• Une fois de plus le parquet a repris les investigations pour que les victimes la ferment à tout jamais.

      #MeToo
      Plaintes pour agressions sexuelles au conservatoire de Rennes : le professeur ne sera pas poursuivi

      Le parquet avait repris les investigations à la demande de la ville de Rennes après la parution de notre enquête publiée en septembre. Finalement, le professeur mis en cause ne sera pas poursuivi.

      Neuf plaintes avaient été déposées contre l’enseignant. (Cyril Pedrosa)
      par LIBERATION
      publié le 23 juin 2021 à 20h28

      Le parquet de Rennes a finalement décidé de ne pas poursuivre V., professeur de théâtre au conservatoire de Rennes. Seul un rappel à la loi lui a été adressé, pour les faits « caractérisés de harcèlement s’inscrivant dans le cadre de pratiques pédagogiques inadaptées ». Les accusations d’agressions sexuelles, elles, ont été jugées insuffisamment caractérisées a fait savoir mardi le parquet. Après la parution de notre enquête sur les agissements de l’enseignant, l’enquête classée sans suite en juin 2020 avait été rouverte par le parquet de Rennes le 14 octobre, sur saisine de la ville.

      Dans le cadre de ces nouvelles investigations, douze élèves de la promotion 2018-2019 du cycle d’orientation professionnelle (COP) de théâtre du conservatoire de Rennes ont mis en cause V. « pour des faits de harcèlement dont deux pour des faits d’agression sexuelle également », précise le procureur Philippe Astruc auprès de Libération. Neuf ont déposé plainte. Trois des plaignants ont par ailleurs été examinés par un médecin légiste, qui a évalué des incapacités totales de travail allant jusqu’à trente jours pour deux d’entre eux.
      Agissements contestés par le mise en cause

      Dans notre édition du 25 septembre, ces anciens élèves de la promotion 2018-2019 du COP affirmaient avoir enduré pendant plusieurs mois des violences physiques et psychologiques de la part de leur professeur. Surtout, l’enseignant était accusé d’avoir agressé sexuellement deux élèves, dont l’une était alors âgée de 16 ans. Agissements que le mis en cause avait fermement contestés auprès de Libération par l’entremise de son avocat.

      La ville de Rennes a commandé une nouvelle enquête administrative. Commencée en février, elle vient juste de se clôturer et vise à « obtenir un éclairage plus large sur les faits qui se sont déroulés », explique la mairie à Libération. La collectivité devrait prendre une décision prochainement, « et ce de façon indépendante de la procédure judiciaire ».

      A la question de savoir s’il reprendra ses fonctions d’enseignant, la ville élude, répondant simplement qu’à ce jour, « le professeur occupe toujours un poste sans contact avec les élèves, rattaché à la directrice du conservatoire ». En mars, après avoir été suspendu provisoirement, le professeur avait pu reprendre un poste au sein de l’établissement car il était arrivé « au terme des quatre mois de suspension juridiquement possibles ».

    • L’enquête pour « viols » visant PPDA classée sans suite

      Après cinq mois d’investigations, le parquet de Nanterre a refermé ce vendredi l’enquête préliminaire visant l’ancienne gloire du 20 heures de TF1 sans aucune poursuite. Huit femmes au total avaient déposé plainte pour « viols », « agressions sexuelles » ou « harcèlement sexuel » mais la justice a estimé que les infractions sont insuffisamment caractérisées ou prescrites.

      https://www.leparisien.fr/faits-divers/lenquete-pour-viols-visant-ppda-classee-sans-suite-25-06-2021-EYEAJX45LVH

      Je souligne les mots « viol », « agressions sexuelles », et « harcelement sexuels » entre guillemets. On pourrait croire que c’est une citation mais lorsque la « justice » est cité il n’y a pas de guillemets.
      #guillemets #euphémisme

  • En Israël, le divorce reste une affaire d’hommes Aline Jaccottet
    https://www.letemps.ch/societe/israel-divorce-reste-une-affaire-dhommes

    Des milliers d’Israéliennes sont empêchées de divorcer, la loi juive prévoyant que seul l’homme peut décider de la fin de l’union conjugale. Galvanisées par le mouvement #MeToo et soutenues par des rabbins ingénieux, les femmes se battent pour leur liberté
    . . . . . . . . .
    Un tableau qui serait banal sans le combat extraordinaire qu’elle a dû mener pour obtenir sa liberté. « Trois ans de bataille pour le quitter », souffle-t-elle avec un sourire las. Mariée à 19 ans, la jeune femme découvre un époux « absent, maltraitant. La situation n’a fait qu’empirer avec le temps. J’ai fini par comprendre qu’il fallait que je parte pour sauver ma peau ». Mais après avoir accepté d’ouvrir un dossier de divorce, son ex-mari se volatilise en France puis refuse tout contact pendant des mois.


    Une situation qui bloque tout car, en Israël, seul l’homme peut décider de la fin de l’union conjugale. Selon le judaïsme traditionnel, une femme qui se sépare de son époux sans obtenir de lui le gett, l’acte de divorce, ne peut se remarier. Les enfants qu’elle aurait ultérieurement seraient considérés comme des mamzerim, des bâtards. Un statut qui a de graves conséquences, dont l’interdiction de se marier avec quelqu’un qui ne partagerait pas ce triste destin. Rien de tout cela pour l’homme dont la femme aurait refusé le divorce, le judaïsme ayant autorisé la polygamie pendant des centaines d’années. Ainsi, en Israël, une femme juive sur cinq qui cherche à divorcer se voit retenue dans le mariage contre son gré pendant parfois des années, selon les chiffres communiqués par l’association Mavoi Satum qui les défend. Tout cela ne concerne que le judaïsme traditionnel, qui fonde sa pratique religieuse sur l’observance du Choulhan Aroukh (« Table dressée » en hébreu), Code de loi juive compilé au XVIe siècle. Ce texte fondamental édicte des lois en rapport avec la vie quotidienne, la vie religieuse, la vie conjugale et le droit civil. Les courants juifs réformés (libéraux, conservateurs), majoritaires en dehors d’Israël, ont, quant à eux, révisé les sections discriminatoires de cet ouvrage au XIXe siècle.
    Etat laïque et religieux
    En 1948, c’est le judaïsme orthodoxe et non réformé qui a été ancré au cœur des fondements de l’Etat d’Israël. Pour apaiser la colère des ultrareligieux furieux à l’idée qu’un gauchiste en short crée l’Etat d’Israël à la place du Messie tant attendu, David Ben Gourion, fondateur et premier ministre du pays en construction, passe un accord avec eux leur abandonnant notamment toute la gestion de l’état civil. C’est ainsi que « depuis 1953, les naissances, mariages, conversions ou funérailles sont réglementés par la communauté à laquelle appartient un individu : la charia pour les musulmans, les lois cléricales pour les chrétiens et la halakha pour les juifs », explique Shuki Friedman, directeur du centre Religion, nation et Etat à l’Institut pour la démocratie en Israël.

    Deux types de lois, civile et religieuse, coexistent ainsi en Israël, le droit civil s’occupant grosso modo de tout à part de l’état civil. Et si la Cour suprême israélienne, connue pour son progressisme, a contribué, au fil des années, à faire évoluer l’interprétation de la loi juive par les rabbins en influençant leurs décisions de diverses manières, le divorce résiste encore et toujours aux modernisateurs. « La Haute Cour de justice intervient sur les problèmes découlant de la séparation tels que le soin aux enfants ou le partage des biens, jamais sur l’acte de séparation lui-même », précise Shuki Friedman.

    Si le mariage et le divorce demeurent les prérogatives intouchables des orthodoxes, c’est parce que ces changements d’état civil définissent aussi si les enfants nés de ces unions sont juifs ou non. Peu de chances que la situation évolue, les très religieux ayant pris une place considérable dans la société et la politique israéliennes suite à leur expansion démographique hors normes – de quelques centaines en 1948, ils sont aujourd’hui plus d’un million.

    Loi éternelle
    Ce n’est pas pour déplaire à Raphaël Sadin. « La loi juive n’a pas à être adaptée car sa valeur est éternelle. Lorsque la pratique évolue, ce n’est que pour faire en sorte que la loi continue d’être respectée », tranche le rabbin dans son salon rempli de livres du sol au plafond. Talmudiste reconnu, ce Franco-Israélien à la tête d’un institut d’études religieuses pour hommes à Jérusalem a deux passions : la Bible et les mots. Parlez-lui de mariage, il devient lyrique. « Les noces chez nous, ce n’est pas un contrat : c’est la rencontre de deux âmes faites de toute éternité pour être ensemble ! » s’exclame-t-il de sa voix de stentor en se passant la main dans sa barbe grise soigneusement taillée. Il y a pourtant une place pour l’erreur humaine dans ce qui est écrit aux Cieux. « Les pierres du Temple de Jérusalem elles-mêmes versent des larmes lorsqu’un homme et une femme divorcent, mais la loi juive conçoit que cela puisse arriver », dit-il. Un libéralisme apparent qui contraste avec sa description de l’amour. « Le judaïsme traditionnel conçoit le rapport amoureux comme une possession dans laquelle il y a, oui, une certaine violence : métaphysique, spirituelle, politique même. La femme se donne et l’homme s’engage. Et c’est lui qui, au moment du divorce, coupe le lien en lui disant : ce que tu m’as donné, je te le rends. » Une inégalité que Raphaël Sadin assume parfaitement. « Quoi que puisse dire la société occidentale, le féminin et le masculin sont ontologiquement différents. »

    Ces paroles pourraient faire craindre que la voix des femmes ne soit jamais entendue dans les tribunaux, mais c’est le contraire qui se produit selon lui. « Le tribunal tranche toujours en faveur de l’épouse. Il n’oblige jamais une femme à rester avec un homme dont elle ne veut plus car, s’il la retient, il commet un des péchés les plus graves de la Torah », tonne Raphaël Sadin. Rivka Perez raconte d’ailleurs que son expérience a été positive. « J’avais peur de la réaction des rabbins mais ils ont été bienveillants et ont fini par donner à mon ex le statut de « mari récalcitrant », « ce qui signifie que des mesures sévères pouvaient être prononcées contre lui ». Ils ont ensuite déployé l’artillerie lourde vis-à-vis de cet homme qui refuse obstinément de la laisser partir : « Les rabbins ont lancé à son encontre une mesure d’exclusion de la communauté juive. C’est une des sanctions les plus dures qui puissent être prononcées. Aucun juif n’avait plus le droit de lui parler, il était exclu des synagogues… » Effrayé par les conséquences de cette décision juridique que Rivka diffuse à toutes les communautés juives de France, son ex signe les papiers du divorce en quelques jours à peine.

    L’ingéniosité de la loi juive ne cesse d’émerveiller Katy Bisraor Ayache. Sous son fichu, cette petite femme constamment affairée est avocate rabbinique. Un métier qui n’existe que depuis une trentaine d’années. « J’ai fait des études très poussées en religion pour aider des femmes à se défendre devant les tribunaux rabbiniques », explique cette Française d’origine dont la rencontre sur un parking de la ville balnéaire de Netanya tient du miracle, tant son agenda est plein. On fait appel à elle dans tout le pays car ses compétences sont rares et respectées. « Quand les juges me voient arriver, il y a comme un wouahou dans la salle. Ils savent que je suis une coriace », rigole celle qui a aidé Rivka à quitter son mari.

    L’art de la menace
    . . . . . . .

    #Égalité #divorce #femmes #sexisme #famille #domination_masculine #masculinisme #mariage #religion #israel #violence #patriarcat #politique #couple

    • Un oui soviétique à l’égalité salariale dans le Jura Vincent Bourquin
      
      https://www.letemps.ch/suisse/un-oui-sovietique-legalite-salariale-jura

      Plus de 88% des Jurassiennes et des Jurassiens ont dit oui à l’initiative « Egalité salariale : concrétisons ! » Des mesures concrètes seront soumises prochainement au parlement.


      Score triomphal dans le Jura. L’initiative populaire « Egalité salariale : concrétisons ! » a été acceptée par plus de 88,3% des votants. Le gouvernement et tous les partis politiques, y compris l’UDC, soutenaient ce texte lancé il y a quatre ans par le syndicat Unia Transjurane.

      Les Jurassiennes et les Jurassiens sont donc quasiment unanimes pour demander que des mesures concrètes soient prises afin de mettre fin aux inégalités salariales entre hommes et femmes. Des inégalités particulièrement criantes dans le dernier-né des cantons : en 2017, l’écart y était de 23%, ce qui en faisait le plus mauvais élève du pays.
      . . . . . .

    • Suisse : Où en est le mouvement de la grève féministe, qui bat le pavé ce lundi ?

      https://www.letemps.ch/societe/mouvement-greve-feministe-bat-pave-lundi

      Après la mobilisation historique de 2019, la claque des statistiques pendant la pandémie, et l’annonce mercredi dernier du relèvement à 65 ans de l’âge de la retraite des femmes... « Le Temps » a sondé les espoirs et déceptions du mouvement à travers la voix d’une de ses représentantes, Tamara Knezevic.


      Sonnez haut-parleurs, résonnez casseroles : la grève féministe https://www.14juin.ch a lieu ce lundi 14 juin – galvanisée par l’annonce, mercredi dernier, du relèvement à 65 ans de l’âge de la retraite des femmes. Le projet d’harmonisation entre travailleurs et travailleuses, rejeté à plusieurs reprises dans les urnes et adopté par le parlement ce printemps, devrait figurer en bonne place sur les pancartes brandies dans les cortèges. Le Temps a sondé les espoirs et déceptions du mouvement à travers la voix d’une de ses représentantes, Tamara Knezevic.
      . . . . . . .

    • #Suisse : Grève féministe ce Lundi 14 Juin 2021
      https://www.14juin.ch

      Deux ans après la légendaire Grève des femmes* de 2019, la situation en matière d’égalité des sexes reste insatisfaisante : sans le travail rémunéré, mal rémunéré et non rémunéré des femmes, la société ne pourrait pas fonctionner, encore moins avec l’actuelle pandémie du COVID-19. Et pourtant, les conditions de travail et les salaires des professions dites « d’importance systémique » dans lesquelles travaille une majorité de femmes, sont toujours mauvais. Les employeurs et employeuses, comme le discours politique dominant, ne veulent pas que cela change. Et le Conseil fédéral nous présente sa stratégie « Égalité 2030 », qui ne va pas améliorer la lamentable situation dans laquelle nous nous trouvons, mais prévoit le relèvement de l’âge de la retraite des femmes. À cela, nous disons : pas question !


      Les femmes souffrent de graves lacunes de revenu parce que ce sont elles qui assument la responsabilité en ce qui concerne les enfants et les proches dépendant de soins. Le risque, pour elles, de basculer dans la pauvreté une fois à la retraite est en conséquence élevé, car leurs rentes ne permettent guère de vivre. Cependant, au lieu d’améliorer ces rentes, le Conseil fédéral et le Conseil des États veulent, avec le projet AVS 21, augmenter l’âge de la retraite des femmes. Pour toutes les femmes, un affront !

      Les places dans les crèches et les écoles à horaire continu, qui devraient alléger la charge des femmes, sont clairement sous-financées ; cela, au détriment des familles, qui doivent payer des contributions records, du personnel, qui manque de temps pour faire son travail, ainsi que de la qualité qui pâtit d’une logique prônant les économies. Or, cette tâche, qui relève de l’ensemble de la société, devrait reposer sur un financement solidaire assuré par les collectivités publiques !

      Et finalement, la différence de salaire entre les hommes et les femmes s’est même creusée entre 2014 et 2018, au lieu de diminuer, surtout parce que les discriminations salariales se sont accentuées. Cela, bien que les femmes aient dépassé depuis longtemps les hommes en matière de formation, parce que la valeur des femmes et de leur travail reste moins reconnue ! 

      La Commission des femmes de l’USS demande pas conséquent instamment, deux années après la Grève des femmes
      . . . . . . . .

  • Ungeschützt mit Hygienekonzept

    https://www.neues-deutschland.de/artikel/1152290.corona-ungeschuetzt-mit-hygienekonzept.html

    16. März 2020: - Ruby: Hey, hast du es schon gehört … wegen Corona sind die Bordelle auf unbestimmte Zeit geschlossen. Und auch Hausbesuche sind gerade nicht wirklich zu empfehlen. Ich blicke gar nicht durch … Wie soll das gehen? Ich habe ausgerechnet: Meine Ersparnisse reichen maximal zwei Monate. Und Hartz IV will ich nicht. Da habe ich Sorge, dass irgendjemand hier auf dem Dorf plaudert und rauskommt, dass ich Sexarbeiterin bin. Vom letzten ungewollten Outing habe ich mich gerade erst erholt … Ich bin wirklich verzweifelt und sehe keine Perspektive. So viele meiner Kolleg*innen sind nicht mal registriert, was sollen sie denn jetzt machen? Ich befürchte, alle werden weiterarbeiten müssen. Aber wie? Manche haben Kinder und müssen jetzt auch Betreuung oder Schule stemmen.

    Ana: Ja, ich habe es schon gehört. Und von den Polizeikontrollen auch. Da bekommen Sexarbeiter*innen Bußgelder, weil sie weiterarbeiten. Aber sie arbeiten, weil wir alle Geld brauchen, unter anderem, um jetzt auch noch die Bußgelder abzubezahlen. Es ist absurd! Irgendwie soll das Geld also aus dem Nichts kommen. Harz IV reicht nicht zum Leben. Und was ist mit den Kolleg*innen, die zwar Steuern bezahlen und alle Hürden irgendwie gemeistert haben, aber noch keine fünf Jahre in Deutschland registriert sind? Die bekommen nichts. Absolut nichts. Das ist doch mies. Migrantische und migrantisierte, rassifizierte und marginalisierte Kolleg*innen fallen entweder durch sämtliche Unterstützungsraster oder werden von mehr Kontrollen und Strukturen auch noch vermehrt diskriminiert. So viele sind jetzt so allein. Gefährlich.

    20. April 2020:

    Ruby: Huhu Ana, verzeih, dass ich mich so lange nicht gemeldet habe. Aus Angst, dass ich mit meinen wenigen Ersparnissen nicht weit komme, habe ich gejobbt. Für Mindestlohn Regale aufgefüllt. Morgens um 5 Uhr in der Eiseskälte vor der Filiale stehen, dann die schweren Pakete verräumen, ständig Druck und Eile von den Vorgesetzten, ich wusste nicht, wo mir der Kopf steht.

    Mir fehlt die Sexarbeit. Da nerven die Kund*innen zwar auch mal, aber ich hatte ganz vergessen, wie sich Fremdbestimmung für ein paar Euro pro Stunde anfühlt. Und mir fehlt die Anerkennung für meine Arbeit.

    Apropos Anerkennung: Ich fasse es nicht, dass es wirklich Politiker*innen gibt, die aus dieser Krise und der Not noch eine Verschärfung der Sexarbeitsgesetze fordern. Die üblichen Gesichter, dachte ich erst, aber jetzt haben sie sich aus SPD und CDU zusammengeschlossen und fordern die Einführung der Freierkriminalisierung in Deutschland. Der Brief der 16 … Nicht genug, dass viele Kolleg*innen keine staatliche Unterstützung bekommen, nun versuchen diese Kräfte auch noch Vorteil daraus zu ziehen. Ich weiß gar nicht, ob ich wütend sein soll oder mir langsam die Hoffnung ausgeht?

    Ich habe das Gefühl, die Pandemie dreht unsere Zeitrechnung 30 Jahre zurück. Alles wird ins Private und Häusliche verschoben. Weibliche Care-Arbeit wird wieder zur Norm. Gleichzeitig sind doch die meisten Pflegenden, Kassierenden und Lehrenden Frauen? Wie passt das zusammen?

    Übrigens werde ich Hartz IV beantragen. Anders komm ich nicht über die Runden.

    Ana: Ach Ruby, ich nehme es dir nicht übel. Es weiß doch niemand mehr, wo der Kopf steht. Ich kenne so viele Kolleg*innen, die ohne ihre Arbeit in Armut und schwere Abhängigkeiten in ungesunden Liebesbeziehungen geraten sind. Häusliche Gewalt wird immer noch als »Privatsache« abgetan. Es werden ja nicht einmal ausreichend Daten gesammelt, um zu verstehen, wie wir am besten dagegen ankämpfen können. Horst Seehofer und die FDP waren 1997 noch dagegen, Vergewaltigungen in der Ehe unter Strafe zu stellen. Und dann tun alle so überrascht von der #Metoo-Bewegung und können es gar nicht nachvollziehen. Aber wenn wir dann in der Sexarbeit arbeiten, dann ist sie auf einmal ganz wichtig, unsere vermeintliche Sicherheit. So sehr, dass unsere Arbeit einfach illegalisiert wird, obwohl sie doch unser Überleben sichert. In allen anderen Bereichen sind wir aber so oft so ungeschützt, dass selbst illegalisierte Sexarbeit manchmal die einzige (er-)tragbare Option bleibt. Und dazu übernehmen wir emotionale, Care-, soziale, reproduktive und systemrelevante Arbeit, die uns trotzdem nicht aus der Armut bringt oder eine Altersvorsorge garantiert. Nein, wir werden beschimpft oder ignoriert!

    Ich kann dir deine Frage nach Hoffnung nicht beantworten. Ich habe das Gefühl, dass wir alle gerade einfach nur überleben.

    Ruby: Du hast ja sooo recht. Was bedeutet denn Sicherheit? Was ist mit meiner Sicherheit, als allein lebende Single-Frau nicht unnötigen psychischen Härten ausgesetzt zu werden? Wenn sich Menschen nur im »engsten« Familienkreis treffen dürfen? Meine Familie habe ich mir selbst ausgesucht, und die ist nicht identisch mit jenen Personen, die der Staat als meine Familie bezeichnen würde. Auch da spüre ich, dass wir gerade die Uhren um mindestens 30 Jahre zurückdrehen.

    Andererseits, wenn ich mir vorstelle, dass ich noch mit meinem letzten Partner zusammen wäre? Da läuft es mir eiskalt den Rücken rauf und runter. Das war so eine toxische Beziehung. Und ich bin seit Monaten fast nur zu Hause. Allein. Aber lieber allein, als einem Ansprüche erhebenden, potenziell übergriffigen Partner ausgeliefert zu sein.

    Ich freu mich gerade sehr auf den 2. Juni. Zwar bin ich auch unsicher, wie es unter Pandemiebedingungen sein wird, aber ich spüre auch, dass es mir Hoffnung gibt.

    2. Juni 2020:

    Ana: Ruby! Wie schön dich zu sehen! Ich will zwar fragen, wie es dir geht, aber ich will heute auch einfach die Welt etwas vergessen und uns Sexarbeiter*innen feiern. Wir wissen ja alle, wie es geht. Und wie es heißt, wir seien »Superspreader«! Pah! Wir sind nicht diejenigen, die auf die Kondompflicht lieber verzichten wollen, weil es sich besser anfühlt. Wir wissen viel mehr über sexuelle Gesundheit, Safer Sex, verschiedenste erotische und sexuelle Praktiken und Hygienebestimmungen als die meisten Menschen in unserer Gesellschaft, und das schon vor der Coronakrise! Wir können so gut über Grenzen und Konsens reden, weil es Teil unserer Arbeit ist. Wie viele Menschen können nicht mal ihren Partner*innen sagen, was ihnen wie im Bett Spaß macht?! Wir sind so resilient und kreativ und stark!

    Ruby: Ana ... Endlich. Ja, lass uns einfach ein bisschen die düsteren letzten Monate vergessen und die Sonne genießen.

    Obwohl, hast du gehört, dass die Tätowierer*innen schon wieder arbeiten dürfen?! Das finde ich schon gewagt, denn ihren Kund*innen kommen sie ja in geschlossenen Räumen doch sehr nahe. Wie siehst du das? Ich weiß gar nicht, ob ich mir derzeit Lockerungen wünschen soll. Ich schwanke zwischen Angst, im Zweifel das Virus weiterzugeben oder selbst zu erkranken, und dem Wunsch, wieder meiner Arbeit nachgehen zu können. Ich habe gehört, dass einige Sexarbeitsorganisationen auch über Demos nachdenken.

