 8 mars 2016. Ce jour-là, un accord est passé entre Ankara et Bruxelles : six milliards d’euros sont octroyés à la Turquie afin qu’elle déploie davantage d’efforts pour empêcher les migrations depuis ses frontières, tout en acceptant le retour de personnes exilées arrivées en Grèce. L’exemple type des politiques européennes, répliqué avec d’autres pays comme le Maroc, la Tunisie ou le Soudan. Mais le processus d’externalisation passe aussi par des dimensions plus opaques. C’est le cas par exemple de ces 18 accords de réadmission entre l’UE et des pays tels que le Pakistan ou la Biélorussie, lesquels permettent de faciliter les expulsions.

      Autre cheval de Troie, les aides au dévelop­pement conditionnées à des politiques locales de criminalisation des migrations. Le quart du Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique administré par l’UE, soit près de un milliard d’euros, serait ainsi dédié à la gestion des frontières africaines. C’est par des tours de passe-passe diplomatiques de ce type que des pays comme le Niger sont devenus des bases avancées de la forteresse Europe, avec des milliers de personnes bloquées dans des camps de transit, ne pouvant ni poursuivre leur route ni rebrousser chemin.

      Derrière cette politique européenne commune permettant à l’UE de se déresponsabiliser des obligations d’accueil et de protection des personnes demandeuses d’asile consignées dans la Convention de Genève de 1951, il y a également un enchevêtrement de politiques binationales s’ajoutant à l’édifice global. Ainsi, l’accord passé entre l’Italie et la Libye en 2017 a entériné un cas particulièrement scandaleux d’externalisation, condamnant des milliers d’innocents aux prisons de ce pays livré au chaos et à l’arbitraire. La volonté de l’Angleterre ou du Danemark de sous-traiter la gestion des demandes d’asile au Rwanda s’inscrit dans une logique similaire. De même que les politiques de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), décidées hors de tout cadre démocratique, pour des partenariats avec des pays comme l’Égypte, le Monténégro, le Sénégal ou l’Albanie, afin d’y « sous-traiter le cordon sanitaire tissé autour du ventre européen ».

      Ne pas s’y tromper, la raison première de cette externalisation généralisée de la gestion des frontières relève autant du calcul que du cynisme : la violence généralisée est lointaine, imputable à d’autres. Par l’utilisation d’acteurs externes, sévissant hors champ, les conséquences des politiques menées deviennent invisibles. La forteresse cache ainsi de l’autre côté de ses murs ceux qui payent le prix fort de ses actions. Dans le même temps, elle encourage les traversées les plus désespérées, provoque naufrages en cascade et drames dans le désert. Tout cela est loin, dissimulé. Sous le tapis, comme les cauchemars, qui quelques fois affleurent.

      https://lmsi.net/Vous-avez-dit-forteresse

    • Cartographier les remparts pour y tailler des brèches

      Pendant plusieurs années, Émilien Bernard s’est tapé la tête contre les murs (des frontières). Menant une enquête au long cours, dont certains fragments ont été publiés par CQFD, il sort un livre, Forteresse Europe, aux éditions Lux.

      Est-il nécessaire de présenter celui qui signe de sa plume une grande partie des pages de CQFD ? Oscillant entre reportages de terrain, et chroniques envolées, on peut parfois se demander à propos d’Émilien Bernard : mais d’où lui vient cette énergie prolifique ? Il serait tentant de répondre en exposant les complexités du personnage, plein d’empathie, qui égaie le quotidien de la rédac, mais ce serait tricher. Parce qu’en travaillant sur les frontières, il a fait ce qu’on peut faire de mieux en tant que Blanc éduqué de la classe moyenne, muni d’un passeport français : il s’est mis en retrait, à l’écoute, en rage. Et ça transpire dans son écriture.

      Forteresse Europe – Enquête sur l’envers de nos frontières (Lux, février 2024) est un livre dense, fruit d’années d’enquêtes aux frontières, constituant une cartographie des remparts au sein desquels le Vieux Continent cherche à se cadenasser. Des rails de Subotica aux barrières high tech de Melilla ; des Alpes glacées au tombeau de la mer Méditerranée ; des CRA de Marseille à la jungle de Calais… Au fil de la lecture, les murs sont auscultés sous toutes leurs coutures : physiques, administratives, psychiques, idéologiques. Au-delà d’un solide travail journalistique, la force du livre est de rassembler la parole de celles et ceux qui démontent, naviguent, contournent, ou volent au-dessus de ces barrières macabres. Personnes exilées en premier lieu, mais aussi militants et chercheurs engagés. On est fiers de faire la promo d’un mini pavé qui viendra pour sûr s’ajouter à la bibliothèque de toutes celles et ceux qui, pierre par pierre et mur par mur, s’appliquent à détruire cette foutue forteresse.

      https://cqfd-journal.org/Cartographier-les-remparts-pour-y

  • « La ruée minière au XXIe siècle » : le #mensonge de la #transition_énergétique

    La transition énergétique telle qu’elle est promue par les entreprises, les institutions et les gouvernements partout dans le monde repose sur l’extraction d’une quantité abyssale de #métaux. C’est ce paradoxe que décortique la journaliste et philosophe #Celia_Izoard dans son essai intitulé La ruée minière au XXIe siècle, qui paraît cette semaine au Québec aux Éditions de la rue Dorion.

    « Pour régler le plus important problème écologique de tous les temps, on a recours à l’industrie la plus polluante que l’on connaisse », résume l’autrice en visioconférence avec Le Devoir depuis son domicile, situé en pleine campagne dans le sud-ouest de la France.

    Cette dernière examine depuis plusieurs années les impacts sociaux et écologiques des nouvelles technologies. Elle a notamment publié un livre sur la vie des ouvriers de l’entreprise chinoise Foxconn, le plus grand fabricant de produits électroniques au monde. Ironiquement, nos outils numériques font défaut au cours de l’entrevue, si bien que nous devons poursuivre la discussion par le biais d’une bonne vieille ligne téléphonique résidentielle.

    Les métaux ont beau être de plus en plus présents dans les objets qui nous entourent, dont les multiples écrans, l’industrie minière fait très peu partie de l’imaginaire collectif actuel, explique Mme Izoard d’un ton posé et réfléchi. « Je croise tous les jours des gens qui me disent : “Ah bon, je ne savais pas que notre système reposait encore sur la #mine.” Ça me conforte dans l’idée que c’était utile de faire cette enquête. Notre système n’a jamais autant reposé sur l’#extraction_minière qu’aujourd’hui. »

    L’extraction de métaux a déjà doublé en vingt ans et elle n’est pas en voie de s’amenuiser, puisque les #énergies dites renouvelables, des #batteries pour #voitures_électriques aux panneaux solaires en passant par les éoliennes, en dépendent. Elle est susceptible d’augmenter de cinq à dix fois d’ici à 2050, selon une évaluation de l’Agence internationale de l’énergie.

    « Électrifier le parc automobile français nécessiterait toute la production annuelle de #cobalt dans le monde et deux fois plus que la production annuelle de #lithium dans le monde. Donc soit cette transition prendra beaucoup trop longtemps et ne freinera pas le réchauffement climatique, soit elle se fera dans la plus grande violence et une destruction incroyable », rapporte l’autrice.

    On bascule d’une forme d’extraction, du pétrole, à une autre, des métaux. « Cela n’a pas plus de sens que d’essayer de venir à bout de la toxicomanie remplaçant une addiction par une autre », juge-t-elle.

    Une justification officielle

    Les pouvoirs publics ne semblent pas y voir de problème. Ils font largement la promotion de cette #ruée_minière, promettant le développement de « #mines_responsables ». La #transition est la nouvelle excuse pour justifier pratiquement tous les #projets_miniers. « Une mine de cuivre est devenue miraculeusement une mine pour la transition », souligne Mme Izoard. Pourtant, le #cuivre sert à de multiples usages au-delà de l’#électrification, comme l’électronique, l’aérospatiale et l’armement.

    C’est dans ce contexte que la journaliste est partie à la recherche de mines responsables. Elle s’est documentée, elle a visité des sites d’exploitation, elle a consulté des experts de ce secteur d’activité et elle a rencontré des travailleurs, tout cela en #France, au #Maroc, au #Suriname et en #Espagne.

