• #Mothership

    In the middle of the Mediterranean Sea, the crew of the #Ocean_Viking is rescuing people in exile fleeing Libya, crammed in unseaworthy boats. Once rescued and welcomed on board, survivors receive first aid, then accompanied to a safe port. On this ship, like a refuge within a refuge, the Women’s Shelter is a listening and care center for women and children.

    To ensure that people in distress are rescued in compliance with human rights and maritime law, a tug-of-war between authorities and humanitarian aid workers occurs on a daily basis.

    https://www.thepartysales.com/movie/mothership
    https://vimeo.com/943563441/3f3fb81516?share=copy

    #sauvetage #mer #Méditerranée #migrations #réfugiés
    #film #film_documentaire #Muriel_Cravatte

  • Zone d’attente de Toulon : violations des droits des personnes sauvées par l’Ocean Viking [Actions collectives] ⋅ #GISTI
    https://www.gisti.org/spip.php?article6919

    Depuis 5 jours, l’Anafé se mobilise pour venir en soutien aux personnes enfermées en zone d’attente de Toulon après le débarquement de l’Ocean Viking, le vendredi 11 novembre. Ses constats sont alarmants. Les personnes sauvées par l’Ocean Viking sont victimes de violations de leurs droits fondamentaux dans ce lieu d’enfermement qui n’a rien d’un village de vacances : violations du #droit_d’asile, personnes portant des bracelets avec numéro, absence d’interprétariat, absence de suivi psychologique effectif, pas de téléphones disponibles et pas de visites de proches, pas d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

    #Ocean_Viking #Anafé

  • Que prévoit la #France pour les 230 migrants de l’#Ocean_Viking ?

    Les migrants arrivés vendredi à #Toulon font l’objet d’un suivi sanitaire, et de contrôles de sécurité, avant d’être entendus par l’#Ofpra dans le cadre d’une #procédure_d’asile à la frontière. Pendant tout ce temps, ils sont maintenus dans une « #zone_d'attente ». Des associations dénoncent ces conditions d’accueil.

    Si les 230 migrants sauvés par l’Ocean Viking ont bien débarqué en France, vendredi 11 novembre, dans le port de Toulon (http://www.infomigrants.net/fr/post/44677/locean-viking-et-ses-230-migrants-accostent-a-toulon-en-france), ils ne se trouvent « pas techniquement sur le sol français », comme l’a indiqué le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

    En effet, les autorités françaises ont choisi de les placer dans une « zone d’attente », définie jeudi soir dans la zone portuaire de Toulon et sur un #centre_de_vacances de la #presqu’île de #Giens à #Hyères, où les exilés sont hébergés pour l’occasion. Un « #centre_administratif » dont ils n’ont pas le droit de sortir.

    Le maintien des personnes dans ce lieu peut durer 26 jours au maximum d’après la loi française.

    « Un système d’#enfermement de #privation_de_liberté et non d’accueil »

    Un dispositif dénoncé par plusieurs associations, dont l’Anafé qui défend les étrangers aux frontières. Interrogée par InfoMigrants, sa directrice Laure Palun souligne que c’est « un système d’enfermement de privation de liberté et non d’accueil, qui pose question quant aux conséquences sur des personnes vulnérables ».

    Gérad Sadik, responsable national de l’asile à La Cimade, estime, quant à lui, que cette #zone_temporaire est « illégale » car ce dispositif est normalement réservé aux espaces situés sur une frontière, dans les aéroports par exemple.

    Une centaine de « #Zones_d'attente_pour_personnes_en_instance » (#ZAPI) existe actuellement en France. Plusieurs associations dont l’Anafé, la Cimade et la Croix-Rouge interviennent dans ces lieux où patientent les étrangers qui ne sont pas autorisés à entrer sur le territoire, pour leur porter une assistance juridique, sanitaire et sociale.

    Mais, concernant les migrants de l’Ocean Viking, la Cimade s’inquiète de ne pas avoir accès aux personnes retenues dans la zone d’attente. Gérard Sadik affirme que l’entrée leur a été refusée. Il alerte également sur le fait que les mineurs non accompagnés ne doivent pas être placés dans ces zones d’attente, or 42 jeunes dans ce cas se trouvaient à bord de l’Ocean Viking selon SOS Méditerranée.

    Dans cette zone d’attente, les migrants feront l’objet d’un suivi sanitaire, puis de contrôles de sécurité des services de renseignement, avant d’être entendus par l’Office français de protection des réfugiés (Ofpra), qui examine les demandes d’asile et décide ou non d’attribuer le statut de réfugié.

    Procédure d’asile à la frontière comme dans les #aéroports

    La France, qui veut décider « très rapidement » du sort des migrants de l’Ocean Viking, a choisi d’appliquer la procédure d’asile à la frontière.

    Habituellement une demande d’asile française est d’abord enregistrée en préfecture, déposée auprès de l’Ofpra sous forme de dossier puis s’ensuit une convocation à un entretien, et entre trois à six mois mois d’attente avant la réponse.

    Mais dans le cas des migrants de l’Ocean Viking, l’Etat a choisi d’appliquer une #procédure_exceptionnelle qui prévoit qu’un agent de la mission asile frontière de l’Ofpra mène un entretien avec ces personnes dans un délai de 48 heures ouvrées afin d’évaluer si la demande d’asile n’est pas « #manifestement_infondée ».

    Cela peut poser problème, car cette notion floue et présentée sous une forme alambiquée laisse un large champ aux autorités françaises pour refuser l’entrée d’une personne, soulèvent les associations d’aide aux migrants.

    « En théorie, l’examen du caractère manifestement infondé ou non d’une demande d’asile ne devrait consister à vérifier que de façon sommaire si les motifs invoqués par le demandeur correspondent à un besoin de protection », soulignait l’Anafé, interrogée par InfoMigrants début novembre sur cette même procédure très régulièrement appliquée sur l’île de La Réunion. « Il ne devrait s’agir que d’un examen superficiel, et non d’un examen au fond, de la demande d’asile, visant à écarter les personnes qui souhaiteraient venir en France pour un autre motif (tourisme, travail, étude, regroupement familial, etc.) en s’affranchissant de la procédure de délivrance des visas », précisait l’association.

    Difficile donc pour des migrants tout juste arrivés après plusieurs semaines d’errance en mer, et parfois la perte de leurs papiers d’identité lors des naufrages, de prouver le fondement de leur demande lors d’un entretien de quelques minutes. D’autres considérations rentrent aussi en ligne de compte lors de ce type d’entretiens, notamment la langue parlée, et la qualité de la traduction effectuée par l’interprète de l’Ofpra.

    Pour accélérer encore un peu plus la procédure, « l’Ofpra a prévu de mobiliser dès ce week-end seize agents pouvant réaliser jusqu’à 90 entretiens par jour », a insisté vendredi le directeur général des étrangers (DGEF) au ministère de l’Intérieur, Eric Jalon.

    Après avoir mené ces entretiens, l’Ofpra donne un avis au ministère de l’Intérieur qui autorise ou non les migrants interrogés à déposer leur demande d’asile. Dans la plupart des cas, les personnes soumises à ce type de procédure échouent avec un taux de refoulement de 60%, indique l’Anafé.

    « Doutes sur le fait que les autorités françaises puissent expulser rapidement »

    « Pour les personnes dont la demande d’asile serait manifestement infondée, qui présenteraient un risque sécuritaire, nous mettrons en œuvre (...) les procédures d’#éloignement pour qu’elles regagnent leur pays d’origine », a prévenu Eric Jalon. Le ministère de l’Intérieur affirme également que des contacts ont déjà été pris avec les pays d’origine de ces rescapés.

    D’après les informations dont dispose InfoMigrants, les rescapés de l’Ocean Viking sont majoritairement originaires du Bangladesh, d’Érythrée et de Syrie, mais aussi d’Égypte, du Pakistan et du Mali notamment.

    « Nous avons des doutes sur le fait que les autorités françaises puissent expulser rapidement », fait savoir Laure Palun, « car il faut que la personne soit détentrice d’un passeport et d’un laissez-passer consulaire ». Or ce document doit être délivré par le pays d’origine et cela prend du temps car certains pays tardent à l’octroyer.

    Deux-tiers des personnes ne resteront de toute façon pas en France, puisqu’elles seront relocalisées dans neuf pays, a précisé le ministère, citant l’#Allemagne qui doit en accueillir environ 80, le #Luxembourg, la #Bulgarie, la #Roumanie, la #Croatie, la #Lituanie, #Malte, le #Portugal et l’#Irlande.

    Si une personne se voit refuser l’entrée sur le territoire par le ministère de l’Intérieur, un recours juridique est possible. Il s’agit du recours contre le refus d’admission sur le territoire au titre de l’asile à déposer dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision de refus prise par le ministère de l’Intérieur, explique la Cimade.

    http://www.infomigrants.net/fr/post/44696/que-prevoit-la-france-pour-les-230-migrants-de-locean-viking
    #sauvetage #asile #migrations #réfugiés #Méditerranée #Italie #ports #ports_fermés #frontières #relocalisation #renvois #expulsions

    ping @isskein @karine4 @_kg_

    –—

    ajouté à la métaliste autour de la création de zones frontalières (au lieu de lignes de frontière) en vue de refoulements :
    https://seenthis.net/messages/795053

    • À peine débarqués, les rescapés de l’« Ocean Viking » sont privés de liberté

      C’est sous #escorte_militaire que le navire de #SOS_Méditerranée a pu s’amarrer à Toulon. Les migrants, dont des enfants, ont été transférés dans une « zone d’attente », soit un lieu de privation de liberté. Un député LFI, qui a pu y entrer, a vu « des humains au bord du gouffre ».

      Deux places, deux ambiances pour l’arrivée du bateau de SOS Méditerranée, vendredi, à Toulon. Sur le quai Cronstadt, en fin de matinée, une centaine de personnes se sont rassemblées pour affirmer un message de bienvenue aux 230 exilé·es secouru·es par l’Ocean Viking. Les slogans, cependant, n’ont pas pu être entendus des concerné·es, puisque le gouvernement a organisé leur réception au port militaire, loin des regards, y compris de ceux de la presse.

      Deux heures plus tard, quelques dizaines de soutiens d’Éric Zemmour ont tenu le pavé devant l’entrée de l’arsenal, tandis que leur chef déclamait un énième discours xénophobe devant un mur de caméras. Outre #Marion_Maréchal-Le Pen, il était accompagné d’anciens de #Génération_identitaire, dont l’Aixois #Jérémie_Piano, récemment condamné à huit mois de prison avec sursis pour des faits de violence au siège de SOS Méditerranée en 2018.

      Jeudi, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, avait annoncé l’autorisation donnée à l’Ocean Viking de débarquer à Toulon, après trois semaines d’errance en mer dans l’attente d’un port sûr que lui ont refusé Malte et l’Italie. Le navire et ses 230 passagers et passagères, dont 13 enfants accompagnés et 44 mineur·es sans famille, s’est amarré à 8 h 50 ce vendredi. Son entrée en rade de Toulon s’est faite sous escorte de plusieurs bateaux militaires et d’un hélicoptère. Puis les personnes ont été acheminées dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, transformé en « zone d’attente » provisoire. Autrement dit : aux yeux de l’administration, les rescapé·es de l’Ocean Viking ne sont pas entré·es sur le territoire français.

      Des bus sont chargés de les conduire « sous #escorte_policière jusqu’au site d’hébergement situé sur la commune d’Hyères », a précisé le préfet du Var, Evence Richard à l’occasion d’une conférence de presse. Les personnes y seront privées de leur liberté, le temps de l’évaluation de leur situation, et sous la #garde_policière de quelque 200 agents.

      Des centaines de policiers

      Le représentant de l’État annonce d’importants moyens mis en place par ses services pour répondre à un triptyque : « #dignité_humanitaire ; #sécurité ; #rigueur et #fermeté ». 600 personnes en tout, forces de l’ordre comprises, vont se consacrer à cet « accueil » prévu pour un maximum de 26 jours. La prise en charge médicale est assurée par les services des pompiers et du Samu.

      D’un point de vue administratif, le ministère veut d’abord « évaluer les #risques_sécuritaires », via des entretiens menés par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), selon les mots d’Éric Jalon, directeur général des étrangers en France, présent au côté du préfet. La mise en avant de cet aspect est un gage donné par Gérald Darmanin à l’extrême droite.

      Ensuite, si les personnes demandent l’asile et rentrent dans les critères, elles pourront, pour un tiers seulement des adultes, rester en France ou bien être « relocalisées », selon le jargon administratif, dans au moins neuf autres pays européens : Allemagne, Luxembourg, Bulgarie, Roumanie, Croatie, Lituanie, Malte, Portugal et Irlande.

      Des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), l’instance dépendant du ministère de l’intérieur chargée d’attribuer ou non le statut de réfugié, évalueront les situations « sous 48 heures », insistent les hauts fonctionnaires. Une procédure express réservée aux « zones d’attente », ces sites habituellement installés dans les aéroports, les ports ou à des postes-frontières, régulièrement dénoncés par des associations comme des lieux où les droits de certains étrangers et étrangères sont bafoués.

      Si les personnes ne demandent pas l’asile, si l’Ofpra rejette leur demande ou si elles sont considérées comme présentant un risque pour la sécurité, le ministère de l’intérieur s’efforcera de les renvoyer dans leur pays d’origine. « Des contacts ont d’ores et déjà été pris avec les pays vers lesquels les personnes ont vocation à retourner », affirme Éric Jalon.

      Les 44 mineur·es non accompagné·es déclaré·es par SOS Méditerranée, pour leur part, verront leur situation évaluée par les services de l’Aide sociale à l’enfance du Var. Si celle-ci ne met pas en cause leur minorité, ils pourront quitter la zone d’attente et être sous la protection du département, comme la loi l’impose.

      Des parlementaires interdits d’accès au quai

      Venue à Toulon pour observer, Laure Palun, de l’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers), organisation active pour défendre les droits des étrangers et étrangères en zones d’attente, critique la méthode. « Il n’y a pas assez d’agents de l’Ofpra formés aux demandes d’asile formulées à la frontière. Il risque d’y avoir plein d’erreurs, dit-elle. Et puis, pour des gens qui ont failli se noyer, qui sont restés autant de temps sur ce bateau, comment pourront-ils être opérationnels dès demain pour faire un récit de vie qui va être crédible aux yeux des autorités françaises ? »

      Sur le plan humain, « enfermer ces personnes, c’est rajouter une couche de #violence à ce qu’elles ont déjà vécu. La zone d’attente n’est pas un lieu qui permet d’aborder sereinement l’asile. Je ne suis pas certaine qu’il y aura une prise en charge psychologique », juge la responsable associative. Dans de nombreuses zones d’attente temporaire habituellement mises en place dans les départements d’outre-mer, l’association a observé que l’information sur la demande d’asile n’est pas toujours donnée aux individus. « C’est une obligation d’informer les étrangers de leurs droits », assure pour sa part Éric Jalon.

      Des rescapés harassés, pieds nus, sans pantalon

      L’opération du gouvernement interpelle aussi par le secret qu’elle s’évertue à organiser. En dehors des agents de l’État, personne n’a eu accès à l’arsenal vendredi, une zone militaire, donc confidentielle. Le député de Marseille Sébastien Delogu (La France insoumise – LFI) s’est vu refuser l’accès à l’Ocean Viking, alors que la loi autorise n’importe quel parlementaire à visiter une zone d’attente à l’improviste, et que celle créée dans le village vacances englobe « l’emprise de la base navale de Toulon », d’après l’arrêté publié vendredi par le préfet.

      Le gouvernement prétend faire primer, semble-t-il, le secret défense. « Moi je ne viens pas pour faire du théâtre comme l’extrême droite, je veux exercer mon droit de parlementaire, s’agace le député insoumis. J’ai aussi été élu pour ça. Sinon, qui a un droit de regard ? » Son collègue Hendrik Davi (LFI) a également été repoussé.

      Plus tard, Sébastien Delogu a pu, tout de même, se rendre au village vacances et « constater toute la souffrance et la détresse physique et mentale dans laquelle se trouvent les rescapés ». « Ces jeunes hommes et femmes sont épuisés, parfois pieds nus ou sans pantalon, harassés par ce périple durant lequel ils ont tout quitté et risqué leur vie. Je n’ai vu que des humains au bord du gouffre, a-t-il précisé, à la sortie, dans un communiqué. Nous ne céderons pas un centimètre d’espace politique aux fascistes qui instrumentalisent ces drames pour propager la haine et la xénophobie. »

      Entre soulagement et amertume, les responsables de SOS Méditerranée ont quant à eux fustigé vendredi des blocus de plus en plus longs imposés à leur navire, au détriment de la sécurité physique et psychologique des naufragé·es recueilli·es à bord. Comme elle le fait depuis sept ans, l’ONG a appelé à la (re)constitution d’une flotte européenne pour faire du sauvetage en Méditerranée centrale et à la mise en place d’un processus de solidarité entre États européens pour la répartition des personnes secourues, qui respecte le droit maritime (soit un débarquement dans le port sûr le plus proche).

      Les finances de l’association étant en baisse à cause de l’explosion des coûts due à l’inflation et à la diminution des dons reçus, elle a relancé un appel aux soutiens. « Dans l’état actuel de nos finances, on ne peut continuer encore que quelques mois, précise sa directrice Sophie Beau. Depuis le premier jour, SOS Méditerranée est essentiellement soutenu par la société civile. » Si quelques collectivités complètent le budget par des subventions, l’État français, lui, ne verse évidemment pas un centime.

      « C’est essentiel qu’on retourne en mer, déclare Xavier Lauth, directeur des opérations de SOS Méditerranée. Parce qu’il y a eu déjà au mois 1 300 morts depuis le début de l’année [en Méditerranée centrale, face à la Libye – ndlr]. » Le décompte de l’Organisation internationale pour les migrations (liée à l’ONU) a précisément dénombré 1 912 personnes disparues en Méditerranée depuis le début de l’année, que les embarcations aient visé l’Italie, la Grèce ou encore l’Espagne. Et depuis 2014, plus de 25 000.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/111122/peine-debarques-les-rescapes-de-l-ocean-viking-sont-prives-de-liberte

    • Le jour où la France n’a pas (vraiment) accueilli l’Océan Viking…

      Après trois semaines à errer, sans qu’on lui assigne de port où débarquer les 234 rescapés secourus en mer, l’Océan Viking, de Sos-Méditerranée, a enfin accosté à Toulon. Entre soulagement et indignation, les associations dénoncent l’instrumentalisation politique de cette crise et les défaillances des États membres de l’Union Européenne.

      « Le sauvetage que nous avons débuté le 22 octobre n’est toujours pas terminé », c’est en substance ce qu’explique Louise Guillaumat, directrice adjointe des opérations de SOS-Méditerranée, lors de la conférence de presse tenue, le vendredi 11 novembre à midi. À cette heure, plus de la moitié des rescapés tirés des eaux par l’ONG, trois semaines auparavant, sont toujours à bord de l’Océan Viking, qui a accosté le matin même, sur le quai de l’artillerie de la base navale varoise.

      Au soleil levant, sur le quai Cronstadt, au pied du « cul-vers-ville », une statue évoquant le génie de la navigation, les caméras de télévision se sont frayé une place parmi les pêcheurs matinaux. Il est 7 h 00, le bateau de Sos-méditerranée est à moins de six miles marins des côtes toulonnaises. Il accoste deux heures plus tard. Pourtant, les 231 exilés à son bord ne sont pas accueillis par la France.
      44 enfants isolés

      « Les passagers ont été placés en zone d’attente. Ils n’ont pas été autorisés à entrer sur le territoire national. » explique Éric Jalon, préfet, et directeur général des étrangers en France (DGEF). Le port militaire et le centre où vont être hébergés les exilés ont été, par décret, définis, la veille, comme « zone d’attente provisoire » gérée par la Police des airs et des frontières (PAF). « Des évaluations de leur état de santé sont faites dès leur descente du navire », promet le préfet.

      Après quoi, ils sont conduits en bus dans un centre de vacances, mis à disposition par la Caisse centrale d’activités sociales (CCAS) des agents des industries électriques et gazières en France, en solidarité avec les personnes réfugiées. Une fois là-bas, ces dernières, parmi lesquelles 44 mineurs isolés, doivent pouvoir formuler une demande d’asile en procédure accélérée.