    Heute gibt es ja auch diese #RotlichtAn!-Aktion in den sozialen Medien. Ehrlich gesagt kann ich mir gerade nicht vorstellen, auf solche Demos zu gehen: Erster Punkt: Ich glaube nicht, dass Hygienekonzepte das Risiko, das Virus weiter in der Bevölkerung zu verbreiten, wirklich minimieren. Ich weiß, dass viele sich das wünschen. Ich ja auch. Aber ich befürchte, die Realität ist anders. Zweitens: Mir grummelt es im Bauch, wenn Arbeiter*innen sich danach verzehren, endlich wieder gegen Geld arbeiten zu dürfen, obwohl die Pandemie ein großes Risiko für uns alle und unsere Lieben darstellt. Ich finde das … mhm, neoliberal. Aber lass uns jetzt einfach ein bisschen den Sommer, die Huren und uns selbst feiern.

    3. März 2021:

    Ana: Hallo Ruby, ich habe lange über deine Worte nachgedacht. Darüber, dass sich Arbeiter*innen »verzehren«, zu arbeiten. Sexarbeit ist Arbeit. Da stehe ich voll hinter, aber Sexarbeit ist eine andere Art von Arbeit. Für mich wird mein Körper, der sonst so sehr kritisiert und herabgewürdigt wird, in dieser sexistischen Gesellschaft, auf einmal zu so etwas wie einer Oase, die Leben nährt. Und dafür kann ich, zumindest vor Corona, selbstbestimmt leben, ohne jeden Tag »auf die Arbeit« gehen zu müssen. Mein Körper wurde zu etwas, in dem ich wirklich zu Hause bin, und das spiegelt sich auch in meinen privaten Beziehungen und in meiner Verbindung zu mir selbst wider. Statt mir Gedanken zu machen, ob ich »zu dick« oder »zu dünn« bin, weiß ich, wie viel Schönheit und Gutes mein Körper in die Welt bringt. Ich weiß, dass ich aus einer privilegierten Position spreche. Ich vermisse meinen Lebensstil vor der Pandemie und wie sehr ich Menschlichkeit mit meinem Körper leben konnte, nicht das Konzept der produktiven Arbeit, um Profite für Investoren zu erwirtschaften. Ich möchte meinen Körper nicht tagtäglich dazu zwingen, Dinge tun zu müssen, die wir nicht wollen, nur um zu überleben. Deswegen bin ich doch so gerne Sexarbeiterin.

    #travail #covid-19

  • #DisSonNom

    https://www.tvanouvelles.ca/2021/05/22/dis-son-nom-la-liste-des-presumes-abuseurs-est-de-retour-1

    https://www.facebook.com/dissonnom

    Des Québécoises ont innové en dressant depuis quelques semaines une liste détaillée des auteurs d’inconduites sexuelles allant de la drague lourde au viol. Les quelque 1 500 hommes (et quelques femmes) ainsi signalées ont vu leur nom affiché par ordre alphabétique sur le site Web « Dis Son Nom » ainsi que le nombre et le type de signalements de leurs actes, leur profession (beaucoup de proxénètes et d’enseignants), leur lieu d’exercice, etc.

    Les objectifs, écrivent les organisatrices, sont de libérer la parole des victimes et protéger la société des prédateurs•rices allégué•e•s.
    Diffusée sur internet, la liste catégorise les inconduites en trois types, selon la gravité des gestes.
    Les noms sont recueillis selon des témoignages livrés par des victimes dans la messagerie privée de Dis Son Nom, sur Facebook et Instagram. Un protocole est suivi par les bénévoles et les victimes restent anonymes.
    Dis Son Nom est une des diverses facettes du mouvement de dénonciations de l’été 2020 sur les réseaux sociaux, avec d’autres groupes comme les Victims Voices.
    Après la réception de multiples mises en demeure, des procédures devant la cour civile ont été entamées contre Dis Son Nom et ses administrateurs•rices.
    Nous considérons qu’il s’agit d’une question de société sur laquelle la population est prête à se pencher, après des mouvements comme #agressionnondenoncee et #metoo.
    Cet état des faits concernant la culture du viol dépasse les histoires individuelles et appel à une réflexion sérieuse sur les crimes à caractères sexuels.
    Dis Son Nom est l’expression d’une nouvelle façon que les victimes ont choisie pour prendre du pouvoir sur leur vie, via les réseaux sociaux.
    Nous répondons à leurs demandes et les soutenons du début à la fin, en leur ouvrant la porte vers le chemin de la guérison.

    Une des organisatrices, Delphine Bergeron, a été interviewée dans un grand média qui a relayé l’URL de la liste, affichée sur un site dédié et sur quelques réseaux sociaux. Des hommes ont fait retirer leur nom, d’autres menacent d’intenter des poursuites, plusieurs chouinent énergiquement au nom de leur présomption d’être protégés par la justice... - mais beaucou de femmes ont écrit être heureuses de voir des voisins, collègues, patrons et vedettes du milieu artistique dénoncés de la sorte.

  • Il saisit la poitrine de ses filles pour voir si « ça pousse » : le père relaxé
    https://www.republicain-lorrain.fr/faits-divers-justice/2021/05/12/il-saisit-la-poitrine-de-ses-filles-pour-voir-si-ca-pousse-le-pe
    Le tribunal a estimé que le fait d’avoir empoigné la poitrine de ses deux adolescentes, par surprise, pendant plusieurs années, ne constituait pas des agressions sexuelles. En revanche, il a condamné le prévenu pour atteinte sexuelle sur une de ses nièces.

    Ca se passe en 2021 après #metoo et #metoo_inceste ...

    Atteinte sexuelle : « Dans le Code pénal français, l’atteinte sexuelle sur mineur est une infraction prohibant et réprimant les relations sexuelles, y compris consenties, entre un majeur et un mineur sexuel. Cet acte est considéré comme un délit. »
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Atteinte_sexuelle_sur_mineur_en_droit_fran%C3%A7ais

    #violences_sexuelles #inceste #viol #violophilie #injustice #culture_du_viol #sexisme #famille #déni

  • Collège Dorgelès : les élèves mobilisés contre un professeur accusé d’attouchements
    https://www.youtube.com/watch?v=mBr6q9DC7PU

    Les collégiennes de l’établissement scolaire Roland Dorgelès, situé dans le 18ème arrondissement de Paris se sont mobilisées avec pancartes et slogans mercredi 12 mai devant les portes du collège, pour dénoncer le comportement de l’un de leurs professeurs.

    Suspendu il y a déjà 4 mois suite à la plainte d’une élève lui reprochant des attouchements sexuels, celui-ci n’est, pour le moment, plus en contact avec les enfants. Certains professeurs ont tenu à lui apporter leur soutien au travers d’une grève mardi 11 mai, déclenchant de vives réactions parmi les élèves et leurs parents.

    Zelda, désormais lycéenne, est venue en soutien aux collégiens mobilisés. « Ces gestes déplacés, on les a tous vus » assure-t-elle. « Ce professeur rentre dans les vestiaires en cours de natation alors qu’on est encore en train de se changer, il se permet de toucher les élèves en cours de gym » dénonce la jeune fille, qui relève par ailleurs des « regards insistants » et des propos « envers les garçons », questionnant leur « virilité ».

    Et cette grève des professeurs ne passe pas. « C’est totalement inadmissible » regrette-t-elle, mais tristement symptomatique du fonctionnement de cet établissement scolaire, assure Zelda. « Ça fait des années qu’on dit qu’il a des gestes, des propos, des regards déplacés, qu’il n’a rien à voir avec le système éducatif…. On ne nous a pas écoutés ».

    Des propos corroborés par plus de 150 anciens élèves du collège Roland Dorgelès, signataires d’une lettre ouverte, en réaction à la plainte déposée à l’encontre de ce professeur d’EPS. « Nous, anciennes et anciens élèves du collège Roland Dorgelès, qui sommes maintenant adultes, vous écrivons aujourd’hui concernant une situation qui a réveillé des souvenirs pénibles. » Evoquant un comportement « déplacé, humiliant et plus que malsain », ces anciens élèves, scolarisés pour les plus anciens en 2010 affirment à l’unisson : « Dès que nous l’avons appris, nous avons toutes et tous, sans exception, pu mettre un nom sur ce professeur ».

    Sur place, les collégiens rassemblés scandent « La honte, la honte, la honte ! ». On retrouve sur les murs du collège affiches et banderoles aux messages « Tu n’es pas seule”, “On te croit »... Autant de messages de soutien et de dénonciation qui rappellent les codes de libération de la parole des différentes vagues #MeToo.

    Pour Isabelle, parent d’élève et élue 4 ans au conseil d’administration du collège, il y a dans cet établissement « un système mis en place où l’on part du principe que la voix de l’enfant n’a jamais raison d’être ». Elle s’indigne contre le rectorat, dont la responsabilité doit être soulevée d’après elle : « Il donne l’impression de découvrir aujourd’hui qu’il y a des dysfonctionnements dans ce collège, alors que des choses ont déjà été remontées avant même l’enquête diligentée par la justice ».

    Côté académique, Marc Teulier, le directeur chargé des écoles et des collèges de Paris, s’est rendu sur place. Ce dernier met l’accent sur la suspension de l’enseignant en question, et insiste sur la nécessité d’attendre les conclusions de l’enquête menée par les services de police. Ensuite, détaille-t-il, viendra seulement le « temps d’une enquête administrative pour vérifier si le collège fonctionnait correctement, si jamais les faits sont avérés ».

  • Il y a 40 ans sortait « The Burning », premier film produit par Harvey Weinstein, concentré de la culture du viol  Nicolas Dufour

    Première production de Harvey Weinstein avec son frère Bob, le film d’horreur « The Burning » sortait le 8 mai 1981. Slasher dans le sillage de « Halloween », il comprenait aussi des échos de l’idéologie d’assaut sexuel de l’époque

    Elles s’agitent dans la prairie à jouer au baseball en petite tenue. Elles se trémoussent en courant. La caméra serre les jeunes poitrines et fesses. Sur un bord du terrain, les garçons se mettent en appétit en se chambrant sur leurs prochaines audaces, leurs hypothétiques consommations charnelles.

    Après une scène d’ouverture horrifique, ainsi commence The Burning (Carnage), un film de Tony Maylam sorti il y a juste 40 ans, le 8 mai 1981. Il s’agit du premier long métrage produit par Harvey Weinstein, et il est impossible, aujourd’hui, de ne pas le voir en pensant à la tempête #MeToo déclenchée par les révélations sur le producteur, en 2017. Certains amateurs ont (re)découvert le film en 2018, lors d’une soirée spéciale au Festival du film fantastique de Neuchâtel.

    Les Weinstein veulent entrer au cinéma
    A l’orée des années 1980, Harvey Weinstein et son frère Bob cherchent à tout prix à entrer dans le business du cinéma. Enfin, à bas prix surtout : il faut trouver le moyen de produire un film bon marché qui rapporte un maximum d’argent. Ils viennent de créer leur première société, Miramax, et s’intéressent à un genre montant, le slasher, film de tueurs en série en général circonscrits à un lieu ou une ville. En 1978, John Carpenter avait fait peur au monde entier avec Halloween , dont une suite se préparait alors. En 1980, Sean S. Cunningham avait dupliqué l’expérience dans Vendredi 13 , dans lequel Jason Voorhees trucidait des ados dans un camp de vacances. Pour une mise de moins de 600 000 dollars, le long métrage faisait jackpot – à cette heure, il aurait rapporté plus de 58 millions de dollars.

    Pourquoi ne pas retenter le coup ? Les Weinstein se lancent. Harvey se souvient d’une légende urbaine sur un gardien d’un camp de loisir qui aurait agressé des jeunes dans l’Etat de New York. L’histoire est toute trouvée, c’est celle de Cropsy, le concierge à qui des gamins ont mis le feu en voulant lui faire peur, que la médecine a sauvé et qui veut se venger.

    Quelques valeurs sûres
    Malgré tout, les frères se donnent les moyens de leurs ambitions. Quelques jeunes talents – le film révèle notamment Holly Hunter et Jason Alexander – sont dirigés par l’Anglais Tony Maylam, que les Weinstein connaissent pour avoir acheté les droits de films sur Genesis qu’il a réalisés. A la musique, donc aux synthétiseurs, un Anglais aussi : Rick Wakeman, pape du rock progressif passé par Yes. Au montage, Jack Sholder, qui fera l’un des films de la franchise Freddy, Hidden puis Arachnid . Aux effets spéciaux, Tom Savini, déjà une vedette, qui a fait les grimaces et les jets de sang de Zombie de George A. Romero et qui est passé par le tournage de Vendredi 13.

    Le film dépeint de manière bien particulière les relations entre garçons et filles. Réaliste, peut-être, pour les années 1980, mais avec le « bigger than life » cinématographique. Jusqu’à la caricature prémonitoire, s’agissant d’une œuvre « créée par Harvey Weinstein » – le producteur est ainsi crédité au générique.

    A-t-on raison après coup ?
    Bien sûr, il est facile de se donner raison après coup. Mais à voir certaines scènes de The Burning, il est impossible de ne pas penser aux sordides révélations qui tomberont près de quatre décennies plus tard.
    Certes, les filles du Carnage ne sont pas dépeintes comme des sottes. Elles résistent aux jeunes mâles, se rient de leurs maladresses, poussent à l’eau le playboy musclé qui prend d’abordage leur plateforme, sur le lac au bord duquel se trouve le camp. Pourtant, The Burning reflète bien une culture masculine apposée sur ses personnages boutonneux.

    L’obsession de l’assaut sexuel
    Dans la scène du baseball, le dragueur principal, celui qui ose aborder les filles, reluque les fesses de la blonde qu’il convoite en lançant qu’elle lui « appartient de droit divin ». Il rigole, mais est-ce un gag ? Peu après, le maladroit du groupe fait le voyeur dans les douches. Il est enguirlandé par le musclé, celui de la plateforme, pas pour ce qu’il a fait, mais parce qu’il l’a fait en épiant sa présumée copine.

    Plus tard, le musclé, encore lui, n’est pas loin de violer sa soi-disant amie. Dans l’eau, elle se refuse en lui rappelant qu’il « a promis » de se tenir correctement. Mais « elle l’a laissé l’approcher », se défend-t-il, elle « en a envie ». Il la colle, l’enlace avec force. Elle s’en dégage – elle se défile, donc.

    Entre eux, les garçons digressent sur les manières de conquérir les filles, au sens plutôt littéral : les prendre d’assaut, les assiéger, afin d’obtenir l’objet de leurs obsessions.
    Source : https://www.letemps.ch/culture/y-40-ans-sortait-the-burning-premier-film-produit-harvey-weinstein-concentre

    #balancetonporc #culture_du_viol #viol #harcèlement_sexuel #violences_sexuelles #femmes #sexisme #weinstein #harcèlement #féminisme #domination_masculine #harvey_weinstein #cinéma #médias #déni #film #slasher

    • A lire aussi : Harvey Weinstein, vu par ses proies
      https://www.letemps.ch/societe/harvey-weinstein-proies

      Réalisé par Ursula Macfarlane, le documentaire « Untouchable » donne la parole aux femmes victimes du producteur d’Hollywood, dont le procès pour viol et agression sexuelle débutera en septembre à New York.

      https://www.youtube.com/watch?v=b-1fKna9l38

      Un prédateur sexuel assoiffé de pouvoir, aux méthodes de shérif. Untouchable, le documentaire réalisé par la Britannique Ursula Macfarlane, livre un portrait sans concession de Harvey Weinstein. Des témoignages, glaçants, constituent son fil rouge. Des femmes victimes de ses agressions sexuelles se confient, mais également des journalistes, d’anciens collaborateurs et sa secrétaire.

    • Ce qui est parlant aussi c’est le succès de ces films violophiles. Les phallosophe appelent ca « la catharsis », une soit disant purge de l’âme, mais en fait c’est seulement le plaisir sadique des dominants à se donner des idées de sévices à faire subir aux dominées.

    • « Madame, on ne reste pas quand ça se passe mal »
      Entendu en 2020 dans un commissariat des Côtes d’Armor (22) à l’occasion d’une plainte pour violences conjugales.

      #PrendsMaPlainte Les résultats de l’enquête #NousToutes

      https://www.noustoutes.org/ressources/resultats_enquete_prendsmaplainte.pdf

      Parmi les 3496 témoignages récoltés, 66% des répondantes font état d’une mauvaise prise en charge par les forces de l’ordre lorsqu’elles ont voulu porter plainte pour des faits de violences sexuelles.Les témoignages reçus par #NousToutes, dont des centaines récents, sont glaçants et montrent un manque total d’empathie et de professionnalisme de la part de nombreux membres des forces de l’ordre dans l’accueil et la prise en charge des femmes victimes de violences sexuelles. Lorsqu’on demande aux personnes ayant témoigné d’un mauvais accueil de détailler la façon dont elles ont été prises en charge,c’est la banalisation des faits qui arrive en premier, suivie par le refus de prendre la plainte ou découragement de porter plainte.(Plusieurs réponses possibles)

  • Soutien procès #MeToo
    https://paypal.me/pools/c/8ySFResgyn
    https://www.paypalobjects.com/web/res/e66/ea85d5e1ab09c4c33a73f1ad271a1/images/social_gradients/teal.png

    Dans le cadre du mouvement MeToo, Cesare a décidé de prendre la parole pour dénoncer les faits dont iel a été victime. L’un des nommés a attaqué Cesare en diffamation et obtenu gain de cause devant le tribunal.
    Tout au long de la procédure, Cesare a espéré trouver une porte de sortie face à cette situation cauchemardesque. Iel a déposé plainte pour être ellui aussi entendu sur les faits dont iel avait été victime. L’enquête réalisée par la police tient en 2 pages.
    Cesare a proposé de régler le problème « à l’amiable » et un échéancier cohérent avec ses revenus. La proposition a été refusée, il lui est demandé de verser chaque mois la moitié de son salaire. Iel est une personne trans et queer victime d’une justice de classe.
    Cette cagnotte a pour objet de permettre à Cesare de pouvoir vivre dignement

    #diffamation #injustice

  • « Pour un retour de l’#honneur de nos gouvernants » : 20 #généraux appellent Macron à défendre le #patriotisme

    (attention : toxique)

    À l’initiative de #Jean-Pierre_Fabre-Bernadac, officier de carrière et responsable du site Place Armes, une vingtaine de généraux, une centaine de hauts-gradés et plus d’un millier d’autres militaires ont signé un appel pour un retour de l’honneur et du #devoir au sein de la classe politique. Valeurs actuelles diffuse avec leur autorisation la lettre empreinte de conviction et d’engagement de ces hommes attachés à leur pays.

    Monsieur le Président,
    Mesdames, Messieurs du gouvernement,
    Mesdames, Messieurs les parlementaires,

    L’heure est grave, la #France est en #péril, plusieurs #dangers_mortels la menacent. Nous qui, même à la retraite, restons des soldats de France, ne pouvons, dans les circonstances actuelles, demeurer indifférents au sort de notre beau pays.

    Nos #drapeaux tricolores ne sont pas simplement un morceau d’étoffe, ils symbolisent la #tradition, à travers les âges, de ceux qui, quelles que soient leurs couleurs de peau ou leurs confessions, ont servi la France et ont donné leur vie pour elle. Sur ces drapeaux, nous trouvons en lettres d’or les mots « #Honneur_et_Patrie ». Or, notre honneur aujourd’hui tient dans la dénonciation du #délitement qui frappe notre #patrie.

    – Délitement qui, à travers un certain #antiracisme, s’affiche dans un seul but : créer sur notre sol un mal-être, voire une #haine entre les communautés. Aujourd’hui, certains parlent de #racialisme, d’#indigénisme et de #théories_décoloniales, mais à travers ces termes c’est la #guerre_raciale que veulent ces partisans haineux et fanatiques. Ils méprisent notre pays, ses traditions, sa #culture, et veulent le voir se dissoudre en lui arrachant son passé et son histoire. Ainsi s’en prennent-ils, par le biais de statues, à d’anciennes gloires militaires et civiles en analysant des propos vieux de plusieurs siècles.

    – Délitement qui, avec l’#islamisme et les #hordes_de_banlieue, entraîne le détachement de multiples parcelles de la nation pour les transformer en territoires soumis à des #dogmes contraires à notre #constitution. Or, chaque Français, quelle que soit sa croyance ou sa non-croyance, est partout chez lui dans l’Hexagone ; il ne peut et ne doit exister aucune ville, aucun quartier où les lois de la #République ne s’appliquent pas.

    – Délitement, car la haine prend le pas sur la #fraternité lors de manifestations où le pouvoir utilise les #forces_de_l’ordre comme agents supplétifs et boucs émissaires face à des Français en #gilets_jaunes exprimant leurs désespoirs. Ceci alors que des individus infiltrés et encagoulés saccagent des commerces et menacent ces mêmes forces de l’ordre. Pourtant, ces dernières ne font qu’appliquer les directives, parfois contradictoires, données par vous, gouvernants.

    Les #périls montent, la #violence s’accroît de jour en jour. Qui aurait prédit il y a dix ans qu’un professeur serait un jour décapité à la sortie de son collège ? Or, nous, serviteurs de la #Nation, qui avons toujours été prêts à mettre notre peau au bout de notre engagement – comme l’exigeait notre état militaire, ne pouvons être devant de tels agissements des spectateurs passifs.

    Aussi, ceux qui dirigent notre pays doivent impérativement trouver le courage nécessaire à l’#éradication de ces dangers. Pour cela, il suffit souvent d’appliquer sans faiblesse des lois qui existent déjà. N’oubliez pas que, comme nous, une grande majorité de nos concitoyens est excédée par vos louvoiements et vos #silences coupables.

    Comme le disait le #cardinal_Mercier, primat de Belgique : « Quand la #prudence est partout, le #courage n’est nulle part. » Alors, Mesdames, Messieurs, assez d’atermoiements, l’heure est grave, le travail est colossal ; ne perdez pas de temps et sachez que nous sommes disposés à soutenir les politiques qui prendront en considération la #sauvegarde_de_la_nation.

    Par contre, si rien n’est entrepris, le #laxisme continuera à se répandre inexorablement dans la société, provoquant au final une #explosion et l’intervention de nos camarades d’active dans une mission périlleuse de #protection de nos #valeurs_civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national.

    On le voit, il n’est plus temps de tergiverser, sinon, demain la guerre civile mettra un terme à ce #chaos croissant, et les morts, dont vous porterez la #responsabilité, se compteront par milliers.

    Les généraux signataires :

    Général de Corps d’Armée (ER) Christian PIQUEMAL (Légion Étrangère), général de Corps d’Armée (2S) Gilles BARRIE (Infanterie), général de Division (2S) François GAUBERT ancien Gouverneur militaire de Lille, général de Division (2S) Emmanuel de RICHOUFFTZ (Infanterie), général de Division (2S) Michel JOSLIN DE NORAY (Troupes de Marine), général de Brigade (2S) André COUSTOU (Infanterie), général de Brigade (2S) Philippe DESROUSSEAUX de MEDRANO (Train), général de Brigade Aérienne (2S) Antoine MARTINEZ (Armée de l’air), général de Brigade Aérienne (2S) Daniel GROSMAIRE (Armée de l’air), général de Brigade (2S) Robert JEANNEROD (Cavalerie), général de Brigade (2S) Pierre Dominique AIGUEPERSE (Infanterie), général de Brigade (2S) Roland DUBOIS (Transmissions), général de Brigade (2S) Dominique DELAWARDE (Infanterie), général de Brigade (2S) Jean Claude GROLIER (Artillerie), général de Brigade (2S) Norbert de CACQUERAY (Direction Générale de l’Armement), général de Brigade (2S) Roger PRIGENT (ALAT), général de Brigade (2S) Alfred LEBRETON (CAT), médecin Général (2S) Guy DURAND (Service de Santé des Armées), contre-amiral (2S) Gérard BALASTRE (Marine Nationale).

    https://www.valeursactuelles.com/politique/pour-un-retour-de-lhonneur-de-nos-gouvernants-20-generaux-appellen

    La une :

    #appel #généraux #valeurs_actuelles #lettre #lettre_ouverte #armée #soldats

    ping @isskein @karine4

    • 2022 : « l’étrange défaite » qui vient

      Pour Marc Bloch, auteur de L’Étrange défaite, la cause de la débâcle de juin 1940 n’était pas seulement militaire mais d’abord politique. De la même façon, le désastre annoncé de printemps 2022 n’est pas seulement de nature électorale. La débâcle de la démocratie se construit depuis des mois par une sorte de capitulation rampante et générale face à l’extrême droite.