    Malgré les engagements publics et les certifications de plusieurs #entreprises_minières envers des pratiques durables et les droits de la personne, Celia Izoard n’a pas trouvé ce qu’elle cherchait. Au cours de cette quête, elle a publié une enquête pour le média Reporterre au sujet d’une mine marocaine mise en avant par les constructeurs automobiles #BMW et #Renault comme étant du « #cobalt_responsable ». Or, il s’est avéré que cette mine empoisonne les sols à l’#arsenic, dessèche la #nappe_phréatique et cause des maladies aux travailleurs.

    « La #mine_industrielle est un modèle qui est voué à avoir des impacts catastrophiques à moyen et long terme. Ce n’est pas parce que ces entreprises sont méchantes et malhonnêtes, mais parce qu’il y a des contraintes physiques dans cette activité. Elle nécessite énormément d’#eau et d’énergie, elle occupe beaucoup d’espace et elle déforeste. »

    #Boues_toxiques et pluies d’oies sauvages

    Dans son livre, Mme Izoard décrit de nombreux ravages et risques environnementaux qui sont matière à donner froid dans le dos. Les premières pages sont notamment consacrées au phénomène du #Berkeley_Pit, une ancienne mine de cuivre devenue un lac acide causant la mort de milliers d’oies sauvages.

    « Rappelons-nous la rupture de digue de résidus de la mine de cuivre et d’or de #Mount_Polley en 2014, lors de laquelle 17 millions de mètres cubes d’eau chargée en #métaux_toxiques ont irréversiblement contaminé de très grandes superficies et des ressources en eau d’une valeur inestimable, a-t-elle souligné au sujet de cette catastrophe canadienne. Or, des bassins de résidus de même type, il y en a 172 rien qu’en #Colombie-Britannique, et les boues toxiques qui y sont stockées représentent l’équivalent d’un million de piscines olympiques. Malheureusement, avec le chaos climatique, les risques de rupture accidentelle de ces barrages sont décuplés. » Elle considère d’ailleurs que le Canada est « au coeur de la tourmente extractiviste ».

    Les gouvernements du #Québec et du #Canada soutiennent généralement que le développement minier sur leur territoire respectera des #normes_environnementales plus strictes, en plus d’utiliser de l’énergie plus propre. Cet argument justifierait-il l’implantation de nouvelles mines ? Non, estime Mme Izoard.

    « Aucun État puissant industriellement ne relocalise sa #production_minière ni ne s’engage à cesser d’importer des métaux. Ce qui est en train de se passer, c’est que les besoins en métaux explosent dans tous les domaines et que les entreprises minières et les États se sont mis d’accord pour créer des mines partout où il est possible d’en créer. Ce n’est pas parce qu’on accepte une mine dans sa région qu’il n’y aura pas de mine pour la même substance à l’autre bout du monde. » Il est peu probable, par exemple, que des batteries produites au Québec s’affranchissent totalement des métaux importés.

    Pour une #décroissance_minérale

    Celia Izoard estime plutôt qu’une grande partie des mines du monde devraient fermer, puisqu’elles sont situées dans des zones menacées par la sécheresse. Nous n’aurions alors pas d’autre choix que de nous engager dans une désescalade de la consommation de métaux, « une remise en cause radicale de la manière dont on vit ». Selon cette vision, il faudrait contraindre l’ensemble du secteur industriel à se limiter, tout comme on lui demande de réduire ses émissions de GES. Les métaux devraient être réservés aux usages alors déterminés comme étant essentiels. Les immenses centres de données, les avions, les VUS électriques et les canettes d’aluminium sont-ils nécessaires à la vie humaine ?

    « Il faut arrêter de se laisser intimider par le #déterminisme_technologique, soit l’idée que le #progrès suit cette direction et qu’on ne peut rien changer. Ce sont des choix idéologiques et politiques très précis avec du financement public très important. Il faut cesser de penser que les technologies sont inéluctablement déployées et qu’on ne peut pas revenir en arrière. »

    https://www.ledevoir.com/lire/806617/coup-essai-mensonge-transition-energetique
    #mines #extractivisme #terres_rares #pollution

  • Chères collaboratrices - Mon blog sur l’écologie politique
    https://blog.ecologie-politique.eu/post/Cheres-collaboratrices

    Mais le passage n’est pas si simple, comme on l’a vu, entre une expérience minorisée et une volonté d’émancipation collective, quand notre ethos libéral et individualiste nous invite plutôt à saisir les possibilités de promotion individuelle. Pour cent femmes qui subissent les boys clubs en entreprise, combien de féministes anti-capitalistes ? C’est une confiance un peu excessive à accorder à une politique des identités qui serait devenue, pour la simple raison qu’on souhaite qu’elle le devienne, matérialiste. Comme si la présence de gays ou de lesbiennes, placardisées ou désormais out, au plus haut sommet de l’État avait depuis 2017 révolutionné les conditions matérielles en moyenne peu reluisantes des personnes LGBT (en moyenne). Et comme si le capitalisme états-unien ne s’appuyait pas sur des dirigeant·es d’entreprise et des employé·es à haut niveau de responsabilité issu·es du Sud global et qui, tout en étant très bien rémunéré·es, n’ont pas même le droit de vote dans le pays où elles et ils travaillent.

    #recension #livre #féminisme #libéralisme #Sandrine_Holin #Aude_Vidal

  • #Pénuries : des grains de sable dans la machine

    Depuis le 17 janvier, on trouve dans toutes les bonnes librairies le dernier #livre de notre contributeur #Renaud_Duterme. #Mondialisation, réseaux d’#approvisionnement, goulots d’étranglement… Voici, en quelques paragraphes, un aperçu du contenu de « Pénuries. Quand tout vient à manquer » (éd. Payot).

    Pénurie. Un mot que l’on croyait appartenir au passé. Mais que plusieurs événements (pandémie de Covid-19, blocage du canal de Suez, guerre en Ukraine) ont fait revenir sur le devant de l’actualité. Énergie, matières premières, denrées alimentaires, médicaments, matériaux de construction, pièces automobiles, puces électroniques, main d’œuvre, aucun secteur ne semble épargné par cette tendance préoccupante.

    Un approvisionnement sous tension

    La quasi-totalité des biens que nous achetons et utilisons nous parviennent via des #chaînes_d’approvisionnement aussi longues que complexes. Elles sont composées de multiples maillons, allant de l’extraction de matières premières (minerais, produits agricoles, énergie) et leur transformation, jusqu’à l’acheminement vers les rayons des supermarchés, en passant par la fabrication, l’entreposage et, bien sûr, le transport. Le tout fonctionnant en #flux_tendu (la logique de stock ayant laissé la place à un acheminement quotidien), principalement grâce au développement de la #conteneurisation et du #transport routier. Le maître mot de cette #logistique est la #fluidité. Le moindre grain de sable peut gripper toute la machine, a fortiori s’il n’est pas résorbé rapidement.

    Car mondialisation capitaliste oblige, les différentes étapes de ces chaînes d’approvisionnement ont été de plus en plus éloignées les unes des autres, augmentant les risques de #perturbations par #effet_domino. Conflits, catastrophes naturelles, aléas climatiques, grèves, attentats, cyber-attaques, épidémies, autant d’événements pouvant « gripper » un maillon de la chaîne (voire plusieurs) et par là provoquer des goulots d’étranglement remettant en question le fonctionnement même de l’#économie. Ces #goulots semblent se multiplier depuis quelques années et il est fort probable que cela ne soit qu’un début, tant de nombreuses ruptures se dessinent, causées par des limites géophysiques (épuisement des ressources), des dérèglements climatiques (sécheresses et inondations), la chute des rendements agricoles, des tensions socio-économiques (mouvements sociaux, grèves, manque de main d’œuvre, vieillissement de la population, montée des replis identitaires) ou encore géopolitiques (guerres et conflits divers).

    Rien que ces derniers mois, on peut évoquer l’assèchement du canal de Panama engendrant une réduction du nombre de navires pouvant l’emprunter quotidiennement ; les attaques des Houthis en mer Rouge contre des navires commerciaux, ce qui a contraint de nombreux armateurs à faire contourner l’Afrique à leurs navires ; ou encore les grèves et les blocages émanant du monde agricole qui, s’ils accentuaient, pourraient priver certains territoires d’approvisionnement divers. Rappelons que les cent premières villes de France ont seulement trois jours d’autonomie alimentaire, avec 98% de leur nourriture importée[1].