      « Des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ont été détachés sur place pour y mener des entretiens », poursuit le DGEF. Ceux pour qui la demande d’asile sera jugée « irrecevable et manifestement infondée » feront l’objet de reconduites dans leur pays d’origine. Ce n’est qu’après cette procédure, pouvant durer jusqu’à 26 jours, que les autres pourront alors prétendre à demander l’asile en France ou dans un des neuf pays de l’union européenne s’étant déclaré prêt à en accueillir une partie.
      Une façon de détourner le règlement de Dublin

      « Ce n’est pas ce que prévoit le droit dans l’état », pointe Laure Palun, la directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), présente au rassemblement organisé sur le port, en milieu de matinée, par les associations, syndicats et partis solidaires des exilés. « Les demandeurs d’asile doivent normalement être accueillis sur le territoire d’un État avant leur relocalisation. » explique-t-elle.

      Le choix fait par la France est une façon de détourner le règlement de Dublin qui prévoit qu’une demande d’asile ne puisse être étudiée que par le pays de première entrée du candidat. Et ce n’est pas la seule entorse à la loi que revêt le dispositif « exceptionnel » mise en place par Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. « Ce matin, on nous a refusé l’entrée dans la zone d’attente alors que nous sommes une des associations agréées pour y accéder en tant qu’observateur », dénonce ainsi la responsable associative. La loi prévoit, d’ailleurs, dans le même cadre un libre accès aux parlementaires. Le député LFI de la 7e circonscription de Marseille, Sébastien Delogu, s’est porté volontaire ce matin. Mais « le cabinet de Sébastien Lecornu, ministre des armées, nous interdit l’accès au port », confia-t-il, en début d’après-midi, au téléphone depuis le bureau du préfet maritime. Même les membres de Sos-Méditerranée n’ont pas pu venir à la rencontre de leur équipage bloqué en mer depuis 21 jours.
      L’indignité monte d’un cran

      « La France a su accueillir dignement les réfugiés venus d’Ukraine », rappelle Olivier Masini, secrétaire général de l’UD CGT du Var, alors que plusieurs centaines de militants entament une marche solidaire en direction du théâtre de la liberté où les représentants de SOS-Méditerranée tiennent leur conférence de presse. « Nous sommes ici pour affirmer les valeurs humanistes de notre syndicat et pour demander que les réfugiés débarqués aujourd’hui puissent bénéficier d’un traitement similaire. »

      C’est avec les traits tendus par la colère et la fatigue que les quatre dirigeants de l’Ong de sauvetage en mer accueillent leur auditoire. « Les États Européens négligent depuis sept ans la situation » , lance Sophie Beau, Co-fondatrice de SOS-Méditerranée. « Il est temps que soit mis en place un véritable mécanisme opérationnel et pérenne de répartition des exilés secourus en Méditerranée centrale. L’instrumentalisation politique de cette crise est indigne des démocraties européennes. »

      L’#indignité est d’ailleurs montée d’un cran en début d’après-midi, lorsque devant l’arsenal, les représentants du parti d’extrême-droite, Reconquête, sont venus s’exprimer devant une poignée de groupies haineux. Pas de quoi décourager, cependant, les sauveteurs de Sos-Méditerranée. «  Je préfère rester optimiste, reprend Sophie Beau. Les citoyens européens sont porteurs de solidarité. Nous repartirons rapidement en mer pour continuer notre mission de sauvetage. Et dans le contexte économique actuel, nous avons plus que jamais besoin du soutien de la société civile… Répondez à ce SOS. »

      https://www.humanite.fr/societe/ocean-viking/le-jour-ou-la-france-n-pas-vraiment-accueilli-l-ocean-viking-770755#xtor=RS

      #migrerrance

    • « Ocean-Viking », un désastre européen

      Editorial du « Monde » . Les trois semaines d’errance du navire humanitaire, qui a fini par accoster à Toulon sur fond de crise diplomatique entre la France et l’Italie, rappellent l’impuissance européenne à mettre en œuvre les droits humains.

      L’Union européenne (UE) n’avait pas besoin de cela. Déjà aux prises avec une guerre à ses portes, une crise énergétique, la montée de l’inflation et les tensions que ce contexte exacerbe entre ses membres, voilà que la terrible errance depuis trois semaines d’un navire humanitaire, l’Ocean-Viking, chargé de migrants secourus en Méditerranée, remet en lumière son incapacité à organiser la solidarité en son sein. Cela sur la principale question qui nourrit l’extrême droite dans chaque pays – l’immigration – et, partant, menace l’avenir de l’Union elle-même.

      Si la France a, finalement, sauvé l’honneur en acceptant que l’Ocean-Viking accoste à Toulon, vendredi 11 novembre, après le refus italien, l’impuissance européenne à mettre en œuvre les droits humains qui la fondent historiquement – en l’occurrence la sauvegarde de 234 vies, dont celles de 57 enfants – est extrêmement préoccupante.

      Que la France et l’Italie, que rapprochent mille liens historiques, géographiques et humains, en viennent à s’apostropher par ministres de l’intérieur interposés donne la mesure de la déstabilisation d’un équilibre déjà fragile, consécutif à l’arrivée à Rome de Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien issue de l’extrême droite.

      Sept ans après la crise migratoire de 2015, au cours de laquelle l’UE avait manqué de solidarité à l’égard de l’Italie, y nourrissant la xénophobie, les ingrédients du malaise sont toujours là. Même si les migrants de l’Ocean-Viking doivent être répartis dans l’UE, le fragile système de partage des demandeurs d’asile dans une douzaine d’Etats européens, obtenu par la France en juin, qui n’a jusqu’à présent connu qu’une application homéopathique, a déjà volé en éclats avec l’Italie.

      Volte-face

      Pour l’exécutif français, enclin à présenter l’Union européenne comme un facteur de protection, le scénario de l’Ocean-Viking est également désastreux. S’il a pris en définitive la bonne décision, il semble s’être fait forcer la main par le gouvernement italien. Alors qu’Emmanuel Macron avait refusé en 2018 l’accostage de l’Aquarius, un autre bateau humanitaire, pour ne pas « faire basculer le pays vers les extrêmes », sa volte-face intervient alors que le Rassemblement national, avec ses 89 députés, a renforcé son emprise sur la vie politique.

      Si le dénouement de Toulon devrait logiquement être salué à gauche, il risque de compromettre le ralliement déjà incertain de la droite au projet de loi sur l’immigration, construit sur un équilibre entre régularisation de travailleurs étrangers et fermeté sur les mesures d’éloignement.

      Le poids des images et des symboles – le navire chargé de malheureux, le débarquement sous escorte militaire – ne saurait cependant faire perdre la véritable mesure de l’événement : l’arrivée de quelques dizaines de demandeurs d’asile est bien loin de déstabiliser un pays comme la France. Une centaine de milliers de réfugiés ukrainiens y sont d’ailleurs accueillis à bras ouverts. Comme eux, les migrants venus d’autres continents ont droit à un examen sérieux de leur demande d’asile.

      Les difficultés d’intégration, les malaises et les craintes que suscite l’immigration dans l’opinion sont évidents et doivent être sérieusement écoutés et pris en compte. Mais, alors que l’extrême droite fait des migrants le bouc émissaire de tous les dysfonctionnements de la société et tient la mise au ban des étrangers pour la panacée, il faut rappeler que des hommes, des femmes et des enfants sont là, derrière les statistiques et les joutes politiques.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/11/12/ocean-viking-un-desastre-europeen_6149574_3232.html

    • Pour le plein respect des droits et de la dignité des passager.e.s de l’Ocean Viking, pour une véritable politique d’accueil européenne [Communiqué de presse inter-associatif]

      L’accueil de l’Ocean Viking à Toulon en France a été un soulagement face au drame terrible et indigne que vivaient ses passager.e.s depuis plusieurs semaines, balloté.e.s sur les flots en attente d’une décision sur leur possibilité de débarquement.

      Maintenant se pose la question des conditions de l’accueil des passager.e.s.

      Nous demandons la mise en place des dispositions suivantes :

      – Pas de privation de liberté en zone d’attente, qui ne ferait qu’accroitre les souffrances et traumatismes vécus en mer et sur le parcours d’exil ; de nos expériences sur le terrain, le respect des droits des personnes et de leur dignité n’est pas compatible avec l’enfermement de ces dernières, quel que soit le contexte de leur arrivée, et a fortiori après un périple tel que l’on vécut les rescapés de l’Océan Viking.
      En outre, il est inadmissible que le gouvernement ait fait le choix de « fabriquer » une zone d’attente temporaire dans une base militaire, rendant impossible l’accès des associations habilitées et des élu.e.s de la République, sous prétexte de secret défense, ne permettant pas à des personnes en situation de particulière vulnérabilité d’avoir accès à l’assistance minimale que la loi leur reconnaît.

      – Mobilisation d’un centre d’accueil ouvert, permettant de mettre en place l’accompagnement sanitaire, social, et également psychologique nécessaire.

      – Protection immédiate, mise à l’abri et hébergement des passager.e.s, dépôt de demandes d’asile pour toutes les personnes le souhaitant, et examen approfondi de toutes les situations des personnes afin de garantir le respect de l’exercice effectif de leurs droits.

      Plus globalement, pour éviter demain d’autres drames avec d’autres bateaux :

      – Nous rappelons le nécessaire respect du droit international de la mer, en particulier l’obligation de porter secours aux passagers d’un bateau en difficulté, le débarquement des personnes dans un lieu sûr dans les meilleurs délais ainsi que le principe de non-refoulement vers des pays où les personnes encourent un risque d’être soumises à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants.

      – La solidarité en Europe ne fonctionne pas. Le « mécanisme de solidarité » proposé dans le cadre du pacte européen « migrations et asile » est non seulement non respecté par les pays mais très en-deçà d’une véritable politique d’accueil respectueuse de la dignité des personnes et de leurs droits fondamentaux. L’Italie est à la pointe des égoïsmes nationaux mais globalement les pays européens dans leur ensemble ne sont pas à la hauteur.

      – C’est donc un changement de modèle politique qui est indispensable : passer de politiques européennes fondées sur la fermeture et le repli vis-à-vis des migrant.e.s considéré.e.s comme indésirables pour prôner un autre système :

      > permettre un accès inconditionnel au territoire européen pour les personnes bloquées à ses frontières extérieures afin d’examiner avec attention et impartialité leurs situations et assurer le respect effectif des droits de tou∙te∙s
      > permettre l’accueil des réfugié.e.s non pas sur la base de quotas imposés aux pays, mais sur la base des choix des personnes concernées (selon leurs attaches familiales, leurs compétences linguistiques ou leurs projets personnels), dans le cadre d’une politique de l’asile harmonisée, fondée sur la solidarité entre Etats et le respect inconditionnel des droits fondamentaux.

      http://www.anafe.org/spip.php?article655

    • Zone d’attente de Toulon : violations des droits des personnes sauvées par l’Ocean Viking [Communiqué de presse]

      Depuis 5 jours, l’Anafé se mobilise pour venir en soutien aux personnes enfermées en zone d’attente de Toulon après le débarquement de l’Ocean Viking, le vendredi 11 novembre. Ses constats sont alarmants. Les personnes sauvées par l’Ocean Viking sont victimes de violations de leurs droits fondamentaux dans ce lieu d’enfermement qui n’a rien d’un village de vacances : violations du droit d’asile, personnes portant des bracelets avec numéro, absence d’interprétariat, absence de suivi psychologique effectif, pas de téléphones disponibles et pas de visites de proches, pas d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

      Violation du droit d’asile
      Toutes les personnes enfermées dans la zone d’attente de Toulon ont demandé l’asile. L’Anafé dénonce le choix des autorités de priver de liberté ces personnes en demande de protection internationale alors que ces mêmes autorités n’ont pas nié l’état psychologique dégradé dans lequel elles se trouvent après un long parcours au cours duquel elles ont failli se noyer et après avoir été débarquées d’un bateau de sauvetage sur lequel elles avaient passé 21 jours. Or, la procédure d’asile à la frontière est une procédure d’asile « au rabais », réalisée dans l’urgence mais aussi dans un lieu d’enfermement, quelques heures seulement après le débarquement.
      Les autorités auraient pu, à l’instar de ce qui a été mis en œuvre l’année dernière à l’arrivée de personnes ressortissantes d’Afghanistan ou lors de l’arrivée de ressortissants d’Ukraine depuis le début d’année, prévoir des mesures d’hébergement et un accès à la procédure de demande d’asile sur le territoire, après un temps de repos et de prise en charge médicale sur le plan physique et psychologique.

      Les conditions d’entretien Ofpra
      Les entretiens Ofpra doivent veiller au respect de la confidentialité des échanges et de la dignité des personnes, tout en prenant en compte leur vulnérabilité. L’Ofpra aurait pu refuser de réaliser les entretiens de personnes à peine débarquées au regard de leur vulnérabilité. Cela n’a pas été le cas. Au contraire, elles ont dû expliquer leurs craintes de persécutions sitôt enfermées en zone d’attente. Surtout, des entretiens se sont déroulés dans des tentes, dont certaines laissant une visibilité depuis l’extérieur et sans respect de la confidentialité des échanges, les conversations étaient audibles depuis l’extérieur. Les autres ont été faits dans des locaux où avaient été réalisés des entretiens avec les services de police, ajoutant à la confusion des interlocuteurs et des rôles. Rien, hormis le petit badge porté par les officiers de protection, ne pouvait les distinguer des policiers en civil ou des associations présents dans le camp.

      L’absence d’interprétariat
      Les personnes ainsi enfermées n’ont pas eu accès à des interprètes. Seulement deux interprètes en arabe étaient présentes lors d’une visite organisée par des sénateurs et un député. Leur rôle : traduire les entretiens avec la police aux frontières. Hormis ces deux interprètes, l’ensemble des entretiens sont effectués via un interprétariat téléphonique assuré par un prestataire, y compris pour les entretiens Ofpra. L’Anafé a pu observer les difficultés de la police aux frontières pour contacter un interprète, faisant parfois appel à une personne maintenue en zone d’attente.
      Dès lors, les personnes ne sont pas en mesure de comprendre la procédure de maintien en zone d’attente, leurs droits, la procédure spécifique d’asile à la frontière et ses tenants et aboutissants.

      Des numéros aux poignets
      Les personnes maintenues sont identifiées par des bracelets de couleur au poignet portant un numéro. Les autorités n’ont donc pas hésité à les numéroter sans aucun respect pour leur individualité et leur identité.

      L’absence de suivi psychologique effectif
      L’Anafé a pu constater dans la zone d’attente que si la CUMP83 (cellules d’urgence médico-psychologique) était présente, les conditions d’enfermement ne permettent pas aux infirmiers d’échanger avec les personnes maintenues, les services d’interprétariat téléphonique toujours assurés par le même prestataire étant saturés. De plus, la CUMP83 ne bénéficie pas d’un local adapté pour s’entretenir de manière confidentielle avec les personnes mais d’une tente située dans le « village Croix-Rouge » au milieu de la zone d’attente. Cette disposition ne permet donc pas aux personnes maintenues de bénéficier d’un soutien psychologique confidentiel et adapté au traumatisme qu’elles ont subi lors de leur parcours migratoire et des trois semaines passées en mer.
      De plus, si un médecin, une sage-femme et une infirmière étaient présents le samedi 13 novembre 2022, nous avons pu constater le lendemain qu’aucun médecin n’était présent sur le site. Il nous a été indiqué qu’en cas de nécessité, il serait fait appel à SOS Médecin.

      Impossibilité d’avoir des contacts avec l’extérieur, contrairement à la législation régissant les zones d’attente
      Les numéros utiles ne sont pas affichés. Le wifi installé par la Croix-Rouge ne fonctionne pas correctement. Si huit téléphones portables sont disponibles toute la journée, les conversations sont limitées à 5 minutes et jusqu’à 18h environ. Il n’est pas possible d’être appelé sur ces numéros et ils ne servent que dans le cadre du rétablissement des liens familiaux. Hormis ces téléphones, aucune cabine téléphonique n’est prévue sur le site de la zone d’attente. Il n’est donc pas possible pour les personnes maintenues de s’entretenir de manière confidentielle, notamment avec un avocat, une association ou leurs proches. Il est impossible pour les personnes maintenues de se faire appeler de l’extérieur.
      Aucune visite de proche n’est possible en raison de l’absence de de mise en place d’un système de visite ou d’un local dédié.

      L’impossible accès aux avocats et aux associations
      L’Anafé a pu constater que les personnes maintenues n’avaient aucune connaissance de leur droit à contacter un avocat et qu’aucun numéro de téléphone ne leur avait été communiqué, là encore, contrairement à la législation applicable. Après la visite de la Bâtonnière de l’Ordre des avocats de Toulon et des élus, les avocats se sont vu attribuer deux chambres faisant office de bureau qui ne sont équipées ni d’ordinateur, ni de fax, ni d’internet pour transmettre les recours.
      L’Anafé n’a pas de local pour s’entretenir de manière confidentielle avec les personnes maintenues, notamment en faisant appel à un service d’interprétariat. D’après les informations fournies par la protection civile, il n’y avait pas de local disponible.
      Il est donc impossible pour les avocats et pour les associations de défense des droits d’exercer leur mission dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges et un accompagnement digne des personnes.

      Toutes ces violations constituent des manquements graves aux droits des personnes enfermées dans la zone d’attente de Toulon. Ces atteintes inacceptables sont le résultat du choix fait par les autorités d’enfermer ces personnes au lieu de les accueillir. Comme à chaque fois que des gens sont enfermés en zone d’attente, leurs droits ne sont pas respectés. C’est ce que l’Anafé dénonce depuis la création des zones d’attente. Il est temps de mettre fin à ce régime d’enfermement.

      http://www.anafe.org/spip.php?article656

    • Comment l’affaire de l’Ocean Viking révèle l’ambiguïté des « zones d’attente »

      Vendredi 11 novembre, les 234 migrantes et migrants secourus par le navire Ocean Viking ont pu rejoindre la base navale de Toulon, après trois semaines d’errance en mer. Ultime épisode du drame de la migration qui se joue en Méditerranée et dont le déroulement puis le dénouement peuvent donner lieu à plusieurs clés de lecture. Au niveau de la politique et de l’intégration européennes, le bras de fer entre Paris et Rome, rejouant le duel ayant opposé en 2018 Emmanuel Macron avec l’alors Président du Conseil des ministres italien et actuel Vice-Président Matteo Salvini, a souligné les obstacles à l’affirmation de la solidarité européenne sur la question. Au niveau de la politique interne, ensuite, l’on a vu combien la situation de l’Ocean Viking a accusé les clivages entre « humanistes » et partisans de la fermeté.

      Rappelons d’ailleurs que les propos ayant valu l’exclusion pour deux semaines du député du Rassemblement national Grégoire de Fournas ont précisément été tenus à l’occasion de l’allocution d’un député de la France insoumise dénonçant le sort réservé aux passagers du navire humanitaire.

      Le dernier épisode en date dans l’épopée de l’Ocean Viking est également et entre autres justiciable d’une analyse juridique.
      Les limites du droit international de la mer

      Pendant son errance, les difficultés à trouver un lieu de débarquement ont de nouveau souligné les limites d’un droit de la mer peinant à imposer à un État clairement défini d’ouvrir ses ports pour accueillir les rescapés. La décision de laisser les passagers de l’Ocean Viking débarquer à Toulon est également significative. Elle signe certes leur prise en charge temporaire par la France, mais n’emporte pas, du moins dans un premier temps, leur admission sur le territoire français (au sens juridique). Ce dont le ministre de l’Intérieur ne s’est d’ailleurs fait faute de souligner).

      Cette situation permet alors de mettre en exergue l’une des singularités de la conception juridique du territoire, notamment en ce qui concerne la situation des étrangers. Les zones d’attente en sont une claire illustration.
      Les « zones d’attente »

      Les aéroports ont été les premiers espaces où sont apparues ces zones considérées comme ne relevant pas juridiquement du territoire de l’État les accueillant. Le film Le Terminal, dans lequel Tom Hanks campait un iranien ayant vécu plusieurs années à Roissy – où il s’est d’ailleurs éteint ce samedi 12 novembre –, avait en 2004 porté à la connaissance du grand public cette situation.