      « Un jour viendra, tôt ou tard, où la France verra de nouveau s’épanouir la liberté de pensée et de jugement. Alors les dossiers cachés s’ouvriront ; les brumes, qu’autour du plus atroce effondrement de notre histoire commencent, dès maintenant, à accumuler tantôt l’ignorance et tantôt la mauvaise foi, se lèveront peu à peu . »

      Ainsi s’ouvre L’Étrange défaite écrite par Marc Bloch au lendemain de la capitulation de l’armée française en juin 1940. « À qui la faute ? », se demande-t-il. Quels mécanismes politiques ont conduit à ce désastre et à l’effondrement d’une République ? Si les militaires, et surtout l’état-major, sont aux premières loges des accusés, nul n’échappe à l’implacable regard de l’historien : ni les classes dirigeantes qui ont « préféré Hitler au Front Populaire », ni la presse mensongère, ni le pacifisme munichois, ni la gauche qui n’a pas eu besoin de ses adversaires pour ensevelir ce Front populaire qui fit si peur aux bourgeois.

      Les « brumes », l’aveuglement et la soumission passive aux récits des futurs vainqueurs ont conduit inexorablement à une #capitulation_anticipée. Comment ne pas y reconnaître la logique des moments sombres que nous vivons sidérés.

      La banalisation de la menace factieuse

      Sidérés, nous le sommes à coup sûr quand il faut attendre six jours pour qu’une menace de sédition militaire (http://www.regards.fr/politique/societe/article/lettre-des-generaux-un-texte-seditieux-qui-menace-la-republique) signée le 21 avril 2021 par une vingtaine de généraux en retraite, mais aussi par de nombreux officiers, commence à faire un peu réagir.

      Sidérés, nous le sommes par la légèreté de la réponse gouvernementale. Un tweet de la ministre des Armées (https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/04/25/la-gauche-s-insurge-contre-une-tribune-de-militaires-dans-valeurs-actuelles-) ne parle que « d’#irresponsabilité » de « généraux en retraite ». Pour #Florence_Parly le soutien que leur apporte Marine Le Pen « reflète une méconnaissance grave de l’institution militaire, inquiétant pour quelqu’un qui veut devenir cheffe des armées ». N’y aurait-il à voir que de l’irresponsabilité militaire et de l’incompétence politique ?

      Il faut attendre le lundi 26 avril pour que Agnès Runacher secrétaire d’État auprès du ministre de l’Économie et des Finances s’avise (https://www.boursorama.com/actualite-economique/actualites/un-quarteron-de-generaux-en-charentaises-la-tribune-de-militaires-dans-v) que le texte a été publié jour pour jour 60 ans après l’appel des généraux d’Alger. En parlant de « quarteron de généraux en charentaises », elle semble considérer que la simple paraphrase d’une expression de l’allocution de De Gaulle, le 23 avril 1961 suffira à protéger la démocratie. Ce dernier, plus martial, en uniforme, parlait surtout de « putsch » et d’un « groupe d’officiers ambitieux et fanatiques ».

      Sidérés, nous le sommes par le #silence persistant, cinq jours après la publication du texte factieux, de l’essentiel les leaders de la droite, du centre, de la gauche et des écologistes.

      Sidérés, nous sommes encore de l’isolement de ceux qui appellent un chat un chat tels Éric Coquerel, Benoît Hamon ou Jean Luc Mélenchon. Ce dernier rappelle au passage que l’article 413-3 du code pénal prévoit cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende pour provocation à la désobéissance des militaires.

      Sidérés, nous le sommes enfin, pendant une semaine, de la #banalisation de l’événement par des médias pourtant prompts à se saisir du buzz des « polémiques ». Le 25 avril (https://rmc.bfmtv.com/emission/tribunes-de-militaires-les-gens-n-ont-pas-confiance-dans-les-politiques-m), RMC/BFM, dans les Grandes Gueules, n’hésite pas à présenter l’appel sur fond de Marseillaise, à moquer « la gauche indignée » en citant Jean Luc Mélenchon et Éric Coquerel, et à débattre longuement avec l’initiateur du texte, Jean-Pierre Fabre-Bernadac. Jack Dion, ancien journaliste de L’Humanité (1970-2004), n’hésite pas à écrire (https://www.marianne.net/agora/les-signatures-de-marianne/malgre-ses-relents-putschistes-la-tribune-des-ex-generaux-met-le-doigt-la-) dans Marianne le 28 avril : « Malgré ses relents putschistes, la tribune des ex généraux met le doigt là où ça fait mal. » Il faut croire donc que cet appel factieux et menaçant ne fait pas polémique après l’appel à l’insurrection de Philippe de Villiers dont on oublie qu’il est le frère aîné d’un autre général ambitieux, Pierre de son prénom, chef d’état-major des armées de 2010 à 2017.

      Qui sont donc les ennemis que ces militaires appellent à combattre pour sauver « la Patrie » ? Qui sont les agents du « délitement de la France » ? Le premier ennemi désigné reprend mot pour mot les termes de l’appel des universitaires publié le 1 novembre 2020 sous le titre de « #Manifeste_des_100 » (https://manifestedes90.wixsite.com/monsite) : « un certain antiracisme » qui veut « la guerre raciale » au travers du « racialisme », « l’indigénisme » et les « théories décoloniales ». Le second ennemi est « l’islamisme et les hordes de banlieue » qui veulent soumettre des territoires « à des dogmes contraires à notre constitution ». Le troisième ennemi est constitué par « ces individus infiltrés et encagoulés saccagent des commerces et menacent ces mêmes forces de l’ordre » dont ils veulent faire des « boucs émissaires ».

      Chacune et chacun reconnaîtra facilement les islamo-gauchistes, les séparatistes et les black blocs, ces épouvantails stigmatisés, dénoncés, combattus par le pouvoir comme par une partie de l’opposition. Ce texte a au moins une vertu : il identifie clairement la nature fascisante des diatribes de Jean-Michel Blanquer, Gérald Darmanin ou Frédérique Vidal. Il renvoie à leur responsabilité celles et ceux qui gardent le silence, organisent le débat public autour de ces thématiques sur la scène médiatique, s’abstiennent à l’Assemblée sur des textes de loi à la logique islamophobe – quand ils ne votent pas pour –, signent des tribunes universitaires pour réclamer une police de la pensée. Il renvoie à ses responsabilités le Bureau national du Parti socialiste qui, dans sa résolution du 27 avril (https://partisocialiste92.fr/2021/04/27/resolution-du-bureau-national-a-la-suite-dune-tribune-de-militaire), persiste à affirmer « qu’il serait absurde de chercher à nier ces sujets qui nous font face » comme « ces #minorités_agissantes » qui prônent la « #désaffiliation_républicaine ».

      Baromètre incontesté des dérives intellectuelles, l’omniprésent #Michel_Onfray, aujourd’hui obsédé par la décadence de la France, ne partage-t-il pas le diagnostic des factieux ? Sa sentence du 27 avril dans la matinale d’Europe 1 (https://www.europe1.fr/societe/sur-le-terrorisme-la-parole-presidentielle-est-totalement-devaluee-estime-on), « l’intérêt de l’#islamo-gauchisme est de détruire la nation, la souveraineté nationale, la France, l’histoire de France, tout ce qui constitue la France », est immédiatement reprise par Valeurs actuelles (https://www.valeursactuelles.com/politique/pour-michel-onfray-linteret-de-lislamo-gauchisme-est-de-detruire-l). Quelques jours plus tôt, dans une envolée digne de Gérald Darmanin, il assénait au Point (https://www.lepoint.fr/debats/michel-onfray-on-a-un-seul-probleme-en-france-c-est-que-la-loi-n-est-pas-res) : « On a un seul problème en France, c’est que la loi n’est pas respectée ». Mais de quelle loi parle Michel Onfray quand il ajoute, à propos du verdict en appel du procès des jeunes de Viry-Châtillon : « Il y a des gens à qui on dit : […] peut-être que vous faites partie de ceux qui auraient pu tuer, mais la preuve n’est pas faite, on est pas sûr que c’est vous, allez, vous pouvez rentrer chez vous. L’affaire est terminée pour vous. » Pour Michel Onfray, le scandale n’est pas la mise en accusation délibérée d’innocents par une police en quête désespérée de coupables mais un principe de droit : la présomption d’innocence elle-même !

      La capitulation rampante

      Voilà où nous en sommes. Voilà pourquoi il est pour beaucoup si difficile de se scandaliser d’un appel factieux quand les ennemis désignés sont ceux-là même qui sont désignés à longueur d’antenne et de déclaration politique dans ce désastreux consensus « républicain » réunissant l’extrême droite, la droite et une partie de la gauche.

      Chacune et chacun y va de sa surenchère. #Anne_Hidalgo (https://www.nouvelobs.com/edito/20201125.OBS36577/derriere-la-gueguerre-entre-hidalgo-et-les-ecolos-la-pomme-de-discorde-de) enjoint les Verts « d’être au clair avec la République » à propos de la laïcité alors même que #Yannick_Jadot (https://www.lepoint.fr/politique/loi-contre-le-separatisme-la-gauche-denonce-un-texte-qui-ne-regle-rien-07-02) demande de « sortir de toute naïveté et de toute complaisance », pour « combattre l’islam politique », proposant de « contrôler les financements des associations » et de « renforcer tous les dispositifs sur le contrôle des réseaux sociaux ».

      La discussion et le vote de la loi sur le « séparatisme », puis les débats hallucinants sur l’organisation de « réunions non mixtes » au sein du syndicat étudiant Unef nous en a fourni un florilège. Pour le communiste #Stéphane_Peu (http://www.le-chiffon-rouge-morlaix.fr/2021/02/separatisme-une-loi-equilibree-se-serait-attachee-a-renforc) comme pour le socialiste #Olivier_Faure (https://www.europe1.fr/politique/projet-de-loi-contre-les-separatismes-olivier-faure-craint-une-surenchere-40), la question n’est pas de combattre sur le fond la notion de « #séparatisme » mais de rester dans une « loi équilibrée » qui « renforce la #République » (Peu) et d’éviter « la surenchère » (Faure). L’un comme l’autre et comme nombre de députés de leurs groupes, s’abstiendront lors du vote à l’Assemblée nationale. Seule La France insoumise a sauvé l’honneur et dénoncé, notamment par la voix de #Clémentine_Autain (https://www.lepoint.fr/politique/loi-contre-le-separatisme-la-gauche-denonce-un-texte-qui-ne-regle-rien-07-02) dès le 16 février, une loi qui « ouvre la boîte de Pandore pour des idées qui stigmatisent et chassent les musulmans » et « nous tire vers l’agenda de l’extrême droite ».

      Si le débat parlementaire gomme un peu les aspérités, l’affaire des réunions « non mixtes » au sein de l’Unef est l’occasion d’un déferlement de sincérité imbécile. On n’en attendait pas moins de #Manuel_Valls (https://www.franceinter.fr/emissions/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien/l-invite-de-8h20-le-grand-entretien-22-mars-2021) qui s’empresse de poser l’argument clef de la curée : « Les réunions "racialisées" légitiment le concept de race ». Le lendemain #Marine_Le_Pen (https://www.francetvinfo.fr/politique/marine-le-pen/video-il-faut-poursuivre-l-unef-un-syndicat-qui-commet-des-actes-racist) le prend au mot et réclame des poursuites contre ces actes racistes. Anne Hidalgo (https://www.europe1.fr/politique/reunions-non-mixtes-a-lunef-cest-tres-dangereux-juge-anne-hidalgo-4032954) apporte sa voix contre une pratique qu’elle considère comme « très dangereuse » au nom de « ses convictions républicaines ». Olivier Faure (https://www.youtube.com/watch?v=rifRSrm7lpU

      ), moins « équilibré » que sur la loi contre le « séparatisme » renchérit comme « une dérive incroyable ».

      Quelle « dérive » ? Tout simplement « l’idée que sont légitimes à parler du racisme les seules personnes qui en sont victimes », alors que « c’est l’inverse qu’il faut chercher ». Dominés restez à votre place, nous parlerons pour vous ! Aimé Césaire dans sa lettre à Maurice Thorez (https://lmsi.net/Lettre-a-Maurice-Thorez), dénonçait ce qu’il nommait le « #fraternalisme » : « Un grand frère qui, imbu de sa supériorité et sûr de son expérience, vous prend la main pour vous conduire sur la route où il sait se trouver la Raison et le Progrès. » Or, ajoutait-il, « c’est très exactement ce dont nous ne voulons plus » car « nous ne (pouvons) donner à personne délégation pour penser pour nous. »

      Olivier Faure revendique un « #universalisme » que ne renierait pas le candidat communiste à la présidentielle, #Fabien_Roussel pour qui « les réunions segmentées selon la couleur de sa peau, sa religion ou son sexe, ça divise le combat ». Le PCF (https://www.pcf.fr/actualite_derri_re_les_attaques_contre_l_unef_une_d_rive_autoritaire_et_antid_mo) n’hésite pas à défendre en théorie l’Unef tout en se joignant cœur réactionnaire des condamnations de ses pratiques.

      #Audrey_Pulvar (https://www.lci.fr/politique/demander-a-une-personne-blanche-de-se-taire-dans-une-reunion-non-mixte-pulvar-cr) cherchant peut-être un compromis dans la présence maintenue mais silencieuse d’un blanc dans une réunion de personnes racisées, se prend une volée de bois vert du chœur des bonnes âmes universalistes. La « dilution dans l’universel » est bien « une façon de se perdre » comme l’écrivait encore Aimé Césaire en 1956.

      Ce chœur hystérisé, rien ne le fera taire, ni le rappel élémentaire d’#Eric_Coquerel (https://www.facebook.com/watch/?v=773978356575699) que les #groupes_de_parole sont « vieux comme le monde, comme le mouvement féministe, comme les alcooliques anonymes », ni la prise du conscience de l’énormité morale, politique et juridique des positions prises ainsi dans une émotion révélatrice.

      Refuser de comprendre que la parole des dominées et dominés a besoin de se constituer à l’abri des dominants, c’est nier, de fait, la #domination. Ce déni de la domination, et de sa #violence, est une violence supplémentaire infligée à celles et ceux qui la subissent.

      Au passage, une partie de la gauche a par ailleurs perdu un repère simple en matière de liberté : la liberté de réunion est la liberté de réunion. Elle n’est plus une liberté si elle est sous condition de surveillance par une présence « hétérogène ». À quand les réunions de salariés avec présence obligatoire du patron ? Les réunions de femmes avec présence obligatoire d’un homme ? Les réunions d’étudiants avec présence obligatoire d’un professeur ? Les réunions de locataires avec présence obligatoire du bailleur ? Les réunions d’antiracistes avec présence obligatoire d’un raciste ?

      Ces héritiers et héritières d’une longue tradition politique liée aux luttes sociales révèle ainsi leur déconnexion avec les mobilisation d’aujourd’hui, celles qui de #MeToo à Black Lives Matter ébranlent le monde et nous interrogent sur quelle humanité nous voulons être au moment où notre survie est officiellement en question. Ces mouvements de fond martèlent, 74 ans après Aimé Césaire, que « l’heure de nous-mêmes a sonné. »

      Nul doute, hélas, que ce qui fait ainsi dériver des femmes et des hommes issus de la #gauche, c’est le poids pas toujours avoué, mais prégnant et souvent irrationnel, de l’#islamophobie. Cette adhésion générale à un complotisme d’État (https://blogs.mediapart.fr/alain-bertho/blog/041220/l-etat-t-il-le-monopole-du-complotisme-legitime) touche plus fortement les espaces partisans, voire universitaires, que le monde associatif. On a pu le constater lors de la dissolution du #Collectif_contre_l’islamophobie_en_France (#CCIF) fin 2020 quand la fermeté les protestations de la Ligue des droits de l’Homme (https://blogs.mediapart.fr/gabas/blog/031220/ldh-dissolution-politique-du-ccif) ou d’Amnesty international (https://www.amnesty.fr/presse/france-la-fermeture-dune-association-antiraciste-e) n’a eu d’égale que la discrétion de la gauche politique. La palme du mois d’avril revient sans conteste à #Caroline_Fourest (https://twitter.com/i/status/1384567288922259467) qui lors du lancement des États Généraux de la Laïcité a pu déclarer sans frémir que « ce mot islamophobie a tué les dessinateurs de Charlie Hebdo et il a tué le professeur Samuel Paty ».

      Oui voilà ou nous en sommes. La menace d’une victoire du #Rassemblement_national ne se lit pas que dans les sondages. Elle se lit dans les #renoncements. Elle s’enracine dans la banalisation voire le partage de ses thématiques disciplinaires, de ses émotions islamophobes, de son vocabulaire même.

      L’évitement politique du réel

      Il faut vraiment vivre dans une bulle, au rythme de réseaux sociaux hégémonisés par l’extrême droite, loin des réalités des quartiers populaires, pour considérer que l’islam et les réunions non mixtes sont les causes premières du délitement des relations collectives et politiques dans ce pays.

      Quelle République, quelle démocratie, quelle liberté défend-on ici avec ces passions tristes ? Depuis plus d’un an, la réponse gouvernementale à l’épreuve sanitaire les a réduites à l’état de fantômes. L’#état_d’urgence sanitaire est reconduit de vague en vague de contamination. Notre vie est bornée par des contrôles, des interdictions et des attestations. Les décisions qui la règlent sont prises par quelques-uns dans le secret délibératif d’un Conseil de défense. Nous vivons suspendus aux annonces du président et de quelques ministres et, de plus de plus en plus, du président seul, autoproclamé expert omniscient en gestion de pandémie. Nous n’avons plus prise sur notre vie sociale, sur nos horaires, sur notre agenda, sur notre avenir même très proche. Nous n’avons plus de lieu de délibération, ces lieux qui des clubs révolutionnaires de 1789 aux ronds-points des gilets jaunes, en passant par la Place Tahrir et la Puerta Del Sol en 2011 sont l’ADN de la #démocratie.

      La violence de la menace létale mondiale que font peser sur nous le Covid et ses variants successifs nous fait espérer que cette épreuve prendra fin, que la parenthèse se refermera. Comme dans une période de guerre (https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/070221/stephane-audoin-rouzeau-nous-traversons-l-experience-la-plus-tragique-depu), cet espoir toujours déçu se renouvelle sans fin à chaque annonce moins pessimiste, à chaque communication gouvernementale sur les terrasses jusqu’à la déception suivante. Cette #précarité sans fin est un obstacle collectif à la #résistance_démocratique, à la critique sociale, idéologique et opératoire de cette période qui s’ouvre et sera sans doute durable. C’est bien dans ce manque politique douloureux que s’engouffrent tous les complotismes de Q-Anon à l’islamophobie d’État.

      Depuis le printemps 2020 (www.regards.fr/politique/societe/article/covid-19-un-an-deja-chronique-d-une-democratie-desarticulee), les partis d’opposition ont cessé d’être dans l’élaboration et la proposition politique en lien avec la situation sanitaire. Le monologue du pouvoir ne provoque plus sporadiquement que des réactions, jamais d’alternative stratégique ni sur la réponse hospitalière, ni sur la stratégie vaccinale, ni sur l’agenda des restrictions sociales. Même l’absence de publication, des semaines durant début 2021, des avis du Conseil scientifique n’émeut pas des politiques beaucoup plus préoccupés par les réunions non mixtes à l’Unef.

      Attac (https://france.attac.org/spip.php?page=recherche&recherche=covid) n’est pas beaucoup plus proactif malgré la publication sur son site en novembre 2020 d’un texte tout à fait pertinent de Jacques Testard sur la #démocratie_sanitaire. En général les think tanks sont plutôt discrets. L’Institut Montaigne est silencieux sur la stratégie sanitaire tout comme la Fondation Copernic qui n’y voit pas l’occasion de « mettre à l’endroit ce que le libéralisme fait fonctionner à l’envers ». Si le think tank Économie Santé des Échos déplore le manque de vision stratégique sanitaire, seule Terra Nova semble avoir engagé un véritable travail : une cinquantaine de contributions (https://tnova.fr/ckeditor_assets/attachments/218/terra-nova_dossier-de-presse_cycle-coronavirus-regards-sur-une-crise_2020.pdf), des propositions (https://tnova.fr/revues/covid-19-le-think-tank-terra-nova-fait-des-propositions-pour-limiter-les-conta) sur l’organisation de la rentrée scolaire du 26 avril 2021, des propositions sur la stratégie vaccinale…

      Pourquoi cette #inertie_collective sur les choix stratégiques ? Ce ne sont pas les sujets qui manquent tant la stratégie gouvernementale ressemble à tout sauf à une stratégie sanitaire. Sur le fond, aucun débat n’est ouvert sur le choix entre stratégie de cohabitation avec la maladie ou d’éradication virale. Ce débat aurait eu le mérite d’éclairer les incohérences gouvernementales comme la communication sur le « tester/tracer/isoler » de 2020 qui n’a été suivie d’aucun moyen opérationnel et humain nécessaire à sa mise en œuvre. Il aurait permis de discuter une stratégie vaccinale entièrement fondée sur l’âge (et donc la pression hospitalière) et non sur la circulation active du virus et la protection des métiers à risque. Cette stratégie a fait battre des records vaccinaux dans des territoires aux risques faibles et laissé à l’abandon les territoires les plus touchés par la surmortalité comme la Seine-Saint-Denis.

      Pourquoi cette inertie collective sur la démocratie sanitaire ? Les appels dans ce sens n’ont pourtant pas manqué à commencé par les recommandations du Conseil Scientifique dès mars 2020 : le texte de Jacques Testard (https://france.attac.org/nos-publications/les-possibles/numero-25-automne-2020/debats/article/la-covid-la-science-et-le-citoyen), un article de The Conversation (https://theconversation.com/debat-quelles-lecons-de-democratie-tirer-de-la-pandemie-140157) au mois de juin 2020, l’excellent « tract » de #Barbara_Stiegler, De la démocratie en pandémie, paru chez Gallimard en janvier 2021 et assez bien relayé. Des propositions, voire des expérimentations, en termes de délibération et de construction collective des mesures sanitaires territorialisées, des contre expertises nationales basées sur des avis scientifiques et une mobilisation populaire auraient sans doute mobilisé de façon positive la polyphonie des exaspérations. On a préféré laisser réprimer la mobilisation lycéenne (https://blogs.mediapart.fr/alain-bertho/blog/181120/sommes-nous-aux-portes-de-la-nuit) pour de vraies mesures sanitaires en novembre 2020.

      Bref la construction de masse d’une alternative à l’incapacité autoritaire du pouvoir aurait pu, pourrait encore donner corps et usage à la démocratie, aujourd’hui désarticulée (https://blogs.mediapart.fr/alain-bertho/blog/160321/covid-un-deja-chronique-d-une-democratie-desarticulee), qu’il nous faut essayer de défendre, pourrait incarner la République dans des exigences sociales et une puissance populaire sans lesquelles elle risque toujours de n’être qu’un discours de domination.

      Une autre élection est-elle encore possible ?

      Entre cet étouffement démocratique de masse et l’immensité des choix de société suggérés au quotidien par la crise sanitaire, le grain à moudre ne manque pas pour des courants politiques héritiers d’une tradition émancipatrice. Leur responsabilité est immense quand l’humanité est mise au pied du mur de sa survie et de l’idée qu’elle se fait d’elle-même. Mais ces partis préfèrent eux aussi considérer la situation sanitaire comme une simple parenthèse à refermer, se projetant sur les échéances de 2022 comme pour oublier 2020 et 2021. Il est ahurissant de penser que, après 14 mois de pandémie, la politique sanitaire ne soit pas au centre des élections territoriales de ce printemps, sinon pour une question d’agenda.

      En « rêvant d’une autre élection » comme d’autres ont rêvé d’un autre monde, la gauche permet tout simplement au président en exercice de s’exonérer de son bilan dramatique : un système de santé et des soignantes et soignants mis en surchauffe des mois durant, une mise en suspens de milliers de soins parfois urgents, des dizaines de milliers de Covid longs, plus de 100.000 morts, des territoires et des populations délibérément sacrifiés, des inégalités devant la mort et la maladie largement calquées sur les inégalités sociales et les discriminations, une vie sociale dévastée, une démocratie en miettes, une faillite biopolitique structurelle.