    Jusqu’ici, les tensions ont été en partie surmontées et n’ont pas débouché sur des ruptures majeures, matérialisées par des pénuries durables. Mais leur multiplication est un phénomène inquiétant et l’analyse objective des risques laisse supposer une aggravation et surtout une interconnexion entre des phénomènes a priori distincts les uns des autres. C’est d’autant plus vrai qu’un couac peut engendrer des perturbations bien plus longues que le problème en tant que tel, les retards s’accumulant à chaque étape, le redémarrage de la machine pouvant mettre plusieurs mois, voire années, pour retrouver la fluidité qui fait sa raison d’être.

    Ironie du sort, ces tensions impactent de nombreux éléments sans lesquels la logistique elle-même serait impossible. Les palettes, conserves, conteneurs, véhicules, emballages et cartons sont aussi fabriqués de façon industrielle et nécessitent des composants ou des matières souvent issus de pays lointains et dont le transport et les procédés de fabrication impliquent de grandes quantités d’énergie et de ressources (métaux, bois, eau, etc.).

    Idem pour la main d’œuvre nécessaire au bon fonctionnement des infrastructures qui nous entourent. La colère des agriculteurs est là pour nous rappeler que ces dernières dépendent in fine de travailleurs agricoles, de chauffeurs (deux professions qui ont bien du mal à trouver une relève auprès des jeunes générations), mais aussi d’employés de supermarché, d’exploitants forestiers, d’ouvriers du bâtiment, de magasiniers d’entrepôts logistiques, etc.

    Le ver était dans le fruit

    Ces #vulnérabilités sont loin d’être une fatalité et découlent d’une vision de la mondialisation au sein de laquelle les forces du marché jouissent d’une liberté quasi-totale, ce qui a engendré une multinationalisation des entreprises, la création de zones de libre-échange de plus en plus grandes et la mainmise de la finance sur les grands processus productifs. Des principes se sont peu à peu imposés tels que la spécialisation des territoires dans une ou quelques productions (particulièrement visible en ce qui concerne l’agriculture) ; la standardisation à outrance permettant des économies d’échelles ; la liberté des mouvements de capitaux, engendrant des phénomènes spéculatifs à l’origine de la volatilité des prix de nombreuses matières premières ; la mise en concurrence de l’ensemble des territoires et des travailleurs ; et bien sûr l’interdépendance mutuelle.

    Ces principes entrainent des conséquences dramatiques chez un nombre croissant de personnes, entraînant une perte de légitimité du système en place, ce qui risque également d’alimenter des tensions sociales et géopolitiques déjà existantes, perturbant un peu plus ces chaînes logistiques. À titre d’exemple, les politiques de fermeture des frontières prônées par de plus en plus de gouvernements national-populistes priveraient les pays qui les appliquent de milliers de travailleurs, conduisant à des pénuries de main d’œuvre dans de nombreux secteurs.

    Démondialiser les risques

    En outre, avoir un regard global sur nos systèmes d’approvisionnement permet de (re)mettre certaines réalités au cœur des analyses. Il en est ainsi de cycles de production concernant les différents objets qui nous entourent. De l’origine des composants nécessaires à leur fabrication. Des impacts écologiques et sociaux présents à toutes les étapes de ces cycles. Des limites du recyclage. De la fable que constitue le découplage[2], cette idée selon laquelle il serait possible de croître économiquement tout en baissant les impacts environnementaux. Des limites physiques et sociales auxquelles va se heurter la poursuite de notre consommation.

    Pour ce faire, il importe de populariser de nombreux concepts tels que l’#empreinte_matière (qui tente de calculer l’ensemble des ressources nécessaires à la fabrication d’un bien), l’#énergie_grise et l’#eau_virtuelle (respectivement l’énergie et l’eau entrant dans les cycles d’extraction et de fabrication d’un produit), le #métabolisme (qui envisage toute activité humaine à travers le prisme d’un organisme nécessitant des ressources et rejetant des déchets), la #dette_écologique (qui inclut le pillage des autres pays dans notre développement économique) ou encore l’#extractivisme (qui conçoit l’exploitation de la nature d’une façon comptable).

    Et par là aller vers plus d’#autonomie_territoriale, en particulier dans les domaines les plus élémentaires tels que l’#agriculture, l’#énergie ou la #santé (rappelons qu’environ 80% des principes actifs indispensables à la plupart des médicaments sont produits en Chine et en Inde)[3].

    Dans le cas contraire, l’#anthropocène, avec ses promesses d’abondance, porte en lui les futures pénuries. Le monde ne vaut-il pas mieux qu’un horizon à la Mad Max ?

    https://blogs.mediapart.fr/geographies-en-mouvement/blog/300124/penuries-des-grains-de-sable-dans-la-machine

    #pénurie #mondialisation #globalisation

    • Pénuries. Quand tout vient à manquer

      Comment s’adapter aux ruptures qui nous attendent dans un monde en contraction

      Saviez-vous que la plupart des villes ne survivraient que deux à trois jours sans apport extérieur de nourriture ? Qu’un smartphone nécessite des métaux rares issus des quatre coins du monde ? Et que 80% des principes actifs nécessaires à la fabrication de nos médicaments sont produits en Chine et en Inde ? La quasi-totalité des biens que nous achetons parviennent jusqu’à nous via des chaînes d’approvisionnement aussi complexes que lointaines, de l’extraction et la transformation de matières premières (minerais, produits agricoles, énergie) à l’acheminement de produits finis vers nos supermarchés. Ce qui, mondialisation capitaliste oblige, augmente les risques de vulnérabilité de ces chaînes par effet domino.
      Nous expérimentons déjà ces pénuries que nous vivons mal, habitués à une société de flux ininterrompu. Or elles vont s’aggraver du fait de l’épuisement des ressources, des dérèglements climatiques, des tensions socio-économiques et géopolitiques. Demain, nous allons manquer de riz, de cuivre, de pétrole... Il est donc urgent de nous y préparer et d’envisager un autre système économique afin de rendre nos villes et nos vies plus autonomes et résilientes.

      https://www.payot-rivages.fr/payot/livre/p%C3%A9nuries-9782228934930

  • PFAS. Gli inquinanti eterni e invisibili nell’acqua. Storie di diritti negati e cittadinanza attiva.

    Quattro lettere che messe insieme descrivono i contorni di un disastro ambientale globale. I PFAS (composti Poli e perfluoroalchilici), nati dall’attività umana, si sono diffusi in ogni angolo del Pianeta, contaminando l’ecosistema e il nostro organismo.

    In questo sconvolgente reportage, il primo su questo tema nel nostro Paese, #Giuseppe_Ungherese ci racconta la storia e gli effetti nefasti dei PFAS, derivati del fluoro utilizzati per moltissimi prodotti di uso quotidiano e definiti “inquinanti eterni”.

    Attraverso un approccio unico, che alterna conoscenza scientifica, testimonianze e impegno civile, l’autore ci guida in un viaggio nelle zone di sacrificio, le regioni del mondo più colpite dalla contaminazione, dove gli interessi economici dell’industria e delle multinazionali della chimica hanno sacrificato la salute dell’ambiente e delle comunità, spesso con la complicità delle istituzioni, che per anni hanno ignorato o sottovalutato il problema.

    Dalla causa per crimini ambientali dell’azienda DuPont negli Stati Uniti, l’inquinamento da PFAS interessa molte zone dell’Occidente e arriva fino in Italia, allo stabilimento della Solvay in Piemonte e a quello della Fluorsid in Sardegna, passando per il Veneto, dove i PFAS hanno contaminato l’acqua potabile di oltre 350 mila persone. Cittadini che dal basso sono stati costretti ad attivarsi per vedere riconosciuti i propri diritti e, in un rinnovato civismo, hanno trovato nelle azioni collettive e di protesta la via d’uscita da questa crisi. Questo libro è anche la loro storia.

    https://altreconomia.it/prodotto/pfas
    #pollution #eau #pollution_de_l'eau #PFAS #livre #fluorure #industrie_chimique #Solvay #Fluorsid #santé #environnement #contamination #résistance

  • L’#Europe et la fabrique de l’étranger

    Les discours sur l’ « #européanité » illustrent la prégnance d’une conception identitaire de la construction de l’Union, de ses #frontières, et de ceux qu’elle entend assimiler ou, au contraire, exclure au nom de la protection de ses #valeurs particulières.