      En France, les « zones internationales », initialement nimbées d’un flou quant à leur fondement juridique et au sein desquelles les autorités prétendaient par conséquent n’y être pas assujetties au respect des règles protectrices des droits humains, ont cédé la place aux « zones d’attente » à la faveur de la loi du 6 juillet 1992).

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      À une situation d’exclusion – du moins, alléguée par les autorités – du droit, s’est alors substitué un régime d’exception : les personnes y étant maintenues n’étaient toujours pas considérées comme ayant pénétré juridiquement le territoire français.

      N’étant plus – prétendument – placées « hors du droit » comme l’étaient les zones internationales, les zones d’attente n’en restaient pas moins « hors sol ». L’une des conséquences en est que les demandes d’asile qui y sont le cas échéant déposées relèvent alors de l’« asile à la frontière ». Elles sont par conséquent soumises à un régime, notamment procédural, beaucoup moins favorable aux demandeurs (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile CESEDA, Titre V, article L.350-1 à L.352-9).
      La « fiction juridique »

      La « fiction juridique » que constituent les zones d’attente s’étend désormais entre autres aux gares ferroviaires ouvertes au trafic international, aux ports ou à proximité du lieu de débarquement (CESEDA, article L.341-1). Ces « enclaves » au sein du territoire, autour d’une centaine actuellement, peuvent par ailleurs inclure, y compris « à proximité de la gare, du port ou de l’aéroport ou à proximité du lieu de débarquement, un ou plusieurs lieux d’hébergement assurant aux étrangers concernés des prestations de type hôtelier » (CESEDA, article L.341-6).

      Tel est le cas de la zone d’attente créée par le préfet du Var par le biais d’un arrêté, à la suite de l’accueil de l’Ocean Viking.

      « pour la période du 11 novembre au 6 décembre 2022 inclus, une zone d’attente temporaire d’attente sur l’emprise de la base navale de Toulon et sur celle du Village Vacances CCAS EDF 1654, avenue des Arbanais 83400 Hyères (Giens) ».

      Accueillis dans ce Village Vacances dont les « prestations de type hôtelier » ne semblent aucunement correspondre à la caricature opportunément dépeinte par certains, les rescapés demeurent, juridiquement, aux frontières de la France.
      Aux portes du territoire français

      Ils ne se situent pas pour autant, de ce fait, dans une zone de non-droit : placés sous le contrôle des autorités françaises, ils doivent se voir garantir par elles le respect de leurs droits humains. Aux portes du territoire français, les migrantes et migrants secourus par l’Ocean Viking n’en relèvent pas moins de la « juridiction » française comme le rappelle la Cour européenne des droits de l’Homme. La France est ainsi tenue d’observer ses obligations, notamment au regard des conditions de leur maintien contraint au sein de la zone.

      Une partie des rescapés recouvreront leur liberté en étant admis à entrer juridiquement sur le territoire de la France. Tel est le cas des mineurs non accompagnés, dont il est annoncé qu’ils seront pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance.

      Tel est également le cas de ceux qui auront été autorisés à déposer une demande d’asile sur le territoire français et se seront vus, à cette fin, délivrer un visa de régularisation de huit jours. Parmi eux, la plupart (175) devraient être acheminés vers des États européens qui se seraient engagés à les accueillir, vraisemblablement afin que soient examinées leurs demandes de protection internationale. Expression d’une solidarité européenne a minima dont il faudra cependant voir cependant les suites.

      À lire aussi : Podcast : « Quand la science se met au service de l’humanitaire », le Comité international de la Croix-Rouge

      Pour tous les autres enfin, ceux à qui un refus d’entrer sur le territoire français aura été notifié et qui ne seront pris en charge par aucun autre État, le ministre de l’Intérieur précise qu’ils seront contraints de quitter la zone d’attente vers une destination qui demeure cependant encore pour le moins incertaine. Ceux-là auront alors été accueillis (très) temporairement par la France mais seront considérés comme n’ayant jamais pénétré sur le territoire français.

      https://theconversation.com/comment-laffaire-de-locean-viking-revele-lambigu-te-des-zones-datte

    • « Migrants » de l’« Ocean Viking », « réfugiés » d’Ukraine : quelle différence ?

      Comme elle l’a fait après l’invasion russe, la France doit mener une véritable politique d’accueil pour les passagers de l’« Ocean Viking » : permettre l’accès inconditionnel au territoire sans présupposé lié à leur origine ni distinction entre « migrants » et « réfugiés ».

      Après trois semaines d’errance en Méditerranée, la France a accepté « à titre exceptionnel » de laisser débarquer le 11 novembre, à Toulon, les 234 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking. Tout en précisant, par la voix du ministre de l’Intérieur, que ces « migrants ne pourront pas sortir du centre administratif de Toulon » où ils seront placés et qu’« ils ne sont donc pas légalement sur le territoire national » : à cette fin, une zone d’attente a été créée en urgence où les personnes, qui ont toutes déposé une demande d’asile, sont donc enfermées sous surveillance policière.

      Pour la suite, il est prévu que la France ne gardera sur son sol, s’ils remplissent les conditions de l’asile, qu’environ un tiers des passagers du bateau. Les autres seront autoritairement relocalisés dans neuf pays de l’Union européenne. Voilà donc « l’accueil » réservé à des femmes, des enfants et des hommes qui, après avoir fui la guerre, la misère, l’oppression, et pour beaucoup subi les sévices et la violence du parcours migratoire, ont enduré une longue attente en mer aux conséquences notoirement néfastes sur la santé mentale et physique. L’accueil réservé par la France à ceux qu’elle désigne comme « migrants ».
      Pas de répartition entre les Etats européens

      Rappelons-nous : il y a moins d’un an, au mois de février, lorsque plusieurs millions d’Ukrainiens fuyant l’invasion russe se sont précipités aux frontières des pays européens, la France a su mettre en place en quelques jours un dispositif à la hauteur de cette situation imprévue. Pas question de compter : au ministère de l’Intérieur, on expliquait que « dès lors que des besoins seront exprimés, la France y répondra », tandis que le ministre lui-même annonçait que « nous pouvons aujourd’hui accueillir jusqu’à 100 000 personnes réfugiées sur le territoire national ». Pas question non plus de répartition entre les Etats européens : « Ce sont des personnes libres, elles vont là où elles veulent », affirmait la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur. Et pour celles qui choisiraient de rester en France, un statut provisoire de protection immédiate était prévu, donnant droit au travail, à un logement et à un accompagnement social. On n’a pas manqué de se féliciter de l’élan formidable de solidarité et d’humanité dont la France avait fait preuve à l’égard des réfugiés, à l’instar de ses voisins européens.

      Une solidarité et une humanité qui semblent aujourd’hui oubliées. Parce qu’ils sont d’emblée qualifiés de « migrants », les passagers de l’Ocean Viking, sans qu’on ne connaisse rien de leurs situations individuelles, sont traités comme des suspects, qu’on enferme, qu’on trie et qu’on s’apprête, pour ceux qui ne seront pas expulsés, à « relocaliser » ailleurs, au gré d’accords entre gouvernements, sans considération de leurs aspirations et de leurs besoins.

      On entend déjà les arguments qui justifieraient cette différence de traitement : les « réfugiés » ukrainiens sont les victimes d’un conflit bien identifié, dans le contexte d’une partie de bras de fer qui oppose l’Europe occidentale aux tentations hégémoniques du voisin russe. Des « migrants » de l’Ocean Viking,on prétend ne pas savoir grand-chose ; mais on sait au moins qu’ils et elles viennent de pays que fuient, depuis des années, d’innombrables cohortes d’exilés victimes des désordres du monde – guerres, corruption, spoliations, famines, désertification et autres dérèglements environnementaux – dont les Européens feignent d’ignorer les conséquences sur les mouvements migratoires mondiaux, pour décréter que ce ne sont pas de « vrais » réfugiés.
      Une hospitalité à deux vitesses

      Mais cette hospitalité à deux vitesses est aussi la marque du racisme sous-jacent qui imprègne la politique migratoire de la France, comme celle de l’Union européenne. Exprimée sans retenue par un élu d’extrême droite sur les bancs de l’Assemblée à propos de l’Ocean Viking (« qu’il(s) retourne(nt) en Afrique ! »), elle s’est manifestée dès les premiers jours de l’exode ukrainien, quand un tri des exilés s’est opéré, sur la base de la nationalité ou de la couleur de peau, à la frontière polonaise, au point que la haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu s’était dite « alarmée par les informations crédibles et vérifiées faisant état de discrimination, de violence et de xénophobie à l’encontre de ressortissants de pays tiers qui tentent de fuir le conflit en Ukraine ». Le traitement réservé depuis des années en France aux exilés privés d’abri et de nourriture, harcelés et pourchassés par la police, dans le Calaisis comme en région parisienne, à la frontière italienne ou dans le Pays basque est la traduction quotidienne de cette politique xénophobe et raciste.

      Au-delà d’une indispensable réorganisation du secours en mer afin que les passagers d’un navire en détresse puissent être débarqués sans délai dans un lieu sûr, comme le prescrit le droit international, l’épisode de l’Ocean Viking nous rappelle, une fois de plus, la nécessité d’une véritable politique d’accueil, dont l’exemple ukrainien montre qu’elle est possible. Elle doit être fondée sur l’accès inconditionnel au territoire de toutes celles et ceux qui demandent protection aux frontières de la France et de l’Europe, sans présupposé lié à leur origine ni distinction arbitraire entre « migrants » et « réfugiés », la mise à l’écart de tout dispositif coercitif au profit d’un examen attentif et de la prise en charge de leurs besoins, et le respect du choix par les personnes de leur terre d’asile, à l’exclusion de toute répartition imposée.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/migrants-de-locean-viking-refugies-dukraine-quelle-difference-20221115_WG

    • « Ocean Viking » : les fourberies de Darmanin

      Le ministre de l’intérieur a annoncé, mardi 15 novembre, que 44 des 234 rescapés de l’« Ocean Viking » seront expulsés dans leur pays d’origine, tandis que la majorité des autres seront relocalisés dans des pays de l’Union européenne. La #fable de la générosité française s’est rapidement fracassée sur l’obsession de Gérald Darmanin de ne pas donner de prises au RN, en acceptant de secourir, mais pas d’accueillir.

      « Expulsés », « relocalisés » : ces termes affreux pour désigner des personnes résument à eux seuls le vrai visage de l’« accueil » que la France réserve aux rescapés de l’Ocean Viking, bien loin d’une certaine idée que l’on pourrait se faire de l’hospitalité due à des hommes, des femmes et des enfants ayant risqué de se noyer en mer pour fuir leur pays. On avait bien compris depuis ses premières interventions que Gérald Darmanin avait agi contraint et forcé. Que les autorités françaises, par la voix blanche du ministre de l’intérieur, avaient fini, à contrecœur, par autoriser les passagers à débarquer à Toulon, dans le Var, vendredi 11 novembre, uniquement parce qu’elles estimaient ne pouvoir faire autrement : à la suite du refus de la nouvelle présidente post-fasciste du conseil italien, Giorgia Meloni, de voir le bateau affrété par SOS Méditerranée accoster sur les rives italiennes, les exilés étaient à bout de forces, et risquaient de mourir.

      Après avoir failli dans le sauvetage de 27 exilés dans la Manche en 2021 (les secours français ayant attendu leur entrée dans les eaux anglaises sans envoyer de moyen de sauvetage, selon les récentes révélations du Monde), la France cette fois-ci ne les laisserait pas périr en mer. Mais elle s’en tiendrait là, sans accueil digne de son nom, ni élan de solidarité. Et ce qui a été vécu par Paris comme un affront ne resterait pas sans conséquences. Tels étaient les messages passés après la décision à reculons d’accepter le débarquement.

      Le courroux français s’est logiquement abattu sur la dirigeante italienne, qui, contrevenant au droit international, a bloqué l’accès de ses côtes au navire humanitaire. Mais il y a fort à parier que la discorde diplomatique finisse par se dissiper. Et qu’en définitive les exilés eux-mêmes soient les principales victimes des mesures de rétorsion françaises.

      Mardi 15 novembre, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, le ministre de l’intérieur a ainsi annoncé, telle une victoire, qu’au moins 44 des 234 rescapés seraient renvoyés dans leur pays d’origine. « Dès que leur état de santé » le permettra, bien sûr, et alors même que l’étude des dossiers est toujours en cours, selon son propre aveu devant les députés. « J’ai déjà pris […] contact dès [lundi] avec mes homologues étrangers pour que ces reconduites à la frontière puissent se faire dans les temps les plus courts possible », s’est-il réjoui, espérant que ces expulsions seront réalisées d’ici à la fermeture de la zone d’attente « dans une vingtaine de jours ». Sachant que le ministre avait d’emblée assuré que les deux tiers des rescapés acceptés sur le sol européen feraient l’objet d’une « relocalisation » vers onze autres pays de l’UE, le nombre de celles et ceux autorisés à demander l’asile en France sera réduit à la portion congrue.

      Gérald Darmanin, en vérité, avait commencé ses calculs d’apothicaire avant même le débarquement, en déclarant que la France suspendait immédiatement l’accueil pourtant prévu de longue date de 3 500 réfugiés se trouvant en Italie et qu’il renforcerait les contrôles à la frontière franco-italienne.

      Entre les « expulsés », les « relocalisés » et les « refusés », la générosité de la France s’est vite muée en démonstration de force à visée politique sur le dos de personnes qui, venues du Bangladesh, d’Érythrée, de Syrie, d’Égypte, du Pakistan, du Mali, du Soudan et de Guinée, ont enduré les dangers de l’exil dans l’espoir d’une vie meilleure. Personne, faut-il le rappeler, ne quitte ses proches, son pays, sa maison, son travail, ses habitudes, avec pour seul bagage quelques billets en poche, pour le plaisir de traverser la Méditerranée. Politiques, économiques, sociaux, climatiques, leurs motifs sont le plus souvent solides. Sauvés en mer par l’équipage de l’Ocean Viking, les 234 rescapés ont attendu trois semaines, dans des conditions indicibles, la possibilité de poser un pied sur la terre ferme. La Commission européenne avait rappelé la nécessité, la veille du feu vert français, de les laisser accoster, soulignant « l’obligation légale de sauver les vies humaines en mer, claire et sans équivoque, quelles que soient les circonstances ».
      « Secourir et reconduire »

      Guidé par sa volonté de répondre à l’extrême droite qui l’accuse de « complaisance », le ministre de l’intérieur a en réalité anticipé son attente, telle qu’exprimée par une élue RN du Var, Laure Lavalette, dans l’hémicycle mardi, l’appelant à « secourir et reconduire ».

      Le cadre répressif de cet accueil à la française a été posé au moment même où les rescapés sont arrivés en France. Leur débarquement s’est fait sous escorte militaire, à l’abri des regards des élus, des ONG et des journalistes, dans le port militaire de Toulon (lire ici et là). Ils ont aussitôt été placés dans une « zone d’attente » créée pour l’occasion, dans un ancien « village de vacances » de la presqu’île de Giens, c’est-à-dire dans un lieu d’enfermement. Ainsi l’« accueil » a commencé sous de sombres auspices.

      Placés sous la garde de deux cents policiers et gendarmes, les 234 rescapés ont été soumis, sans attendre d’être remis des épreuves physiques et psychologiques de la traversée, à un examen de leur situation administrative. Pratiquée dans l’urgence, la procédure, dans ce cadre « exceptionnel », est particulièrement expéditive : les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), instance dépendant du ministère de l’intérieur, sont tenus de délivrer un avis « sous 48 heures » sur le « caractère manifestement fondé ou non de la demande d’asile », charge ensuite au ministère de l’intérieur de poursuivre – ou non – l’examen du dossier. Comment peut-on humainement demander à des personnes venant de passer trois semaines d’errance en mer, et qui ont pour la plupart subi des chocs de toute sorte, de retracer posément – et de manière convaincante, c’est-à-dire preuves à l’appui – les raisons qui leur permettraient d’obtenir une protection de la France ? L’urgence, l’arbitraire et le respect de la dignité des personnes font rarement bon ménage.

      Habilitée à intervenir en zone d’attente, l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers, qui a pu se rendre sur place, estime dans un communiqué publié mardi que les rescapés de l’Ocean Viking sont « victimes de violation de leurs droits fondamentaux » dans cette zone d’attente. Ses constats sont « alarmants ». Elle regrette tout d’abord le manque de temps de repos à l’arrivée et une prise en charge médicale passablement insuffisante. Elle évoque ensuite de nombreuses violations du droit d’asile dans le déroulement des entretiens administrés par l’Ofpra, liées notamment au manque d’interprétariat, à l’absence de confidentialité des échanges et à l’absence d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

      Mais discuter de la légalité des procédures n’est, à cette heure, pas la priorité du ministre de l’intérieur dont l’objectif est de montrer qu’il prend garde à ce que la France ne soit pas « submergée » par quelques dizaines d’exilés. Sa célérité à annoncer, le plus vite possible, et avant même la fin de la procédure, qu’une partie des rescapés seront expulsés, en est la preuve.

      Quand on se souvient de l’accueil réservé aux Afghans fuyant le régime des talibans ou aux Ukrainiens fuyant la guerre, on observe pourtant qu’il existe d’autres manières d’assurer que les droits des demandeurs d’asile soient respectés. Pour ne prendre que cet exemple, il y a un an, lorsque plusieurs millions d’Ukrainiens ont fui l’invasion russe, « la France a su mettre en place en quelques jours un dispositif à la hauteur de cette situation imprévue », souligne Claire Rodier, membre du Groupe d’information et de soutien des immigré·es (Gisti) et du réseau Migreurop, dans une tribune à Libération. Et de rappeler les déclarations du ministre de l’intérieur lui-même assurant alors que « nous pouvons aujourd’hui accueillir jusqu’à 100 000 personnes réfugiées sur le territoire national ».

      Précédent également notable, la France, en 2018, avait refusé d’accueillir l’Aquarius, soumis au même sort que l’Ocean Viking. À l’époque, Emmanuel Macron n’avait pas voulu céder et le navire avait fait route vers Valence, en Espagne, suscitant la honte d’une partie des soutiens du président de la République. L’accueil alors réservé aux exilés par les autorités et la société civile espagnole avait été d’une tout autre teneur. Le pays s’était largement mobilisé, dans un grand élan de solidarité, pour que les rescapés trouvent le repos et le réconfort nécessaires après les épreuves de l’exil.

      Il faut se souvenir enfin de l’émoi national légitimement suscité, il n’y a pas si longtemps, par les propos racistes du député RN Grégoire de Fournas, en réponse à une intervention de l’élu LFI Carlos Martens Bilongo concernant… l’Ocean Viking. « Qu’il(s) retourne(nt) en Afrique », avait-il déclaré (lire notre article), sans que l’on sache trop s’il s’adressait à l’élu noir ou aux exilés en perdition. Alors qu’il est désormais établi qu’au moins quarante-quatre d’entre eux seront renvoyés dans leur pays d’origine, vraisemblablement, pour certains, sur le continent africain, il sera intéressant de constater à quel niveau notre pays, et plus seulement nos gouvernants, placera son curseur d’indignation.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/161122/ocean-viking-les-fourberies-de-darmanin

    • Ocean Viking : 123 « #refus_d'entrée » en France et une grande confusion

      Une semaine après leur débarquement à Toulon, une soixantaine de migrants de l’Ocean Viking a été autorisée à demander l’asile. En parallèle de la procédure d’asile aux frontière, des décisions judiciaires ont conduit à la libération d’une centaine de rescapés retenus dans la « zone d’attente », désormais libres d’entrer sur le sol français. Une vingtaine de mineurs, ont quant à eux, pris la fuite vers d’autres pays.

      Sur les 234 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking débarqués à Toulon il y a une semaine, 123 migrants se sont vu opposer un refus à leur demande d’asile, soit plus de la moitié, a indiqué vendredi 18 novembre le ministère de l’Intérieur. Ils font donc « l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire » français, soit plus de la moitié, a ajouté le ministère de l’Intérieur.