      Comment lui en faire porter la responsabilité si on ne peut lui opposer aucune alternative ? Le pouvoir s’en réjouit d’avance et, renversant la charge de la preuve, semaine après semaine, somme chacune et chacun de présenter un bilan sur l’agenda qu’il déroule sans rencontrer beaucoup de résistance : les politiques sécuritaires et l’islamophobie d’État. Or, ce concours électoraliste du prix de la « laïcité », de la condamnation de l’islamisme, de la condamnation des formes contemporaines de lutte contre les discriminations, nous savons qui en sera la championne incontestée : elle en maîtrise à merveille les thématiques, le vocabulaire comme la véhémence.

      Voici ce que les sondages, jour après jour, mesurent et nous rappellent. Dans ces conditions, l’absence de dynamique unitaire à gauche n’est pas la cause de la défaite annoncée, elle est déjà le résultat d’une perte majoritaire de boussole politique, le résultat d’une sorte d’évitement du réel, le résultat d’un abandon.

      « L’étrange défaite » de juin 1940 a pris racine dans le ralliement des classes dirigeantes à la nécessité d’un pouvoir policier et discriminatoire. Nous y sommes. « L’étrange défaite » s’est nourrie de la pusillanimité d’une gauche désertant les vrais combats pour la démocratie, de la défense de l’Espagne républicaine au barrage contre un racisme aussi déchaîné qu’expiatoire. Nous y sommes sur les enjeux de notre temps. « L’étrange défaite » a été la fille du consensus munichois et de la capitulation anticipée. Nous y sommes. « L’étrange défaite » a été suivie de la mort d’une République. L’appel militaire du 21 avril en fait planer la menace.

      À l’exceptionnalité de la période traumatique qui bouleverse depuis 14 mois en profondeur nos repères politiques, sociaux et vitaux, s’ajoute l’exceptionnalité de l’échéance institutionnelle du printemps 2022. Il est dérisoire d’y voir la énième occasion de porter un message minoritaire, dérisoire de donner le spectacle d’une querelle d’egos, dérisoire de jouer à qui sera responsable de la défaite. Le salut ne sera pas dans un compromis défensif sans principe mais dans un sursaut collectif d’ambition.

      Il est temps de prendre la mesure du temps que nous vivons, car il est toujours temps de résister. Comme concluait Marc Bloch en septembre 1940, « peut-être est-ce une bonne chose d’être ainsi contraints de travailler dans la rage », car « est-ce à des soldats qu’il faut, sur un champ de bataille, conseiller la peur de l’aventure ? » Il ajoutait que « notre peuple mérite qu’on se fie à lui et qu’on le mette dans la confidence ».

      http://www.regards.fr/idees-culture/article/2022-l-etrange-defaite-qui-vient
      #non-mixité

  • « Le sexisme est utile à la téléréalité »

    Le journaliste Paul Sanfourche retrace dans un livre intitulé Sexisme story l’histoire de Loana, la première gagnante de « Loft Story », en 2001, à l’aune du sexisme et du patriarcat dont elle a été la première victime. Depuis, le système sexiste a perduré dans la téléréalité et il est dénoncé par des candidates. Décryptage.
    https://www.mediapart.fr/journal/france/240421/paul-sanfourche-le-sexisme-est-utile-la-telerealite?onglet=full

    Elle reste la première icône de la téléréalité en France. Loana Petrucciani a gagné, en 2001, la première édition de « Loft Story », émission qui a ouvert la brèche de cette télé qui prétend raconter le réel (lire l’article de François Bougon). Vingt ans plus tard, les programmes en tout genre se sont multipliés. Le journaliste Paul Sanfourche, qui avait suivi adolescent les aventures télévisuelles de ces premiers cobayes de la téléréalité française, a décidé de revenir sur le cas précis de Loana et en a tiré un livre, baptisé Sexisme story (éditions du Seuil). Au-delà du seul destin mâtiné de tragique de l’ex-lofteuse, le journaliste, via des entretiens avec les acteurs de l’époque et des ressources universitaires, dissèque avec précision les rouages de cette industrie et ceux de la société de production, Endemol.

    Il analyse par ce truchement le sexisme, presque systémique, qui infuse dans le monde de la téléréalité et est même devenu l’une des jambes de ces programmes. Depuis quelques jours, plusieurs candidates des « Anges de la téléréalité » et « Les Vacances des Anges », Angèle Salentino, Rawell Saiidii, Rania Saiidii et Nathanya Sion, appellent au boycott de ces émissions de téléréalité. Elles ont raconté sur Internet le harcèlement, les humiliations et le sexisme dont elles disent avoir été victimes durant certains tournages. Les jeunes femmes ont décidé de prendre un avocat pour constituer leur plainte contre la société de production. Pour Paul Sanfourche, il faudrait que les candidats se mobilisent et conditionnent leurs participations aux émissions de téléréalité à l’engagement des sociétés de production à lutter contre le sexisme en leur sein et dans les programmes.

    Mediapart : Pourquoi avez-vous écrit cet ouvrage et qu’est-ce qui vous a amené à choisir une analyse sur le système sexiste de la téléréalité ?

    Paul Sanfourche © Emmanuelle Marchadour Paul Sanfourche © Emmanuelle Marchadour
    Paul Sanfourche : J’ai eu l’idée de ce livre en lisant l’ouvrage de Gabrielle Deydier, On ne naît pas grosse. Il y a une citation de Daria Marx, militante féministe et antigrossophobie, qui évoque Loana. Elle explique que cette dernière est l’incarnation du fait que les femmes ont toujours tort. À 20 ans, quand elle est une bimbo et satisfait les regards masculins, les canons et les stéréotypes, elle est conspuée comme une fille facile. À 40 ans, quand elle devient obèse elle est de nouveau raillée, toujours pour son corps. Ça a provoqué un déclic chez moi. Je n’avais pas vu ça dans le personnage alors que j’avais regardé la téléréalité de manière avide quand j’étais adolescent. Pourquoi personne ne s’était-il intéressé à elle comme l’archétype télévisuel de la femme-objet, moquée pour son corps à la télévision ? Dès que j’ai commencé à m’intéresser à elle, je me suis rendu compte que sa vie reflète le sort réservé aux femmes à la télévision, et globalement dans la société. Loana a vécu chacune des expériences dont on parle aujourd’hui, ces violences faites aux femmes. Elle a connu les violences intrafamiliales, l’inceste, les violences conjugales et le viol. Tout ça est mis sous le tapis, sous le personnage construit médiatiquement de la fille dont on pouvait rire quand on était bien né. Il y avait un mystère, tout était sous nos yeux mais personne ne voit ce qu’il s’est passé. J’ai eu envie de fouiller et de démonter ces mécaniques-là.

    Un séisme traverse le monde de la téléréalité avec ces candidates des « Anges » qui dénoncent le sexisme et le harcèlement qu’elles disent avoir subis. Elles mettent en cause la société de production, pourquoi les autres ne sont-ils pas touchées ?

    L’un des candidats, Raphaël Pépin, avait déjà été cité par Nathanya Sion qui avait participé aux « Anges ». Elle avait dit qu’il était violent, qu’il l’avait insultée de manière sexiste et que la production, alertée, n’avait rien fait. « Les Anges », c’est particulier, car ça a longtemps été l’émission phare de la téléréalité. Tout a été déplacé sur la TNT car les autres étaient en perte de vitesse sur le réseau hertzien historique. Il y a eu à ce moment-là une low-costisation de la téléréalité et un nouveau modèle a été créé. Les émissions coûtent moins cher et la participation des candidats devient encore plus importante car ils sont la main-d’œuvre. Les boîtes de production ont besoin du candidat qui accepte de tourner 24 heures sur 24 et produit de la séquence. Pour ça, il faut un sens de la mise en scène personnelle. Ces logiques de mise en scène de soi, de clashs, commencent à s’installer dès les années 2010 avec « Les Anges de la téléréalité ». D’ailleurs, dans le jargon de la profession, on parle désormais de série-réalité et non plus de téléréalité, ce qui montre qu’on franchit un cap.

    Toutes les scènes sont donc scénarisées ?

    Ce n’est pas une scénarisation dans le sens où la production fournit aux candidats un script – ça, tout le monde l’exclut –, mais c’est une fictionnalisation par l’acceptation et l’intégration des candidats selon le personnage qu’ils doivent incarner. Ils vont jouer de leur personnalité et créer du récit, des histoires d’amours et évidemment des clashs. Dans ces téléréalités d’enfermement, les caméras sont dissimulées, grâce à des vitres sans tain avec des cadreurs derrière. Les candidats, et c’était le souhait de la production, oubliaient les caméras. Dans les programmes actuels, c’est tout l’inverse, ce sont des cadreurs avec des grosses caméras, quand ça tourne les candidats le savent, ils se rapprochent d’eux. Ils se prêtent au jeu.

    Lire aussi

    Vingt ans de téléréalité en France : du scandale « Loft Story » au business des influenceurs Par François Bougon

    Dans ce cadre-là, le sexisme, c’est un ingrédient du récit. Ce n’est pas que propre à la téléréalité, mais les stéréotypes de genre y sont présents. La téléréalité applique les vieilles recettes : il faut une tension amoureuse, une opposition entre deux mâles pour s’attirer les faveurs d’une femme, il faut qu’un homme accuse une femme de quelque chose, qu’elle soit vue comme une séductrice, une chose fragile ou comme quelqu’un de manipulateur. Tout ça va fournir une matière première pour les productions. Le sexisme est utile à la téléréalité.

    Alors que le sexisme est très présent dans ces émissions, pourquoi n’y a-t-il pas eu de mouvement d’ampleur de dénonciation dans ce milieu ?

    Les dénonciations restent sporadiques. Mais il semblerait que la téléréalité prenne le pas de toutes les industries du divertissement. Il y a eu un effet #MeToo dans le cinéma puis dans la musique, et là cela atteint la téléréalité. Il y a urgence pour les productions de s’intéresser au sexisme car cela reste dans l’angle mort. Ils ont une responsabilité envers les publics qui regardent ces programmes qui sont en majorité adolescents. Le Haut Conseil à l’égalité démontrait dans un rapport en 2019 que la téléréalité fonctionne selon des ressorts identiques. Les corps des femmes sont très sexualisés, elles reçoivent souvent des insultes sexistes à l’antenne sans que cela ne semble poser problème. Et c’est même diffusé, ce qui devient gênant en 2021.

    Surtout qu’aujourd’hui, s’il y avait un mouvement encore plus large des candidats et candidates, cela aurait du poids. Ils sont puissants, pas comme au début où ils étaient des simples cobayes. Chaque candidat emblématique a une vraie marge de manœuvre et a pour lui cette popularité qui se traduit par des followers sur les réseaux sociaux.

    Si les candidates se mobilisaient en disant qu’elles arrêtent de participer aux émissions tant que ces comportements sexistes sont tolérés, cela pourrait avoir du poids. Les sociétés de production doivent se responsabiliser elles-mêmes. Surtout quand on voit que les rapports du CSA ne changent rien. On est dans une impasse.
    « Loana a été le patient zéro de la téléréalité »

    Endemol, la maison de production derrière « Loft Story », s’est toujours dédouanée de toute responsabilité quant à la diffusion de la scène de la piscine, qui a été un fardeau pour Loana. Pourquoi, vingt ans plus tard, rien n’est régulé ? La limite a-t-elle été repoussée avec les années ?

    Il y a un premier argument développé par les productions : tous les gens de ces émissions, hommes comme femmes, sont volontaires. Elles considèrent qu’elles ne peuvent être tenues pour responsables car les candidats savent qu’ils viennent participer à un jeu pour lequel ils seront filmés et que leur image sera exposée. Mais cet argument est fallacieux à mon sens, la justice a par exemple considéré que les candidats et les boîtes de production étaient reliés par des contrats de travail, quasiment celui d’un acteur. Si on doit exiger des candidats de se lever à telle ou telle heure et faire telle ou telle activité, à partir de là, comme tout employeur, il y a une obligation morale et de sécurité vis-à-vis de l’employé.

    Tout ça met en lumière les interrogations face au rôle du CSA et son action sur l’audiovisuel français. Quel est son pouvoir ? Plusieurs mises en demeure et rappels à l’ordre n’ont jamais influencé les programmes, on peut donc se poser des questions quant à son efficacité. Mais cela soulève aussi la question de la censure, car plein de voix s’élèveraient si on interdisait de mettre des filles dénudées ou de dire telle ou telle chose dans ces programmes. C’est tout le débat qu’on a sur la culture et la production de la fiction. C’est assez compliqué. Tant que les candidats et téléspectateurs ne diront pas qu’ils ne veulent plus voir ça à l’écran, les productions ne changeront pas.

    © DR © DR
    Les scènes diffusées sont toutes bien sélectionnées, à l’époque jeune adolescent, vous vous délectez de ces morceaux choisis avec les candidates qui sortent de la douche ou sont en maillot de bain autour de la piscine par exemple. Est-ce qu’aujourd’hui les émissions sont-elles toujours aussi caricaturales, est-ce allé crescendo ?

    Dans le « Loft », c’était du voyeurisme assez pur dans la mesure où les candidats n’étaient pas préparés à cette exposition et avaient un comportement assez naturel. Il y avait pour le téléspectateur un plaisir d’observateur, avec un côté laboratoire humain in vivo. Il y avait aussi une dimension de voyeur visuel pur avec ces corps exposés lors de ces scènes de douche. Le paroxysme étant cette scène dans la piscine et la chambre entre Loana et Jean-Édouard. Ces moments ont cristallisé l’audience et ont créé le programme, dès le troisième soir, quand les deux ont eu une relation sexuelle ensemble.

    Aujourd’hui, les candidats sont conscients de l’image qu’ils vont véhiculer. Tout ce qu’on voit à l’écran est maîtrisé, proche de ce qu’on voit sur un shooting de mannequin. Ce n’est pas la même esthétique et pas la même violence. Douze millions de téléspectateurs ont suivi la finale. Les candidats du « Loft » ont tous été sidérés face à leur starification, alors qu’ils pensaient participer à une sorte de « Tournez... manège ». À l’époque, Internet est balbutiant, ils ont peut-être vaguement entendu parler de Big Brother à l’étranger. Aujourd’hui, les candidats veulent tout ça, c’est une démarche professionnelle.

    Loana, en gagnant, a créé un précédent, elle a incarné la bimbo provocante de l’extérieur mais finalement fragile. Ce stéréotype va être recréé à foison. Ces personnalités vont être mises en avant comme vont l’être les grandes gueules. Le « Loft 1 », c’est le galop d’essai, on voit ce qui fédère les téléspectateurs. Les productions ont intérêt à sélectionner des profils limites avec une forte envie d’exposition et des failles narcissiques béantes à exploiter. Elles ont un goût particulier pour les personnes au passé douloureux, ce qui va alimenter le récit. À cet égard, Loana a été le patient zéro de la téléréalité.

    La vie de Loana a été scrutée sous toutes ses coutures, son passé, sa famille ont été traqués. Son corps, jugé trop sexy d’abord, et ses fluctuations de poids ont aussi été disséqués. Est-ce parce que la téléréalité impose une norme qui fait le lit de ce sexisme généralisé ?

    Le souci principal de ces émissions, c’est l’audience, elles utilisent des techniques identiques à celles de l’industrie du spectacle. Les corps sont stéréotypés et obéissent au male gaze, ce regard masculin. Ils sont mis en valeur pour ça, sont censés attirer et faire rêver ceux qui suivent leurs aventures. Quand j’ai interviewé Thibaut Valès, l’ancien producteur des « Anges », il m’a dit cela : « Nous, on veut faire rêver. » On considère qu’un corps qui correspond aux canons de la publicité et des magazines féminins fait vendre et attire. C’est une industrie du désir qui emploie les mêmes méthodes. D’où une uniformisation des corps.

    Ces sociétés de production n’ont pas d’état d’âme et ne sont pas misogynes pour le plaisir de l’être. Elles trouvent ça efficace donc ce sont les seules valeurs qu’elles épousent. Loana devient une star et cette espèce d’appétit de notre société pour ces destins de jeunes filles portées au pinacle puis foulées au pied par la société qui va se délecter de la chute de ses idoles, ce double plaisir. On les admire car elles sont belles et provoquent du désir. Ensuite on se rassure en les voyant chuter. Cela réveille des sentiments peu glorieux qui existent en chacun de nous. C’est aussi vrai pour Britney Spears.

    Cette absence d’empathie pour ces trajectoires-là n’est pas étonnante. Récemment, dans une émission revisitant les vingt ans du « Loft », les anciens candidats présents ont parlé de Loana en son absence. Jean-Édouard a fait une blague en disant que ça lui avait pris cinq minutes pour la séduire. La scène est d’une violence rare. Vingt ans après elle est encore et toujours moquée avec un sexisme et une condescendance absolus.

  • Stéphanie #Roza : « La focalisation sur la race et le genre fait aujourd’hui écran aux questions sociales » | Histoire et société

    https://histoireetsociete.com/2021/04/23/stephanie-roza-la-focalisation-sur-la-race-et-le-genre-fait-aujou

    Philosophe spécialiste des #Lumières et des précurseurs du #socialisme, Stéphanie Roza vient de publier « La gauche contre les Lumières ? » (Fayard, 2020) dans lequel elle revient sur l’émergence, au sein de la gauche intellectuelle, d’une critique radicale contre les principes fondateurs des Lumières, au risque de jeter le bébé avec l’eau du bain. À l’heure où le rapport à l’#universalisme, à la #science ou au #progrès sont au cœur du débat public, nous avons souhaité nous entretenir avec elle.

    • La gauche contre les Lumières ? | 40 Min., 17.07.2020

      https://www.youtube.com/watch?v=3og-y4cOD98

      Depuis plusieurs années déjà s’élèvent des critiques d’une radicalité inouïe contre le cœur même de l’héritage des Lumières : le rationalisme, le progressisme, l’universalisme. Ces critiques se revendiquent de l’émancipation des dominés, marqueur traditionnel des différents courants de gauche.
      Mais s’inscrivent-elles dans le prolongement de celles qui, depuis l’émergence des mouvements #socialiste, #communiste ou #anarchiste, avaient pour horizon un prolongement et un élargissement des combats des Lumières « bourgeoises » ? Il est malheureusement à craindre que non.

      Une partie de la gauche est-elle dès lors en train de se renier elle-même ? À l’occasion de la publication de son ouvrage "La gauche contre les Lumières ?" (coll. « raison de plus » dirigée par Najat Vallaud Belkacem, Éditions Fayard, 2020), Stéphanie Roza, chargée de recherches au CNRS et spécialiste des Lumières et de la #Révolution_française, en débat avec Frédéric Worms, professeur de philosophie à l’ENS. Des Lumières aux critiques radicales récentes, en évoquant le passé comme le présent avec les mouvements #MeToo​ et #Black_Lives_Mater, ils nous livrent leur définition de la gauche émancipatrice pour les années à venir.

      –----

      Entre autres, Frédéric Worms tente d’argumenter sur l’insuffisance de l’universalisme, surtout à min. 25.

      #antisémitisme #démocratie_formelle vs. #démocratie_concrète #fracturation

    • En Allemand, j’ai du mal à suivre. Mais, fondamentalement, l’idée qui s’est imposée, c’est qu’il faut cesser de lutter pour le socialisme et le communisme et lutter pour un capitalisme « juste ». C’est cela l’idéologie des droits de l’homme qui a constitué le pendant du néo-libéralisme depuis 40 ans : « Le capitalisme des droits de l’homme est meilleur que le socialisme qui est au mieux une utopie dangereuse, au pire un crime ». La classe ouvrière et le prolétariat ont été effacés de la scène politique. Les classes moyennes versatiles, trouillardes et influençables ont été érigées en idéal sociétal. Au nom de la liberté, on a effacé l’émancipation, puis, au nom de la sécurité, on a effacé la liberté.
      Le seul problème, c’est qu’on finit pas comprendre que tout cela n’est qu’un vaste mensonge. La classe ouvrière n’a pas disparu, elle a été délocalisée. Elle a été renvoyée vers des pays dont on pensait qu’ils ne comptaient pas et qu’ils ne compteraient jamais, des pays qu’on a longtemps qualifié de Tiers-monde, mais qui sont devenus, après la fin de l’URSS, des pays du non-monde. Dans l’idéologie dominante, ces pays ne comptent absolument pas. Ils peuvent voter à 95 % à l’AG de l’ONU pour la reconnaissance de la Palestine ou à 99% contre l’embargo américain sur Cuba, cela ne compte pas. On nous parle toujours de la communauté internationale" comme étant alignées sur l’expression des classes dominantes d’Europe et des USA.
      Pourtant, la classe ouvrière et le prolétariat ont augmenté pendant ses 40 ans dans des proportions considérables et représentent aujourd’hui plus de 4 milliards de personnes, la majorité de l’humanité. Et les pays qui ne comptent pas, finissent pas compter et certains d’entre eux commencent à demander des comptes. L’Alliance Atlantique reste accrochée à sa domination et la défend avec rage, mais celle-ci s’effrite. En particulier, elle use jusqu’à la corde et jusqu’à l’odieux la stratégie de la division, de la peur de l’autre. Peur de l’africain, peur du chinois, peur du russe, oppositions entre hommes et femmes, ...
      Alors, il est temps de penser différemment, et de se réapproprier notre histoire collective de l’émancipation, de la fraternité pour construire un autre avenir pour le monde. Et cet avenir ne peut être que communiste, porté par le prolétariat mondial dans toutes ses couleurs et toute sa diversité. Il nous faut retrouver notre drapeau rouge.

    • Mmmh non ce n’est pas l’objet de son dernier livre du tout. Elle ne parle à peu près pas des idées de droite comme quoi la classe ouvrière aurait disparu, etc, mais bien une critique des idées de plusieurs courants de gauche (d’ailleurs très différents entre eux ! théorie critique, études post-coloniales, queer, etc) qui critiquent l’universalisme abstrait et le rationalisme dérivant vers le scientisme, en disant finalement peu ou prou que tous ces courants vont à l’encontre des Lumières et sont au final réactionnaires (je fais très très rapide huhu), et aboutissent à des… séparatismes. C’est bien son discours stalinien est raccord avec le gouvernement finalement. :)

    • Alors, il est temps de penser différemment, et de se réapproprier notre histoire collective de l’émancipation, de la fraternité pour construire un autre avenir pour le monde.

      Fraternité c’est typiquement un mot du vieux monde misogyne, le contraire de l’émancipation, rien de « pensé different là dedans ». La fraternité c’est l’alliance des frères , et uniquement des frères et si les frères s’allient c’est toujours contre les sœurs. Rien à voire avec un autre monde, bien au contraire c’est un mot de l’effacement et de l’exploitation des femmes tout à fait ancien et typique du masculinisme ordinaire. Dans la devise nationale française, fraternité ca correspond aussi bien historiquement que philosophiquement à la privation du droit de vote pour les femmes. Bref la fraternité c’est moche, c’est reac, et c’est pour les faschos du zob qui peuvent pas supporter les femmes comme leurs égales. #fraternité #male_gaze #sororité #solidarité

  • #MeToo : le patron d’une maison d’édition mis en cause - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/210421/metoo-le-patron-d-une-maison-d-edition-mis-en-cause?onglet=full

    Mediapart a recueilli de nombreux documents et les témoignages d’une vingtaine de femmes ayant un jour croisé la route de Stéphane Marsan, patron des éditions Bragelonne, spécialisées dans les littératures de l’imaginaire. Autrices, éditrices, étudiantes, traductrices ou stagiaires… Toutes font part de remarques et de gestes inappropriés, à connotation sexuelle, dans un cadre professionnel.

    • J’en ai entendu parler par des amies chez Bragelonne. Le mécanisme de protection de la direction s’ajoute à l’affaire. Ils protègent leur boss (Stéphane Marsan), résultat tous les salariés sont en crise psychologique de ce fait. Une boite où il ne fait pas bon travailler tant qu’il est aux affaires.
      @mad_meg moi je veux bien

    • #MeToo : le patron d’une maison d’édition mis en cause

      Mediapart a recueilli de nombreux documents et les témoignages d’une vingtaine de femmes ayant un jour croisé la route de Stéphane Marsan, patron des éditions Bragelonne, spécialisées dans les littératures de l’imaginaire. Autrices, éditrices, étudiantes, traductrices ou stagiaires… Toutes font part de remarques et de gestes inappropriés, à connotation sexuelle, dans un cadre professionnel.