    Longtemps absente de la vie démocratique de l’#Union_européenne (#UE), la question identitaire s’y est durablement installée depuis les années 2000. Si la volonté d’affirmer officiellement ce que « nous, Européens » sommes authentiquement n’est pas nouvelle, elle concernait jusqu’alors surtout – à l’instar de la Déclaration sur l’identité européenne de 1973 – les relations extérieures et la place de la « Communauté européenne » au sein du système international. À présent, elle renvoie à une quête d’« Européanité » (« Europeanness »), c’est-à-dire la recherche et la manifestation des #trait_identitaires (héritages, valeurs, mœurs, etc.) tenus, à tort ou à raison, pour caractéristiques de ce que signifie être « Européens ». Cette quête est largement tournée vers l’intérieur : elle concerne le rapport de « nous, Européens » à « nous-mêmes » ainsi que le rapport de « nous » aux « autres », ces étrangers et étrangères qui viennent et s’installent « chez nous ».

    C’est sous cet aspect identitaire qu’est le plus fréquemment et vivement discuté ce que l’on nomme la « #crise_des_réfugiés » et la « #crise_migratoire »

    L’enjeu qui ferait de l’#accueil des exilés et de l’#intégration des migrants une « #crise » concerne, en effet, l’attitude que les Européens devraient adopter à l’égard de celles et ceux qui leur sont « #étrangers » à double titre : en tant qu’individus ne disposant pas de la #citoyenneté de l’Union, mais également en tant que personnes vues comme les dépositaires d’une #altérité_identitaire les situant à l’extérieur du « #nous » – au moins à leur arrivée.

    D’un point de vue politique, le traitement que l’Union européenne réserve aux étrangères et étrangers se donne à voir dans le vaste ensemble de #discours, #décisions et #dispositifs régissant l’#accès_au_territoire, l’accueil et le #séjour de ces derniers, en particulier les accords communautaires et agences européennes dévolus à « une gestion efficace des flux migratoires » ainsi que les #politiques_publiques en matière d’immigration, d’intégration et de #naturalisation qui restent du ressort de ses États membres.

    Fortement guidées par des considérations identitaires dont la logique est de différencier entre « nous » et « eux », de telles politiques soulèvent une interrogation sur leurs dynamiques d’exclusion des « #autres » ; cependant, elles sont aussi à examiner au regard de l’#homogénéisation induite, en retour, sur le « nous ». C’est ce double questionnement que je propose de mener ici.

    En quête d’« Européanité » : affirmer la frontière entre « nous » et « eux »

    La question de savoir s’il est souhaitable et nécessaire que les contours de l’UE en tant que #communauté_politique soient tracés suivant des #lignes_identitaires donne lieu à une opposition philosophique très tranchée entre les partisans d’une défense sans faille de « l’#identité_européenne » et ceux qui plaident, à l’inverse, pour une « #indéfinition » résolue de l’Europe. Loin d’être purement théorique, cette opposition se rejoue sur le plan politique, sous une forme tout aussi dichotomique, dans le débat sur le traitement des étrangers.

    Les enjeux pratiques soulevés par la volonté de définir et sécuriser « notre » commune « Européanité » ont été au cœur de la controverse publique qu’a suscitée, en septembre 2019, l’annonce faite par #Ursula_von_der_Leyen de la nomination d’un commissaire à la « #Protection_du_mode_de_vie_européen », mission requalifiée – face aux critiques – en « #Promotion_de_notre_mode_de_vie_européen ». Dans ce portefeuille, on trouve plusieurs finalités d’action publique dont l’association même n’a pas manqué de soulever de vives inquiétudes, en dépit de la requalification opérée : à l’affirmation publique d’un « #mode_de_vie » spécifiquement « nôtre », lui-même corrélé à la défense de « l’#État_de_droit », « de l’#égalité, de la #tolérance et de la #justice_sociale », se trouvent conjoints la gestion de « #frontières_solides », de l’asile et la migration ainsi que la #sécurité, le tout placé sous l’objectif explicite de « protéger nos citoyens et nos valeurs ».

    Politiquement, cette « priorité » pour la période 2019-2024 s’inscrit dans la droite ligne des appels déjà anciens à doter l’Union d’un « supplément d’âme
     » ou à lui « donner sa chair » pour qu’elle advienne enfin en tant que « #communauté_de_valeurs ». De tels appels à un surcroît de substance spirituelle et morale à l’appui d’un projet européen qui se devrait d’être à la fois « politique et culturel » visaient et visent encore à répondre à certains problèmes pendants de la construction européenne, depuis le déficit de #légitimité_démocratique de l’UE, si discuté lors de la séquence constitutionnelle de 2005, jusqu’au défaut de stabilité culminant dans la crainte d’une désintégration européenne, rendue tangible en 2020 par le Brexit.

    Précisément, c’est de la #crise_existentielle de l’Europe que s’autorisent les positions intellectuelles qui, poussant la quête d’« Européanité » bien au-delà des objectifs politiques évoqués ci-dessus, la déclinent dans un registre résolument civilisationnel et défensif. Le geste philosophique consiste, en l’espèce, à appliquer à l’UE une approche « communautarienne », c’est-à-dire à faire entièrement reposer l’UE, comme ensemble de règles, de normes et d’institutions juridiques et politiques, sur une « #communauté_morale » façonnée par des visions du bien et du monde spécifiques à un groupe culturel. Une fois complétée par une rhétorique de « l’#enracinement » desdites « #valeurs_européennes » dans un patrimoine historique (et religieux) particulier, la promotion de « notre mode de vie européen » peut dès lors être orientée vers l’éloge de ce qui « nous » singularise à l’égard d’« autres », de « ces mérites qui nous distinguent » et que nous devons être fiers d’avoir diffusés au monde entier.

    À travers l’affirmation de « notre » commune « Européanité », ce n’est pas seulement la reconnaissance de « l’#exception_européenne » qui est recherchée ; à suivre celles et ceux qui portent cette entreprise, le but n’est autre que la survie. Selon #Chantal_Delsol, « il en va de l’existence même de l’Europe qui, si elle n’ose pas s’identifier ni nommer ses caractères, finit par se diluer dans le rien. » Par cette #identification européenne, des frontières sont tracées. Superposant Europe historique et Europe politique, Alain Besançon les énonce ainsi : « l’Europe s’arrête là où elle s’arrêtait au XVIIe siècle, c’est-à-dire quand elle rencontre une autre civilisation, un régime d’une autre nature et une religion qui ne veut pas d’elle. »

    Cette façon de délimiter un « #nous_européen » est à l’exact opposé de la conception de la frontière présente chez les partisans d’une « indéfinition » et d’une « désappropriation » de l’Europe. De ce côté-ci de l’échiquier philosophique, l’enjeu est au contraire de penser « un au-delà de l’identité ou de l’identification de l’Europe », étant entendu que le seul « crédit » que l’on puisse « encore accorder » à l’Europe serait « celui de désigner un espace de circulation symbolique excédant l’ordre de l’identification subjective et, plus encore, celui de la #crispation_identitaire ». Au lieu de chercher à « circonscri[re] l’identité en traçant une frontière stricte entre “ce qui est européen” et “ce qui ne l’est pas, ne peut pas l’être ou ne doit pas l’être” », il s’agit, comme le propose #Marc_Crépon, de valoriser la « #composition » avec les « #altérités » internes et externes. Animé par cette « #multiplicité_d’Europes », le principe, thématisé par #Etienne_Balibar, d’une « Europe comme #Borderland », où les frontières se superposent et se déplacent sans cesse, est d’aller vers ce qui est au-delà d’elle-même, vers ce qui l’excède toujours.

    Tout autre est néanmoins la dynamique impulsée, depuis une vingtaine d’années, par les politiques européennes d’#asile et d’immigration.