      Hormis les 44 passagers reconnus mineurs et placés dès les premiers jours sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance, les 189 adultes restant avaient été retenus dans une « zone d’attente » fermée, qui n’est pas considérée comme appartenant au territoire français. Un espace créé dans le cadre de la procédure d’asile à la frontière, pour l’occasion, dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, à proximité de Toulon.

      Ils sont tous passés cette semaine entre les mains de la police et des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), pour des contrôles de sécurité et de premiers entretiens effectués depuis cette « zone d’attente », afin d’évaluer si leur demande d’asile était fondée.

      Au terme de ces entretiens, l’Ofpra a émis « 66 avis favorables » a précisé Charles-Edouard Minet, sous-directeur du conseil juridique et du contentieux du ministère de l’Intérieur. Cette soixantaine de migrants a donc été autorisée à déposer des demandes d’asile, et autorisée à entrer sur le territoire français. Ils ont été conduits vers des centres d’hébergement du Var, dont des #Centres_d'accueil_et_d'évaluation_des_situations (#CAES).

      Parmi eux, certains seront « relocalisés » vers les onze pays européens (dont l’Allemagne, la Finlande ou le Portugal) qui s’étaient portés volontaires pour se répartir les efforts et les accueillir après leur débarquement en France.

      Des avis défavorables mais pas d’expulsions massives et immédiates

      Les « 123 avis défavorables », quant à eux, ne sont pas pour autant immédiatement expulsables. Le gouvernement français veut aller vite, le ministre de l’Intérieur Gerald Darmanina ayant affirmé dès le 15 novembre que ces personnes « seront reconduites [vers leur pays d’origine] dès que leur état de santé » le permettra. Mais les refoulements pourraient prendre un temps plus long, car ces procédures nécessitent que « la personne soit détentrice d’un passeport et d’un laissez-passer consulaire ». Or ce document doit être délivré par le pays d’origine et cela prend du temps car certains pays tardent à l’octroyer, avait expliqué l’Anafé, association de défense des étrangers aux frontières, à InfoMigrants il y a quelques jours.

      D’autre part, des décisions de justice sont venues chambouler le calendrier annoncé par l’Etat. La cour d’appel d’Aix-en-Provence a annoncé vendredi 18 novembre avoir validé la remise en liberté de la « quasi-totalité, voire la totalité » des 108 rescapés qui réclamaient de ne plus être enfermés dans la « zone d’attente ».

      En cause, des vices de procédure dans les dossiers montés dans l’urgence et de juges dépassés par la centaine de cas à traiter. Les juges des libertés et de la détention (JLD) qui doivent en France, se prononcer pour ou contre un maintien en « zone d’attente » après 4 jours d’enfermement, ont estimé dans une majorité de cas que les migrants devaient être libérés. Le parquet a fait appel de ces décisions, mais la cour d’appel a donné raison au JLD pour une non-prolongation du maintien dans la « zone d’attente » dans la plupart des cas.

      Certains des migrants libérés avaient reçu ces fameux avis défavorables de l’Ofpra, notifiés par le ministère de l’Intérieur. D’après l’Anafé, ils devraient néamoins pouvoir désormais « faire une demande d’asile une fois entrés sur le territoire ».

      Douze migrants en « zone d’attente »

      Après ces annonces de libération, le gouvernement a estimé dans l’après-midi, vendredi, que seuls douze migrants se trouvaient toujours dans ce centre fermé vendredi après-midi. A ce flou s’ajoutent « les personnes libérées mais revenues volontairement » sur le site « pour bénéficier » de l’hébergement, a reconnu, désabusé, le représentant du ministère.

      Ces complications judiciaires et administratives ont perturbé nombre des rescapés, parmi lesquels se trouvent des personnes fragiles, dont la santé nécessite des soins psychologiques après les 20 jours d’errance en mer sur l’Ocean Viking qui ont précédé cette arrivée chaotique en France. Et ce d’autant que les autorités et les associations présentes dans la « zone d’attente » ont été confrontés à une pénurie de traducteurs dès les premiers jours.

      A tel point que le préfet du Var, Evence Richard, a alerté le 16 novembre sur le manque d’interprètes, estimant qu’il s’agissait d’"un vrai handicap" pour s’occuper des migrants. « Dès lors, les personnes ne sont pas en mesure de comprendre la procédure de maintien en zone d’attente, leurs droits, la procédure spécifique d’asile à la frontière et ses tenants et aboutissants », avait aussi fait savoir l’Anafé dans un communiqué publié mardi.

      Des scènes de grande confusion

      En effet, la presse locale du Var et d’autres journaux français ont rapporté des scènes de grande confusion lors des audiences devant le tribunal de Toulon et la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avec des « interprètes anglais pour des Pakistanais, une femme de ménage du commissariat de Toulon réquisitionnée comme interprète de langue arabe, des entretiens confidentiels tenus dans les couloirs », comme en atteste dans les colonnes du Monde, la bâtonnière du barreau varois, Sophie Caïs, présente le 15 novembre au tribunal.

      Dans une autre audience, décrite par un journaliste du quotidien français ce même jour, une mère Malienne « fond en larmes lorsque la juge lui demande ce qu’elle a à ajouter aux débats. Sa petite fille de 6 ans, qui, depuis le début de la matinée ne la quitte pas d’un pouce, ouvre de grands yeux ».

      Des mineurs en fugue

      En parallèle, parmi les 44 rescapés mineurs logés hors de la « zone d’attente », dans un hôtel où ils étaient pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, 26 ont quitté les lieux de leur propre chef, a-t-on appris le 17 novembre dans un communiqué du Conseil départemental du Var.

      Les mineurs qui ont fugué « ont eu un comportement exemplaire, ils sont partis en nous remerciant », a insisté Christophe Paquette, directeur général adjoint en charge des solidarités au conseil départemental du Var. D’après lui, ces jeunes, dont une majorité d’Erythréens, « ont des objectifs précis dans des pays d’Europe du nord » tels que les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Allemagne, où ils souhaitent rejoindre de la famille ou des proches.

      Les services sociaux ont « essayé de les en dissuader », mais « notre mission est de les protéger et pas de les retenir », a ajouté M. Paquette.

      http://www.infomigrants.net/fr/post/44849/ocean-viking--123-refus-dentree-en-france-et-une-grande-confusion

    • Ocean Viking : le #Conseil_d’État rejette l’#appel demandant qu’il soit mis fin à la zone temporaire d’attente où certains passagers ont été maintenus

      Le juge des référés du Conseil d’État rejette aujourd’hui la demande de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) de mettre fin à la zone d’attente temporaire dans laquelle ont été placés certains passagers de l’Ocean Viking. L’association requérante, avec le soutien d’autres associations, contestait les conditions de création de la zone d’attente et estimait que les personnes qui y avaient été placées n’avaient pas accès à leurs droits. Le juge relève les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé. Il observe également que les demandes d’asile à la frontière ont pu être examinées, 66 personnes étant finalement autorisées à entrer sur le territoire pour déposer leur demande d’asile, et que les procédures judiciaires ont suivi leur cours, la prolongation du maintien de la détention n’ayant d’ailleurs pas été autorisée pour la très grande majorité des intéressés. Enfin, il constate qu’à la date de son intervention, les associations et les avocats peuvent accéder à la zone d’attente et y exercer leurs missions dans des conditions n’appelant pas, en l’état de l’instruction, que soient prises des mesures en urgence.

      Pour des raisons humanitaires, le navire « Ocean Viking » qui transportait 234 personnes provenant de différents pays, a été autorisé par les autorités françaises à accoster au port de la base militaire navale de Toulon. Le préfet a alors créé une zone d’attente temporaire incluant cette base militaire et un village vacances à Hyères, où ont été transférées, dès le 11 novembre dernier au soir, les 189 personnes placées en zone d’attente.

      L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) a saisi en urgence le juge des référés du tribunal administratif de Toulon pour demander la suspension de l’exécution de l’arrêté préfectoral créant la zone d’attente temporaire, estimant que les personnes placées en zone d’attente se trouvaient illégalement privées de liberté et n’avaient pas un accès effectif à leurs droits. Après le rejet de son recours mercredi 16 novembre, l’association a saisi le juge des référé-liberté du Conseil d’État, qui peut, en appel, ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale en cas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Ce dernier confirme aujourd’hui la décision du tribunal administratif et rejette l’appel de l’association.

      Le juge relève les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé (nombre important de personnes, nécessité d’une prise en charge médicale urgente, considérations d’ordre public), ce qui a conduit à la création par le préfet d’une zone d’attente temporaire sur le fondement des dispositions issues d’une loi du 16 juin 20111, en cas d’arrivée d’un groupe de personnes en dehors d’une « zone de passage frontalier ». Il observe également que les droits de ces étrangers n’ont pas, de ce seul fait, été entravés de façon grave et manifestement illégale. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a pu mener les entretiens légalement prévus, ce qui a conduit à ce que 66 personnes soient autorisées à entrer sur le territoire pour présenter une demande d’asile, et le juge des libertés et de la détention puis la cour d’appel d’Aix-en-Provence se sont prononcés sur la prolongation des mesures de détention, qui a d’ailleurs été refusée dans la grande majorité d’entre eux.

      S’agissant de l’exercice des droits au sein même de la zone, le juge des référés, qui se prononce en fonction de la situation de fait à la date à laquelle son ordonnance est rendue, note qu’à l’exception des quelques heures durant lesquelles les personnes étaient présentes sur la base militaire, l’association requérante a pu accéder au village vacances sans entrave. Si la persistance de difficultés a pu être signalée à l’audience, elles ne sont pas d’une gravité telle qu’elles rendraient nécessaires une intervention du juge des référés. Le ministère de l’intérieur a par ailleurs transmis à l’association, une liste actualisée des 16 personnes encore maintenues, afin de lui faciliter l’exercice de sa mission d’assistance, comme il s’y était engagé lors de l’audience au Conseil d’État qui a eu lieu hier.

      Les avocats ont également accès au village vacances. Là encore, des insuffisances ont pu être constatées dans les premiers jours de mise en place de la zone d’attente. Mais des mesures ont été progressivement mises en œuvre pour tenter d’y répondre, notamment la mise à disposition de deux locaux dédiés et un renforcement de l’accès aux réseaux téléphoniques et internet.

      A la date de l’ordonnance et en l’absence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, il n’y avait donc pas lieu pour le juge des référés de prononcer des mesures en urgence.

      1 Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

      https://www.conseil-etat.fr/actualites/ocean-viking-le-conseil-d-etat-rejette-l-appel-demandant-qu-il-soit-mis
      #justice

    • Le Conseil d’État valide l’accueil au rabais des rescapés de l’Ocean Viking

      Des associations contestaient la création de la zone d’attente dans laquelle ont été enfermés les exilés après leur débarquement dans le port militaire de Toulon. Bien qu’elle ait reconnu « des insuffisances », la plus haute juridiction administrative a donné raison au ministère de l’intérieur, invoquant des « circonstances exceptionnelles ».

      LeLe Conseil d’État a donné son blanc-seing à la manière dont le ministère de l’intérieur a géré l’arrivée en France des rescapés de l’Ocean Viking. Débarqués le 11 novembre à Toulon après vingt jours d’errance en mer, à la suite du refus de l’Italie de les faire accoster sur ses côtes, les migrants avaient immédiatement été placés dans une zone d’attente temporaire à Hyères (Var), sur la presqu’île de Giens. Gerald Darmanin avait en effet décidé de secourir, sans accueillir. 

      Ce lieu d’enfermement, créé spécialement pour y maintenir les exilés avant qu’ils ne soient autorisés à demander l’asile, est-il légal ? L’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) posait cette fois la question au Conseil d’État, après avoir été déboutée une première fois par le tribunal administratif de Toulon. 

      La plus haute juridiction administrative du pays a rejeté samedi 19 novembre la demande de l’association qui souhaitait la fermeture de la zone d’attente au motif que les droits des exilés n’étaient pas respectés. Le Conseil d’État reconnaît que « des insuffisances ont pu être constatées dans les premiers jours de mise en place de la zone d’attente ». Mais il invoque « les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé ». 

      L’audience s’est déroulée vendredi matin, sous les moulures et lustres recouverts d’or du Conseil d’État. Si 189 personnes étaient initialement maintenues dans la zone d’attente le 11 novembre, elles étaient de moins en moins nombreuses au fil de la journée, assurait d’entrée de jeu le représentant du ministère de l’intérieur, Charles-Édouard Minet. « Vous êtes en train de me dire qu’à la fin de la journée, il peut n’y avoir plus personne en zone d’attente », s’était étonnée la magistrate qui présidait l’audience. « Absolument, oui », confirmait Charles-Édouard Minet. Rires dans la salle.

      Symbole de la grande improvisation ministérielle, la situation évoluait d’heure en heure, à mesure que la justice mettait fin au maintien prolongé des exilés en zone d’attente. Au moment de l’audience, entre 12 et 16 personnes étaient encore enfermées. Deux heures plus tard, la cour d’appel d’Aix-en-Provence décidait de remettre en liberté la « quasi-totalité voire la totalité » des personnes retenues dans la zone d’attente d’Hyères. Moins de dix personnes y seraient encore retenues. 

      Devant le Conseil d’État, s’est tenue une passe d’armes entre les avocats défendant les droits des étrangers et le ministère de l’intérieur. Son représentant a assuré que l’accès aux droits des personnes retenues était garanti. Ce qu’a fermement contesté le camp adverse : « Il existe un vrai hiatus entre ce que dit l’administration et ce qu’ont constaté les associations : les avocats ne peuvent pas accéder comme il le devrait à la zone d’attente », a affirmé Cédric Uzan-Sarano, conseil du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI). 

      En creux, les représentants des associations dénoncent les choix très politiques de Gerald Darmanin. Plutôt que de soumettre les rescapés de l’Ocean Viking à la procédure classique de demande d’asile, la décision a été prise de les priver de leurs libertés dès leur débarquement sur le port militaire de Toulon. « Tous les dysfonctionnements constatés trouvent leur source dans l’idée de l’administration de créer cette zone d’urgence, exceptionnelle et dérogatoire », tance Patrice Spinosi, avocat de l’Anafé. 

      Les associations reprochent aux autorités le choix de « s’être placées toutes seules dans une situation d’urgence » en créant la zone d’attente temporaire. La procédure étant « exceptionnelle » et « mise en œuvre dans la précipitation », « il ne peut en découler que des atteintes aux droits des étrangers », ont attaqué leurs avocats.

      Dans sa décision, le Conseil d’État considère toutefois que la création de la zone d’attente est conforme à la loi. Il met en avant « le nombre important de personnes, la nécessité d’une prise en charge médicale urgente et des considérations d’ordre public ». L’autorité administrative note par ailleurs qu’au moment où elle statue, « à l’exception des quelques heures durant lesquelles les personnes étaient présentes sur la base militaire, [l’Anafé] a pu accéder au village vacances sans entrave ».

      À écouter les arguments de l’Anafé, les dysfonctionnements sont pourtant nombreux et persistants. À peine remis d’un périple éprouvant, les exilés ont dû sitôt expliquer les persécutions qu’ils ont fuies aux agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

      « Puisque les entretiens avec l’Ofpra sont devenus l’alpha et l’oméga des procédures d’asile, il est indispensable que les personnes soient préparées par des avocats », juge Gérard Sadik, représentant de La Cimade, une association qui vient en aide aux réfugiés. 
      Plus de la moitié des rescapés interdits d’entrée sur le territoire

      L’Anafé estime que les conditions sur la zone d’attente d’Hyères ne permettent pas aux associations et aux avocats d’accomplir leur mission d’accompagnement. Si les autorités ont mis à disposition deux locaux, ceux-ci « ne sont équipés ni d’ordinateur, ni de fax, ni d’Internet pour transmettre les recours », indique l’Anafé. Par ailleurs, ces pièces, très vite remplacées par des tentes, empêchent la confidentialité des échanges, pourtant imposée par la loi. 

      Laure Palun, directrice de l’Anafé, est la seule personne présente ce jour-là à l’audience à avoir visité la zone d’attente. « Quand on passait à côté des tentes, on pouvait entendre et voir tout ce qui se passait à l’intérieur, décrit-t-elle. Un moment, on a même vu un exilé quasiment couché sur une table pour comprendre ce que l’interprète lui disait au téléphone. »

      Le Conseil d’État a préféré relever les efforts réalisés par les autorités pour corriger les « insuffisances constatées dans les premiers jours » : « Des mesures ont été progressivement mises en œuvre [...], notamment la mise à disposition de deux locaux dédiés et un renforcement de l’accès aux réseaux téléphoniques et Internet. »

      Conséquence de cette procédure d’asile au rabais et des obstacles rencontrés par les exilés dans l’exercice de leurs droits ? Charles-Édouard Minet a annoncé que plus de la moitié des rescapés du navire de SOS Méditerranée, soit cent vingt-trois personnes, ont fait « l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire » français, à la suite de leur entretien individuel avec l’Ofpra. Pour l’heure, le ministère de l’intérieur n’a pas précisé s’ils allaient être expulsés. 

      D’un ton solennel, Patrice Spinosi avait résumé l’enjeu de l’audience : « La décision que vous allez rendre sera la première sur les zones d’attente exceptionnelles. Il existe un risque évident que cette situation se reproduise, [...] l’ordonnance que vous rendrez définira une grille de lecture sur ce que peut faire ou pas l’administration. » L’administration n’aura donc pas à modifier ses procédures.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/191122/le-conseil-d-etat-valide-l-accueil-au-rabais-des-rescapes-de-l-ocean-vikin

    • Ocean Viking : « On vient d’assister à un #fiasco »

      Laure Palun, directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) énumère les multiples entraves aux droits des personnes recueillies par l’Ocean Viking et déplore que le choix de l’enfermement l’ait emporté sur celui de l’accueil.

      La France avait annoncé vouloir faire vite. Se prononcer « très rapidement » sur le sort des passager·ères de l’Ocean Viking tout juste débarqué·es sur la base navale de Toulon (Var), après que le gouvernement italien d’extrême droite avait refusé (en toute illégalité) que le navire accoste sur son territoire. Ces personnes étaient maintenues dans une zone d’attente temporaire créée dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens.

      Un lieu de privation de liberté qui, juridiquement, n’est pas considéré comme étant sur le sol français. Dans les quarante-huit heures, avaient estimé les autorités, l’ensemble des rescapé·es auraient vu examiner la pertinence de leur demande d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Une procédure accélérée qui n’a pas vocation à attribuer une protection internationale, mais à examiner si la demande d’entrée sur le territoire au titre de l’asile est manifestement fondée ou pas.

      Rien, toutefois, ne s’est passé comme prévu puisque la quasi-totalité des rescapé·es, à l’heure où nous écrivons ces lignes, ont pu être libéré·es au terme de différentes décisions judiciaires (1). Pour Laure Palun, directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étranger·ères (Anafé) – la principale association autorisée à intervenir en zone d’attente –, « on vient d’assister à un fiasco ». Tant pour l’administration que pour les demandeur·ses d’asile.

      En créant une zone d’attente temporaire, les autorités ont choisi d’accueillir les passager·ères de l’Ocean Viking sous le régime de la privation de liberté. Que dit la méthode ?

      Laure Palun : Que nous aurions pu faire le choix de l’accueil, plutôt que celui de l’enfermement ! La zone d’attente est un lieu privatif de liberté où la procédure d’asile « classique » ne s’applique pas. La procédure d’asile à la frontière permet de procéder à une sorte de tri en amont et de dire si, oui ou non, la personne peut entrer sur le territoire pour y demander la protection internationale. Mais l’expérience nous le montre : le tri, les opérations de filtrage et les procédures d’asile à la frontière, ça ne fonctionne pas si on veut être en conformité avec le respect des droits.

      La situation des personnes sauvées par l’Ocean Viking et enfermées dans la zone d’attente de Toulon nous a donné raison puisque la plupart d’entre elles ont été libérées et prises en charge pour entrer dans le dispositif national d’accueil (DNA). Soit parce qu’elles avaient été admises sur le territoire au titre de l’asile, soit parce qu’elles avaient fait l’objet d’une décision judiciaire allant dans le sens d’une libération.