      Stéphane Marsan est bien connu dans le petit monde des littératures de l’imaginaire. Président et cofondateur, au tout début des années 2000, des éditions Bragelonne, devenues l’une des plus importantes maisons du secteur, il est présenté dans la presse comme « l’une des personnes qui a marqué le plus l’édition de la fantasy et de la science-fiction depuis une vingtaine d’années ». Mais derrière la vitrine Bragelonne et la renommée professionnelle de son patron, se cache une autre réalité.

      Une réalité que l’autrice Audrey Alwett, publiée dans une autre maison d’édition, résume en ces termes à Mediapart : « J’ai toujours eu des réticences à tenter ma chance chez Bragelonne, bien que ce soit la seule maison de l’imaginaire qui puisse vous faire monter, parce qu’on m’a prévenue très tôt des problèmes qu’il y avait avec les femmes. On en parle souvent entre collègues et on essaye autant que possible de mettre en garde les jeunes autrices. »

      Pendant plusieurs mois, Mediapart a recueilli de nombreux documents et les témoignages d’une vingtaine d’autrices, éditrices, attachées de presse, salariées, étudiantes, traductrices ou stagiaires ayant un jour croisé la route de Stéphane Marsan (lire notre Boîte noire). Ils révèlent des remarques et des gestes inappropriés, à connotation sexuelle, dans un cadre professionnel, ou un environnement de travail que certain·e·s retrouvaient déjà derrière le hashtag #brevedebrage, compilant sur les réseaux sociaux des choses entendues au sein de la maison d’édition. Son patron en avait publié plusieurs sur son propre compte Twitter, @stephanemarsan, supprimé entre le dimanche 18 et le lundi 19 avril, après l’envoi de notre demande d’entretien.

      Contacté à plusieurs reprises par courriel, par message et par téléphone, l’éditeur n’a pas donné suite (lire notre Boîte noire).

      Toutes nos interlocutrices nous ont décrit la façon dont elles se sont senties prises au piège d’un système mélangeant intérêts professionnels et sentiment d’emprise personnelle, qui aurait perduré durant des années, sans que personne ne le dénonce ouvertement. « Les femmes du milieu se le disent : Marsan se servirait de sa position professionnelle pour rechercher des faveurs sexuelles auprès de femmes, auteures ou autres, explique une autrice sous le couvert de l’anonymat. C’est avec le mouvement #MeToo que j’ai réalisé qu’il était important d’en parler. »

      À ces témoignages sont venus s’ajouter ceux d’hommes gravitant eux aussi dans le milieu de la fantasy. Celui du bibliothécaire Samuel L., un fan du genre, qui a passé quelques soirées avec Stéphane Marsan au festival des Utopiales, à Nantes (Loire-Atlantique), et affirme avoir observé un comportement « déplacé » avec des femmes. Il le décrit à Mediapart comme étant « très tactile ». Celui de l’auteur Nabil Ouali, qui n’a fréquenté l’édition que quelques années et dit avoir été frappé par « l’omerta » qui y règne. « On m’a parlé de Stéphane Marsan dès mes premiers salons », à propos de son rapport supposé aux femmes, assure-t-il.

      L’autrice Catherine Dufour, qui a entretenu une relation amicale pendant quelques années avec le patron de Bragelonne, n’a, elle non plus, jamais pu vérifier l’exactitude des histoires qui lui revenaient aux oreilles. En revanche, elle explique avoir commencé à « se méfier » un soir de fête, dans un bar du Xe arrondissement de Paris. « On dansait et il m’a mis la main aux fesses. J’ai remonté sa main, pensant à une erreur. Il s’est mis à me repeloter les fesses et je l’ai repoussé, pensant qu’il avait bu un coup de trop », se souvient l’autrice, qui a cessé toute relation avec Stéphane Marsan quelques années plus tard. Un épisode corroboré par une amie présente ce soir-là et interrogée par Mediapart.

      Deux anciennes salariées de la maison d’édition nous ont également rapporté ce que l’une d’entre elles qualifie de « mains baladeuses sur la taille », observées « à l’occasion de soirées ». « Des gestes exécutés en public, sans gêne apparente de sa part, témoigne Charlotte Oehler, une ex-assistante d’édition. J’avais l’impression que c’était un fait notoire et admis. Sur le coup, quand cela m’est arrivé, j’étais surprise et gênée. Je me souviens avoir essayé de me dégager, mais ça n’a pas été insistant non plus. » La jeune femme s’en est ouverte à une autrice, qui nous l’a confirmé.

      Sophie*, qui a travaillé pendant un an au service de presse de Bragelonne, en contrat d’alternance, dit aussi s’être sentie « super mal à l’aise » le 16 juin 2016, pendant la soirée du « Prix des lectrices ». La jeune femme – elle est alors âgée de 24 ans – affirme que ce soir-là, exceptionnellement, elle portait une robe et était maquillée.

      Selon son récit, Stéphane Marsan se serait approché d’elle et lui aurait dit, en glissant sa main « en bas de [son] dos, jusqu’au niveau des fesses », qu’elle était très belle. « J’étais interdite. J’ai essayé de l’éviter tout le reste de la soirée », ajoute-t-elle. Quelques semaines plus tard, elle en parle à sa supérieure hiérarchique, en congé pendant tout l’été. Cette dernière confirme à Mediapart avoir été informée par Sophie de ce qu’il s’était passé et avoir ainsi compris pourquoi elle avait trouvé la jeune femme si « différente » lors de la soirée. Elle explique comment son apprentie, d’ordinaire si « discrète », était venue se « coller » à elle, alors qu’elle parlait à des journalistes.

      La supérieure évoque également des échanges de courriels. Comme celui du 20 juillet 2016, date à laquelle Sophie soumet à Stéphane Marsan une demande d’interview qu’il accepte, en précisant qu’il est « déjà en retard sur plusieurs itw » et qu’il sera sans doute nécessaire de le relancer. Au milieu de cet échange, il écrit aussi : « Prépare-toi à venir t’asseoir sur mon bureau pour m’y obliger » [à répondre aux questions]. Alors qu’il avait été question qu’elle signe un CDI chez Bragelonne, Sophie a finalement quitté la maison d’édition au terme de son contrat en alternance.

      En 2014, Violaine*, aujourd’hui salariée d’une petite maison d’édition, a 25 ans lorsqu’elle entre en contact avec Stéphane Marsan via LinkedIn. À la recherche d’un boulot dans l’édition, elle traverse, comme beaucoup dans le milieu, « les galères du début ». « Bragelonne, c’était le rêve pour moi », dit-elle. Alors quand le patron de la maison d’édition lui écrit spontanément pour lui proposer « un verre en fin de journée », elle prépare cette rencontre comme un entretien d’embauche. Mais elle finira par se sentir mal à l’aise. Le rendez-vous se serait prolongé au restaurant par un dîner arrosé. « J’étais partagée entre le fait que je ne le sentais pas trop et l’idée que c’était peut-être la chance de ma vie », explique-t-elle.

      Selon son récit, le patron de Bragelonne lui aurait proposé avec insistance un dernier verre chez lui. « J’arrive à partir et pendant quelques jours, je me sens un peu honteuse, je ne comprends pas ce que j’ai vécu », raconte Violaine. S’ensuit une proposition de pige professionnelle, comme un essai. Dans des échanges LinkedIn que Mediapart a pu consulter, Stéphane Marsan lui promet en effet de lui envoyer prochainement un texte de l’un de ses auteurs pour relecture. Il ajoute dans un message : « Je te donnerai rendez-vous en un lieu mystérieux et redoutable (genre la place Maubert) pour que tu m’en parles. »

      Violaine raconte ensuite qu’elle a travaillé sur ce manuscrit, sans facture, sans contrat, et sans réponse à ses demandes de retour. Selon son récit, à ses messages d’ordre professionnel, il aurait répondu d’un ton badin. Elle affirme aussi qu’au bout de quelques semaines, Stéphane Marsan lui aurait dit de laisser tomber, sans autre explication. L’éditrice ne comprend pas ce qui se passe. Elle se dit constamment que tout est de sa faute, qu’elle est « nulle ».
      « Je t’invite à mesurer les conséquences de tes errements sur le cours de ta carrière »

      Ce sentiment d’avoir tutoyé les étoiles avant d’être subitement et violemment rabaissée traverse tous les témoignages que Mediapart a recueillis. L’autrice Samantha Bailly, ancienne présidente de la Ligue des auteurs professionnels, en a fait l’expérience de 2012 à 2017, en publiant ses premiers romans chez Bragelonne. « Au départ, cela avait tout du conte de fées. Stéphane Marsan ne tarissait jamais d’éloges sur mes livres, ni à mon sujet d’ailleurs, raconte-t-elle. Quand il parlait de ses collaboratrices, que ce soit des autrices ou des salariées, il y avait toujours la petite remarque sur le physique qui allait avec... Cela me mettait mal à l’aise. »

      Mais à l’époque, l’autrice se dit que ces remarques « vont avec le personnage ». Certes, certaines personnes lui conseillent de « faire attention », mais rien de plus. Puis, poursuit-elle, « les salariées, de jeunes femmes de mon âge, se sont ouvertes à moi sur ses comportements déplacés ». Deux d’entre elles ont témoigné dans cette enquête. « Des crises de colère. Des avances voilées… ou non. Des comportements changeants. Cette ambiance étrange commençait à m’inquiéter », raconte encore Samantha Bailly. D’autant plus que Bragelonne cherche à avoir l’exclusivité sur ses parutions. Une situation délicate pour une jeune plume vivant seule à Paris, dans un 14 m2, et dépendant uniquement de ses revenus d’autrice.

      Son trouble s’accroît au fil du temps. « En 2014, au salon du livre de Genève, je l’ai entendu dire à une jeune femme : “Tu sais, les contrats d’auteur, ça se négocie dans la chambre.” À partir de ce moment, j’ai été glacée. Je me souviens être allée pleurer aux toilettes. » Samantha Bailly se souvient aussi d’un courriel, que Mediapart a pu consulter, ayant pour objet « Amour et préface ». Stéphane Marsan y écrivait notamment : « Alors que nous discutions, hier, debout près de mon bureau (très joli chemisier by the way), je te regardais et j’ai pensé que c’était quand même miraculeux de se trouver un jour, comme ça, à discuter de la couv de ton roman. »

      Le « conte de fées » vire bientôt au « cauchemar », selon l’expression de Samantha Bailly. En juin 2014, l’autrice est approchée par une plus grande maison d’édition, pour une publication en poche de son texte Les Stagiaires, mais Stéphane Marsan lui répond vouloir le rééditer dans ce format chez Bragelonne, par souci de « cohérence ». Un an plus tard, il lui annonce l’annulation du projet. « J’avais décidé de maintenir cette parution pour te faire plaisir, lui écrit-il le 11 mai 2015, dans un courriel consulté par Mediapart. Mais un événement récent a changé mon point de vue. On nous a rapporté que tu tenais en public des propos désagréables sur Bragelonne et moi-même. J’accepte la critique mais pas la calomnie ni le colportage de ragots sur la vie personnelle. »

      Il ajoute cette phrase, qui inquiète l’autrice : « Tu sais l’estime que j’ai pour toi et ton talent, et je t’invite à mesurer les conséquences de tes errements sur le cours de ta carrière, sur le travail des équipes dédiées à tes ouvrages, ainsi que sur l’image que tu donnes de toi dans la profession. »

      Samantha Bailly laisse à son agent littéraire le soin de récupérer ses droits. Mais « face à l’échec des négociations », elle répond directement à Stéphane Marsan le 3 décembre 2015. Elle met fin à leur collaboration professionnelle. Interrogé là aussi sur ce point précis, l’éditeur n’a pas donné suite.

      Des histoires de collaborations brutalement interrompues, Mediapart en a recueilli plusieurs au cours de son enquête. C’est notamment l’histoire de Julie*, qui a collaboré avec le patron de Bragelonne pendant plusieurs années. D’après son témoignage, tous deux ont été très proches, jusqu’au jour où elle a émis des réserves sur son comportement avec les femmes. « Ce qui m’avait le plus blessée à l’époque où on s’était fâchés, c’était que tout ce qu’il avait tellement aimé chez moi au niveau écriture semblait être devenu de la merde à ses yeux, dit-elle. Après cela, j’ai eu des doutes terribles sur mon talent, ma valeur en tant qu’autrice, j’ai même failli arrêter d’écrire. »

      Éléonore*, qui a travaillé trois ans comme attachée de presse pour Bragelonne, a quant à elle été virée du jour au lendemain pour des raisons qu’elle juge « obscures », après avoir dit à Stéphane Marsan qu’elle trouvait qu’« il ne se comportait pas bien » vis-à-vis d’une collègue avec laquelle il entretenait une relation personnelle aussi officieuse que houleuse. Elle a poursuivi les éditions Bragelonne devant les prud’hommes en 2014, mais n’a pas obtenu les indemnités financières qu’elle demandait.

      Des années plus tard, elle le décrit comme « un homme autoritaire et séducteur, ayant du pouvoir et s’en servant ». Pour étayer ses propos, elle a retrouvé des courriels. Dans l’un d’eux, son patron de l’époque lui parlait en ces termes d’une autrice qu’il souhaitait ajouter à son catalogue : « Ah Myriam* truc, j’aimerais beaucoup la rencontrer aussi pour lui faire des propositions scandaleuses, tu t’en doutes bien… en fait, nous porter candidat pour des reprises poche de ses titres grand format. »

      Il y avait aussi les « soufflantes », pour reprendre une expression employée par Stéphane Marsan dans l’un de ses échanges avec Samantha Bailly. Des colères exprimées par courriel ou dans l’open space, que certains, ou plus exactement certaines, car ce sont surtout des femmes qui en étaient victimes, appelaient en interne « les Marsannades ».

      Il est un autre cadre dans lequel le comportement du patron de Bragelonne a suscité a minima une gêne. Tous les ans, le festival Les Imaginales, à Épinal (Vosges), organise un speed dating pour mettre en relation des aspirant·e·s auteurs et autrices avec des éditeurs de fantasy. Le patron de Bragelonne est un habitué de l’exercice.

      Mediapart a consulté un courriel envoyé, en date du 9 mai 2019, par une organisatrice du speed dating aux futures participant·e·s, dans lequel il est écrit : « Certains éditeurs sont très demandés : Bragelonne attire beaucoup, par exemple, mais sachez que Stéphane Marsan, le saint patron, est prêt à vous écouter pitcher votre roman le samedi si vous lui offrez une bière. » Stéphanie Nicot, la directrice artistique des Imaginales, dit qu’elle ignorait tout de cette pratique. En revanche, il y a quelques années, elle a été alertée sur un « comportement inapproprié » de l’éditeur : elle raconte en effet que des organisatrices du speed dating lui avaient rapporté qu’il prenait la main de jeunes autrices en train de « pitcher » leur roman.

      Jugeant ce comportement « inacceptable », Stéphanie Nicot assure avoir pris des mesures en plaçant Stéphane Marsan « à la première table » des speed dating. « On l’a mis devant pour le garder à l’œil », dit-elle. Le directeur du festival, Stéphane Wieser, indique de son côté avoir été « vigilant ». « On a toléré, les unes et les autres, beaucoup trop de choses », regrette aujourd’hui Stéphanie Nicot, en évoquant le « sexisme systémique » qui règne aussi dans l’édition. « On se demande tous si on aurait dû réagir plus tôt. »
      « Parler avec des jeunes auteures ravissantes fait partie de mon boulot »

      Jeanne* a participé au speed dating en 2019. Son premier échange avec Stéphane Marsan aurait duré une dizaine de minutes, juste le temps de « pitcher » son premier roman encore au stade du manuscrit. Il aurait alors dit qu’elle était « jolie ». Jeanne raconte avoir accepté sa proposition de se voir à Paris pour un déjeuner, malgré un comportement qu’elle juge « un peu paternaliste ». Le rendez-vous est fixé quelques jours plus tard. Et Jeanne tombe de haut. Selon son récit, il lui aurait alors parlé de sa vie sentimentale et de ses préférences amoureuses. « Il disait aussi aimer les femmes intelligentes, avec de l’éloquence, et il a ajouté : “Comme vous.” »

      Selon son témoignage, l’éditeur aurait demandé à Jeanne si elle avait un petit ami, glissé dans la conversation qu’il n’habitait pas très loin. Au cours de ce déjeuner, elle se souvient qu’il l’avait appelée « Cendrillon » lorsqu’elle lui avait expliqué devoir s’éclipser. Dans un échange de messages Facebook du 19 juin 2019, que Mediapart a pu consulter, il l’affuble du sobriquet « Souris Intelligente ». Sur un ton professionnel, elle lui indique vouloir « négocier le sobriquet ». Réponse de Stéphane Marsan : « Encore des conditions ! »

      Au deuxième déjeuner, « même ton de badinage, de flirt ». « J’avais tellement l’impression de rencontrer un date Tinder [une application de rencontres – ndlr] que j’ai essayé de remettre notre différence d’âge au centre de la discussion, explique-t-elle. Il parlait de la relation éditeur-auteur, il disait que c’était une relation très intime, qu’on allait partager des trains, des hôtels… » D’après elle, cela n’empêche pas Stéphane Marsan d’adopter un ton très professionnel quand il s’agit de parler du manuscrit. Tout en mêlant les registres. Ainsi, au détour d’un commentaire argumenté et élogieux sur son livre, il lui glisse dans un courriel envoyé le 24 juillet 2019, à 23 h 40 : « “Putain, elle est forte !” m’exclamai-je dedans mon lit. »

      Jeanne est alors en discussion avec d’autres maisons d’édition, plus généralistes. Mais Stéphane Marsan veut la publier. Un dernier rendez-vous est organisé au siège de Bragelonne. « On était restés tard. Il était environ 19 h 30, tout le monde était parti. Je ne me sentais pas très à l’aise, rapporte-t-elle. Il était pressant pour que je signe le contrat. Il m’a dit : “Je devrais vous obliger à signer ici et maintenant. Mais je ne le ferai pas parce que je souhaite bien me comporter avec vous.” »

      En sortant de ce rendez-vous, le 14 août 2019, à 20 h 32, la jeune femme reçoit un SMS de celui qu’elle vient de quitter. Elle y lit trois phrases qui lui suffisent à tomber d’encore plus haut : « Vu miss nibs [seins – ndlr]. Haut blanc transparent sur un sous tif en dentelles. Ah ça pour négocier un contrat elle sait faire ! :) » Stéphane Marsan s’est manifestement trompé de destinataire. Il s’en excuse dans la foulée en lui envoyant plusieurs messages, dans lesquels il parle d’une « blague potache » et assure que « c’était évidemment ironique », mais il est trop tard.

      Jeanne se méfie et après quelques recherches sur Internet, elle trouve sur Facebook une photo où l’on voit l’éditeur discuter avec une femme. En commentaire, il a écrit : « Parler avec des jeunes auteures ravissantes fait partie de mon boulot et j’essaie d’être consciencieux… » L’autrice a finalement publié son manuscrit ailleurs.

      C’est aussi autour d’un speed dating des Imaginales que Betty Piccioli, secrétaire générale de la Ligue des auteurs professionnels, a rencontré Stéphane Marsan en 2015. Leur premier contact « reste très cordial ». L’éditeur retoque son projet d’écriture. Un an plus tard, au même festival, elle retente sa chance en allant l’aborder directement. Selon son témoignage, Betty Piccioli demande au patron de Bragelonne s’il se souvient d’elle, ce à quoi il aurait répondu : « Comment aurais-je pu oublier vos yeux ? »

      Gênée par cette remarque et avec le soleil tapant, la jeune femme affirme avoir mis ses lunettes de soleil. « À ce moment-là, il fixe avec insistance mon décolleté », rapporte-t-elle. « La gêne pour moi était vraiment forte, poursuit l’autrice. Dans ma tête, j’ai pensé : soit je me lève en lui foutant une claque, soit je ne dis rien et je pitche mon roman. J’ai choisi la seconde option parce que face à moi, j’avais l’éditeur de fantasy le plus inaccessible de toute la profession. »

      Le premier roman de Betty Piccioli est finalement publié en août 2018 chez Castelmore, la filiale jeunesse de Bragelonne, au terme de nombreuses « difficultés » – « contrat signé avec retard, changement d’éditrice… ». Un mois après la parution du livre, et malgré ses relances auprès du service comptabilité qui invoque des « problèmes de trésorerie » par courriel, l’autrice n’a toujours pas perçu la deuxième partie de son à-valoir – 1 000 euros brut. Elle décide de profiter du mouvement #PayeTonAuteur, qui dénonce les abus des maisons d’édition.

      Son témoignage arrive aux oreilles de Stéphane Marsan, qui la contacte immédiatement. Sur Facebook, il lui envoie plusieurs messages privés, dans lesquels il tente longuement de justifier ce retard de paiement, en lui expliquant le fonctionnement de Bragelonne et « les aléas du marché ». Au milieu, il glisse une phrase qui inquiète Betty Piccioli : « Je connais bien la profession, et d’autres éditeurs peuvent désormais considérer que tu es une chieuse et penser que s’ils te proposent un contrat, ils se feront allumer sur insta [Instagram – ndlr] un jour ou l’autre, parce que un jour ou l’autre, tout le monde a un accident, tout le monde fait une connerie, et alors ils n’auront pas envie de prendre ce risque. »

      Dès lors, Betty Piccioli s’est sentie « blacklistée par les équipes Bragelonne ». Ses doutes sur le comportement de Stéphane Marsan sont renforcés quelques mois plus tard. En janvier 2020, alors que l’affaire Gabriel Matzneff secoue l’édition française et questionne plus largement cette industrie dans son rapport aux femmes, l’autrice poste « un appel à témoignages sur Twitter » – effacé depuis –, sans citer nommément Stéphane Marsan. « Ça a été l’emballement », affirme-t-elle, en expliquant qu’à la suite de ce post, plusieurs personnes l’ont contactée, par messagerie privée, persuadées d’emblée qu’il s’agissait du patron de Bragelonne.

      C’est à ce moment-là qu’une enquête de France Info paraît : nous sommes en février 2020, et il est question d’un « poids lourd de l’édition dans la littérature de l’imaginaire ». Une personnalité « dont vous connaissez TOUS l’identité », avait à l’époque commenté Betty Piccioli, sur Twitter. Une personnalité qui avait été explicitement désignée sur un blog américain deux ans plus tôt.

      Les gens du milieu reconnaissent Stéphane Marsan derrière le témoignage de cette agente littéraire évoquant des « regards appuyés au point de [la] mettre mal à l’aise » lors d’une réunion de travail, et « en partant, un bras qui s’attarde un peu trop sur le sien, presque comme une caresse ». Comme ils nous l’ont rapporté par la suite, plusieurs d’entre eux avaient déjà entendu parler de cette autrice indiquant que l’éditeur lui avait « arraché » son tee-shirt pendant une soirée professionnelle. Et qui l’accusait d’avoir entravé sa carrière, après qu’elle lui avait reproché son comportement « abject ».

      Mediapart a vérifié l’existence de ces témoignages. C’est parce qu’ils ont été livrés de façon anonyme, sans que le nom de Stéphane Marsan ne soit jamais révélé, que d’autres femmes, mais aussi des hommes, ont voulu prendre la parole. Pour qu’il cesse d’« abuser de son pouvoir », selon l’expression de Betty Piccioli. « Il faut que ça se sache », estime Violaine. « Le milieu est tellement précaire que se faire blacklister par un leader économique et communicationnel comme Stéphane Marsan est la dernière chose dont on a envie », conclut Nabil Ouali. Celles qui ont franchi le pas ont d’ailleurs toutes fait part de « la peur » qui les a saisies au moment de le faire.