    La gouvernance européenne des étrangers : l’intégration conditionnée par les « valeurs communes »

    La question du traitement public des étrangers connaît, sur le plan des politiques publiques mises en œuvre par les États membres de l’UE, une forme d’européanisation. Celle-ci est discutée dans les recherches en sciences sociales sous le nom de « #tournant_civique ». Le terme de « tournant » renvoie au fait qu’à partir des années 2000, plusieurs pays européens, dont certains étaient considérés comme observant jusque-là une approche plus ou moins multiculturaliste (tels que le Royaume-Uni ou les Pays-Bas), ont développé des politiques de plus en plus « robustes » en ce qui concerne la sélection des personnes autorisées à séjourner durablement sur leur territoire et à intégrer la communauté nationale, notamment par voie de naturalisation. Quant au qualificatif de « civique », il marque le fait que soient ajoutés aux #conditions_matérielles (ressources, logement, etc.) des critères de sélection des « désirables » – et, donc, de détection des « indésirables » – qui étendent les exigences relatives à une « #bonne_citoyenneté » aux conduites et valeurs personnelles. Moyennant son #intervention_morale, voire disciplinaire, l’État se borne à inculquer à l’étranger les traits de caractère propices à la réussite de son intégration, charge à lui de démontrer qu’il conforme ses convictions et comportements, y compris dans sa vie privée, aux « valeurs » de la société d’accueil. Cette approche, centrée sur un critère de #compatibilité_identitaire, fait peser la responsabilité de l’#inclusion (ou de l’#exclusion) sur les personnes étrangères, et non sur les institutions publiques : si elles échouent à leur assimilation « éthique » au terme de leur « #parcours_d’intégration », et a fortiori si elles s’y refusent, alors elles sont considérées comme se plaçant elles-mêmes en situation d’être exclues.

    Les termes de « tournant » comme de « civique » sont à complexifier : le premier car, pour certains pays comme la France, les dispositifs en question manifestent peu de nouveauté, et certainement pas une rupture, par rapport aux politiques antérieures, et le second parce que le caractère « civique » de ces mesures et dispositifs d’intégration est nettement moins évident que leur orientation morale et culturelle, en un mot, identitaire.

    En l’occurrence, c’est bien plutôt la notion d’intégration « éthique », telle que la définit #Jürgen_Habermas, qui s’avère ici pertinente pour qualifier ces politiques : « éthique » est, selon lui, une conception de l’intégration fondée sur la stabilisation d’un consensus d’arrière-plan sur des « valeurs » morales et culturelles ainsi que sur le maintien, sinon la sécurisation, de l’identité et du mode de vie majoritaires qui en sont issus. Cette conception se distingue de l’intégration « politique » qui est fondée sur l’observance par toutes et tous des normes juridico-politiques et des principes constitutionnels de l’État de droit démocratique. Tandis que l’intégration « éthique » requiert des étrangers qu’ils adhèrent aux « valeurs » particulières du groupe majoritaire, l’intégration « politique » leur demande de se conformer aux lois et d’observer les règles de la participation et de la délibération démocratiques.

    Or, les politiques d’immigration, d’intégration et de naturalisation actuellement développées en Europe sont bel et bien sous-tendues par cette conception « éthique » de l’intégration. Elles conditionnent l’accès au « nous » à l’adhésion à un socle de « valeurs » officiellement déclarées comme étant déjà « communes ». Pour reprendre un exemple français, cette approche ressort de la manière dont sont conçus et mis en œuvre les « #contrats_d’intégration » (depuis le #Contrat_d’accueil_et_d’intégration rendu obligatoire en 2006 jusqu’à l’actuel #Contrat_d’intégration_républicaine) qui scellent l’engagement de l’étranger souhaitant s’installer durablement en France à faire siennes les « #valeurs_de_la_République » et à les « respecter » à travers ses agissements. On retrouve la même approche s’agissant de la naturalisation, la « #condition_d’assimilation » propre à cette politique donnant lieu à des pratiques administratives d’enquête et de vérification quant à la profondeur et la sincérité de l’adhésion des étrangers auxdites « valeurs communes », la #laïcité et l’#égalité_femmes-hommes étant les deux « valeurs » systématiquement mises en avant. L’étude de ces pratiques, notamment les « #entretiens_d’assimilation », et de la jurisprudence en la matière montre qu’elles ciblent tout particulièrement les personnes de religion et/ou de culture musulmanes – ou perçues comme telles – en tant qu’elles sont d’emblée associées à des « valeurs » non seulement différentes, mais opposées aux « nôtres ».

    Portées par un discours d’affrontement entre « systèmes de valeurs » qui n’est pas sans rappeler le « #choc_des_civilisations » thématisé par #Samuel_Huntington, ces politiques, censées « intégrer », concourent pourtant à radicaliser l’altérité « éthique » de l’étranger ou de l’étrangère : elles construisent la figure d’un « autre » appartenant – ou suspecté d’appartenir – à un système de « valeurs » qui s’écarterait à tel point du « nôtre » que son inclusion dans le « nous » réclamerait, de notre part, une vigilance spéciale pour préserver notre #identité_collective et, de sa part, une mise en conformité de son #identité_personnelle avec « nos valeurs », telles qu’elles s’incarneraient dans « notre mode de vie ».

    Exclusion des « autres » et homogénéisation du « nous » : les risques d’une « #Europe_des_valeurs »

    Le recours aux « valeurs communes », pour définir les « autres » et les conditions de leur entrée dans le « nous », n’est pas spécifique aux politiques migratoires des États nationaux. L’UE, dont on a vu qu’elle tenait à s’affirmer en tant que « communauté morale », a substitué en 2009 au terme de « #principes » celui de « valeurs ». Dès lors, le respect de la dignité humaine et des droits de l’homme, la liberté, la démocratie, l’égalité, l’État de droit sont érigés en « valeurs » sur lesquelles « l’Union est fondée » (art. 2 du Traité sur l’Union européenne) et revêtent un caractère obligatoire pour tout État souhaitant devenir et rester membre de l’UE (art. 49 sur les conditions d’adhésion et art. 7 sur les sanctions).

    Reste-t-on ici dans le périmètre d’une « intégration politique », au sens où la définit Habermas, ou franchit-on le cap d’une « intégration éthique » qui donnerait au projet de l’UE – celui d’une intégration toujours plus étroite entre les États, les peuples et les citoyens européens, selon la formule des traités – une portée résolument identitaire, en en faisant un instrument pour sauvegarder la « #civilisation_européenne » face à d’« autres » qui la menaceraient ? La seconde hypothèse n’a certes rien de problématique aux yeux des partisans de la quête d’« Européanité », pour qui le projet européen n’a de sens que s’il est tout entier tourné vers la défense de la « substance » identitaire de la « civilisation européenne ».

    En revanche, le passage à une « intégration éthique », tel que le suggère l’exhortation à s’en remettre à une « Europe des valeurs » plutôt que des droits ou de la citoyenneté, comporte des risques importants pour celles et ceux qui souhaitent maintenir l’Union dans le giron d’une « intégration politique », fondée sur le respect prioritaire des principes démocratiques, de l’État de droit et des libertés fondamentales. D’où également les craintes que concourt à attiser l’association explicite des « valeurs de l’Union » à un « mode de vie » à préserver de ses « autres éthiques ». Deux risques principaux semblent, à cet égard, devoir être mentionnés.

    En premier lieu, le risque d’exclusion des « autres » est intensifié par la généralisation de politiques imposant un critère de #compatibilité_identitaire à celles et ceux que leur altérité « éthique », réelle ou supposée, concourt à placer à l’extérieur d’une « communauté de valeurs » enracinée dans des traditions particulières, notamment religieuses. Fondé sur ces bases identitaires, le traitement des étrangers en Europe manifesterait, selon #Etienne_Tassin, l’autocontradiction d’une Union se prévalant « de la raison philosophique, de l’esprit d’universalité, de la culture humaniste, du règne des droits de l’homme, du souci pour le monde dans l’ouverture aux autres », mais échouant lamentablement à son « test cosmopolitique et démocratique ». Loin de représenter un simple « dommage collatéral » des politiques migratoires de l’UE, les processus d’exclusion touchant les étrangers constitueraient, d’après lui, « leur centre ». Même position de la part d’Étienne Balibar qui n’hésite pas à dénoncer le « statut d’#apartheid » affectant « l’immigration “extracommunautaire” », signifiant par là l’« isolement postcolonial des populations “autochtones” et des populations “allogènes” » ainsi que la construction d’une catégorie d’« étrangers plus qu’étrangers » traités comme « radicalement “autres”, dissemblables et inassimilables ».