      Lire aussi > Ocean Viking, un naufrage diplomatique

      On vient d’assister à un fiasco. Non seulement du côté des autorités – considérant l’échec de leur stratégie politique –, mais aussi pour les personnes maintenues, qui auraient pu se reposer et entrer dans le processus d’asile classique sur le territoire une semaine plus tôt si elles n’avaient pas été privées de liberté. Au lieu de ça, elles ont été fichées, fouillées et interrogées à de multiples reprises.

      Le point positif, c’est que les mineur·es non accompagné·es – qui ont bien été placé·es quelques heures en zone d’attente, contrairement à ce qu’a déclaré le ministère de l’Intérieur – ont été libéré·es le premier jour pour être pris·es en charge. Le Ceseda [code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile] prévoit en effet que les mineur·es non accompagné·es qui souhaitent demander l’asile ne peuvent être maintenu·es en zone d’attente « sauf exception ». Mais c’est généralement le cas.

      Le 16 novembre, devant l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait pourtant annoncé l’expulsion de 44 personnes d’ici à la fin de la période de maintien en zone d’attente.

      Une telle déclaration pose de vraies questions sur le non-respect de la convention de Genève, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et du droit national : il n’est pas possible de dire une chose pareille, alors même que les personnes sont en cours de procédure d’asile. Même si les demandes de ces personnes ont été rejetées, il existe des recours, et ça fait partie de la procédure !

      Le droit à un recours effectif est inscrit dans la Convention européenne des droits de l’homme et a même été consacré concernant la procédure d’asile à la frontière en 2007 (2). Mais Gérald Darmanin a aussi dit qu’il avait pris contact, la veille [le 15 novembre, NDLR], avec les autorités des pays d’origine.

      Non seulement les décisions de l’Ofpra n’avaient pas encore été notifiées aux demandeur·ses d’asile à ce moment-là – et quand bien même ça aurait été le cas, elles étaient encore susceptibles de recours –, mais il s’agit encore d’une atteinte grave et manifeste à la convention de Genève. Contacter les pays d’origine de personnes en cours de demande d’asile, a fortiori pour envisager leur expulsion, ajoute des risques de persécutions en cas de retour dans le pays.

      Dans un communiqué, vous avez dénoncé de « nombreuses violations des droits » au sein de la zone d’attente, notamment dans le cadre des procédures d’asile. Lesquelles ?

      À leur arrivée, les personnes ont été prises en charge d’un point de vue humanitaire. À ce sujet, l’Anafé n’a pas de commentaire à faire. En revanche, elles n’ont reçu quasiment aucune information sur la procédure, sur leurs droits, et elles ne comprenaient souvent pas ce qui se passait. En dehors de la procédure d’asile, il n’y avait pratiquement aucun interprétariat.

      Cela a représenté une immense difficulté sur le terrain, où les conditions n’étaient globalement pas réunies pour permettre l’exercice effectif des droits. Notamment le droit de contacter un·e avocat·e, une association de défense des droits, ou un·e médecin. Et ni les associations ni les avocat·es n’ont pu accéder à un local pour s’entretenir en toute confidentialité avec les demandeur·ses d’asile.

      Concernant les demandes d’asile, ça a été très compliqué. Déjà, à l’ordinaire, les procédures à la frontière se tiennent dans des délais très courts. Mais, ici, l’Ofpra a dû mener environ 80 entretiens par jour. Pour les officier·ères de protection, cela paraît très lourd. Et ça signifie aussi que les personnes ont dû passer à la chaîne, moins de 48 heures après leur débarquement, pour répondre à des questions portant sur les risques de persécution dans leurs pays.

      Les entretiens ont été organisés sans confidentialité, dans des bungalows ou des tentes au travers desquels on entendait ce qui se disait, avec des interprètes par téléphone – ce que nous dénonçons mais qui est classique en zone d’attente. Ces entretiens déterminants devraient être menés dans des conditions sereines et nécessitent de pouvoir se préparer. Cela n’a pas été le cas, et on le constate : 123 dossiers de demande d’entrée sur le territoire ont été rejetés.

      Le Conseil d’État a pourtant estimé que, malgré « les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé », les droits des personnes placées en zone d’attente n’avaient pas été « entravés de façon grave et manifestement illégale ».

      Nous avons déposé une requête devant le tribunal administratif de Toulon pour demander la suspension de l’arrêt de création de la zone d’attente, mais cela n’a pas abouti. L’Anafé a fait appel et porté l’affaire devant le Conseil d’État. Ce dernier n’a pas fait droit à notre demande, constatant que des améliorations avaient été apportées par l’administration avant la clôture de l’instruction, tout en reconnaissant que des manquements avaient été commis.

      Le Conseil d’État a néanmoins rappelé que les droits des personnes devaient être respectés, et notamment l’accès à un avocat, à une association de défense des droits et à la communication avec l’extérieur. Par exemple, ce n’est qu’après l’audience que l’administration a consenti à transmettre à l’Anafé le nom des personnes encore enfermées (16 au moment de l’audience) pour qu’elle puisse exercer sa mission de défense des droits.

      Il faut se rappeler que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui ont été enfermés après avoir vécu l’enfer.

      Ces entraves affectent notre liberté d’aider autrui à titre humanitaire découlant du principe de fraternité, consacré en 2018 par le Conseil constitutionnel, mais surtout les droits fondamentaux des personnes que l’Anafé accompagne.

      Il est à déplorer que les autorités ne respectent pas les droits des personnes qu’elle enferme et qu’il faille, à chaque fois, passer par la voie contentieuse pour que des petites améliorations, au cas par cas, soient apportées. Le respect des droits fondamentaux n’est pas une option, et l’Anafé continuera d’y veiller.

      Avec le projet de réforme européenne sur la migration et l’asile, qui prévoit notamment de systématiser la privation de liberté aux frontières européennes le temps de procéder aux opérations de « filtrage », faut-il s’attendre à ce que de telles situations se reproduisent et, en l’absence de condamnation du Conseil d’État, à des expulsions qui seraient, cette fois, effectives ?

      La situation vécue ces derniers jours démontre une nouvelle fois que la procédure d’asile à la frontière et la zone d’attente ne permettent pas de respecter les droits des personnes qui se présentent aux frontières européennes. C’est ce que l’Anafé dénonce depuis de nombreuses années et c’est ce qu’elle a mis en avant dans le cadre de sa campagne « Fermons les zones d’attente ».

      La perspective d’étendre cette pratique au niveau européen dans le cadre du pacte sur la migration et l’asile est un fiasco politique annoncé. Surtout, cela aura pour conséquence des violations des droits fondamentaux des personnes exilées. Au-delà du camouflet pour le gouvernement français, il faut se rappeler que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui ont été enfermés, et pour certains qui le sont encore, dans la zone d’attente de Toulon, après avoir vécu l’enfer – camps libyens, traversée de la Méditerranée…

      Le filtrage, le tri et l’enfermement ne peuvent pas être la réponse européenne à de telles situations de détresse, sauf à ajouter de la souffrance et de la violence pour ces personnes.

      En représailles de l’action de l’Italie, le gouvernement a annoncé le déploiement de 500 policiers et gendarmes supplémentaires à la frontière franco-italienne, où l’Anafé constate quotidiennement des atteintes aux droits. À quoi vous attendez-vous dans les prochains jours, sur le terrain ?

      Nous sommes évidemment très mobilisés. Actuellement, nous constatons toujours la même situation que celle que nous dénonçons depuis de nombreuses années. Conséquence de ces contrôles, les personnes prennent de plus en plus de risques et, pour certaines, mettent leur vie en péril… Preuve en est l’accident qui a eu lieu ce week-end à la frontière franco-italienne haute (3).

      Il me paraît surtout important de rappeler que ces effectifs sont mobilisés dans le cadre du rétablissement du contrôle aux frontières intérieures, mesure ininterrompue depuis sept ans par les autorités françaises. Or ces renouvellements [tous les six mois, NDLR] sont contraires au droit européen et au code frontières Schengen. Il est temps que ça s’arrête.

      (1) Soit parce qu’elles ont reçu une autorisation d’entrée sur le territoire au titre de l’asile, soit parce que les juges des libertés et de la détention (JLD) ont refusé la prolongation du maintien en zone d’attente, soit parce que les JLD se sont dessaisis par manque de temps pour traiter les dossiers dans le délai imparti, soit en cour d’appel.

      (2) À la suite d’une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme, la France a modifié sa législation (Gebremedhin contre France, req n° 25389/05, 26 avril 2007).

      (3) Un jeune Guinéen est tombé dans un ravin dans les environs de Montgenèvre (Hautes-Alpes), ce dimanche 20 novembre.

      https://www.politis.fr/articles/2022/11/ocean-viking-on-vient-dassister-a-un-fiasco-45077

    • « Ocean Viking », autopsie d’un « accueil » à la française

      La sagesse, comme la simple humanité, aurait dû conduire à offrir aux rescapés de l’Ocean Viking des conditions d’accueil propres à leur permettre de se reposer de leurs épreuves et d’envisager dans le calme leur avenir. Au contraire, outre qu’elle a prolongé les souffrances qu’ils avaient subies, la précipitation des autorités à mettre en place un dispositif exceptionnel de détention a été la source d’une multitude de dysfonctionnements, d’illégalités et de violations des droits : un résultat dont personne ne sort gagnant.
      Dix jours après le débarquement à Toulon des 234 rescapés de l’Ocean Viking – et malgré les annonces du ministre de l’Intérieur affirmant que tous ceux qui ne seraient pas admis à demander l’asile en France seraient expulsés et les deux tiers des autres « relocalisés » dans d’autres pays de l’Union européenne – 230 étaient présents et libres de circuler sur le territoire français, y compris ceux qui n’avaient pas été autorisés à y accéder. Ce bilan, qui constitue à l’évidence un camouflet pour le gouvernement, met en évidence une autre réalité : le sinistre système des « zones d’attente », consistant à enfermer toutes les personnes qui se présentent aux frontières en demandant protection à la France, est intrinsèquement porteur de violations des droits humains. Principale association pouvant accéder aux zones d’attente, l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) le rappelle depuis 2016 : « Il est illusoire de penser pouvoir [y] enfermer des personnes dans le respect de leurs droits et de leur dignité. » Ce qui s’est passé dans la zone d’attente créée à Toulon en est la démonstration implacable.

      Une gestion calamiteuse

      Pour évaluer a posteriori la gestion calamiteuse du débarquement de ces naufragés, il faut rembobiner le film : poussé dans ses ultimes retranchements mais y voyant aussi l’occasion de se poser en donneur de leçon à l’Italie, le gouvernement annonce le 10 novembre sa décision d’autoriser « à titre tout à fait exceptionnel » l’Ocean Viking à rejoindre un port français pour y débarquer les hommes, femmes et enfants qui, ayant échappé à l’enfer libyen, puis à une mort certaine, ont passé trois semaines d’errance à son bord. « Il fallait que nous prenions une décision. Et on l’a fait en toute humanité », a conclu le ministre de l’Intérieur.

      Preuve que les considérations humanitaires avancées n’ont rien à voir avec une décision prise à contrecœur, le ministre l’assortit aussitôt de la suspension « à effet immédiat » de la relocalisation promise en France de 3 500 exilés actuellement sur le sol italien : sous couvert de solidarité européenne, c’est bien le marchandage du non-accueil qui constitue l’unique boussole de cette politique du mistigri.

      Preuve, encore, que la situation de ces naufragé·e·s pèse de peu de poids dans « l’accueil » qui leur est réservé, une zone d’attente temporaire est créée, incluant la base navale de Toulon, où leur débarquement, le 11 novembre, est caché, militarisé, « sécurisé ». Alors même qu’ils ont tous expressément demandé l’asile, ils sont ensuite enfermés dans un « village vacances », à l’exception de 44 mineurs isolés, sous la garde de 300 policiers et gendarmes, le ministre prenant soin de préciser que, pour autant « ils ne sont pas légalement sur le territoire national ».

      La suspicion tenant lieu de compassion pour ces rescapés, débutent dès le 12 novembre, dans des conditions indignes et avec un interprétariat déficient, des auditions à la chaîne leur imposant de répéter inlassablement, aux policiers, puis aux agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), les récits des épreuves jalonnant leur parcours d’exil, récits sur la base desquels doivent être triés ceux dont la demande d’asile pourra d’emblée apparaître « manifestement infondée », les empêchant de fouler le sol de cette République qui prétendait, quelques heures auparavant, faire la preuve de son humanité.

      Seuls 66 de ces demandeurs d’asile échappent à ce couperet, si bien que les juges des libertés et de la détention du tribunal de Toulon sont alors chargés d’examiner la question du maintien dans la zone d’attente, au-delà du délai initial de quatre jours, de plus de 130 d’entre eux. La juridiction se révélant rapidement embolisée par cet afflux de dossiers, les juges se trouvent dans l’impossibilité de statuer dans les vingt-quatre heures de leur saisine comme l’impose la loi et ils n’ont d’autre solution que d’ordonner la mise en liberté de la plupart.

      En deux jours 124 dossiers examinés au pas de charge

      Le calvaire pourrait s’arrêter là pour ces exilé·e·s perdu·e·s dans les arcanes de procédures incompréhensibles, mais le procureur de la République de Toulon fait immédiatement appel de toutes les ordonnances de mise en liberté, sans doute soucieux que les annonces du ministre ne soient pas contredites par des libérations en masse. C’est alors la cour d’appel d’Aix-en-Provence – qui est soumise au train d’enfer imposé par la gestion de l’accueil à la française : entre le 16 et le 17 novembre 124 dossiers sont examinés au pas de charge pendant que les personnes concernées sont parquées dans un hall de la cour d’appel jusque tard dans la nuit. Mais les faits étant têtus et la loi sans ambiguïté, les juges d’appel confirment que leurs collègues de Toulon n’avaient pas d’autres choix que de prononcer les mises en liberté contestées. A l’issue de ce marathon, il ne reste, le 21 novembre, que quatre personnes en zone d’attente.

      « Tout ça pour ça » : ayant choisi la posture du gardien implacable des frontières qu’un instant de faiblesse humanitaire ne détourne pas de son cap, le gouvernement doit maintenant assumer d’avoir attenté à la dignité de ceux qu’il prétendait sauver et aggravé encore le sort qu’ils avaient subi. Il faudra bien qu’il tire les leçons de ce fiasco : la gestion policière et judiciaire de l’accueil qu’implique le placement en zone d’attente se révélant radicalement incompatible avec le respect des obligations internationales de la France, il n’y a pas d’autre solution – sauf à rejeter à la mer les prochains contingents d’hommes, de femmes et d’enfants en quête de protection – que de renoncer à toute forme d’enfermement à la frontière.

      Signataires : Avocats pour la défense des droits des étrangers (Adde) Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et trans à l’immigration et au séjour (Ardhis) La Cimade, groupe d’information et de soutien des immigré·e·s (Gisti) La Ligue des Droits de l’homme (LDH) Syndicat des avocats de France (SAF) Syndicat de la magistrature (SM).

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/ocean-viking-autopsie-dun-accueil-a-la-francaise-20221127_B53JAB6K7BDGFKV

    • #Mineurs_non_accompagnés de l’« Ocean Viking » : « Un #hôtel, ça ne correspond pas aux besoins d’un gamin »

      Pour Violaine Husson, de la Cimade, la France, signataire de la convention des droits de l’enfant, contrevient à ses engagements en plaçant des mineurs dans des situations loin d’être adéquates.
      L’information a fuité par voie de presse jeudi : 26 des 44 mineurs arrivés en France à bord du bateau humanitaire Ocean Viking ont fugué de l’hôtel où ils étaient logés à Toulon. « Le département a vocation à mettre les mineurs en sécurité mais pas dans des geôles, on ne peut pas les maintenir de force dans un foyer. Ils peuvent fuguer et c’est ce que certains on fait. On ne peut pas les contraindre, il n’y a pas de mesures coercitives à leur égard », a assuré Jean-Louis Masson, le président du conseil départemental du Var. Parmi ces 26 mineurs se trouvaient une majorité d’Erythréens qui, selon Christophe Paquette, directeur général adjoint en charge des solidarités au conseil départemental du Var, « ne restent jamais » car « ils ont des objectifs précis dans des pays d’Europe du Nord » comme les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Allemagne, où ils souhaitent rejoindre de la famille ou des proches. Les associations et les ONG, elles, pointent du doigt les conditions d’accueil et de prise en charge de ces jeunes, souvent inadaptées. Violaine Husson, responsable nationale Genre et Protections à la Cimade, répond à nos questions.

      Quelles sont les conditions de vie des mineurs étrangers non accompagnés, comme ceux de l’Ocean Viking, pris en charge dans des hôtels en France ?

      Il faut d’abord préciser une chose : la loi Taquet de février 2022 interdit le placement des mineurs non accompagnés dans des établissements hôteliers. Cela dit, il y a une exception : dans leur phase de mise à l’abri, en attendant l’entretien d’évaluation de leur minorité, il y a une possibilité de les placer à l’hôtel jusqu’à deux mois. C’est le cas pour cette quarantaine d’enfants, ça l’est aussi pour des centaines d’autres chaque année.

      Un hôtel, ça ne correspond pas aux besoins d’un gamin. Ils sont placés dans des chambres à plusieurs – en fonction des établissements, ils peuvent se retrouver à une deux ou trois personnes dans une chambre, voire plus –, ils ne parlent pas la même langue, ils n’ont pas la même religion… Il n’y a rien qui les relie vraiment. Par ailleurs, il n’y a pas de suivi social, personne ne vient les voir dans la journée pour leur demander si ça va ou ce qu’ils font. Il n’y a pas de jeux prévus, ils sont indépendants. Ce sont aussi souvent des hôtels miteux, pas chers, avec des toilettes et des salles de bains communes. C’est un quotidien qui est loin de l’idée que l’on se fait des mesures de protection de l’enfance en France.

      Ça peut expliquer pourquoi certains décident de quitter ces établissements ?

      Oui, il y a des enfants qui partent parce que les conditions ne vont pas du tout, elles ne sont pas adéquates. Certains ont dû tomber des nues. Dans certains hôtels, il n’y a pas que des mineurs, parfois ils peuvent être placés avec d’autres publics, des majeurs notamment. Ça les rend particulièrement vulnérables : ils sont des enfants étrangers isolés qui viennent d’arriver d’une traversée éprouvante et des personnes peuvent leur mettre la main dessus.

      La question des mineurs non accompagnés est souvent débattue, certaines personnalités politiques estiment qu’ils coûtent énormément d’argent, qu’ils seraient des délinquants. Qu’en est-il réellement selon vous ?

      En effet, on a parlé des mineurs non accompagnés de manière très négative : il y a la délinquance mais aussi le fait qu’ils mentiraient et qu’ils frauderaient, qu’ils coûteraient beaucoup à l’Aide sociale à l’enfance… Certains politiques ont même affirmé que 80 000 mineurs non accompagnés arriveraient en France chaque année. La réalité est toute autre : il y en a eu un peu plus de 9 000 en 2021. On est quand même loin du fantasme véhiculé.

      La protection de l’enfance est problématique aujourd’hui, il y a un véritable manque de moyen et de compétences, y compris pour les enfants français. Mais c’est bien plus simple de dire que c’est la faute des étrangers, même si leur proportion dans la prise en charge est dérisoire. Il y a cette injonction des politiques politiciennes de dire : le problème de l’Aide sociale à l’enfance, c’est les étrangers. Selon eux, ils mentent, ils fraudent, ils fuguent, ils ne sont pas mineurs ou ne sont pas vraiment isolés. Alors que le système de protection ne fait pas la différence entre les enfants français et étrangers.

      La France, comme d’autres pays, a signé la convention internationale des droits de l’enfant. Les démarches doivent donc être faites en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant. On voit bien que quand on les place à l’hôtel ou qu’on les suspecte de mentir sur leur âge parce qu’ils sont étrangers, ce n’est pas le cas.

      https://www.liberation.fr/societe/mineurs-non-accompagnes-de-locean-viking-un-hotel-ca-ne-correspond-pas-au
      #MNA #enfants #enfance

  • "Enfin libéré", l’#Ocean_Viking repartira en #mer_Méditerranée en janvier

    Après cinq mois de blocage par les autorités italiennes, le navire humanitaire de l’ONG #SOS_Méditerranée, Ocean Viking, repartira en mer en janvier 2021 pour reprendre ses opérations de sauvetage. Un « soulagement » pour l’ONG qui estime avoir perdu beaucoup de temps.