      D’autres ont déjà contacté le compte Instagram @balancetonediteur, animé depuis le 5 avril, par des personnes ayant travaillé ou travaillant encore dans le milieu de l’édition. « Au fil de nos années d’expérience dans ce milieu, nous avons subi ou été témoins de nombreux comportements déplacés, discriminants ou humiliants », raconte le collectif, qui souhaite susciter « une prise de conscience ». En quelques semaines, il aurait déjà recueilli plusieurs témoignages visant Stéphane Marsan.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/210421/metoo-le-patron-d-une-maison-d-edition-mis-en-cause?onglet=full

  • LSD, La série documentaire
    Vivre sans sexualité
    Épisode 4 : Sortir de la sexualité, un acte politique
    https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/vivre-sans-sexualite-44-sortir-de-la-sexualite-un-acte-politique


    https://cdn.radiofrance.fr/s3/cruiser-production/2021/04/af1170f9-d714-498a-84c1-93f33c43cc51/838_gettyimages-1299784442.webp

    Les rapports de domination dans le couple et dans la sexualité posent la question de la compatibilité du féminisme et de l’hétérosexualité.
    De Madeleine Pelletier qui prônait la chasteté politique à Virginie Despentes, en passant par Monique Wittig, la question de la compatibilité du féminisme avec l’hétérosexualité n’a jamais complètement cessé de se poser.

    Et elle se pose d’autant plus actuellement car depuis #MeToo, nombreuses sont les femmes qui se sentent dans l’impossibilité de continuer à entretenir une relation hétéronormatives. Certaines arrêtent momentanément tous rapports, d’autres ont juste exclu la pénétration. D’autres encore veulent remettre en question l’hétérosexualité en tant que régime politique et non en tant que simple orientation.

    #féminisme #sexualité #asexualité (pas encore écouté)

  • Wenn Ärzte ihre Patientinnen missbrauchen

    Janine Fiedler wurde von ihrem Arzt sexuell missbraucht. Trotzdem darf er jahrelang weiter arbeiten. Die Behörden stoppen ihn nicht, das Problem hat System.

    Als der Hausarzt Mark Johnson an einem Tag im Dezember 2015 vom Amtsgericht Berlin wegen sexuellen Missbrauchs an zwei Patientinnen verurteilt wird, schaut er Janine Fiedler direkt in die Augen. Eigentlich dürfte Fiedler gar nicht hier sein. Eigentlich hätte der Arzt längst gestoppt werden müssen.

    Doktor Mark Johnson war den Berliner Behörden seit Jahren bekannt, seinen Namen haben wir ebenso wie den von Janine Fiedler geändert.

    Über fünf Jahre gingen Frauen immer wieder zur Polizei und erzählten ähnliche Geschichten über Johnson: Dass ihr Arzt sie belästigt habe und sie unter dem Slip und an den Brüsten angefasst habe. Vier von ihnen waren minderjährig. Ein Fall wurde vor dem Amtsgericht verhandelt, auch die Ärztekammer wusste Bescheid.

    „Es scheinen jedoch keine Konsequenzen daraus gezogen worden zu sein, sodass Herr Johnson die Tathandlungen fortführt“, steht in einem Polizeibericht.

    Im Herbst 2014 sagt eine weitere Teenagerin bei der Polizei aus. Johnson, so sagt sie, habe sie während der Behandlung sexuell missbraucht. Acht Wochen später steht das LKA mit einem Durchsuchungsbeschluss in der Praxis. Die Ärztekammer erteilt eine Rüge und Johnson muss 5000 Euro an eine gemeinnützige Einrichtung zahlen.

    Danach darf Johnson weiter praktizieren.

    Und so führt Mark Johnson an einem Tag im Mai 2015 die Hand in den Intimbereich von Fiedler, einer 20-Jährigen, die zu diesem Zeitpunkt akut suizidgefährdet ist und unter starken Psychopharmaka steht. Nach diesem Vorfall wird Johnson erstmals verurteilt. Und erst Mitte 2018, drei Jahre nach der Tat, fast ein Jahrzehnt nach den ersten Vorwürfen, verliert der endgültig Arzt seine Zulassung.

    Auf eine schriftliche Bitte um Stellungnahme zu den Straftaten und Vorwürfen hat Mark Johnson bis zum Redaktionsschluss nicht reagiert.
    Trotz der #MeToo-Bewegung: Missbrauch im Medizinbetrieb liegt im Dunkelfeld

    Über Monate haben vier Reporterinnen für BuzzFeed News Deutschland, IPPEN.MEDIA und weitere europäische Medien zu sexualisiertem Missbrauch im Medizinbetrieb recherchiert.

    Wir haben mit zahlreichen Betroffenen und Expert:innen gesprochen, mit Rechtsanwältinnen und Psychotherapeuten. Wir haben dutzende Behörden in ganz Deutschland kontaktiert, etliche Medienberichte und dutzende Gerichtsurteile analysiert und eine Umfrage ausgewertet, in der uns 140 Personen von Grenzverletzungen und Missbrauchserfahrungen erzählt haben. Das Ergebnis ist die erste umfassende Recherche im Dunkelfeld „Missbrauch im Medizinbetrieb“.

    Die Opfer sind Studierende und Rentnerinnen, Akademikerinnen und Auszubildende. Sie waren bei Zahnärzten, Physiotherapeuten, Allgemeinärzten und Psychotherapeuten. Ihre Erlebnisse unterscheiden sich, aber eines haben sie gemeinsam: Sie alle haben erlebt, wie schwer es für Patient:innen ist, Hilfe zu finden, wenn sie von ihren Ärzten missbraucht wurden.

    Unsere Recherchen zeigen, dass Ärzte immer wieder geringe Strafen erhalten, selten verurteilt werden und oft weiter praktizieren dürfen. Die Recherchen zeigen auch, dass Behörden versagen, weil sie aufeinander warten, statt zu handeln. Und dass sich an diesem strukturellen Problem seit Jahren fast nichts ändert.

    Das Dunkelfeld ist riesig.

    Wie häufig es hinter geschlossenen Türen zu Missbrauch kommt, weiß niemand. Es gibt keine umfassende Studie dazu. Fragt man nach Zahlen zu dem Thema, verweisen Behörden und Fachstellen auf eine Untersuchung im Auftrag des Familienministeriums, die ein Vierteljahrhundert alt ist und sich nur auf Psychotherapeut:innen und nicht auf die gesamte Ärzteschaft bezieht. In den vergangenen zehn Jahren verloren nur einige dutzend Ärzte deshalb ihre Approbation. „Das Dunkelfeld ist riesig”, sagt der Schweizer Psychiater Werner Tschan, der sich als einer der wenigen seit Jahrzehnten mit dem Thema beschäftigt.

    Allein durch eine Recherche in Archiven deutscher Medien haben wir Berichte zu fast 100 öffentlich gewordenen Missbrauchsfällen durch Ärzte und Therapeuten seit 2008 gefunden. Der Ethikverein, der Missbrauchsvorwürfe aus dem Bereich Psychotherapie sammelt, registriert 350 Hinweise im Jahr, in jedem vierten Fall geht es um sexualisierte Gewalt gegen Patient:innen. Und der Ombudsmann für Fälle von Missbrauch in ärztlichen Behandlungen in Hessen, Meinhard Korte, hat in den vergangenen Jahren über 500 Meldungen aus ganz Deutschland erhalten – rund 80 davon seien „gravierende Fälle” von Missbrauch, sagt er, also von Körperverletzungen oder sexualisierter Gewalt.

    Die Fälle sind besonders schwer nachzuweisen, die Unsicherheit und die Scham bei Betroffenen groß. Wenige der Täter erhalten lange Haftstrafen. Viele werden mit Geldstrafen oder auf Bewährung bestraft und können weiter praktizieren. Andere kommen über Jahre oder Jahrzehnte ganz ohne Strafe davon.

    Warum schaut Deutschland nicht besser hin, wenn Ärzte ihre Patient:innen missbrauchen? Wie sehr sind sie geschützt vom Mythos der „Götter in weiß”?

    Es ist ein sonniger Tag im Februar, Janine Fiedler spielt mit ihrer kleinen Tochter auf einem Spielplatz, nur wenige Bushaltestellen von der ehemaligen Praxis von Mark Johnson entfernt. „Halloooooo“, ruft das kleine Mädchen und steckt den Kopf aus einem Spielhaus. Von außen betrachtet sieht das Leben der jungen Frau harmonisch aus, doch bis heute denkt Fiedler täglich an ihren ehemaligen Arzt und an das Gefühl der Ausweglosigkeit, das die jahrelangen Auseinandersetzungen mit Behörden bei ihr hinterlassen haben. Noch heute ist sie in Therapie. Sie habe versucht, sich mit Tabletten das Leben zu nehmen. „Ich konnte nicht mehr.“

    Als Fiedler 2015 zu Mark Johnson in die Praxis geht, kommt sie gerade aus einer psychiatrischen Klinik, braucht dringend einen Therapieplatz. Sie hat Bauchschmerzen, Krampfanfälle. Fiedler fühlt sich allein, sucht einen Anker. Der Arzt verspricht, ihr zu helfen. „Er war für mich damals die einzige Bezugsperson“, sagt Fiedler, „Ich dachte, ich will mich umbringen. Aber wenn er mir jetzt hilft, lebe ich weiter. Ich habe die ganze Hoffnung an ihn geknüpft.“ Der Arzt hört sich ihre Probleme an, wechselt und erhöht die Dosis ihrer Psychopharmaka. Die Nebenwirkungen sind so stark, dass Fiedler daneben gießt, wenn sie sich ein Glas Wasser einschenkt. Sie wird aggressiv, hat Konzentrationsstörungen.

    Er hatte die Kontrolle über mich.

    In der Praxis gibt der Arzt ihr „Entspannungsmassagen“, schreibt ihr private Nachrichten auf ihr Handy. Er habe immer wieder gesagt, das sei normal, er mache dies auch bei anderen Patientinnen, erinnert sich Fiedler. „Ich habe die ganze Zeit gespürt, dass irgendwas nicht stimmt.“ Doch sie hat Angst, dass ihr niemand mit den psychischen Problemen helfen kann. Bei den Terminen spricht Mark Johnson mit ihr und berührt sie. „Es hat sich gesteigert“, sagt Fiedler, von Mal zu Mal. „Er hat ausprobiert wie weit er gehen kann. Er hatte die Kontrolle über mich.“ Erst berührt er die junge Frau am Rücken und Bauch, dann an den Brüsten, an den Beinen. „Ich hatte immer wieder die Hoffnung, dass es doch nicht das ist, was ich denke“, sagt Fiedler. Schließlich berührt er sie mit den Fingern an der Vagina, obwohl sie die Beine zusammengedrückt habe, in dem Versuch, sich zu wehren. Die Taten wird der Arzt vor Gericht und bei der Ärztekammer später teilweise zugeben, dann wieder bestreiten.

    Danach geht die junge Frau nie wieder in die Praxis, aber der Schaden ist nicht mehr rückgängig zu machen. Einen Monat später geht sie zur Polizei, macht eine Aussage. Was sie noch nicht weiß: Sie ist nicht die einzige. Und Mark Johnson führt die Behörden seit Jahren an der Nase herum.
    Wie vertrauenswürdig ist ein Arzt, der Frauen nicht mehr ohne Aufsicht behandeln darf?

    Bereits 2009 ging eine Patientin von Johnson zur Polizei und sagte, der Arzt habe während der Untersuchung einen Finger in sie eingeführt, was Johnson abstreitet. Sie ist eine von insgesamt sieben Frauen, die wie Fiedler bei der Polizei gegen den Arzt ausgesagt haben, von „Massagen” erzählt haben, von Berührungen an der Brust und im Intimbereich. Das geht aus Gerichtsakten hervor.

    Der Arzt streitet alles ab, drei Ermittlungsverfahren werden eingestellt – teils, weil die Beweise fehlen, teils, weil die Taten verjährt sind. Nur in einem Fall kommt es zu einer Anklage, weil der Arzt einer Patientin über die Brustwarzen gestrichen haben soll, zweimal soll er mit einem Finger zwischen ihren Schamlippen entlang gestrichen und dabei auch die Klitoris berührt haben. Der Arzt entschuldigt sich: „Es tut mir sehr leid. Es kommt nie wieder vor.“ Sein Mandant sei davon ausgegangen, er habe sich nicht strafbar gemacht, verliest der Anwalt. Die Frau erhält 2000 Euro, der Arzt muss weitere 2000 Euro an die Staatskasse zahlen. Dann wird die Akte geschlossen.

    Auch bei der Ärztekammer läuft in der Zeit bereits ein Verfahren wegen fünf mutmaßlicher Übergriffe. Der Untersuchungsführer hält die Frauen für glaubwürdig. Mark Johnson gibt eine Bedauernserklärung ab, die als Geständnis gewertet wird. Die Ärztekammer verzichtet darauf, vor ein Berufsgericht zu gehen, das dem Arzt verbieten könnte, weiter zu praktizieren – auch, weil er sich verpflichtet, Patientinnen nicht mehr alleine zu untersuchen.

    Wie vertrauenswürdig ist ein Arzt, der Frauen nicht mehr ohne Aufsicht behandeln darf? Was dubios klingt, ist eine Maßnahme, die in Missbrauchsfällen immer wieder angewendet wird. 2003 etwa verurteilte das Landgericht Köln einen Neurologen, drei Jahre lang keine Frauen mehr zu behandeln. Auch ein weltbekannter HIV-Arzt verpflichtete sich 2013, Patienten nur noch in Anwesenheit einer dritten Person zu untersuchen – diesen April wird er wegen Missbrauchsvorwürfen vor Gericht stehen, angeklagt in fünf Fällen. BuzzFeed News hatte ausführlich über den Fall berichtet.

    Kontrolliert werden diese Maßnahmen nicht. „Die Ärztekammer Berlin kann ihre Kammermitglieder jedoch nicht zur Abgabe solcher Zusicherungen verpflichten und demgemäß auch nicht deren Einhaltung überwachen oder durchsetzen“, heißt es auf Anfrage.

    Im Fall von Mark Johnson spricht die Berliner Ärztekammer 2014 eine Rüge aus und er muss 5000 Euro an eine gemeinnützige Einrichtung zahlen. Der Arzt kann weiter arbeiten.

    Fünf Monate später missbraucht er die damals 20-jährige Janine Fiedler auf seiner Arztliege.

    „Wo bleibt die Gerechtigkeit?“

    Als sich Johnson schließlich vor dem Amtsgericht Berlin für die Übergriffe gegen Fiedler und eine weitere Patientin verantworten muss, räumt er die Taten gegen Fiedler grundsätzlich ein und zeigt sich reumütig, sagt aber auch, dass er ihr nicht in den Slip gefasst habe. Er habe Eheprobleme, müsse Unterhalt für seine Kinder zahlen. Das Gericht glaubt, durch das Geständnis werde Johnson Konsequenzen durch die medizinischen Behörden erfahren und nicht weiter arbeiten können und entscheidet sich auch deshalb für ein mildes Urteil: Er wird zu einer Geldstrafe von knapp 15.000 Euro verurteilt.

    Mehr als ein halbes Jahr, nachdem das Urteil rechtskräftig geworden ist, sieht die Mutter von Janine Fiedler, dass die Praxis von Mark Johnson noch geöffnet ist. Sie schreibt mehrere Briefe an die zuständigen Behörden. Sie fragt: „Weshalb wird der Täter weiterhin verschont und kann so weiterleben, als wäre nichts geschehen?“ Und: „Wo bleibt die Gerechtigkeit?“

    Auf die Betroffenen wirkt es, als passiere gar nichts. Antworten auf ihre Fragen erhält Fiedlers Mutter nicht, aus datenschutzrechtlichen Gründen, heißt es in einem Brief der Behörde.

    Ärztekammern oder Approbationsbehörden dürfen grundsätzlich so gut wie keine personenbezogenen Daten über ihre Mitglieder herausgeben, weder an die Presse, noch an Betroffene. Die Betroffenen erfahren nicht, ob es weitere Opfer gibt, ob ein Beschuldigter zu den Vorwürfen angehört wird, ob er überhaupt eine Strafe erhält. Viele der Opfer haben uns erzählt, das habe ihre Ohnmachtsgefühle noch verstärkt. Die Bundesärztekammer schreibt auf Anfrage, dass die jeweiligen Landesregierungen dafür zuständig wären, dies zu ändern.

    Was Fiedler und ihre Mutter zu diesem Zeitpunkt nicht wissen: Nach dem Urteil widerruft Mark Johnson sein Geständnis, geht in Berufung. Den Behörden sagt Doktor Johnson zu, seine Praxis zu verkaufen, zieht diese Zusage jedoch wenig später wieder zurück. Als die zuständige Behörde endlich entscheidet, dass er nicht mehr praktizieren darf, legt der Arzt Widerspruch ein. Das Verfahren, inzwischen vor einem Verwaltungsgericht, geht weiter. So kann er, fast zwei Jahre nachdem das Urteil im Fall Fiedler rechtskräftig wurde, noch immer Patient:innen behandeln. Erst im Juni 2018 verliert er seine Approbation.
    Die Folgen des Missbrauchs: Schlafprobleme, Albträume, Flashbacks

    Fiedler fühlt sich im Stich gelassen. Wütend sei sie gewesen, „auf den Staat, auf den Arzt“.

    Sie versucht, in einem Zivilverfahren Schadenersatz von Johnson zu bekommen, der letzte Versuch, sich gerecht behandelt zu fühlen. Doch auch in diesem Verfahren gibt der Arzt die Taten jetzt nicht mehr zu.

    Im Herbst 2017 wird die Belastung zu groß: Fiedler muss erneut in psychiatrische Behandlung in eine Klinik.

    Auch danach kämpft sie mit schweren Folgen. Beziehungen zu Menschen aus ihrem engsten Umfeld zerbrechen. Sie hat Schlafprobleme. Albträume. Panikattacken. Flashbacks. Bauch- und Magenschmerzen. Weinanfälle. Partnerschaftsprobleme. Essstörungen. Ekel vor Körpergerüchen. Ekel vor männlichem Atem. Angst vor bestimmten Männertypen. Angst, wenn männliche Ärzte sie berühren. Angst, den Arzt zu treffen. Angst, nach Jahren vor Gericht aussagen zu müssen und dass alles wieder hochkommt. Angst, dass man ihr nicht glaubt. Angst, dass der Arzt in dieser Zeit weitere Frauen und Mädchen belästigt hat.

    Und sie hat Schuldgefühle, dass sie Johnson nicht aufhalten konnte; dass sie erst nach einigen Woche Anzeige erstattete. Weil sie häufig krank ist, sei ihr Arbeitsvertrag nicht verlängert worden, sagt Fiedler. Sie ist lange Zeit arbeitsunfähig. Am Ende bleiben ihr 3500 Euro Schmerzensgeld. Davon habe sie ihre Rechnungen und mehrere Umzüge bezahlt, sagt Fiedler. Sie hat ständig das Gefühl, sie müsse flüchten. Bis heute.

    Mark Johnson ist weiterhin in Berlin gemeldet, sein Name steht an der Klingel eines unscheinbaren Mehrfamilienhauses. In seiner ehemaligen Praxis arbeitet mittlerweile eine andere Ärztin. Was der Mann heute macht, ist unklar. Theoretisch könne er nach einigen Jahren Wohlverhaltensphase seine Zulassung wieder beantragen, schreibt die zuständige Behörde aus Berlin.

    Wie konnte Mark Johnson über Jahre praktizieren, obwohl er immer wieder Patientinnen missbrauchte? Und wie viele Mark Johnsons gibt es in Deutschland?

    Ein komplexes System, das etliche Lücken und Schlupflöcher bietet

    „Die Ärztekammer wartet auf die strafrechtliche Verfolgung. Und die meisten Gerichte denken, die Kammer wird es schon machen“, sagt Christina Clemm. Sie ist Strafrechtsanwältin und vertritt seit 25 Jahren immer wieder Frauen, die von Ärzten missbraucht worden sind. „Das ist ein ungutes Zusammenspiel.“ Immer wieder beobachte sie, dass Verfahren sich über Jahre ziehen, ohne dass der Beschuldigte ernsthafte berufliche Konsequenzen erlebe.

    Das ist ein ungutes Zusammenspiel.

    Menschen, die zum Arzt gehen, suchen Hilfe, sie müssen ihrem Gegenüber vertrauen. Das Machtgefälle ist groß, der Beruf körpernah, der Betrieb hierarchisch. Der Bruch des ärztlichen Vertrauens hinterlässt tiefe Spuren, weil Menschen, die zu „den Guten“ gehören sollten, eine Notlage ausnutzen. Expert:innen sagen, dass der Missbrauch durch Ärzte für die Opfer oft so schwere psychische Folgen hat wie Kindesmissbrauch.

    Einige Betroffene, mit denen wir gesprochen haben, sind seit Jahren berufsunfähig. Sie haben posttraumatische Belastungsstörungen, mussten den Wohnort wechseln, kämpfen oft noch immer mit den körperlichen und psychischen Leiden, für die sie eigentlich Hilfe suchten. Sie sagen in Gesprächen, dass der Weg zur Presse ihre letzte Hoffnung auf Gerechtigkeit ist, weil sie im Kampf gegen Behörden verzweifeln. Sie weinen am Telefon. Weil ihre Ärzte und Therapeuten weitermachen können, während ihr Leben in Trümmern liegt.

    Warum können Behörden diesen Menschen nicht besser helfen?

    Wer versucht, zu verstehen, wie Gerichte und medizinische Behörden Missbrauch im Medizinbetrieb sanktionieren und bestrafen, stößt auf ein komplexes System, das etliche Lücken und Schlupflöcher bietet.

    Die Ärztekammern dürfen ermitteln, rügen und Bußgelder verhängen und können sehr schwere Fälle vor spezielle Berufsgerichte bringen. Schalten sich die Staatsanwaltschaften ein, um zu ermitteln, werden die Verfahren bei den Berufsgerichten ausgesetzt und es muss abgewartet werden. Einem Arzt das Praktizieren zu verbieten, können nur Gerichte. Die Zulassung widerrufen aber wiederum die Approbationsbehörden, die in der Regel bei den Sozialministerien angesiedelt sind. Wehren sich die Ärzte und Therapeuten dagegen, landen die Fälle bei den Verwaltungs- oder Zivilgerichten. Und ob Ärzte und Therapeuten weiter abrechnen können, verfügen die Kassenärztlichen Vereinigungen, auch hier können eigene Verfahren angestoßen werden. Die Details sind teilweise je nach Bundesland unterschiedlich geregelt.

    Das Prinzip ist: Viele Behörden können erst Entscheidungen treffen, nachdem andere Behörden Entscheidungen getroffen haben, wie im Fall von Janine Fiedler. Man kann viele Verordnungen, Heilberufsgesetze und Verwaltungsvorschriften nachschlagen. Verständlich ist das im Einzelfall, doch in der Menge ergeben sie ein kompliziertes Zusammenspiel, in dem die Opfer die Leidtragenden sind und teils jahrelang oder vergeblich auf Gerechtigkeit hoffen. Sie fühlen sich doppelt missbraucht: Erst von ihrem Arzt oder Therapeuten. Dann vom System. Die wenigsten Betroffenen wollen Rache. Viele wollen, dass anderen nicht dasselbe passiert wie ihnen.

    Betroffene können sich an die Heilberufekammern für Ärzt:innen und Psychotherapeut:innen wenden, die zuständig für die Berufsaufsicht sind. Oder sie gehen zur Polizei. In Deutschland gibt es, anders als in anderen Ländern, Regelungen im Strafrecht, wenn Ärzte ihre Patient:innen missbrauchen. Doch die Verjährungsfristen sind kurz, die Verfahren lang und die Strafen, wie auch sonst im Sexualstrafrecht, verhältnismäßig niedrig.

    Nach Angaben des Statistischen Bundesamtes kam es zwischen 2008 und 2019 zu insgesamt 235 Verurteilungen wegen „Sexuellem Missbrauch unter Ausnutzung eines Beratungs-, Behandlungs- oder Betreuungsverhältnisses“. Unter den Verurteilten sind Ärzte und ein dutzend Psychotherapeuten, aber etwa auch Pflegepersonal von Menschen mit Behinderung.

    Für die Berufszulassung von Ärzt:innen und Psychotherapeut:innen sind sogenannte Approbationsbehörden zuständig. Sie erteilen die Zulassungen und widerrufen oder pausieren sie bei Fehlverhalten. Selten geht es um Missbrauch, häufiger um Delikte wie Abrechnungsbetrug. Die Behörden widerrufen nur selten Zulassungen, weil das einen Eingriff in die Berufsfreiheit und damit in die Grundrechte bedeutet.