    Le second risque que fait courir la valorisation d’un « nous » européen désireux de préserver son intégrité « éthique », touche au respect du #pluralisme. Si l’exclusion des « autres » entre assez clairement en tension avec les « valeurs » proclamées par l’Union, les tendances à l’homogénéisation résultant de l’affirmation d’un consensus fort sur des valeurs déclarées comme étant « toujours déjà » communes aux Européens ne sont pas moins susceptibles de contredire le sens – à la fois la signification et l’orientation – du projet européen. Pris au sérieux, le respect du pluralisme implique que soit tolérée et même reconnue une diversité légitime de « valeurs », de visions du bien et du monde, dans les limites fixées par l’égale liberté et les droits fondamentaux. Ce « fait du pluralisme raisonnable », avec les désaccords « éthiques » incontournables qui l’animent, est le « résultat normal » d’un exercice du pouvoir respectant les libertés individuelles. Avec son insistance sur le partage de convictions morales s’incarnant dans un mode de vie culturel, « l’Europe des valeurs » risque de produire une « substantialisation rampante » du « nous » européen, et d’entériner « la prédominance d’une culture majoritaire qui abuse d’un pouvoir de définition historiquement acquis pour définir à elle seule, selon ses propres critères, ce qui doit être considéré comme la culture politique obligatoire de la société pluraliste ».

    Soumis aux attentes de reproduction d’une identité aux frontières « éthiques », le projet européen est, en fin de compte, dévié de sa trajectoire, en ce qui concerne aussi bien l’inclusion des « autres » que la possibilité d’un « nous » qui puisse s’unir « dans la diversité ».

    https://laviedesidees.fr/L-Europe-et-la-fabrique-de-l-etranger
    #identité #altérité #intégration_éthique #intégration_politique #religion #islam

    • Politique de l’exclusion

      Notion aussi usitée que contestée, souvent réduite à sa dimension socio-économique, l’exclusion occupe pourtant une place centrale dans l’histoire de la politique moderne. Les universitaires réunis autour de cette question abordent la dimension constituante de l’exclusion en faisant dialoguer leurs disciplines (droit, histoire, science politique, sociologie). Remontant à la naissance de la citoyenneté moderne, leurs analyses retracent l’invention de l’espace civique, avec ses frontières, ses marges et ses zones d’exclusion, jusqu’à l’élaboration actuelle d’un corpus de valeurs européennes, et l’émergence de nouvelles mobilisations contre les injustices redessinant les frontières du politique.

      Tout en discutant des usages du concept d’exclusion en tenant compte des apports critiques, ce livre explore la manière dont la notion éclaire les dilemmes et les complexités contemporaines du rapport à l’autre. Il entend ainsi dévoiler l’envers de l’ordre civique, en révélant la permanence d’une gouvernementalité par l’exclusion.

      https://www.puf.com/politique-de-lexclusion

      #livre

  • Vivre et lutter dans un monde toxique. #Violence_environnementale et #santé à l’âge du #pétrole

    Pour en finir avec les success stories pétrolières, voici une histoire des territoires sacrifiés à la transformation des #hydrocarbures. Elle éclaire, à partir de sources nouvelles, les #dégâts et les #luttes pour la santé au XXe siècle, du #Japon au #Canada, parmi les travailleurs et travailleuses des enclaves industrielles italiennes (#Tarento, #Sardaigne, #Sicile), auprès des pêcheurs et des paysans des « #Trente_Ravageuses » (la zone de #Fos / l’étang de# Berre, le bassin gazier de #Lacq), ou encore au sein des Premières Nations américaines et des minorités frappées par les #inégalités_environnementales en #Louisiane.
    Ces différents espaces nous racontent une histoire commune : celle de populations délégitimées, dont les plaintes sont systématiquement disqualifiées, car perçues comme non scientifiques. Cependant, elles sont parvenues à mobiliser et à produire des savoirs pour contester les stratégies entrepreneuriales menaçant leurs #lieux_de_vie. Ce livre expose ainsi la #tension_sociale qui règne entre défense des #milieux_de_vie et #profits économiques, entre santé et #emploi, entre logiques de subsistance et logiques de #pétrolisation.
    Un ouvrage d’une saisissante actualité à l’heure de la désindustrialisation des #territoires_pétroliers, des #conflits sur la #décarbonation des sociétés contemporaines, et alors que le désastre de #Lubrizol a réactivé les interrogations sur les effets sanitaires des dérivés pétroliers.

    https://www.seuil.com/ouvrage/vivre-et-lutter-dans-un-monde-toxique-collectif/9782021516081

    #peuples_autochtones #pollution #toxicité #livre

    • Ces territoires sacrifiés au pétrole

      La société du pétrole sur laquelle s’est bâtie notre prospérité ne s’est pas faite sans sacrifices. Gwenola Le Naour et Renaud Bécot, co-directeurs d’un ouvrage sur ce sujet, lèvent le voile sur les dégâts causés par cette « pétrolisation » du monde, en France et à l’étranger.

      Si le pétrole et ses produits ont permis l’émergence de notre mode de vie actuel, l’activité des raffineries et autres usines de la pétrochimie a abîmé les écosystèmes et les paysages et a des effets de long terme sur la santé humaine. Dans le livre qu’ils ont coordonné, Vivre et lutter dans un monde toxique (Seuil, septembre 2023), Gwénola Le Naour et Renaud Bécot lèvent le voile sur les dégâts causés par cette « pétrolisation » du monde, selon leurs propres mots. Ils ont réuni plusieurs études de cas dans des territoires en France et à l’étranger pour le démontrer. Un constat d’autant plus actuel que la société des hydrocarbures est loin d’être révolue : la consommation de pétrole a atteint un record absolu en 2023, avec plus de 100 millions de barils par jour en moyenne.

      À la base de votre ouvrage, il y a ce que vous appelez « la pétrolisation du monde ». Que recouvre ce terme ?
      Gwenola Le Naour1. Dans les années 1960, s’est développée l’idée que le pétrole était une énergie formidable, rendant possible la fabrication de produits tels que le plastique, les textiles synthétiques, les peintures, les cosmétiques, les pesticides, qui ont révolutionné nos modes de vie et décuplé les rendements agricoles. La pétrolisation désigne cette mutation de nos systèmes énergétiques pendant laquelle les hydrocarbures se sont imposés partout sur la planète et ont littéralement métamorphosé nos territoires physiques et mentaux.

      L’arrivée du pétrole et de ses dérivés nous est le plus souvent présentée comme une épopée, une success story. On a mis de côté la face sombre de cette pétrolisation, avec ses territoires sacrifiés comme Fos-sur-Mer, qui abrite depuis 1965 une immense raffinerie représentant aujourd’hui 10 % de la capacité de raffinage de l’Hexagone, ou Tarente, dans le sud de l’Italie, où se côtoient une raffinerie, une usine pétrochimique, un port commercial, une décharge industrielle et la plus grande aciérie d’Europe.

      Comment des territoires entiers ont-ils pu être ainsi abandonnés au pétrole ?
      Renaud Bécot2. L’industrie du pétrole et des hydrocarbures n’est pas une industrie comme les autres. Les sociétés pétrolières ont été largement accompagnées par les États. Comme pour le nucléaire, l’histoire de l’industrie pétrolière est étroitement liée à l’histoire des stratégies énergétiques des États et à la manière dont ils se représentent leur indépendance énergétique. L’État a soutenu activement ces installations destinées à produire de la croissance et des richesses. Pour autant, ces industries ne se sont pas implantées sans résistance, malgré les discours de « progrès » qui les accompagnaient.

      Des luttes ont donc eu lieu dès l’installation de ces complexes ?
      G. L. N. Dès le début, les populations locales, mais aussi certains élus, ont compris l’impact que ces complexes gigantesques allaient avoir sur leur environnement. Ces mobilisations ont échoué à Fos-sur-Mer ou au sud de Lyon, où l’installation de la raffinerie de Feyzin et de tout le complexe pétrochimique (le fameux « couloir de la chimie ») a fait disparaître les bras morts du Rhône et des terres agricoles... Quelques-unes ont cependant abouti : un autre projet de raffinerie, envisagé un temps dans le Beaujolais, a dû être abandonné. Il est en revanche plus difficile de lutter une fois que ces complexes sont installés, car l’implantation de ce type d’infrastructures est presque irréversible : le coût d’une dépollution en cas de fermeture est gigantesque et sans garantie de résultat

      Les habitants qui vivent à côté de ces installations finissent ainsi par s’en accommoder… En partie parce qu’ils n’ont pas d’autre choix, et aussi parce que les industriels se sont efforcés dès les années 1960-1970 et jusqu’à aujourd’hui de se conduire en « bons voisins ». Ils négocient leur présence en finançant par exemple des infrastructures culturelles et/ou sportives. Sans oublier l’éternel dilemme entre les emplois apportés par ces industries et les nuisances qu’elles génèrent. Dans le livre, nous avons qualifié ces arrangements à l’échelle des districts pétrochimiques de « compromis fordistes territorialisés ».