    L’ONG de secours aux migrants SOS Méditerranée pousse un cri de soulagement. Lundi 21 décembre, elle a annoncé que son navire Ocean Viking allait pouvoir reprendre ses opérations de sauvetage dans les eaux méditerranéennes, après avoir été bloqué pendant cinq mois par les autorités italiennes.

    « Après une troisième inspection en cinq mois par les garde-côtes italiens, l’Ocean Viking a été jugé conforme à l’interprétation des règles de sécurité des navires par les autorités italiennes. La détention du navire a donc été levée », a indiqué l’ONG dont le siège est à Marseille dans un communiqué.


    https://twitter.com/SOSMedFrance/status/1341067468077473797

    L’Ocean Viking va désormais quitter l’Italie et rejoindre Marseille d’ici la fin du mois de décembre pour se réapprovisionner et embarquer les membres des équipes de sauvetage et médicales. Les personnes à bord vont être mises en quarantaine et subir différents tests pour s’assurer de ne pas être positives Covid, avant un départ prévu au cours de la première quinzaine de janvier, indique Sophie Beau, directrice générale de SOS Méditerranée.

    « Nous sommes soulagés que le bateau soit libéré, enfin, et nous sommes déterminés à repartir en Méditerranée centrale après une période très éprouvante pour nos marins sauveteurs », a réagi Sophie Beau, interrogée par InfoMigrants.
    « Mesures de dissuasion visant les navires humanitaires »

    Pour pouvoir obtenir l’autorisation de reprendre à mer, SOS Méditerranée a dû se plier aux desiderata des garde-côtes italiens. « On nous a dit de mettre à niveau notre capacité d’abandon du navire en embarquant des radeaux de survie », poursuit Sophie Beau, précisant que ce genre d’embarcation est utilisée comme solution de repli si le navire coule ou prend feu. « On ne nous avait jamais demandé ça. Nous avons dû en acheter 8 nouveaux. Cela nous a pris du temps et nous a coûté plus de 200 000 euros. »

    Du temps perdu car ces nouvelles mesures de sécurité ont été, de manière paradoxale, prises au détriment de centaines de personnes qui ont, pendant ce temps-là, risqué leur vie en mer, pointe la directrice.

    >> À (re)lire : Mer Méditerranée : un nouveau navire humanitaire italien bientôt prêt pour des opérations de sauvetage

    « On peut considérer que ces exigences s’inscrivent dans une liste de mesures de dissuasion visant à empêcher les navires humanitaires de naviguer », tacle encore Sophie Beau, alors que cinq autres navires humanitaires sont actuellement bloqués dans différents ports. « Il y a une absence de volonté politique de la part des pays européens de mettre en place un mécanisme pour sauver des vies, c’est très choquant. »

    L’année 2020 a été marquée par une recrudescence des tentatives de traversée en Méditerranée centrale. Au total, plus de 1 100 migrants, partis pour l’essentiel de Tunisie ou de Libye, ont péri en Méditerranée dont la grande majorité sur cette route centrale, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Mais combien sont morts sans même avoir été répertoriés ?

    Pour 2021, SOS Méditerranée a lancé un nouvel appel aux dons citoyens, dans l’espoir de pouvoir « mener à bien [leur] mission vitale ». Chaque jour passé en mer pour l’Ocean Viking coûte 14 000 euros à l’ONG.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/29246/enfin-libere-l-ocean-viking-repartira-en-mer-mediterranee-en-janvier
    #ONG #sauvetage #asile #migrations #réfugiés #Méditerranée #libération

  • La drammatica foto dell’uomo sulla nave Talia simbolo della tragedia dei migranti

    Il mercantile ancora al largo di Malta dopo aver soccorso, tre giorni fa, 52 persone alla deriva senza cibo né acqua. La Valletta per farli sbarcare vuole garanzie dalla Ue sulla ricollocazione. Sulla Ocean Viking si stanno eseguendo i tamponi.

    La Pietà dei mari si trova sul mercantile Talia. Ha il volto scheletrico e terrorizzato di un migrante subshariano, privato ormai anche della forza per scendere le scalette di un ponte. E ha le braccia forti e compassionevoli di un marinaio in tuta blu e mascherina che lo sorregge. Questa foto è stata scattata poche ore fa sulla Talia, e da sola racconta quello che il governo di Malta si rifiuta di vedere: i 52 migranti recuperati in mare, e che le autorità della Valletta da tre giorni non vogliono far sbarcare, sono allo stremo.

    Il marinaio della foto dovrebbe essere un motorista. Il mercantile, dopo aver ricevuto la segnalazione di un gommone in avaria, ha deviato la propria rotta per recuperare gli uomini e le donne che vi viaggiavano. Come impongono le convenzioni marittime internazionali. Ora li stanno accudendo e nutrendo, pur con tutte le preoccupazioni del rischio Covid, ma non possono resistere ancora per molto.

    #Nave_Talia, i migranti ammassati a bordo vengono accuditi dai marinai del mercantile

    Malta continua a non assegnare loro un porto di sbarco. Solo due migranti sono stati autorizzati a scendere perché ritenuti in concreto pericolo di vita. L’armatore è in difficoltà, perché il Talia era atteso in Libia per consegnare un carico. Il governo di Malta dice che non consentirà l’attracco ai naufraghi fino a quando non avrà garanzie da altri Stati membri dell’Unione sulla loro immediata ricollocazione, come scrive il Times of Malta. Il 3 luglio Alarm Phone, l’ong che segnala i gommoni, aveva diramato il primo allarme. Rilanciato poi dall’italiana Mediterranea Saving Humans e dall’ong tedesca Sea Watch.

    Intanto a bordo della #Ocean_Viking, nave della ong Mediterraneé che si trova al largo di Pozzallo con 180 migranti salvati in diverse operazioni, le autorità italiane stanno effettuando i tamponi per il Covid. La ong Mediterraneé, in merito al trasbordo dei migranti sulla #nave-quarantena #Moby_Zazà previsto domani, sottolinea: «Non abbiamo ricevuto alcuna istruzione. Senza conferme, non possiamo dare soluzioni ai sopravvissuti. L’incertezza prosegue e questo significa che le tensioni permangono».

    https://www.repubblica.it/cronaca/2020/07/05/news/la_foto_shock_dell_uomo_sulla_nave_talia_simbolo_della_tragedia_dei_migra
    #image #photo #asile #migrations #réfugiés #Méditerranée #sauvetage #Libye #faim

    A mettre en lien avec ces autres images, mises sur seenthis en 2018:

    https://seenthis.net/messages/678573

    ping @isskein

  • Sauvetage de migrants en Méditerranée : #MSF met un terme à son partenariat avec #SOS_Méditerranée

    Médecins sans frontières a annoncé vendredi la fin de sa collaboration avec SOS Méditerranée à bord du navire Ocean Viking. Les deux ONG sont en désaccord sur la possibilité d’effectuer des sauvetages malgré la #crise_sanitaire liée au coronavirus.

    Après quatre ans de collaboration, l’organisation #Médecins_sans_frontières (MSF) a annoncé, vendredi 17 avril, qu’elle cessait ses missions de #sauvetage_en_mer aux côtés de SOS Méditerranée, qui affrète le bateau #Ocean_Viking, contraint de rester jusqu’à nouvel ordre à Marseille, son port d’attache.

    https://twitter.com/MSF_Sea/status/1251093648529334273?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E12

    Les deux ONG, dont le partenariat a permis de sauver au cours des quatre dernières années environ 30 000 personnes en Méditerranée, ne sont pas parvenues à s’entendre sur la possibilité d’opérer malgré la crise sanitaire du coronavirus qui a notamment vu les ports italiens et maltais se fermer.

    MSF aurait souhaité poursuivre les sauvetages, même sans garantie des États européens de pouvoir débarquer les personnes secourues, au nom de « l’#impératif_humanitaire », a expliqué Hassiba Hadj Sahraoui, chargée des questions humanitaires. Mais l’ONG pouvait difficilement continuer de mobiliser une équipe médicale si le bateau de sauvetage restait à quai en France, a-t-elle ajouté.

    SOS Méditerranée a considéré, de son côté, que « les conditions de sécurité n’étaient malheureusement plus réunies pour les équipages et les personnes secourues », a expliqué à l’AFP Sophie Beau, sa directrice générale. Reprendre la mer, c’était prendre le risque de se retrouver « face à des situations de #blocage qui s’éternisent en mer », « sans aucune garantie de #débarquement », et « des #évacuations_médicales rendues très hasardeuses du fait des conditions de crise sanitaire », a-t-elle ajouté.

    De nombreuses embarcations quittent la Libye

    MSF a par ailleurs rappelé la gravité de la situation de ceux qui continuent de fuir la #Libye. Alors que #Malte et l’#Italie ont fermé leurs #ports et que plus aucun navire humanitaire ne se trouvait dans la zone de recherche et sauvetage libyenne vendredi, les tentatives de traversées de la Méditerranée sont encore plus dangereuses qu’avant.

    Pour MSF, les États européens « continuent de se dérober devant leur #responsabilité, contrecarrant sans relâche les efforts des ONG ». Elle accuse Malte et l’Italie de ne pas avoir répondu à plusieurs appels de détresse et d’avoir refusé « le débarquement à près de 200 personnes » par d’autres ONG pendant le week-end de Pâques.

    Prenant acte du #retrait de son « #partenaire_médical », SOS Méditerranée espère pouvoir reprendre les opérations de sauvetage au plus vite pour éviter « que la crise sanitaire n’en cache une autre », humanitaire, en Méditerranée. Et elle rappelle dans un communiqué que plus de 1 000 personnes ont fui la Libye « à bord de bateaux impropres à la navigation » au cours des dix derniers jours.

    https://twitter.com/SOSMedFrance/status/1251088701217746951?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E12

    https://www.infomigrants.net/fr/post/24182/sauvetage-de-migrants-en-mediterranee-msf-met-un-terme-a-son-partenari
    #sauvetage #ONG #asile #migrations #Méditerranée #coronavirus #covid-19 #Mer_Méditerranée #rupture #ports_fermés #fermeture_des_ports

  • Struggles of women on the move*

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    Introduction

    When the crowd gathered for the Women’s Day demonstration on March 8, 2020 at 10am in front of Cinema Riff at Grand Socco in Tangier, Moroccan feminists, Sub-Saharan women for freedom of movement, single mothers, and a few Europeans came together. The women of our local Alarm Phone team, all from Sub-Saharan Africa, would sit together afterwards with some of their friends from Europe and start to write down their experiences for this report.


    At the same time, on the Greek island of Lesvos women from Alarm Phone teams interviewed women in and around the hot-spot of Moria, who spoke out about the suffering they had gone through on the most Eastern flight route towards Europe. They reported how on 30 January a crowd started moving from the overcrowded hot-spot Moria towards the city of Mytilene, which is still on Lesvos. „All women against Moria“, „Women in solidarity“, „Moria is a women’s hell“ and „Stop all violence against women“ was written on some of the many signs while the crowd chanted „Azadi“ (farsi: freedom) with raised fists.

    Shortly afterwards an Alarm Phone activist met with a young woman from Somalia, who had made the crossing from Libya to Italy last September and who wants to encourage the rescue groups to continue their amazing work.

    Another woman sat down and wrote a beautiful solidarity letter to one of the women active in Search and Rescue: “When I hear her voice on the phone, saying ‘my boat will head to the target with full speed,’ I picture her behind the wheel of this massive boat carrying 400 people, flying above the sea as if it was weightless.”

    There are some who write in a brave way about the suffering women had to go through: The pain they feel and the suffering that the simple fact of having to pee means for women in Moria. Or the struggles with the Boumla (Wolof for police) deporting them within Morocco towards the deserts, exposing them to greater dangers. Or the death of a young Moroccon student.

    There are others who decided not to remember the suffering in detail, but to point out their strategies, their struggles and the thankfulness about the solidarity created among us.

    In this report we tried to write about the manifold experiences of women and LGBTQII+, who cross the sea to reach a place of safety or who are stuck in transit, and about the experiences of women active in Search and Rescue who are trying to support these struggles. Women are on the move for their own freedom of movement in all three regions of the sea: in the East between Turkey and Greece in the Aegean, in the Central Mediterranean from Libya and Tunisia towards Italy and Malta, and in the West from Morocco towards Spain. Everywhere we meet more women in the frontlines of these struggles than we used to in the past. In the East, the percentage of adult men among those arriving even fell below 50 percent after 2015, which creates a completely different situation. While all of them face intersecting forms of visible and invisible violence making border crossing even more dangerous and lethal for women, we know that women on the move are more than what they are reduced to, and that they bear a power and a strength that no border is able to defeat.

    Also, more and more women are active in the Search and Rescue initiatives as well as in our Alarm Phone team. In the Alarm Phone we are even a majority. We decided to write in a very subjective way and what we ended up with is a patch-work of different stories in various styles and tones. We hope that this report empowers others to raise their voices as well and to become more visible with all their great expertise.

    We dedicate this report to all women and LGBTQI+ who are struggling for their survival in the refugee camps all around the world in times of the Coronavirus under life-threatening conditions. The only option to end this suffering is freedom of movement as a basic global right for all. We will continue this struggle.

    In March 2018, the Alarm Phone published the last report that was dedicated to the specific situation of women at sea.

    From now on, we will try to publish a report every year about the special situation of women and LGBTQI+ on the move.
    Daily struggles of women on the move in the Western Mediterranean. Alarm Phone activists report
    March 8, 2020 in Tangier

    The Women’s Day demonstration gather on March 8, 2020 at 10am in front of Cinema Riff at Grand Socco in Tangier. Moroccan feminists, Sub-Saharan women for freedom of movement, single mothers, and a few Europeans come together. A Samba group is drumming, there is a lively exchange between the different groups, purple-coloured cloths – the symbolic colour of March 8 – are handed out, banners are rolled out, contacts are exchanged – the atmosphere is great. About 800 women come together. This makes an impression in the northern Moroccan metropolis, because the voices are loud and determined with slogans like ‘Solidarité avec les femmes du monde entier!’ ‘Raise your voice, seize your rights’ in Arabic and French starts the demonstration and runs along the big boulevard to the Place de Nación. Passers-by and journalists follow with interest. One thing is already clear at this early hour: the march is empowering, and this in a place that has been marked by the worst police repression for several months.

    Julia and Pauline* participated during this march with the women’s group of Alarm Phone.

    Julia: “Sub-Saharan women are too tired, we suffer all kinds of violence, violence through the Moroccan security, through the Moroccan compatriot. Even Moroccan women have their difficulties. In their households, in their homes, in their surroundings. There are too many cases and there is evidence too. Women do not have a loud voice towards the men in uniform. They don’t open the doors and they don’t listen to us, we’re always there in moments of distress. That’s why we raised our angry shouts. I hope that our message is sent to the Moroccan authorities. We want peace and we have the right to live.”

    Pauline: “We women are brutalised in the house and we have no right to express ourselves. But we as women have to express ourselves, also in the media, so that the people through us understand what is really going on in the field. This is violence in everyday life. But we women want equality.
    March 8 was an opportunity to express ourselves. Because as we walked, there were many people who followed us. We fought, we sent messages. We gave ourselves the right to speak out and we said no to violence against women. We demanded our right to free expression and free movement!”

    Here Pauline’s speech, which unfortunately could not be presented on Women’s Day:

    Me, I am Pauline.

    I am an activist who is concerned about the rights of migrants in Morocco, especially in Tangier, but this struggle is not easy with the new policy of the Moroccan authorities, because we suffer repression by the police and deportation to southern cities and sometimes to the Algerian border. So, we as activists, we are calling for our rights and the rights of migrants.

    As Morocco has signed international conventions on the right of asylum and freedom of movement, the Moroccan authorities are asked to respect international law and not to be the gendarmes of the European Union. It is a bad policy to block migrants in Morocco, neither work nor residence permit, and to prevent migrants from their liberty in order to avoid illegal immigration. But Morocco must try to review its state policies and open the borders so that people can move freely. So that Sub-Saharan migrants can also go to earn a living in Europe as the Europeans can come here and earn their living in Africa. So we simply ask for freedom of movement for everyone and their well-being.

    Thank you very much.

    Stories of Struggles with the Boumla

    After the demonstration, we are together, the friends of the Alarm Phone: Pauline, Carla, Fatou, Co and Julia in Tangier. We tell and listen to each other’s stories about the Boumla (Wolof: police). As Alarm Phone has often reported, persecution, racism, violence and deportations are part of the daily life of black communities in Morocco, especially in the Tangier region. The women describe how they face discrimination on a daily basis and what strategies they have developed against repression.

    Fatou: We stopped the deportation in Rabat

    “Me and Pauline were with friends. We saw the police and we knew they’d take us even though we had papers.

    I said: ‘No, I’m not leaving, I have my passport and I have my residence permit.’ They slapped me and took me to the police station. They told us they’d take us to Tiznit. When we got to Rabat, we told ourselves we had to do something. If not, we’ll end up in Tiznit and it’s far from Tangier. So we revolted together to annoy them. We started to shout, shout with force. The Moroccans, they started to get irritated. And we shouted shouted shouted shouted… and they said “safi, safi safi safi safi” (Arabic: enough). We stopped and we got out in Rabat.”

    Pauline: I didn’t accept it

    “I wanted to talk about the violence I suffered as a woman in Morocco. The police came many times to catch me and take me south. I didn’t accept it, because I don’t know anyone there. At that time, I had my own restaurant in the Medina (Arabic: city). The police sent me to the police station. When I left there, I saw a lot of people and I told myself that if I didn’t do something, they would send me south, to Tiznit. I told the officer that I was sick. He said, ‘No, you’re not sick, you’re going to go out to the bus with the others.’ The bus was already there in front of the door. I was afraid of being deported to Tiznit, because I couldn’t afford to go back to Tangier.

    So, I went to the toilet. I had the second day of my period, so I took off the cotton. I threw it away and went out. There was a lot of blood coming out, it got on my pants, everything was spoiled. I said to the Chief of Police, ‘Look, I’m sick.’ But he said, ‘No, you’re not, get in line…’ That was when I opened my legs. He was surprised and said: ‘Okay, okay, okay.’ He gave me a ride home. So, I went back to work.”

    Julia: The hospital instead of the deportation to Tiznit

    “The last attempt to deport me was in 2019. The Moroccan police came to our house very early in the morning. They wore Kagouls outfits as if we were criminals in our own house. I had lost my residence permit, because I couldn’t renew it. They took us to Tiznit. We couldn’t resist. We were on the road from 8 in the morning until 11 in the evening, without food, water or anything. 2km before reaching to Marrakech I told myself that I had to find a possibility to go down there, because at least it was a city I knew. Just before I got there, I made a lot of noises and had a crisis, they got scared and called an ambulance to pick me up. I really wasn’t sick, I had nothing, it was just a trick so they could release me. So I made gestures, I stopped breathing. In the ambulance they gave me an oxygen mask. When I got to the hospital, they put me on a bench with a mask, by the time they went to find a doctor I took off everything and I ran away…”
    Aurore Boréale, based in Rabat: Only by fighting together can we can have real progress

    Since the dawn of time, human beings have been on the move, looking for green pastures, a milder sky, a better elsewhere or simply out of curiosity. That leads us to the conclusion, that the desire to see what’s on the other side has always been there, and, which leads us to conclude that migration is a phenomenon inherent to living beings. I would even say vital.

    The most shocking thing today is to see how migration has become demonised and criminalised everywhere. Leaving has become anathema, to the point where barriers are being erected everywhere. Means that are being used to hinder freedom of movement, are becoming more and more dramatic every day are being used to hinder freedom of movement, to sort out who is eligible or not. Let us take the case of Morocco: on the one hand, due to its geographical location it is considered the gateway to the Eldorado by many Africans, and also Syrians, Bangladeshis and Filipinos rush to Morocco hoping to live a better life on the other side of the Mediterranean, or perhaps simply to settle there.