    Anfragen in allen 16 Bundesländern zeigen, dass 2019 in mindestens der Hälfte aller Bundesländer überhaupt keine Zulassung entzogen wurden. Seit 2008 bis Mitte 2020 wurden in Deutschland 48 Fälle erfasst, in denen Ärzten und Psychotherapeuten im Zusammenhang mit Sexualdelikten die Approbation widerrufen wurde. In rund einem Dutzend weiterer Fälle wurden die Zulassungen zeitweise ausgesetzt. Einige der Ärzte und Therapeuten haben die Zulassung freiwillig zurückgegeben, bevor sie bestraft oder sanktioniert wurden. Einzelfälle, heißt es unisono aus den Behörden. Ein Muster aber gibt es: Bei den Tätern handelt es sich ausschließlich um Männer.

    Da geht es um den Ehrverlust.

    So selten es geschieht, so häufig wehren sich Beschuldigte offenbar gegen die Maßnahmen. Ärzte und Psychotherapeuten können gegen den drohenden Approbationsentzug Widerspruch einlegen – und unterdessen meist weiter praktizieren. So wie Mark Johnson. „In der Regel wehren sich Ärzte mit Händen und Füßen durch alle Instanzen, selbst wenn die Rente kurz bevorsteht. Da geht es um den Ehrverlust“, sagt eine Mitarbeiterin einer Approbationsbehörde.

    Dass es einen Unterschied machen dürfte, ob Menschen aus den Behörden sich für das Thema interessieren, zeigt ein Blick nach Hessen und Nordrhein-Westfalen – hier werden wegen Sexualdelikten mehr Approbationen entzogen als anderswo, jeweils mehr als ein Dutzend seit 2008.

    Im Vorstand der Ärztekammer Nordrhein sitzt Dr. Christiane Groß, die sich seit Jahren mit dem Thema Missbrauch im Medizinbetrieb beschäftigt. „Bei sexuellen Handlungen im Behandlungsverhältnis sind wir ganz strikt, das geht ans Berufsgericht“, sagt sie. „Ich weiß aber leider nicht, wie die anderen Kammern das handhaben.“

    Nur wenige Fälle landen bei den Ärztekammern

    Die Bundesärztekammer vertritt mehr als eine halbe Million Ärzt:innen in ganz Deutschland, die Bundespsychotherapeutenkammer rund 50.000 Psychotherapeut:innen. Sie haben die Berufsaufsicht, sollen also verhindern, dass Ärzt:innen Schaden anrichten. Das kann man sich vorstellen wie bei einer Staatsanwaltschaft mit weniger Möglichkeiten: In den Kammern nehmen Ärzt:innen Beschwerden entgegen, spezialisierte Jurist:innen ermitteln und bewerten die Fälle. Die Idee ist, dass die Kammern fachlich am besten erkennen können, ob ein Mediziner einen Missbrauch etwa als Behandlungsmethode tarnt – zum Beispiel als therapeutische Massagen. Die Menschen, die hier sitzen, seien engagiert und nehmen die Vorwürfe ernst, hören wir immer wieder aus den Behörden.

    Aber das offizielle Beschwerdeverfahren ist sehr anspruchsvoll und hochschwellig.

    „Aber das offizielle Beschwerdeverfahren ist sehr anspruchsvoll und hochschwellig“, sagt Andrea Schleu,​ ​die Vorsitzende des Ethikvereins​, ​der vor allem Hilfe bei Grenzverletzungen und Missbrauch in der Psychotherapie bietet. Viele der Opfer seien geschädigt, traumatisiert. „Man muss die Vorgänge ausführlich und schriftlich abgeben, Namen nennen, Orte, Zeiten und Belege. Das schaffen viele nicht.“ Betroffene und Hilfesuchende aus verschiedenen medizinischen Bereichen landen deshalb oft nicht bei den zuständigen Behörden, sondern bei Schleu und den wenigen anderen Menschen in Deutschland, die seit Jahren versuchen, Hilfe gegen übergriffige Ärzte und Psychotherapeuten anzubieten.

    Wie selten es bei Beschwerden zu Konsequenzen kommt, kann man etwa in Berlin sehen. Hier gehen pro Jahr zwischen 1400 und 1500 Beschwerden über ärztliche Pflichtverletzungen ein, schreibt die Ärztekammer auf Anfrage. Die Anzahl der im Schnitt pro Jahr eingeleiteten, förmlichen Untersuchungsverfahren: Dreizehn. Berufsgerichtliche Verfahren: Fünf. Im vergangenen Jahrzehnt gingen rund 200 Beschwerden über missbräuliches Verhalten durch Ärztinnen oder Ärzte ein, schreibt die Kammer. In vielen dieser Fälle handele es sich um Wiederholungstäter.

    Insgesamt landen Fälle von sexualisierter Gewalt oder Übergriffen nur vereinzelt bei den Ärztekammern, ergeben bundesweite Anfragen. Schleswig-Holstein etwa führt keine Statistik über Fälle mit Verdacht auf sexuellen Missbrauch. Wieder andere, wie die Ärztekammer in Mecklenburg-Vorpommern, haben seit 2008 keinen einzigen Fall zu vermelden.

    Die Ärztekammern haben die Berufsaufsicht – aber nur begrenzte Handlungsmöglichkeiten

    Die Heilberufekammern für Ärzt:innen und Psychotherapeut:innen haben eine Doppelfunktion: Sie beaufsichtigen ihre Mitglieder nicht nur, sie vertreten auch deren Interessen, stellen etwa Forderungen für Gesetzesänderungen.

    Eine Institution, die ihre Mitglieder zugleich vertritt, sie aber auch überprüfen und sanktionieren soll. Ist das ein Interessenkonflikt?

    Das könne man nicht erkennen, schreibt die Bundesärztekammer auf Anfrage. Im Gegenteil gebe es ein hohes Interesse berufsrechtliche Verstöße einzelner Ärztinnen und Ärzte aufzuarbeiten und berufsrechtlich zu ahnden. In Missbrauchsfällen aber liege diese Verantwortung in der Regel bei den Berufsgerichten.Nicht alle sehen das so unkritisch.

    „Das ist ein Spagat“, sagt Sabine Maur, Präsidentin der Landestherapeutenkammer Rheinland-Pfalz. „Und ein Problem ist, dass es in der Regel Aussage gegen Aussage steht. Wir nehmen jede Beschwerde von Patient:innen sehr ernst. Doch es steht möglicherweise die berufliche Existenz eines Kammermitglieds auf dem Spiel. Das ist ganz delikat.”

    Maur kämpft mit ihrer Kammer dafür, dass sich etwas verändert. Sie hat für dieses Jahr einen runden Tisch mit Expert:innen zu dem Thema eingeladen, weil sie die Abläufe in ihrer Behörde verbessern will.

    Zum Thema Missbrauch in der Psychotherapie gibt es mehr Erkenntnisse, mehr Fachpersonen, die sich mit dem Thema beschäftigen, und hier gelten strengere Regeln als bei Fachärzten, über welche etwa die Bundespsychotherapeutenkammer im Internet informiert. Sexuelle Kontakte oder private Treffen sind grundsätzlich berufsrechtlich verboten, auch wenn sie einvernehmlich sind, weil die Abhängigkeit hier besonders groß ist.

    Die Ahndungsmöglichkeiten sind niedrig.

    Eine Untersuchung aus dem Jahr 1995 für das Bundesfamilienministerium schätzt, dass es 600 Fälle pro Jahr gibt, in denen Therapeuten ihre Patient:innen missbrauchen. Die Hälfte der Befragten litt an einer posttraumatischen Belastungsstörung. Folgekosten, die durch die Missbrauchsfälle entstehen, weil viele weitere Behandlungen nötig werden: Mindestens zehn Millionen Euro im Jahr. Die Zahl der Psychotherapeut:innen in Deutschland hat sich seit damals mehr als verdoppelt, inzwischen gelten strengere Standards.

    Wie viele Missbrauchsfälle es heute gibt? Unklar. Auch nach einer neueren Untersuchung sei davon auszugehen, dass nur jede zehnte betroffene Person rechtliche Schritte unternehmen, schreibt die Bundespsychotherapeutenkammer auf Anfrage. Deutschlandweit würden jährlich knapp 20 Beschwerdeverfahren begonnen, bei denen um mögliche Verstöße wegen sexualisierter Übergriffe ging – in rund der Hälfte kommt es zu Berufsgerichtsverfahren.

    „Die Ahndungsmöglichkeiten sind niedrig“, so Maur. „Eine Rüge juckt niemanden. Eine Rüge mit Ordnungsgeld kann man so hoch setzen, dass es weh tut – aber das hat ja überhaupt keine Folgen, was die Berufsausübung angeht.“ Fortbildungen oder psychologische Maßnahmen kann sie nur anraten, nicht anordnen. „Wir haben fast nichts in der Hand, solange die Fälle so liegen, dass das Strafrecht nicht greift.“ Das gelte zum Beispiel für anzügliche Bemerkungen oder übergriffige, fachlich nicht angemessene Fragen zur Sexualität, die sie als „Red Flags“ bezeichnet.

    Ein blinder Fleck: In Deutschland fehlen Beratungsangebote und Beschwerdestellen

    Dass so wenige Missbrauchsfälle im Medizinbetrieb erfasst werden, hat noch einen anderen Grund: Es fehlen spezialisierte Angebote für Betroffene. 2,2 Millionen Menschen gehen jeden Tag zum Arzt. Es gibt mehr als eine Milliarde Arzt-Patient:innen-Kontakte pro Jahr, Kliniken und Krankenhäuser nicht mitgerechnet. Doch es gibt keine einzige länderübergreifende staatliche Anlaufstelle für Patient:innen, die sagen, dass sie missbraucht wurden oder einen sexualisierten Übergriff erlebt haben.

    Bei Ombudsmann Meinhard Korte in Hessen rufen Ratsuchende aus ganz Deutschland an, einzig in Niedersachsen gibt es ein vergleichbares Angebot. Das richtet sich aber an Menschen aus dem Medizinbetrieb selber, nicht an Patient:innen. Viele der Betroffenen, meist Frauen, erzählen uns, dass sie im Internet recherchiert haben, um zu verstehen, ob das Verhalten ihres Arztes überhaupt strafbar ist. Und dass sie erst durch Fachartikel verstanden hätten, wer ihnen weiterhelfen kann.

    Angst und Gleichgültigkeit von Ärzten wirken sich fatal für die betroffenen Patienten aus; die brauchen Unterstützung.

    Wir haben bei der Unabhängigen Patientenberatung nachgefragt, beim Hilfetelefon „Gewalt gegen Frauen“ des Bundesfamilienministeriums, bei allen Krankenkassen in Deutschland. Ja, solche Fälle kämen vereinzelt vor, heißt es dort. Aber spezielle Ansprechpersonen gibt es so gut wie nicht, Beschwerden dieser Art werden nicht gesondert erfasst. Der Medizinische Dienst der Krankenkassen kann bei angeblichen Behandlungsfehlern fachärztliche Gutachten erstellen lassen. Mehr als 14.000 davon wurden 2019 geschrieben. Um sexualisierte Gewalt geht es in einem einzigen. Der von der Bundesregierung eingesetzte Unabhängige Beauftragte für Fragen des sexuellen Kindesmissbrauchs hat ein Monitoring im Gesundheitsbereich veröffentlicht. Das Ergebnis: Es wird zu selten wahrgenommen, dass Praxen und andere Einrichtungen auch Tatorte sexualisierter Gewalt sein können.

    Auch das Umfeld schaut zu oft weg. „Es gibt viele Ärzte, die immer wieder Grenzüberschreitungen begehen können, weil die Mitwissenden nicht aktiv werden, sondern es hinnehmen“, sagte Ombudsmann Korte aus Hessen. „Oft wissen die Arzthelferinnen davon, trauen sich aber nicht, etwas zu sagen, um ihren Arbeitsplatz nicht zu verlieren“, sagt er. Auch andere Ärzte wüssten oft Bescheid, blieben aber stumm. „Angst und Gleichgültigkeit von Ärzten wirken sich fatal für die betroffenen Patienten aus; die brauchen Unterstützung.“

    Es ist nicht so, dass die #MeToo-Bewegung am Medizinbetrieb spurlos vorbeigezogen wäre. Der Deutsche Ärztetag etwa forderte vor knapp zwei Jahren, Mitarbeiter:innen und Patient:innen besser vor sexueller Belästigung zu schützen. Doch auf Anfrage kann die Bundesärztekammer nicht sagen, was sich seitdem verändert hat und verweist auf die Kassenärztliche Bundesvereinigung und die Deutsche Krankenhausgesellschaft. Letztere schreibt auf Anfrage, dass derzeit an neuen Schutzkonzepten gearbeitet werde, um vulnerable Gruppen besser zu schützen.

    Vorwürfe gegen die Ärztekammer Hamburg

    Wie schwer es für Menschen ist, Missbrauchsvorwürfe überhaupt zu erheben, kann man auch sehen, wenn es um die eigenen Reihen geht.

    In Hamburg beschwerten sich drei Mitarbeiterinnen über einen Vorgesetzten in der Ärztekammer. Es sei zu sexistischen Äußerungen und Gesten gekommen, in einem Fall zu zwei unerwünschten Küssen, und zu einer Hand im Intimbereich. Der Vorgesetzte wies die Vorwürfe von sich; ein Kuss habe stattgefunden, jedoch auf Initiative der Frau.

    Die Staatsanwaltschaft Hamburg ermittelte in einem Fall, ließ das Verfahren aber dann fallen. Dem Beschuldigten wurde kein strafbares Verhalten nachgewiesen. „Ein kurzzeitiger Zungenkuss ohne sonstige sexuell motivierte Berührungen stellt [...] keine sexuelle Handlung dar“, steht in dem Einstellungsbescheid.

    Der damalige Vorsitzende der Bundesärztekammer, Frank Montgomery, teilte die Entscheidung der Staatsanwaltschaft in einer Rundmail an die Mitarbeiter:innen. „Vorstand und Geschäftsführung nehmen dieses Ergebnis natürlich mit Erleichterung zur Kenntnis“, heißt es darin, man sehe sich dadurch in der Einschätzung der Sach- und Rechtslage bestätigt.

    Eine der Betroffenen zog vor ein Arbeitsgericht. Doch auch das fand nicht, dass die Ärztekammer die Frau nicht genügend geschützt habe. Es seien verschiedene Maßnahmen ergriffen worden.

    Auf Anfrage schreibt die Ärztekammer, es sei eine Dienstvereinbarung getroffen und eine Beschwerdestelle implementiert worden

    .Auch wurde dem Mann die Personalverantwortung für die Mitarbeiterin entzogen und er sollte keinen direkten Kontakt mehr zu ihr suchen. Der Mitarbeiterin wiederum wurde empfohlen, sich einen „Schattenpartner“ zu suchen. Dieser solle in Rufbereitschaft sein, so dass sie nicht allein an ihrem Arbeitsplatz sein müsse, wenn das Büro sich am Abend leere.

    Die Mitarbeiterin kündigte. Der Vorgesetzte arbeitet bis heute in leitender Funktion in der Hamburger Ärztekammer.

    #Germany #sexual_assault #medical_sector #physicians #hierarchy #psychotherapists #Ärztekammer #law #public_authority

    ping @cdb_77 ...higher education, catholic church, medical sector...das Problem hat System...

    https://www.buzzfeed.de/recherchen/aerzte-patientinnen-missbrauch-medizin-gesundheit-90262449.html

  • Backlash - Crêpe Georgette
    http://www.crepegeorgette.com/2021/03/23/backlash

    Ils sont stupéfaits. Ils ouvrent leur grands yeux d’enfants innocents, entre eux, partout, pour s’étonner qu’on ne puisse plus bien rigoler comme ils disent.
    On les connait, on les a subis, ceux qui regardent leurs potes, qu’ils aient 12, 17, 25 ou 50 ans et se jettent sur vous, vous embrassant de force.
    Le pire est que vous n’êtes même pas assez importante pour que votre consentement compte ou pas. Ils regardent leurs potes en vous embrassent, en vous tripotant, en vous agressant parce que vous ne valez pas mieux qu’un objet transitionnel entre mecs, pour passer un bon moment entre mecs, pour rigoler entre mecs.
    On ne peut plus rigoler disent-ils. C’est vrai qu’on a rigolé. J’ai rigolé des agressions subies « haha il est trop con Sébastien », la gerbe à la bouche.
    Une femme ne gagne jamais. Elle est furieuse ? C’est une connasse coincée. Elle rit ? C’est une salope.

    total #toctoc

    Les journalistes ne cessent de me demander « alors c’est bien ca a changé depuis #metoo ». Oui ca a changé puisqu’on a un homme accusé de deux viols au ministère de l’intérieur.
    Ca a changé puisqu’on démissionne pour du homard mais pas pour un viol.
    Ca a changé puisque désormais des hommes peuvent assumer avoir agressé en plein plateau télé et se plaindre de ne plus pouvoir le faire.
    Ca a changé puisqu’on en appelle à la connivence virile pour être soutenu.

  • « Léon », 25 ans après : un regard masculin dépassé ?
    https://theconversation.com/leon-25-ans-apres-un-regard-masculin-depasse-156792

    Ces dernières années, avant l’apparition du mouvement #MeToo, des autrices et réalisatrices se sont emparé de la représentation des jeunes filles, en offrant des portraits plus authentiques. Certaines, dont la réalisatrice Céline Sciamma font figure de pionnières dans la manière dont elles dépeignent l’adolescence au féminin, afin d’offrir un contrepoint sur la question.

    Ses films, à l’image de Naissance des pieuvres (2007), Tomboy (2011), Bande de filles (2015) et Portrait de la jeune fille en feu, sont portés par des personnages féminins. L’exemple de Céline Sciamma montre que les récits qui traitent de relations, de passe-temps et de créativité entre jeunes filles ont toute leur place au cinéma. Par ailleurs, ces histoires abordent avec sensibilité des questions touchant à la sexualité des adolescentes.

  • L’instrumentalisation de ce professeur par la droite extrémiste est inquiétante

    Le but : Dire que l’islamophobie n’existe pas

    C’est ce que pense ce professeur qui refusait le mot « islamophobie » dans un groupe de travail et qui a harcelé une collègue pour l’enlever.

    https://twitter.com/CNEWS/status/1369201573595844611

    Dans un premier mail au ton assez hallucinant, il refuse le mot dans « Racisme, islamophobie, antisémitisme »

    Il se demande même si le mot à un sens, et s’il n’est pas "l’arme de propagande d’extrêmistes plus intelligents que nous".

    L’argument est plutôt complotiste d’ailleurs.

    Une collègue lui répond simplement que si l’islamophobie est actuellement contesté dans le champ politique, il ne l’est pas dans le champ scientifique, et qu’il n’y a aucune raison de ne pas employer ce terme.

    Kinzler répond avec un long mail très agressif, et conclut que les persécutions des musulmans sont imaginaires, que l’islamophobie n’a rien à faire aux côté de « l’antisémitisme millénaire », que le nom du groupe est une « réécriture de l’histoire qui fait honte à l’établissement »

    On voit déjà le profil de Kinzler. La violence des tournures de phrase, l’insistance, les formes de langages et la longueur des mails montrent l’agressivité des échanges.

    Il fait ensuite une confidence : Il déteste l’islam et préfère le Christ « Qui pardonne la femme adultère »

    Puis on retrouve les arguments de l’extrême droite « pourquoi n’y a-t-il pas des millions de musulmans dans les rues après chaque attentat ? »
    Il avoue que l’islam « lui fait franchement peur » mais il « en connaît de nombreux » donc il n’est pas islamophobe.

    L’échange de mail termine par un mail d’excuse de Kinzler envers sa collègue, qui reconnaît son agressivité, et se justifie en disant avoir été énervé par « l’arrogance d’une jeune enseignante-chercheuse »

    On peut donc rajouter la misogynie au tableau de chasse.

    Vous remarquerez aussi dans ce mail qu’il menace de "quitter le groupe" si le nom n’est pas changé.

    Il prétendra dans d’autres écrits avoir été "exclu du groupe".

    https://twitter.com/Babar_le_Rhino/status/1369277304740982784

    #Klaus_Kinzler #Kinzler #islamophobie

    • Chronologie des faits, rétablis par la directrice du labo PACTE :

      En préambule il semble essentiel d’affirmer que Pacte, comme les trois tutelles dont le laboratoire dépend (Science Po, Univ Grenoble Alpes, CNRS), dénonce absolument les collages sur les murs de l’IEP qui mettent en cause deux collègues -dont un membre du laboratoire, et demande que l’enquête puisse éclaircir toutes les responsabilités en la matière.
      Mais il faut ensuite comprendre que la mise en cause médiatique du laboratoire repose sur une confusion entre deux communiqués.
      – Nous avons bien, en date du 7/12/2020, établi un communiqué interne, envoyé à l’ensemble des membres du groupe de travail alors appelé « Racisme, antisémitisme, islamophobie » - dont 4 étudiants de l’IEP, et à la directrice de l’IEP. Celui-ci ne dénonçait personne à titre nominatif. La notion de harcèlement qui y était mentionnée portait sur le dysfonctionnement des échanges ayant eu lieu par mail, dans leur tonalité notamment. Il disait : « Nier, au nom d’une opinion personnelle, la validité des résultats scientifiques d’une collègue et de tout le champ auquel elle appartient, constitue une forme de harcèlement et une atteinte morale violente ». Des excuses ont par la suite été rédigées par la personne mise en cause. Une autre phrase importante de ce texte était : « L’instrumentalisation politique de l’Islam et la progression des opinions racistes dans notre société légitiment la mobilisation du terme "islamophobie" dans le débat scientifique et public ». Le terme a par ailleurs été retiré du titre du débat qui a eu lieu en janvier. La justification de ce communiqué est un débat dans lequel on me demande de ne pas entrer ici.
      – À la suite de cela, notre collègue attaquée a saisi le Défenseur des Droits qui a confirmé notre interprétation des faits par un courrier officiel envoyé à l’IEP en janvier 2021.
      Puis le laboratoire n’a plus jamais entendu parler de cette affaire jusqu’aux collages du 6 mars 2021.
      – Notre deuxième communiqué a été rédigé le 3 mars 2021 par le conseil d’unité et le directoire. Il était lui tout à fait public, publié sur le site web du labo, traduit en anglais, etc.. Suite aux déclarations de la ministre Mme Vidal, la direction du laboratoire et le conseil d’unité ont en effet pris une position contre la façon dont la croisade contre l’islamo-gauchisme permettait de nier la scientificité des SHS dans leur ensemble, voire de tout le champ scientifique. C’est le seul communiqué visible à ce jour sur notre site. Il n’avait rien à voir avec la situation inter-personnelle qui avait justifié le premier
      Nous n’avons donc jamais traité quiconque d’islamophobe.
      La gravité des faits entraîne une double enquête, à la fois de l’Inspection Générale du Ministère et du Parquet.
      Les deux collègues dont les noms ont été affichés sur les murs de l’IEP, mais aussi celle dont le nom a été exposé contre sa volonté dans la presse, les étudiants concernés et moi-même sommes actuellement sous protection judiciaire.

      https://www.facebook.com/annelaure.amilhatszary/posts/3702745506474976

    • Mediapart : Accusations d’islamophobie : la direction de Sciences Po Grenoble a laissé le conflit s’envenimer

      Une violente polémique agite Sciences Po Grenoble depuis que l’Unef a relayé des affiches accusant de manière nominative deux professeurs d’« islamophobie ». Des enseignants et étudiants dénoncent pourtant l’« instrumentalisation de cette affaire » et un « traitement médiatique biaisé ». Depuis décembre, d’après nos informations, de nombreuses instances avaient été alertées sans entraîner de réaction de la direction.

    • Accusations d’islamophobie : la direction de Sciences Po Grenoble a laissé le conflit s’envenimer

      Une violente polémique agite #Sciences_Po_Grenoble depuis que l’Unef a relayé des affiches accusant de manière nominative deux professeurs d’« islamophobie ». Des enseignants et étudiants dénoncent pourtant l’« instrumentalisation de cette affaire » et un « traitement médiatique biaisé ». Depuis décembre, d’après nos informations, de nombreuses instances avaient été alertées sans entraîner de réaction de la direction.