      Que recouvre ce terme de compromis ?
      R. B. En échange de l’accaparement de terres par l’industrie et du cortège de nuisances qui l’accompagne, les collectivités locales obtiennent des contreparties qui correspondent à une redistribution partielle des bénéfices de l’industrie. Cette redistribution peut être régulière (via la taxe professionnelle versée aux communes jusqu’en 2010, notamment), ou exceptionnelle, après un accident par exemple. Ainsi, en 1989, après une pollution spectaculaire qui marque les habitants vivant près de Lubrizol en Normandie, l’entreprise a versé 100 000 francs à la municipalité du Petit-Quevilly pour qu’elle plante quatre-vingts arbres dans la ville...

      Mais ce type de compromis a également été très favorable aux industries en leur offrant par exemple des allégements fiscaux de long terme, comme en Sicile près de Syracuse où se situe l’un des plus grands sites chimiques et pétrochimiques qui emploie plus de 7 000 personnes, voire une totale exonération fiscale comme en Louisiane, sur les rives du Mississippi. Des années 1950 aux années 1980, pas moins de 5 000 entreprises sur le sol américain – majoritairement pétrochimiques, pétrolières, métallurgiques ainsi que des sociétés gazières – ont demandé à bénéficier de ces exonérations, parmi lesquelles les sociétés les plus rentables du pays telles que DuPont, Shell Oil ou Exxon...

      Ces pratiques, qui se sont développées surtout lors des phases d’expansion de la pétrochimie, rendent plus difficile le retrait de ces industries polluantes. Les territoires continuent de penser qu’ils en tirent un bénéfice, même si cela est de moins en moins vrai.

      On entend souvent dire, concernant l’industrie pétrolière comme le nucléaire d’ailleurs, que les accidents sont rares et qu’on ne peut les utiliser pour remettre en cause toute une industrie… Est-ce vraiment le cas ?
      G. L. N. On se souvient des accidents de type explosions comme celle de la raffinerie de Feyzin, qui fit 18 morts en 1966, ou celle d’un stock de nitrates d’ammonium de l’usine d’engrais AZF à Toulouse en 2001, qui provoqua la mort de 31 personnes – car ils sont rares. Mais si l’on globalise sur toute la chaîne des hydrocarbures, les incidents et les accidents – y compris graves ou mortels pour les salariés – sont en réalité fréquents, même si on en entend rarement parler au-delà de la presse locale (fuites, explosions, incendies…). Sans oublier le cortège des nuisances liées au fonctionnement quotidien de ces industries, telles que la pollution de l’air ou de l’eau, et leurs conséquences sur la santé.

      Pour qualifier les méfaits des industries pétrochimiques, sur la santé notamment, vous parlez de « violence lente ». Pouvez-vous expliquer le choix de cette expression ?
      G. L. N. Cette expression, créée par l’auteur nord-américain Rob Nixon, caractérise une violence graduelle, disséminée dans le temps, caractéristique de l’économie fossile. Cette violence est également inégalitaire car elle touche prioritairement des populations déjà vulnérables : je pense notamment aux populations noires américaines de Louisiane dont les générations précédentes étaient esclaves dans les plantations…

      Au-delà de cet exemple particulièrement frappant, il est fréquent que ces industries s’installent près de zones populaires ou touchées par la précarité. On a tendance à dire que nous respirons tous le même air pollué, or ce n’est pas vrai. Certains respirent un air plus pollué que d’autres. Et ceux qui habitent sur les territoires dévolus aux hydrocarbures ont une qualité de vie bien inférieure à ceux qui sont épargnés par la présence de ces industries.

      Depuis quand la nocivité de ces industries est-elle documentée ?
      G. L. N. Longtemps, les seules mesures de toxicité dont on a disposé étaient produites par les industriels eux-mêmes, sur la base des seuils fixés par la réglementation. Pourtant, de l’aveu même de ceux qui la pratiquent, la toxicologie est une science très imparfaite : les effets cocktails ne sont pas recherchés par la toxicologie réglementaire, pas plus que ceux des expositions répétées à faibles doses sur le temps long. De plus, fixer des seuils est à double tranchant : on peut invoquer les analyses toxicologiques pour protéger les populations, l’environnement, ou les utiliser pour continuer à produire et à exposer les gens, les animaux, la nature à ces matières dangereuses. Ainsi, ces seuils peuvent être alternativement présentés comme des seuils de toxicité, ou comme des seuils de tolérance… Ce faisant, la toxicologie produit de l’imperceptibilité.

      R. B. Des études alternatives ont cependant commencé à émerger, avec des méthodologies originales. Au Canada, sur les territoires des Premières Nations en Ontario, au Saskatchewan précisément, une étude participative a été menée au cours de la décennie 2010 grâce à un partenariat inédit entre un collectif de journalistes d’investigation et un groupe de chercheurs. En distribuant très largement des kits de mesure, peu coûteux et faciles d’utilisation, elle a permis de démontrer que les populations étaient exposées aux sulfures d’hydrogène, un gaz toxique qui pénètre par les voies respiratoires. Grâce à cette démarche participative, des changements de règlementation et une meilleure surveillance des pollutions ont été obtenus. Il s’agit d’une réelle victoire qui change la vie des gens, même si l’industrie n’a pas été déplacée.

      Qu’en est-il des effets sur la santé de tous ces polluants ? Sont-ils documentés ?
      G. L. N. En France, les seuls travaux menés à ce jour l’ont été autour du gisement de gaz naturel de Lacq, exploité de 1957 à 2013 dans les Pyrénées. Une première étude, conduite en 2002 par l’université, concluait à un surrisque de cancer. Deux autres études ont été lancées plus récemment : une étude de mortalité dévoilée en 2021, qui montre une plus forte prévalence des décès par cancer, et une étude de morbidité toujours en cours. À Fos-sur-Mer, l’étude « Fos Epseal », conduite entre 2015 et 20223, s’est basée sur les problèmes de santé déclarés par les habitants. Ses résultats révèlent que près des deux-tiers des habitants souffrent d’au moins une maladie chronique – asthme, diabète –, ainsi que d’un syndrome nez-gorge irrités toute l’année qui n’avait jamais été identifié jusque-là.

      R. B. Ce que soulignent les collectifs qui évoquent des problèmes de santé liés à l’industrie pétrochimique – maladies chroniques de la sphère ORL, diabètes, cancers, notamment pédiatriques, etc. –, c’est la difficulté de prouver un lien de corrélation entre ces maladies et telle ou telle exposition toxique.

      L’épidémiologie conventionnelle ne le permet pas, en tout cas, car elle travaille à des échelles larges, sur de grands nombres, et est mal adaptée à un déploiement sur de plus petits territoires. C’est pourquoi les collectifs militants et les scientifiques qui travaillent avec eux doivent faire preuve d’inventivité, en faisant parfois appel aux sciences humaines et sociales, avec des sociologues qui vont recueillir des témoignages et trajectoires d’exposition, des historiens qui vont documenter l’histoire des lieux de production…

      Cela suppose aussi la mise au point de technologies, d’outils qui permettent de mesurer comment et quand les gens sont exposés. Cela nécessite enfin une coopération de longue haleine entre chercheurs de plusieurs disciplines, militants et populations. Car l’objectif est d’établir de nouveaux protocoles pour mieux documenter les atteintes à la santé et à l’environnement avec la participation active de celles et ceux qui vivent ces expositions dans leurs chairs.

      https://lejournal.cnrs.fr/articles/ces-territoires-sacrifies-au-petrole

  • Der hessische Landbote - Le messager de Hesse (1834), Georg Büchner, Éditions Pontcerq, 2011
    http://i2d.toile-libre.org/PDF/2008/i2d_Messager_Hesse.pdf

    Présentation : https://www.pontcerq.fr/livres/le-messager-de-hesse

    Premier message

    Darmstadt, juillet 1834

    Avant-propos

    Cette feuille doit révéler la vérité au land de Hesse, mais qui dit la vérité est gehenkt-pendu, et même celui qui lit la vérité sera peut-être châtié par des juges parjures. C’est pourquoi ceux à qui cette feuille parvient devront observer ce qui suit :

    1. Il leur faut conserver soigneusement la feuille hors de leur maison, à l’abri de la police ;

    2. ils ne doivent la faire connaître qu’aux amis de confiance ;

    3. à ceux en qui ils n’ont pas confiance comme en eux- mêmes, ils ne la doivent déposer qu’en secret ;

    4. si la feuille était cependant trouvée chez un qui l’aurait lue, il faut que celui-ci avoue avoir justement voulu la porter au kreisrat ;

    5. celui qui n’a pas lu la feuille, si on la trouve chez lui, est naturellement hors de faute.