    On the other hand, however, while non-dark-skinned migrant communities may enjoy more tranquillity and are not often subject to the most blatant forms of discrimination, the same does not hold true for the black African migrant community in Morocco. The case that interests our report is that of women.

    If yesterday it was rare to see women taking to the migration routes, today that is no longer the case and women migrate as much as men. Today, more women take the routes, swallowing the fear that arises, facing cold, hunger, danger, and closing their ears to not hear about all kinds of violence.

    Today the women are leaving too. But what about the daily life of these women once they have settled in Morocco? A country which, despite progress and openness in terms of women’s rights, remains a country where women do not enjoy practically any of the rights granted to them by law or the constitution. A country where women still remain the inferiors, the subordinates, or simply things belonging to men, to satisfy their impulses or their egos. Basically, I would say, a country where women are not truly free to be who they want to be.

    Migrant women in Morocco have to deal with all this, and additionally with the fact that they are black women. Thus, they are perceived in the collective consciousness of Moroccans as women of little value, of light morals, prostitutes, or beggars: The black woman at the bottom of the ladder that people with an atrophied mentality have decided to create. For some of the migrant brothers or for some chairman’s prey single migrant women’s bodies are there to be exploited when promising them the journey to the Eldorado.

    And they are left to their fate as soon as these men have found more attractive prey. Thus, many women find themselves single mothers, with children whose fathers don’t give a damn, or don’t even want to know. Because of the hard reality, some women find themselves in a relationship and move in with the first one who could offer her a roof over her head, food on her plate, in order to reach the basic comforts. Sometimes it turns out well, sometimes it turns out very problematic. Migrant women who work in private homes are also subject to exploitation, even physical abuse, non-payment of wages that are insignificant compared to the work they do. We can also talk about the difficulty to be respected in public health centres, complications, late care or lack of care on discriminatory and racist grounds. They remain on the margins.

    What I find most appalling is that even in some militant associations, where women are under-represented, they are given less responsibility and no real decision-making power. They are infantilised, or just given a place to serve as a showcase to obtain grants from organisations that take the status of women seriously. Once the grant is awarded, these women are side-lined, without any decision-making power, bullied and subjected to everything that men have decided without them having a say.

    There are organisations, such as UNHCR., Caritas, and CEI (Comité d’Entraide Internationale), which provide assistance to migrant women. But here again, there is the eternal question of eligibility, the unhealthy hierarchy of suffering, the categorisation of migrants. They are classified according to their suffering, according to how they arrived in Morocco, and the migrant who arrives by plane is often not entitled to this little help: “You can’t help everyone”, unless you have a story that holds up, a lie that is worth telling, or if you pretend to be someone you are not.

    I have seen people who really needed help but were not given it, because they did not meet the criteria for it. I know people who died as a result. And even when help is given to these women, it is not free. In one way or another, they remain like prisoners of the organisations, spied upon even on their most intimate affairs. That is the price that has to be paid.

    There are a few women’s associations such as La voix des femmes de Hélène Yalta, the Collective of Migrant Women in Morocco (COFMIMA) and ARCOM, which try as best they can to fight for the status of migrant women in Morocco. But a real struggle for the rights of migrant women, for women’s empowerment, is almost non-existent. The urgency, the need, the survival cries out too loud… It is in dispersed groups, individually that the great majority of women fight. Can we hope for real progress or evolution by fighting in dispersed groups? No, not at all.

    With your courage you can do this work
    Interview with Leonie

    Although the situation in Tangier is becoming more and more difficult for Sub-Saharan travellers, a group of women has been formed, who are active with the Alarm Phone there. We spoke with Leonie, who is new to the group. She has been living in Morocco for 5 years.

    Leonie, why do you take part in the Alarm Phone?

    L: It was a good brother who introduced me to the group. He told me that there is a network of activists, and he said: “I see that you with your courage, you can do this work.”

    Have you already worked here in Morocco in solidarity activities?

    L: I am in almost all the associations in Tangier that bring together migrants. When there is a meeting or a small activity, they invite me. I am almost always present.

    Alarm Phone is a network of activists who help migrants who are already on the water, so that they don’t lose their lives in the water. In case of distress we guide them.

    Can you explain the situation of migrants here in Morocco?

    L: In Morocco it is not easy for migrants. Whether you are regularised or not. It’s very tense. Life is no sugar for us. I myself have suffered the consequences. They’ re breaking your door down. At two o’clock in the morning the soldiers are here, they don’t warn you, they don’t ask if you have papers or not. To your surprise you jump out of your sleep and they break your door down.

    They come home like thieves. They don’t even try to find out if you have papers. You are supposed to say, ‘But sir, I have papers’.

    Once they arrived at my house, I was washing myself around 3am, last summer, so in 2019. The man opened the bathroom and I said, ‘But sir, I’m showering.’ He said: ‘That’s not my problem.’ I said: ‘When you came in, did you ask me if I’m legal or not? You come in my house, but I have my house contract, I have my papers. You want to come in the shower? If you put your head in the bathroom again, I’ll throw the water on you!’ And that’s how he left the toilet.

    It hurts, it’s frustrating. Every year like this, they treat us like animals as if we’re not human. Really, it’s disgusting.

    And as women you don’t have the right to speak up, especially in front of the authorities, they don’t consider you. It hurts you, it stays in your heart. And morally, you don’t have the right to express yourself! That’s the suffering of women here. We’re trying to talk to human rights and women’s rights associations.

    In the work of Alarm Phone – What are the demands?

    L: Alarm Phone demands that borders are open. If someone wants to go out of a country that the person passes freely without being caught and without being violated. This is the demand of Alarm Phone: Freedom of movement!
    Hayat, killed at the border by the Moroccan Navy in September 2017

    In order to prevent the young people from setting out at all, armed force is used in Morocco: On September 25th 2017, the Navy shot and

    killed 19-year-old student Hayat Belkacem from Tétouan. Three men were injured, some of them seriously.

    The four of them, along with 21 other young Moroccans*, had set off from Martil Beach in a “Go-Fast” (speedboat) in the direction of Spain. The Navy wanted to stop the travellers; when the boat started, they opened fire. The hashtag 126102877 #Quiadonnélordre: Who gave the order? went viral afterwards and contradicted the version of the Navy, which allegedly only fired warning shots.

    For days, before Hayat’s death, hundreds of young people had been flocking to the beaches in the north after Spanish videos of successful arrivals in Spain were posted on the Internet. Moroccan security forces had blocked the young Moroccans* from accessing the beaches of northern Morocco. In response, hundreds of young Moroccans* demonstrated in Martil and demanded ‘l’harga fabor’ – their right to free passage: https://youtu.be/ICahwzMzbdM

    After the death of Hayat, people in many cities, including many Ultras, took their anger to the streets. In Tétouan, the people chanted ‘We will avenge you, Hayat!’ as well as ‘We will renounce the Moroccan passport!’ and ‘Viva España’: https://youtu.be/EyXfV-fMoBg

    A student was subsequently sentenced to two years in prison, claiming that his call for protest via Facebook had allegedly insulted the nation of Morocco and called for an uprising. Other young people have also been accused, many of whom are still minors.
    Central Mediterranean: Women on the move
    The invisible struggles

    It is difficult to write about women who cross the Central Mediterranean. It is difficult because, in first place, we don’t want to write ‘about’ women on the move. We would love to write ‘with’ them about their experiences, to use this platform to make their voices heard. However, their stories are often kept invisible, as is the violence they experience on a daily basis. Too often, women crossing the Central Mediterranean route just appear to us as a number communicated by the person who speaks on the phone. A number that we try to clarify several times, to then quickly report it into an email to the authorities or into a tweet: “We were called by a boat in distress, on board there are 60 people fleeing from Libya including 3 children and 8 women, two of them are pregnant”. We rarely hear their voices. Communication with people in distress in the Central Mediterranean is brief and fragmented: it starts with a distress call through a satellite phone, it ends with a satellite phone being thrown into the water. And then silence. A silence that can mean many things, but that too often does not carry good news. This communication through an unstable connection does not allow us to get in touch again, to ask for details, to ask for their names and testimonies once they make it to Europe or when they are returned to violence and war in Libya. And this is how, painfully, the powerful voices of women on the move get lost, and their presence remains fixed in a dry and uncertain number.

    Of course, we often know what is beneath those numbers, and here we could write stories of violence, slavery and torture in Libya. We also know that many women are fleeing not only war or poverty, but also gendered-based violence, forced marriages, harassment due to their sexuality. We could write about their pregnancies, and about the rapes behind them. We could write about what it means to be a mother and to embark on a precarious rubber dinghy holding your child’s hand in the hope that the sea will be less violent than the Libyan camp or the homes they left behind.

    The borders of Europe amplify the violence women flee from, but security measures, surveillance and criminalisation of people’s movement are often legitimised under the flag of combatting human trafficking. With one hand Europe pretends to give protection: it portrays border controls as humanitarian acts to protect ‘vulnerable women’ from ‘bloodthirsty’ traffickers. With the other hand Europe pours money and resources into creating stronger borders, organises trainings and signs deals and agreements to limit freedom of movement, thus fuelling border violence.

    Depicted as vulnerable victims in need of protection, discourses of women’s protection and vulnerability are often used by European member states to put a humanitarian face to the violence they inflict through their border policies.

    While all these intersecting forms of visible and invisible violence make border crossing even more dangerous and lethal for women, we know that women on the move are more than what they are reduced to, and that they bear a power and a strength that no border is able to defeat. This is what we would love to write about, and this is what we learn from the testimonies and experiences collected here.
    Women on the phone

    In a few situations, we talked to women in distress who called the Alarm Phone, and since then, when the communication is difficult, we ask the people on the phone to let us talk to a woman on board.

    As Alarm Phone, we talk to people during their journey. For us they are voices in distress that we try to comfort, with difficulty. We ask for their GPS coordinates and they try to read us numbers. It’s hard to be on the phone with people who could drown any moment and to ask them to read numbers. They just want to tell you that the sea is too big and the boat is too small. They want to tell you that they don’t want to go back to Libya, that they’d rather die at sea. They ask us to help. They tell us that they’re sick, that they won’t make it, that there’s water in the boat, lots of water, too much water. They ask why we haven’t arrived yet, and why we keep asking for numbers. And how do you explain that you’re not at sea, but in England, or France, or Germany? How to explain that you called for help but that European authorities aren’t answering your requests, and are letting them die at sea? How do you explain that the only thing we can do is to write down these numbers, and that because of these numbers their lives might be rescued?

    More than once, a chaotic situation where communication seemed impossible and where we feel that we will never be able to clarify the GPS coordinates of the boat, was solved by simply talking to a woman, as it was reported by a shift team: “they passed the phone to a woman, she speaks clearly, she is calm. She listens carefully and she understands how to find the GPS coordinates on the phone. She spells out the numbers: ‘North, 34 degrees, 22 minutes…’ She is confident and she explains the situation. She said that there are sick people on the boat and that there is little fuel left. We keep regular contact, she knows what she has to do and how to continue.”

    It is in these volatile moments, in these few exchanges and in the courage that we hear in their voices, that the invisible struggles of women on the move in the Central Mediterranean become visible. Their voices become weapons against the brutal border regimes, a weapon, on which the lives of 100 fellow travellers depend. We wish we could hear more of these voices, and that we could talk to them and hear their voices beyond distress situations, as we did with Daniella and Abeni, who are still in Tunisia, or as we did with Kobra, who managed to reach Germany.

    Trapped by the UNHCR
    Speaking to Daniella, Tunisia

    Daniella comes from the English-speaking part of Cameroon. The war has been escalating since 2016. Her husband has been murdered and she also lost her mother in that war. She belongs to a politically marked family as part of the opposition. She left the country in October 2017. Since she left, she didn’t hear from the rest of her family.

    She crossed Nigeria, Niger, Algeria and Libya before crossing the border to Tunisia. She was arrested at Ben Guerdane, where her fingerprints were collected. She was in facilities of the Red Crescent and the UNHCR in Medenine, and then taken to the Ibn Khaldun centre in August 2018. She was registered with UNHCR and underwent 4 interviews, in which she was asked the same questions, trying to ‘trap her’ on dates. Her request was denied. She was told she could very well go back to the English-speaking part of Cameroon: “But if you go to this area as a francophone, you are in danger because people will think you’re a spy.”

    During her stay at the centre, Daniella often organised sports activities such as football games, which did not please the UNHCR. She was also very active, taking part in the various demonstrations organised by the refugees and asylum seekers of the centre to protest against their living conditions and to denounce the practices of the UNHCR.

    Since UNHCR rejected her asylum application, she no longer receives food coupons. She decided to leave the centre after being pressured by UNHCR to make room for others. “It’s their strategy, they embarrass you to make you go away”. Today she lives in a small apartment with two other people. She says she doesn’t have the courage to appeal UNHCR’s decision. It has been 11 months since she left the centre.

    The crossing from Tunisia costs about 1000 Euros. She intends to attempt the crossing. Their group of 14 people is ready. The smuggler asked them to wait until the weather improves, saying it’s only a matter of a couple of days. It’s already been two weeks that they’re waiting for the weather to get better to cross the border. A month ago, migrants have been intercepted. They are not imprisoned unless they are found to be smugglers.

    She also crossed the ditch; it is about three metres deep. There was no water at the bottom, but there was mud. To climb, some men helped her, braiding clothes to hoist her up. The desert is full of aggressive dogs. She had to walk for a long time with her baby and a friend from the Ivory Coast before she came across the military. The military knew their number, they had to identify their group well in advance (they asked where the men were, looking for a group of 18 people). The soldiers were equipped with huge searchlights sweeping across the desert. After you cross the ditch, there’s a barbed-wire fence three meters high. Crossing this border costs about 300 Euros.
    Intercepted to Tunisia
    Interview with Abeni, Tunsia

    Abeni left Nigeria in 2017. She lived in a southern province. Her husband’s father was killed and her husband was threatened, so the family had to flee the country.

    She arrived in Tunisia in May 2017 while she was 6 months pregnant with her first child. Her boat ran out of petrol and was rescued by the Tunisian authorities and handed over to IOM. They were taken to Medenine by bus to an IOM shelter that shut down in March 2019. She remained in this centre for one year and asked to see UNHCR, but for one year she was only offered the voluntary return. It wasn’t until a year later that she was able to go to a UNHCR centre.

    She went to Zarzis with her husband for the UNHCR interview. Her husband, who only speaks Ikâ, was given a translation by phone. A few months later they received a negative response from UNHCR, telling them that the events that they had raised could not be verified on the net, and that it was a family problem.

    She says that few Nigeriens are accepted, with the exception of single women with children (one of whom has been relocated). They appealed against this decision by filling out a form, without an interview, but were again given a rejection. The UNHCR gave them three days to leave the centre, along with her two daughters, aged two years and six months. This happened one year ago. They refused, were able to stay but they no longer have food coupons and no more help from the UNHCR.

    When she talks to the staff, they pretend to ignore her. UNHCR has not renewed their cards. They have stopped paying for medical expenses, while the baby has to go to hospital regularly. The Doctor said it was because he was suffering from the cold. Her husband tries to work but there are no opportunities in Medenine. He went to Sfax but he got himself arrested and imprisoned for two days for not having papers. Without documents, they have no freedom of movement. The second baby wasn’t registered in Tunisia. UNHCR refused to accompany them.

    Her husband wants to go back to Libya to attempt the crossing, but she doesn’t want to and stayed in Tunisia. The UNHCR still wants to kick the family out of the shelter but can’t do it due to the current coronavirus pandemic.
    We felt welcome
    Kobra’s testimony, rescued by the Ocean Viking in September 2019

    My name is Kobra. I am 18 years old and I come from Somalia. I want to tell you the story of my rescue in the Mediterranean Sea on September 2019. I don’t know how to find the words to describe the suffering I went through, and I don’t want to remember what happened before I left Libya. I also never want to forget the moment, after nearly two days at sea, when we finally saw a small sailing-boat on the horizon that ended our suffering.

    We were full of fear, because finally our phone, our only connection to the world, had stopped functioning and water was rapidly entering the boat. It was a miracle when we finally found this sail-boat. We were about 45-50 people in a blue rubber boat, and seven of us onboard were coming from Somalia. One pregnant woman was traveling with her 1-year-old child and her husband. She is now doing well because she was transferred to Germany after the rescue.

    I never learned how to swim, so the idea of the boat flooding was a possible death sentence to me.

    I have a video a friend took on the boat and you can see the expressions of relief and happiness in everyone’s faces when we spotted the sailboat. There are no words to describe how you feel when you realize that your journey across the sea is over. It was a German sailboat, which was too small to take us on board. They came to us and asked us, if we could speak English. They then told us that they would call for the OCEAN VIKING a big rescue ship to come and take us on board. They gave us jackets and life-vests, because the weather was getting rougher and colder.

    Later, when it was dark, it started raining and the waves got bigger. The small German boat took us to OCEAN VIKING which took us aboard. There were already other people with them who had been rescued earlier that day. Even the rescuers seemed so happy that we were all safe. They had doctors on board and they gave us medical treatment, since my pregnant friend and I had had vomited a lot. I had a heavy allergic reaction on my skin as well because the sea irritated my skin condition after being exposed to the salt for so long.

    On the OCEAN VIKING we found another pregnant woman, whom I think was from Nigeria. She was brought by a helicopter to Malta because she was very close to delivering her baby. The crew later made an announcement to tell us when the baby was born in Malta.

    We were on the OCEAN VIKING for one week because no country wanted to take us in. This time was difficult, but it was much better than what we experienced before. The crew was always with us and they tried to support us however they could. We had enough food. We had a doctor whenever we felt sick. They even gave us clothing. We felt welcome.

    Finally, Lampedusa decided to take us in. When we finally left the boat after such a long time at sea it was not as warm of a welcome. We received food only after being forced to give our fingerprints and we were brought to a dirty place with barbed wire. I could not stay in Italy; the conditions were so poor. Today I struggle to live in Germany with the fear of my fingerprints on record and that I will be deported back to Italy.

    I will never forget the good people on these ships, who welcomed me before I arrived in Europe. They will stay in my memory. Maybe, one day I will meet them again. Until then I want to encourage them to continue what they are doing and I send them all my greetings.

    SAR Solidarity
    Letter from an Alarm Phone activist to an amazing woman of the SAR world in January 2020

    The past 5 days were crazy, my dear friend. We never met, but I have read the stories that you wrote on board of the rescue ship. Nine boats in distress fleeing from Libya called the Alarm Phone, and for the first time in a long time, all the boats that called Alarm Phone from the Central Mediterranean where rescued to Europe, more than 650 people in 5 days. This was not just about luck. It was about the incredible efforts of the people out there doing everything they could to rescue these boats, despite European authorities’ efforts to let them sink without trace. These were efforts mostly by women. Wonderful, fierce, kind, fearless women like you. In the past, I have mostly have dealt with men at sea and it was difficult. These 5 days were joyful instead.

    L., she crossed the Mediterranean up and down 3 times in 72 hours without ever sleeping, just following the GPS coordinates that we had received from the people in distress, which we also forwarded to the authorities and to the rescue ships. After sending an email, I would call the bridge. Again and again, for 72 hours. I would call the bridge telling her, “L.! There is a boat in distress again you need to be quick”. I never heard moment of discomfort in her voice. Even under that pressure, she was trying to create little cracks of softness, of love, of solidarity, of laughter. When I hear her voice on the phone, saying “my boat will head to the target with full speed”, I picture her behind the wheel of this massive boat carrying 400 people, flying above the sea as if it was weightless. I cannot find the words to describe the love and respect I feel towards her when I read her emails to the authorities, defying their orders, placing herself and ‘her boat’ against the orders given by some Colonel of the Armed Forced of Malta, or of some Commander of the Libyan Navy. I think there are no words in this world to express the magnitude of certain actions.

    On the phone, we tell the people in distress that they have to stay strong and keep calm, that they have to trust us, that they cannot give up. We tell them “rescue is coming for you my friend, don’t worry”. When you’re out at sea, lost in the darkness.

    Then Luisa and ‘her boat’ arrive, to the rescue, after hours of darkness and uncertainty. After hours when they thought they had been abandoned by everyone, and that they had been forgotten in a sea that is too big, on a boat that is too small. After so many hours of exhaustion, there is certain magic in the moment when we can tell them “make light, with a telephone, don’t use flames – make yourself visible.” There is magic in the few words spoken by voices broken by panic and excitement “we see a boat, it’s red”, and in an email of few words from the rescue ship we read “we see an intermittent light coming from the sea, we believe it is the rubber boat”. I imagine this little light shining above a sea that is a cold, dark, liquid cemetery. A sign of life, of resistance, of struggle. Not just of despair.

    Then silence. One second you are head and body in the Mediterranean, the next you are in silence and you realise that hours have passed. From this side of the phone we do not know what happens in this silence. It’s a feeling that makes you feel completely detached from reality.

    Waking up reading the stories you write about these rescues, my dear friend, I always cry. Reading your descriptions of the rescue, reading the stories of the people who were on board, it makes it all real, it fills the void of these silences.

    Reading your stories makes me think of all the witches of the sea like you, like L., like the women of Alarm Phone and the women crossing the Mediterranean, who relentlessly struggle together in this hostile sea. The Morganas of the sea, the few little lights in this darkness, sparks that are reflected by the waves, as magic as fairies and as fierce as witches.

    I cannot stop being inspired by all these women, who cannot be stopped, contained, tamed. So yes, it is hard work also for all of us, and many people think we are crazy for doing this work, but we know that we are not the crazy ones, and that we are part of a brigade of amazing witches who believe that the real craziness is looking away. Thank you.
    From the crossing of the Aegean Sea to the struggle for women rights. Women on Lesvos
    All women against Moria

    Most women have already endured hardship even before they get into a boat to cross the Mediterranean Sea. But the journey is far from being over once they reach the shore. Many of them find themselves in overcrowded refugee camps, such as Moria on the Greek island of Lesvos, where the authorities are overwhelmed with numbers and unable or unwilling to provide the most basic needs such as clean water, electricity, shelter, medical care and security. It is a harsh environment where the strongest rules and violence is part of everyday life which leads to an existence dictated by constant fear. In this rough environment, solidarity is a vital tool for survival, especially among women.

    On January 30th 2020, approximately 450 women and children gathered in Mytilene, the capital of Lesvos, to protest the horrific living conditions in the camp and the dramatic increase of violence– including several fatal stabbings that had taken place within the previous weeks. The protest was organized by a group of about 15 Afghan women, and their goal was to draw attention to the dire situation. It was both a cry of despair as well as a powerful and loud manifestation of female solidarity when women of all ages and different nationalities took to the streets and blocked the traffic for several hours.

    “All women against Moria“, “Women in solidarity“, “Moria is a women’s hell“ and “Stop all violence against women“ was written on some of the many signs. The crowd chanted “Assadi“ (farsi: freedom) with raised fists. Several women said that it was the first time they had participated in a demonstration, but they showed great confidence during negotiations with the police or when giving media interviews. An elderly Afghan woman explained that she had focussed on caring for her family all her life but the hellish situation in Moria had given her no choice but to join the demonstration.

    Many women kept their faces hidden behind hijabs, voluminous scarves, and surgical face masks to conceal their identity. In the past, well placed rumours had been circulating that political involvement and contact with the press would lead to immediate deportation and repression by the Greek authorities. Taking this into account, 450 protesters is an astonishing number. Even more so considering the difficulties a trip from Moria to the islands capital, Mytilene, includes. For example, people have to cue for several hours to be able to get into one of the few busses. It has been reported that bus drivers had to push people away with sticks to be able to close the door. If you did make it onto the bus, you would miss your meals for that day as you weren’t able to stand in the food line. We also heard reports that a larger number of women were prevented from leaving the camp to join the demonstration by the authorities and police forces.

    No flyers, no Facebook group, no official announcement. News of the women-only-protest was spread by word of mouth. The success of the demonstration was a surprise to many, especially the police, who initially showed up with only 10 riot-cops. After the protest, 9 female volunteers were taken to the police station, where their identity cards were checked. Their sneaking suspicion is that they were the ones organising the women’s protest. The officials seemed to be unable to grasp the idea that women from Moria could organise efficiently. The women’s role in the camps traditionally has been to calm the male-dominated unrests rather than taking part in them or even initiating them. But times are desperate and increasingly women are discovering their political voice. They are finding strength in female cooperation. There had been an all-women sit-in last October after the tragic death of a woman in a gas explosion in the camp. Assemblies, empowerment workshops, networking and practical support are less visible and yet essential aspects of the politicisation of women.

    Experiences of crossings and life in Moria

    Again this year, with the increase in the number of people arriving on the island and the non-reaction of the Greek and European authorities, the conditions in Moria have only gotten worse and worse. When you talk with the women living there, their daily life comprises of fear, no rest, long lines, attacks, power cuts… but also solidarity amongst each other, survival strategies and the struggle to be able to decide about their own lives. There are the stories of three women, F, N, and J.

    F left Iran: “Unfortunately, in Iran members of my family did not have identity cards. We couldn’t go to school. We just had to work. My older sister and I worked as tailors in a basement. I started working when I was 12 years old. I have a passion for education. Finally, this year my sister and I decided on leaving in search of something better. Finally, my parents accepted. So, we started our travels. During our journey we tolerated several difficulties. Upon arrival to Lesvos, we slept two nights on the streets because we had to wait until Monday for when the offices of Moria opened. Finally, we could get a tent.”

    N and J arrived on the island of Lesvos by boat last December crossing over from Turkey. Both are living in Moria today. For J “each person has their own way to experience and to bear the crossing of the Mediterranean Sea”. She had to pay 450 USD to the person who organised the crossing and was told: ‘In 4 days we will come to pick you up at 23 o’clock at the hostel.’

    She tells us her story: “…they put us in a covered pick-up truck, we were a lot and really squeezed together. Four hours later we arrived in a very dark place. They put us in an abandoned house without any water or food all day long until 7 pm. Then we walked 5 hours up and down in the Turkish hills. Finally, we arrived on the shoreline. They inflated the dinghy in front of us. We left close to midnight. 1.5 hours later the Turkish coastguards stopped us on the sea and they brought us back to Turkey. We were 29 people on board. When they released us we went back to Izmir. I didn’t have any strength anymore. The smugglers told me ‘you have to leave.’ Two days later we tried again. Same group, same way. Five hours of walking again. And again, we couldn’t reach Greece. The big boats came close to our rubber boat to make big waves and they were yelling at us to leave and go back to Turkey. This time we spent one week in the police station. The third time, we arrived in Greek waters and called the Greek Coastguard, that came to pick us up. But we had to throw away our personal belongings because the boat was filling up with water. There was complete disorder on board, no organisation. After we had called them for the first time, we still waited three hours until they came to pick us up.”

    N spoke about how “the fear comes when you’re at sea. You didn’t know who your neighbour was, but you held their hand. We started to pray. On the open sea the water was coming inside the boat. Each one was calling for God in his own way. I didn’t want to go on the boat, but they pushed me. The kids were in the middle. Me as well. I closed my eyes. We landed without any police, only fishermen. It was raining. I was wet and we had to wait 15 minutes more for the bus. What gave us our hope back, was this woman, who gave us chips and sent her kids to say hello to us. They let us on the bus and we sat there until the morning without giving us anything”

    J described her situation after being registered in Moria: “I didn’t have any tent in which to sleep. I slept from tent to tent. They kick you out of the tent when you cough too much. The few that we had, they would steal it. I was scared to be stabbed, mainly during the night and someone would do it just to take your phone. The worst is that the authorities don’t let us leave the island.”

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    Your whole life is waiting in line

    For the refugees, lines are running a big part of their daily and social lives. As N and I were talking over some tea, N had to leave us to go stand in line for food. Very often they have to miss a workshop, a class, a commitment, or a friends-gathering to go stand in line for a basic necessity. Sometimes it gets so late that people have to return to their tents in Moria, even if they did not receive what they had been standing in line for all day. And the day is done. J told us that: “In the morning, when you wake up, the first thing that you have to do is line-up. We line-up for every basic need. We pee in buckets since the toilets are too far away and we have to wait in line to use them. It’s infernal to wait and the belly burns. During the night especially, the toilets are too far to reach. And the toilets are dirty, so you easily get itchy. The Moria medical tent usually gives paracetamol to calm the itchiness down… To take a shower is the same. You wait in the cold, and sometimes when you arrive the shower is clogged”. N added: “You have to stand in line, but you know that someone can come and stab you for your phone while you wait. It has happened a few times since I have been here, and people have died just waiting. I am scared when I have to go stand in line. One time, they didn’t clean the floor and we had to line up standing on the blood of a guy who was stabbed. I was so scared, it was horrible.”

    F also described the situation in a letter: “When you get up you must stand in a line for breakfast, lunch, diner, toilet, shower: for everything! You wait about 2.5 hours in each line. Your whole life is waiting in a line. We have only two places for doctor’s visits, which is not enough for thousands of people. Again, you have to wait in a line. Only the people that go at 4 o’clock in the morning have the opportunity to be checked. If you have a cold, standing in a line outside is bad for your health. You will get worse. If you have a headache, cold, flu or pain in your back or leg… it doesn’t matter. Doctors just give you painkillers and tell you to drink water.”

    Z, is an underaged Afghan girl, who lives in the jungle of Moria with her family. She wrote the following in a letter: “There is a toilet but at night it’s so hard to go to the toilet because we have to cross a small bridge and we can’t’ see anything because there is no light. I am under 18 and they don’t give me food because my mother is not here and when my father got sick, I was given the task to wait in line for food for the family but they didn’t give it to me because I am a minor. Life here is so hard: washing clothes, caring for my little sister, my brother and father. It’s so hard for me. I miss my mum.”

    Living in Moria is like living in jail. You are constantly living in fear. “Inactivity makes people go crazy. You will pass 6 months here without realising it”. You have nothing to do, nothing that you can do to be a part of civil society. The lines are dehumanising. People become a ticket, a plate, a bottle of milk, a croissant or a bag of clothes,” J explained.
    Self-organisation and a daily life strategy

    For N solidarity is important: “We also have to accept each other and the situation. I cannot eat too late, but when the electricity comes back at 2 am, I cannot prevent the others to talk, to eat and to cook. So, I put my earphones on and cover my eyes. In any case, I don’t sleep well. I refuse to take the medication that they give me to sleep, because we know that boys spend the nights in the alleys. With the canvas walls of the tents, you can feel the people passing by close to you and your head, and I want to be awake in case something happens. To eat warm and cooked food, we have to prepare the food before the electricity comes on. The last time, my tent’s mates put the potatoes in the pan and everything was ready, but they had only 10 minutes of electricity. So they had to wait, but when the power came back the food was not good anymore. As they were hungry, they added some milk. I don’t know how they ate it.”

    N continues: “In my tent we are 7 people plus a little girl. We sleep on the floor and each one puts their stuff around their sleeping place. We keep the middle of the tent open to cook and sit, and eat together. It is important to show solidarity, so I said to the women that we have to protect each other and when one of us has to go stand in line early in the morning, some of us go with her until daylight comes. Also, the women in my tent dance and sing, do braids, and find time to do what they want, and that’s strengthening for me.”

    J talked about solidarity concerning food: “The food in Moria is disgusting and gives you diarrhoea, meaning you then have to go stand in line for the toilets. Can you imagine! We collect money, around one euro per person, and we give it to the person, who cooks for the day. Every day it is a new person.”

    When women cross the sea, and even before then along the journey, they often have different experiences than men and are exposed to greater danger. Being on the move is a difficult situation, but being on the move and being a woman puts you in an even more vulnerable position. Specific issues related to gender discrimination and racism are being reported by the women on Lesbos that we were talking to:

    The women that we talked to speak about racism against black people within the hotspot, but also in the city. For example, a woman told us that in one supermarket, whenever a black person enters, a guard will follow that person around. She also told us that black women are often offered money in the street for sexual services. Prostitution is undoubtedly happening a lot, there lacks public information or data about this invisible side of this kind of unbearable situation on the island. It is clear, however, that human traffickers take advantage of the overcrowded and unsafe situation in Moria and that people are doing business with women and kids. And since the administration is overwhelmed, people can wait up to three months to be registered and to be able to benefit from the “cash programme for refugees”. Three months without any money.

    As we are writing this report, and just a few weeks before the international women’s day, there are five women locked-up in different police stations on Lesbos. They were arrested after trying to leave the island without proper papers. They have been arrested as part of a pilot project to see if this idea for a new law can be implemented: The new law indicates that a person who has been arrested must stay detained until the end of the asylum application. This would mean that all asylum seekers, who can be arrested for any illegitimate reason, would have to wait in detention.

    Having daily contact with women living in Moria, you can see how solidarity starts with their everyday basic needs and continues with the provision of psychosocial human support in an effort to protect each other’s security, rights, and sanity in the face of the dire situations they face every day.
    LGBTQI+ people on the move

    We don’t want to overlook women’s experiences of discrimination and the needs of different vulnerable groups, but considering this report is about gender-based discrimination and violence, the situation of LGBTQI+ people on the move has to also be mentioned.

    This report uses the acronym LGBTQI +: it is used to refer to people who identify as lesbian (L), gay (G), bisexual (B), trans (T), intersex (I), queer (Q) and + for all the different expressions and intimate relation with (no)gender identity and sexual definition: non-binary, asexual, aromantic, etc.

    Those who are LGBTQI+ face an even more difficult reality because they cannot always count on the national solidarity networks. And even when these resources are mobilized, it is often at the cost of important precautions so as not to be identified as LGBTQI+. Housing in camps and collectives of LGBTQI + people with other non-LGBTQI+ in asylum accommodations can cause anxieties regarding being mis-identified or ‘outed’ unwillingly (for their sexual orientation or gender identities). This is especially the case for trans people in accommodation facilities who find themselves living in single-sex housing that does not correspond to their gender identity. Because most of the time the authorities mis-gender trans persons, using the sex that is written on their official papers. Later on, when it comes to the asylum request, LGBTQI+ people fear that information about their sexual orientation or gender identity might start to circulate within the communities. This produces a lot of hesitations concerning what to say in front of the court, causing sorrow and fear because a large part of the LGBTQI+ people particularly pay attention not to reveal the reasons for their presence in Europe.

    From the perspective of Alarm Phone, writing about LGBTQI+ people on the move during the situations they encounter while the crossing on sea is difficult, because of course people also try and hide their identity in situations of close confinement, because it is a risk of discrimination and violence is very high. We can hardly provide a general analysis about people on the move because there is only partial knowledge available. Statistics are often binary and queer people are not mentioned.
    Lesvos LGBTQI+ refugee solidarity

    This is taken from a text that was published by members of the group in 2019

    As another deadly winter sets in, Moria prison camp on Lesvos is over its capacity by the thousands and growing fuller every day. In these conditions, LGBTQI+ refugees are particularly at risk of exposure, violence, and death.

    With homosexuality still illegal in 72 countries, it is obvious why many LGBTQI+ people became refugees. Many of us fled from home because we had to hide our gender identities. When we arrive on Lesvos, expecting safety, we are shocked to find the same issues continue for us here. Homophobic harassment and violent attacks are frequent and severe: by fellow residents as well as by the police and camp guards.

    We know some LGBTQI+ people that have been beaten and even hospitalised from homophobic and transphobic attacks. All have had to repress their identity, living cheek by jowl among communities which replicate the persecution they fled in the first place.

    “When I was in the boat, a beautiful cry came. We’re starting a new life. We were just throwing all our troubles into the sea. I wasn’t scared. I just read the Qur‘an and cried. I sat in the boat, my hand was in the sea along the way.”

    “I left Morocco because for 30 years I was insulted, persecuted and beaten by the community, the police and my family, but on Lesvos I found the same thing.”

    “In the early days in Moria, I was systematically raped. I‘ve seen the most difficult conditions, but I‘ve never seen such a horrible place.”

    “These people are looking at you like you’re rubbish. Like you smell. On the street, on the bus. I don’t know how to explain this. Even when you are on the street, you feel ashamed, like there is shit on you.”

    “If we can’t dress up the way we want, if we can’t do our make-up, why come to Europe?“

    “And together we will change the world, so that people will never have to come out again!”

    We did not flee our homes only to continue to hide and live in fear. We won’t be silenced. We won’t be ignored. We will shout it from the rooftops: we are gay, we are lesbian, we are women, we are men. We are here. We are all migrants. We want our freedom we won’t wait ‘till it‘s given to us. We ask those that hear us to fight alongside us, wherever you are.

    Queer solidarity smashes borders!

    https://alarmphone.org/en/2020/04/08/struggles-of-women-on-the-move
    #femmes #résistance #migrations #réfugiés #asile #lutte #luttes #femmes_migrantes #Tanger #Maroc #solidarité #Rabat #invisibilité #Tunisie #Méditerranée_centrale #Ocean_Viking #Mer_Egée #Moria #Lesbos #Grèce #attente #LGBT #genre

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  • Coronavirus, le Ong fermano le missioni di salvataggio in mare. Migranti senza più soccorsi

    Mediterranea: «La pandemia ci impone di congelare l’attività operativa. Scelta obbligata anche se le partenze sono ricominciate». Bloccate in porto anche #Ocean_Viking, #Sea_watch e #Open_Arms

    Le partenze dei migranti dalle coste africane sono riprese ma il Mediterraneo è destinato a rimanere senza soccorsi per chissà quanto tempo. Il coronavirus ferma anche le navi umanitarie e, una dietro l’altra, le Ong comunicano a malincuore la sospensione delle missioni.

    «Una comunicazione inevitabile e difficile - dice Mediterranea, che pure nelle scorse settimane si era vista finalmente restituire le due navi, Mare Jonio e Alex, sequestrate per mesi dal decreto sicurezza - Eravamo pronti a ripartire con la tenacia e la determinazione di sempre: pronte le navi, pronti gli equipaggi. Ma lo svilupparsi della pandemia e le sacrosante misure adottate per tentare il contenimento del contagio e per tentare di salvare le persone più fragili ed esposte, ci impone oggi di congelare l’attività operativa in mare. Gli effetti di questa scelta obbligata ci fanno soffrire perchè in mare c’è chi rischia la morte ogni giorno». Mediterranea confida nella disponibilità, per i soccorsi in mare delle navi civili che continuano ad operare. «Daremo loro ogni supporto possibile».

    Restano al momento in porto anche le navi della Sea Watch e di Sos Mediterranée e Medici senza frontiere che hanno finito il periodo di quarantena dopo gli ultimi due sbarchi di migranti a Pozzallo e a Messina. E ferma è anche da una ventina di giorni per riparazione, la spagnola Open Arms. «Stiamo cercando di capire in che modo poter tornare in mare in sicurezza per tutti. Purtroppo in mare c’è bisogno di noi nonostante il coronavirus», dice la portavoce Veronica Alfonsi.

    Le partenze dall’Africa comunque non si fermano. Il centralino Alarm phone negli ultimi giorni ha segnalato diverse imbarcazioni in difficoltà in zona Sar libica e maltese. E preoccupano gli sbarchi autonomi sull’isola di Lampedusa dove nell’ultima settimana sono arrivate 150 persone. Il sindaco Salvatore Martello ne ha disposto subito la messa in quarantena nell’hot spot ma ha chiesto al ministro dell’Interno Lamorgese un protocollo per il loro immediato trasferimento sulla terraferma per la mancanza delle necessarie misure a salvaguardia della popolazione. Anche in Africa ormai sono centinaia i casi di coronavirus registrati nei Paesi di origine dei migranti e anche la Libia ha dichiarato lo stato di emergenza per l’epidemia.

    Al momento le Ong che hanno volontari impiegati nei servizi di assistenza medica e paramedica nelle aree più colpite dal territorio sono Medici senza frontiere, la cui presidente Claudia Lodesani da giorni sta lavorando a Codogno. Ma anche la piattaforma di terra di Mediterranea ha messo a disposizione le sue forze.

    https://www.repubblica.it/cronaca/2020/03/18/news/coronavirus_le_ong_fermano_le_missioni_di_salvataggio_in_mare_migranti_se
    #coronavirus #conavid-19 #ONG #Méditerranée #fin #arrêt #migrations #réfugiés #sauvetage

    via @isskein