    Paix aux chaumières ! Guerre aux palais !

    En l’an 1834 c’est comme si c’était la Bible qu’on convainquait de mensonges. C’est comme si Gott avait créé les paysans et les artisans le cinquième jour et les princes et les vornehms le sixième, et comme si le Seigneur avait dit à ceux-ci : « Régnez sur tous les bestiaux qui rampent sur terre », et qu’il avait compté les paysans et bürger au nombre de la gewürm-vermine. La vie des vornehms est un long dimanche, ils habitent dans de belles maisons, ils portent de gracieux vêtements, ils ont des visages replets et parlent un langage qui leur est propre ; mais le volk est couché devant eux comme le fumier sur le champ. Le paysan marche derrière la charrue ; le vornehm marche derrière lui et la charrue, et le pousse à la charrue avec les bœufs, il prend le grain et lui laisse l’éteule. La vie du paysan est un long jour de travail ; des étrangers se nourrissent de ses champs devant ses yeux, son corps-leib est un cal, sa sueur est le sel sur la table des vornehms.

    Dans le grand-duché de Hesse on compte 718 373 habitants, ils donnent au Staat, par an, 6 363 364 florins, en :

    1. impôts directs ..........................................2 128 131 fl.
    2. impôts indirects ......................................2 478 264 fl.
    3. domaines ................................................1 547 394 fl.
    4. droits régaliens ..............................................46 938 fl.
    5. amendes........................................................98 511 fl.
    6. diverses sources ............................................64 198 fl.
    ....................................................................6 363 436 fl. 6

    Cet argent est la dîme de blut, qui est pris sur le corps-leib du volk. Environ 700 000 personnes suent, gémissent et souffrent de faim pour cela. On extorque au nom du Staat, les extorqueurs en appellent au gouvernement et le gouvernement dit que cela est nécessaire pour maintenir l’ordre dans le Staat. Mais quelle chose énorme-gewaltig est-ce donc que cela : le Staat ? Quand un certain nombre de gens habitent dans un pays et qu’il y a des ordonnances ou des lois, auxquelles chacun doit se conformer, on dit qu’ils forment un Staat. Le Staat, c’est donc tous ; les instances qui créent l’ordre dans le Staat sont les lois par lesquelles le bien-être de tous est assuré et qui doivent provenir du bien-être de tous. — Voyez maintenant ce que, dans le grand-duché, on a fait du Staat ; voyez ce que cela veut dire, maintenir l’ordre dans le Staat ! 700 000 personnes paient six millions pour cela, c’est-à-dire qu’on fait d’eux des chevaux de trait, du bétail de charrue, afin qu’ils vivent dans l’ordre. Vivre dans l’ordre, cela veut dire souffrir de faim et être équarri.

    Qui sont-ils donc ceux qui ont fait cet ordre et qui veillent pour que cet ordre se maintienne ? C’est le gouvernement grand-ducal. Le gouvernement est constitué par le grand-duc et par ses plus hauts fonctionnaires. Les autres fonctionnaires sont des hommes qui sont appelés par le gouvernement pour maintenir en vigueur cet ordre. Leur nombre est légion : conseillers de Staat, conseillers gouvernementaux, conseillers du land, conseillers de landkreis, conseillers aux affaires religieuses et conseillers aux affaires scolaires, conseillers financiers et conseillers forestiers, etc., avec toute leur armée de secrétaires, etc. Le volk est leur troupeau, ils sont ses bergers, les auteurs de la traite et de l’équarrissage, ils se vêtissent de la peau des paysans, le butin pris sur les pauvres est dans leur maison, les tränen-larmes des veuves et orphelins sont la graisse étalée sur leurs visages ; ils règnent librement et exhortent le volk à la servitude. À ceux-là, vous donnez six millions de florins en redevances ; pour cette somme ils ont la charge de vous gouverner ; c’est-à-dire de se laisser engraisser par vous et de vous voler vos droits d’hommes et de bürger. Voyez ce qu’est la récolte de votre sueur.

    Merci @klaus de m’avoir fait penser à ce texte que je n’ai connu que tardivement et dont je (re)découvre que la traduction publiée chez Poncerq a fait l’objet d’une publication en ligne. Enjoy ! et, pourquoi pas ? #toctoc

    https://seenthis.net/messages/210230

    #Allemagne #révolution #littérature #Georg_Büchner #Livre_en_ligne

  • Faire justice. #Moralisme_progressiste et #pratiques_punitives dans la lutte contre les violences sexistes

    Là où il est admis que le recours à la #police en cas de violence n’est pas la solution mais plutôt un problème supplémentaire, la tentation est de s’y substituer. Si l’intention est louable, son application l’est moins. Les mesures sont expéditives et les outils pour faire justice sont encore profondément empreints d’une philosophie punitive : menace, exclusion, harcèlement, dénonciation publique et discréditation politique. Comment sortir de cette impasse ? La question est d’autant plus difficile qu’elle surgit au moment où les forces réactionnaires mènent une large offensive contre le wokisme pour mieux protéger ceux qui organisent les violences dans nos sociétés.
    Écrit par une « militante gouine », ce livre propose une critique fine du moralisme progressiste et des pratiques punitives dans les luttes sociales. En se saisissant d’exemples concrets rencontrés au gré de son militantisme et en discutant précisément l’abolitionnisme pénal, elle pose les jalons d’une justice transformatrice inventive, capable de prendre soin des victimes et de transformer les individu.es comme les groupes.
    Endiguer les violences c’est aussi ne plus craindre le conflit, ne plus avoir peur de lutter.

    https://lafabrique.fr/faire-justice
    #justice #justice_transformatrice #livre #VSS #violences_sexistes

    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/1027419

    ping @_kg_

  • #Paris_2024 - Une ville face à la #violence olympique

    Les organisateurs des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ont obtenu carte blanche pour fabriquer en #Seine-Saint-Denis la ville rêvée des promoteurs et investisseurs : moderne, innovante, lucrative. Sans pauvre, sans cité à la dérive, sans caillassage de voiture de police ; un merveilleux produit d’appel pour nouveaux habitants bankable au pays de Vinci, Eiffage, et Nexity. Il faut regarder par la fenêtre de celles et ceux qui y habitent pour voir que l’ « #intérêt_national » de cette opération a délogé 1500 personnes, détruit des #jardins_ouvriers, collé une voie d’accès routière à une école. Pourtant, à l’ombre de la puissante métropole parisienne, les #contre-projets fleurissent et les désirs d’habiter une ville aussi diverse qu’égalitaire sont vivaces.

    https://www.editionsdivergences.com/livre/paris-2024-une-ville-face-a-la-violence-olympique
    #livre #JO #jeux_olympiques Paris #destruction #résistance

  • Lecture d’un extrait du livre « Transformation de la condition humaine dans toutes les branches de l’activité » de Frédéric Forte, paru aux Éditions P.O.L., en 2023.

    https://liminaire.fr/radio-marelle/article/transformation-de-la-condition-humaine-dans-toutes-les-branches-de-l-activ

    Dans ce livre, Frédéric Forte, membre de l’Oulipo, tente de donner un ordre lisible aux textes écrits dans cette forme de 99 notes préparatoires que l’auteur a inventé et qu’il produit depuis une dizaine d’années, des poèmes-essais explorant avec humour et sagacité, les potentialités d’un sujet par un jeu polyphonique, selon différents registres, à la fois sérieux et décalés. « Ce qui se rapproche le plus, en poésie, de la pensée. » Ces notes aux formes très variées se font écho, développant des motifs récurrents, s’entremêlant et se répondant à distance, produisant ainsi dans leur succession accélérée des effets de sens, poétique, narratif, réflexif.

    (...) #Radio_Marelle, #Écriture, #Livre, #Lecture, #En_lisant_en_écrivant, #Podcast, #Enfance, #Art, #Littérature, #Édition, #OULIPO, #jeu, #POL (...)

    https://liminaire.fr/IMG/mp4/en_lisant_transformation_dans_la_condition_humaine_fre_de_ric_forte.mp4

    https://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-8180-5836-7