      Il est midi mardi 9 mars lorsqu’une vingtaine d’étudiants de l’#Institut_d’études_politiques (#IEP) de Grenoble déploient une banderole au pied de l’#université. « Islam ≠ Terrorisme », peut-on lire en plus de deux autres inscriptions affichées sur des cartons pour rappeler que le « racisme est un délit » et pour dire « stop à l’islamophobie ». En face, quelques journalistes attendent de pouvoir interroger les étudiants. Le climat est tendu. Les jeunes se méfient de la presse accusée de « manquer de rigueur » depuis le début de cette polémique. Un étudiant prend la parole.

      La presse s’attend à des excuses publiques. Les étudiants en réalité reviennent à la charge et accusent de nouveau deux professeurs « d’islamophobie », témoignages à l’appui. « Vous vous rendez compte que vous assassinez entre guillemets votre prof ? », lâche un confrère, qui n’a plus envie de cacher sa colère. « Je n’aurais pas dû prendre la parole. Je ne me suis pas fait comprendre », regrette plus tard l’étudiant pris à partie.

      Quelques jours avant, ce sont d’autres affiches qui avaient été placardées sur ces mêmes murs de l’IEP avec les noms de deux enseignants de l’IEP. « Des fascistes dans nos amphis Vincent T. [...] et Klaus K. démission. L’islamophobie tue. » Si ces pancartes ont rapidement été retirées, l’Unef les avait relayées sur les réseaux sociaux avant de se raviser. Marianne et Le Figaro ont ensuite embrayé avant qu’une enquête pour « injures publiques » et « dégradation » ne soit ouverte par le parquet de Grenoble.

      De manière unanime, la classe politique a dénoncé cette action, représentant selon elle une véritable mise en danger pour les deux enseignants. « Je condamne fermement que six mois après l’assassinat, même pas, de Samuel Paty, des noms soient ainsi jetés en pâture. La liberté d’opinion est constitutionnelle pour les enseignants chercheurs… », a déclaré le maire EELV de Grenoble Éric Piolle. Même condamnation pour la ministre de l’enseignement supérieur Frédérique Vidal, qui a diligenté une enquête administrative et rappelé que « les tentatives de pression » et « l’instauration d’une pensée unique » n’avaient « pas leur place à l’université ».

      Sur le parvis de Sciences Po mardi, les étudiants sont aussi unanimes : « Ces collages, c’était une vraie connerie et une mise en danger pour ces deux profs. L’Unef n’aurait jamais dû les relayer non plus », explique un étudiant en troisième année. « Notre communication était clairement maladroite », reconnaît Emma, la présidente de l’Unef Grenoble. « On ne tolère pas que des affiches puissent mettre la vie de profs en danger », renchérit Maxime Jacquier de l’Union syndicale de l’IEP. Tous en revanche disent ne pas savoir qui a collé ces pancartes.

      « Depuis que tout ça a éclaté, les médias comparent cette affaire à ce qui est arrivé à Samuel Paty. On parle de terrorisme intellectuel, d’entrisme islamo-gauchiste ou de fatwa. Mais il y a un décalage magistral entre la réalité de ce qui se passe à l’IEP et la récupération qu’en font les politiques », regrette Thibault, étudiant en master : « C’est une affaire bien plus complexe qui a démarré bien avant. »

      Visé par ces collages, #Klaus_Kinzler, professeur d’allemand, enchaîne les médias depuis, pour témoigner et livrer sa version de la genèse de l’affaire. Cette « cabale » serait née simplement parce qu’il contestait le choix d’utiliser le terme « islamophobie » lors d’une semaine de l’égalité. D’après lui, « la liberté d’expression n’existe plus à Sciences Po ». « Ils voulaient nous faire la peau à moi et mon collègue », dit-il aussi dans Le Point en évoquant une partie des étudiants de l’institution.

      Auprès de Mediapart, ce prof de 61 ans, « 35 ans d’enseignement », introduit la conversation en se félicitant que les médias soient « si nombreux à en parler ». « C’est un vrai marathon, mais le plus intéressant était CNews. Il y a des extraits de l’émission qui sont vus plus de 100 000 fois sur les réseaux », se réjouit l’enseignant qui dit vouloir désormais se concentrer sur le volet judiciaire. « Grâce à l’essayiste Caroline Fourest, j’ai pris l’avocat Patrick Klugman pour préparer ma riposte », explique le prof qui accuse ses collègues de l’avoir complètement lâché.

      Il explique avoir été exclu d’un groupe de travail pour avoir voulu débattre de l’utilisation du terme « islamophobie ». Il dit avoir été accusé de harcèlement pour avoir simplement remis en cause les arguments de Claire M., sa collègue également membre de ce groupe. Il accuse même sa directrice de lui avoir fait fermer une page de son site internet pour le punir d’avoir été se répandre médiatiquement. Il dénonce enfin la pression constante des étudiants qui n’hésiteraient plus à entraver la « liberté d’expression » et la « liberté académique » des enseignants.

      « Le problème, c’est qu’il y a beaucoup d’erreurs et de mensonges dans son récit », regrette l’un de ses collègues de l’IEP qui rappelle qu’il a été immédiatement soutenu par ses pairs. « On est scandalisé par les propos qu’il a tenus sur CNews. Il regrette ne pas avoir de soutien alors qu’il y a eu une boucle de mails dans la foulée des collages. Notre soutien a été unanime et immédiat et la condamnation de ces affiches a été très ferme », rectifie Florent Gougou, maître de conférences à l’IEP. Une motion, votée mardi par le conseil d’administration de Sciences Po, condamne d’ailleurs « fermement cet affichage qui relève de l’injure et de l’intimidation ».

      Mais ce texte rappelle aussi l’importance « du devoir de réserve » et du respect des « règles établies et légitimes de l’échange académique ». Un élément clé de toute cette affaire que ni les enseignants visés, ni Marianne et Le Figaro n’ont évoqué jusqu’à présent. Sur la base de nombreux témoignages d’étudiants, de professeurs et de la direction mais aussi en s’appuyant sur l’intégralité des mails et échanges en cause, Mediapart a tenté de retracer les raisons de cette affaire débutée fin novembre. Et qui, de l’aveu de tous, « n’aurait jamais dû prendre cette tournure nationale ».

      Fin novembre donc, sept étudiants et une autre enseignante, Claire M., planchent ensemble dans un groupe de travail pour préparer la « semaine de l’égalité et contre les discriminations » qui se tient annuellement depuis 2017. Ce groupe a pour intitulé « Racisme, islamophobie, antisémitisme ». Klaus Kinzler le rejoint alors qu’il est déjà constitué et remet immédiatement en cause l’intitulé.

      « Bonsoir à tout le monde, concernant notre groupe thématique “Racisme, islamophobie, antisémitisme”, je suis assez intrigué par l’alignement révélateur de ces trois concepts dont l’un ne devrait certainement pas y figurer (on peut même discuter si ce terme a un vrai sens ou s’il n’est pas simplement l’arme de propagande d’extrémistes plus intelligents que nous) », écrit d’emblée le professeur d’allemand qui livre la véritable raison de sa présence dans ce groupe : « Je ne vous cache pas que c’est en vertu de ce contresens évident dans le nom de notre groupe thématique que je l’ai choisi. »

      Claire M., l’enseignante en question, répond le lendemain pour défendre le choix de l’intitulé qui n’est d’ailleurs pas de son fait. Ce dernier a été décidé après un sondage en ligne lancé par l’administration et a été validé par un comité de pilotage. « La notion d’islamophobie est effectivement contestée et prise à partie dans le champ politique et partisan. Ce n’est pas le cas dans le champ scientifique », défend la maîtresse de conférences qui cite des arguments scientifiques pour se justifier. Elle précise aussi « qu’utiliser un concept ne dispense pas d’en questionner la pertinence, de se demander s’il est opérant ».

      Quelques heures plus tard, Klaus Kinzler répond de manière plus virulente. Les étudiants du groupe de travail, eux, sont toujours en copie. « Affirmer péremptoirement, comme le fait Claire, que la notion d’islamophobie ne serait “pas contestée dans le champ académique” me paraît une imposture », estime l’enseignant qui conteste les références utilisées par Claire qui mettait en avant « le champ académique ». « Ou alors soyons francs et reconnaissons tout de suite ceci : ce “champ académique” dont (Claire) parle et dont elle est un exemple parfait, est lui-même, du moins dans certaines sciences sociales (qu’à l’INP on appelle “sciences molles”), devenu partisan et militant depuis longtemps », poursuit-il.

      Il ajoute : « Contrairement à ce que Claire affirme ex cathedra, le débat académique sur la notion hautement problématique de l’“islamophobie” n’est absolument pas clos… » Il enchaîne pour évoquer une notion « fourre-tout », « inventée de toutes pièces comme arme idéologique dans une guerre mondiale menée par des “Fous de Dieu” (au sens littéral) contre les peuples “impies”, notion qui semble avoir envahi de nombreux cerveaux, y compris dans notre vénérable institut ». « C’est pour cela que je refuse catégoriquement de laisser suggérer que la persécution (imaginaire) des extrémistes musulmans (et autres musulmans égarés) d’aujourd’hui ait vraiment sa place à côté de l’antisémitisme millénaire et quasi universel ou du racisme dont notre propre civilisation occidentale (tout comme la civilisation musulmane d’ailleurs) est passée championne du monde au fil des siècles... »

      Il dénonce ensuite « le véritable scandale » que représente selon lui le nom de ce groupe de travail, « une réécriture de l’histoire » qui ferait « honte » à l’IEP de Grenoble. « J’ai décidé que, au cas où le groupe déciderait de maintenir ce nom absurde et insultant pour les victimes du racisme et de l’antisémitisme, je le quitterai immédiatement (c’est déjà presque fait, d’ailleurs) », annonce-t-il en guise de conclusion.

      Juste après ce mail, Vincent T., maître de conférences en sciences politiques – que Klaus Kinzler avait laissé en copie caché dans l’échange – intervient alors qu’il ne fait pas partie du groupe de travail. Il défend son collègue et cible directement Claire M. en disant découvrir « avec effarement à quel point des universitaires sont enfoncés dans le militantisme et l’idéologie ». « Associer l’IEP de Grenoble au combat mené par des islamistes, en France et dans le monde, et de surcroît au moment où le gouvernement vient de dissoudre le CCIF, mais vous devenez fous ou quoi ? », interroge Vincent T.

      Claire M. répond et poursuit son argumentation en produisant plusieurs publications scientifiques pour expliquer pourquoi l’usage du terme « islamophobie » n’est pas problématique selon elle. Les choses s’enveniment lorsque Vincent T. rétorque en mettant cette fois-ci la direction de l’IEP en copie. Il évoque Charlie Hebdo « accusé d’islamophobie », « Samuel Paty accusé d’être islamophobe » et dit ne pas pouvoir imaginer « un instant que l’IEP de Grenoble se retrouve dans ce camp » et invite la direction à réagir.

      En réponse, Klaus Kinzler poursuit sa dénonciation dans un mail fleuve, notamment d’une « partie grandissante des chercheurs en sciences sociales ». « Tous les jours, les départements en “gender studies”, “race studies” et autres “études postcoloniales” (liste loin d’être exhaustive !) des universités les plus prestigieuses du monde sortent leur production de nouveaux livres et articles “scientifiques” dont les conclusions sont strictement hallucinantes (pour des personnes normalement constituées) », poursuit le professeur d’allemand avant de déplorer « la cancel culture » qui serait à l’œuvre. Il continue de dénigrer les sciences sociales qui produiraient « un tas de choses invraisemblables » et qui seraient bien moins légitimes que « les sciences dures ». Il se fait ensuite plus intransigeant : « Je vais être clair : je refuse absolument d’accepter qu’on puisse continuer, comme Claire le propose au groupe, de conserver l’intitulé de la journée prévue. »

      Le prof d’allemand qui revendique auprès de Mediapart son côté « provoc’ » a en tout cas une réputation « sulfureuse » au sein de l’IEP. « Lui et Vincent sont les deux profs réputés à droite quoi et parfois très militants », contextualise un enseignant. L’argumentation de Klaus Kinzler déployée dans ses mails le prouve.

      « Les musulmans ont-ils été des esclaves et vendus comme tels pendant des siècles, comme l’ont été les Noirs (qui aujourd’hui encore sont nombreux à souffrir d’un racisme réel) ? Non, historiquement, les musulmans ont été longtemps de grands esclavagistes eux-mêmes ! Et il y a parmi eux, encore aujourd’hui, au moins autant de racisme contre les Noirs que parmi les Blancs », peut-on lire. Il poursuit sa mise en cause des musulmans en expliquant qu’ils n’ont pas jamais été « persécutés », « tués » ou « exterminés » comme l’ont été les juifs et qu’au contraire, on compterait parmi eux « un très grand nombre d’antisémites virulents ».

      Il en profite pour expliquer qu’il n’a « aucune sympathie » pour l’islam « en tant que religion » et préfère même « largement le Christ qui, lui, pardonne fameusement à la femme adultère ». Il précise toutefois n’avoir aucune « antipathie » à l’égard des musulmans, mais reprend à son compte la théorie qui veut que ces derniers soient a priori solidaires des terroristes : « Pourquoi n’y a-t-il pas des millions de musulmans dans la rue pour le crier haut et fort, immédiatement, après chaque attentat, pourquoi ? » Il termine enfin son mail en proposant un nouvel intitulé qui serait « Racisme, antisémitisme et discrimination contemporaine » pour englober « l’homophobie, l’islamophobie et la misogynie ».
      Le Défenseur des droits défend l’enseignante

      « Après ces échanges, Claire M. a considéré être victime d’une agression et même d’un harcèlement », explique l’un de ses collègues. Elle aurait reproché à Klaus Kinzler de se contenter de livrer ses opinions personnelles face à des arguments scientifiques. Mais aussi de la dénigrer, la qualifiant d’« extrémiste ». Il aurait ainsi clairement dépassé son devoir de réserve et bafoué le principe de laïcité en faisant l’éloge du Christ. L’enseignante sollicite l’intervention de la direction qui refuse de rappeler à l’ordre Klaus Kinzler mettant en avant la liberté d’expression. « Nous l’avons accompagnée dans ces démarches car nous avons considéré que la direction se devait de réagir. On a remarqué au passage qu’aucun registre de santé et de sécurité ni de CHST n’existait », explique un membre de la CGT de l’université de Grenoble. « On a même fait une alerte pour danger grave et imminent », ajoute-t-il.

      De son côté pourtant, Klaus Kinzler affirme qu’il a été lâché par sa direction. « J’ai même été exclu du groupe de travail », assure l’enseignant qui estime « ne pas avoir dépassé le cadre de la politesse » dans ses mails. « En réalité, Klaus n’a jamais été exclu. C’est lui-même qui a annoncé son départ », nuance une étudiante membre du groupe de travail et elle aussi destinataire des courriers. « On ne comprenait pas pourquoi il prenait à partie notre enseignante alors que l’intitulé du groupe avait été voté et validé en amont. Il y avait un tel manque de professionnalisme de sa part qu’on a choisi de ne pas répondre », explique-t-elle.

      Contrairement à ce que le prof répète dans les médias, les étudiants à ce moment-là de l’affaire ne réagissent pas. « On a demandé à sortir de cette boucle de mails, on a sollicité la direction qui n’a pas souhaité réagir. Du coup, on a fait remonter que dans ces conditions, on ne voulait plus travailler avec lui. Son agressivité et ses propos anti-islam nous ont mis mal à l’aise mais il n’y a pas eu de volonté de le faire taire ou de l’exclure », poursuit-elle : « Ses mails s’en prenant de cette manière à l’islam ou aux musulmans étaient difficiles à vivre pour certains étudiants. »

      En révélant cette affaire, Le Figaro affirme que les échanges en question ne contenaient aucune « trace d’invectives personnelles ». Dans des échanges consultés par Mediapart pourtant, Klaus Kinzler reconnaît lui-même sa violence. « Je viens de relire notre échange. De ton côté, un ton parfaitement modéré et poli ; de mon côté, je l’admets, je n’ai pas eu la même maîtrise du langage et, dans le feu de l’action, je me suis par moments laissé emporter. Je le regrette », écrit-il le 4 décembre tout en précisant que sur le fond, il « maintient tout à 100 % ». « Je me suis excusé pour calmer les choses, c’était diplomatique, mais je maintiens qu’il n’y avait pas de problème dans mes mails », corrige-t-il finalement à Mediapart.

      D’après son entourage, Claire M. vit mal « l’inertie de la direction » et est même mise en arrêt maladie du 7 au 11 décembre. Juste avant, elle alerte Pacte, le labo de recherches de l’université dont elle dépend. Ce labo rattaché au CNRS publie dans la foulée un communiqué interne pour affirmer « son plein soutien » à l’enseignante « attaquée personnellement ». Sans jamais nommer Klaus Kinzler, il lui reproche de nier ses résultats scientifiques (elle travaille depuis de longues années sur les questions autour de l’islam et des musulmans et est largement reconnue alors que lui n’est pas chercheur) et dénonce une forme de « harcèlement ». Il rappelle enfin que le débat scientifique nécessite « liberté, sérénité et respect ».

      « On ne voulait pas attaquer la direction », explique un membre de ce labo, « mais on ne pouvait pas laisser un prof dénigrer les SHS de cette manière, mettre en copie un prof qui n’a rien à voir avec ce groupe de travail, et les laisser s’en prendre à une collègue aussi violemment par mail devant ses étudiants. C’était un rappel à l’ordre sur la forme puisque la direction refusait d’intervenir ».

      D’après l’étudiante du groupe de travail, l’affaire aurait dû s’arrêter là. D’autant que Klaus Kinzler oublie de dire qu’il a obtenu gain de cause puisque la semaine de l’égalité a été rebaptisée. « Féminismes et antiracisme » a remplacé l’autre intitulé d’après les documents obtenus par Mediapart. « On a d’ailleurs pris le soin de ne pas évoquer ses mails publiquement. C’est Klaus en réalité qui en fait le premier la publicité », explique-t-elle. Un point aussi crucial que le prof d’allemand n’évoquera jamais lors de ses différentes sorties médiatiques.

      En effet, l’enseignant est furieux, voit dans la réaction de Pacte « une punition » et envoie de nombreux mails à la communauté éducative pour exposer ce litige et se plaindre de Claire M. Il va jusqu’à publier sur son site internet les échanges sans l’accord de l’enseignante. « Il a même utilisé les échanges de mails et la réponse du labo comme matériel pédagogique pour évoquer avec ses étudiants “la cancel culture” dont il se dit victime », témoigne l’une de ses collègues : « Claire M. n’avait rien demandé et c’est d’abord son nom qui a été jeté en pâture. Il se garde bien de dire qu’il est allé aussi loin. » Comme l’a constaté Mediapart, Klaus Kinzler a en effet utilisé cet incident lors de conférences de méthode de langue allemande de 3e année consacrés à la « cancel culture ».

      Interrogé, Klaus Kinzler confirme avoir été le premier à publier tous ces échanges sur son site internet mais assure que s’il l’a fait, c’est parce que le labo Pacte avait « rendu public son communiqué ». En réalité, le courrier de Pacte a seulement été envoyé par mail aux personnes concernées et à la direction. « Jamais il n’a été rendu public sur notre site », précise l’un de ses membres qui admet toutefois qu’il n’aurait pas dû intituler ce courrier « communiqué ».

      Reprenant les arguments de Klaus Kinzler, Marianne indique ainsi que le collectif Sciences Po Grenoble, relayé par l’Union syndicale, a donc publié le 7 janvier des extraits des courriels pour dénoncer son discours « ancré à l’extrême droite ». C’est exact. Mais les mails repris par les étudiants, qui ne nomment jamais le professeur, ont été piochés sur le site de l’enseignant qui les avait lui seul rendus publics.

      « Je ne regrette pas de les avoir fait circuler car c’était mon seul moyen pour me défendre », justifie aujourd’hui Klaus Kinzler. Rétrospectivement, il reconnaît une erreur, celle d’avoir rendu public le nom de Claire M. « J’aurais dû retirer son nom mais j’avais d’autres colères à gérer », rétorque l’enseignant qui explique l’avoir finalement fait il y a quelques jours, lorsque la polémique a éclaté médiatiquement. « Mais je ne comprends pas trop qu’on fasse tout un fromage du risque de sécurité pour ma collègue », nuance-t-il. Comme lui et Vincent T. pourtant, Claire M. bénéficie d’une protection policière depuis samedi 6 mars. « Elle a d’ailleurs reçu un mail haineux en début de semaine », ajoute la CGT.

      Face à l’inaction de la direction, Claire M. avait également saisi le Défenseur des droits en décembre. D’après nos informations, l’institution via sa cellule grenobloise a envoyé un courrier le 11 janvier à Sabine Saurugger, la directrice de l’IEP. Dans cette lettre, le Défenseur des droits précise qu’il n’a pas à se positionner sur le fond du débat mais rappelle que le respect entre collègues est un élément fondamental. Surtout, il estime que Vincent T. et Klaus Kinzler ont bafoué le droit au respect de Claire M. et que cette dernière n’a pas bénéficié du soutien de la direction.

      Sollicitée par Mediapart, la directrice, qui n’avait pas répondu au Défenseur des droits à l’époque, conteste toute inertie. « Ces événements avaient donné lieu à une action très ferme de la direction qui a d’ailleurs mené à la rédaction d’excuses de Klaus Kinzler », explique-t-elle. Le 16 décembre en effet, l’enseignant s’était une nouvelle fois excusé. Mais au même moment, il exposait sur son site les échanges mails avec l’enseignante et revendiquait sa démarche dans un courrier adressé au labo Pacte en réponse à leur communiqué.

      Malgré le constat du Défenseur des droits, la direction l’assure : « Il est incorrect de dire que nous n’avons pas réagi, mais on a tenté d’avoir un dialogue constructif », explique Sabine Saurugger.

      Étudiants et syndicats avaient aussi alerté la direction

      Contrairement à ce qui a pu être dit jusqu’à présent, la plupart des instances internes ont donc été sollicitées avant que les fameuses affiches soient collées sur les murs de l’IEP. L’Union syndicale, par exemple, avait aussi dénoncé l’inaction de la direction et demandé par courrier qu’elle condamne les propos tenus par le professeur. « L’islamophobie n’a pas sa place dans notre institut tout comme les autres discriminations que peuvent être le racisme et l’antisémitisme », peut-on lire dans un échange daté du 9 janvier. Le syndicat en profitait pour apporter son soutien à l’enseignante et demander la suppression du cours sur l’islam de Vincent T. qu’ils accusent d’islamophobie.

      En réponse, la directrice temporise. Sabine Saurugger rappelle l’importance de la liberté d’expression des enseignants mais aussi des principes de « tolérance et d’objectivité » exigés par les « traditions universitaires et le code de l’éducation ». Le 13 janvier, les étudiants insistent et demandent que l’IEP « ne se cache pas derrière la liberté pédagogique pour défendre l’islamophobie ». Ils veulent aussi que soit mise à l’ordre du jour du prochain conseil d’administration la suppression du cours de Vincent T. baptisé « Islam et musulmans dans la France contemporaine ». Le 22 février enfin, l’Union syndicale lance un appel à témoignage sur Facebook et demande aux étudiants de faire remonter d’éventuels propos islamophobes tenus par Vincent T. dans ses cours.

      « On avait eu plusieurs remontées problématiques », justifie un membre de ce syndicat. Les étudiants évoquent notamment les prises de position de ce maître de conférences, par ailleurs membre de l’Observatoire du décolonialisme (il a signé une tribune en janvier dans Le Point « contre le “décolonialisme” et les obsessions identitaires »). Il est aussi un contributeur régulier du site Atlantico. « Ses tribunes sont d’ailleurs toutes reprises par la revue de presse officielle de l’IEP », remarque l’un de ses collègues pour démontrer qu’on est loin d’une « université minée par l’islamo-gauchisme ».

      « Les idéologies islamo-gauchistes et décoloniales sont devenues tellement puissantes que les instances officielles cherchent à les protéger », écrivait Vincent T. par exemple en septembre. « Nos meilleurs étudiants sont aujourd’hui conditionnés pour réagir de manière stéréotypée aux grands problèmes de société. Ils sont par exemple persuadés que la société française est raciste, sexiste et discriminatoire, que les immigrés ont été amenés de force en France pour être exploités et parqués dans des ghettos, que Napoléon était une sorte de fasciste ou que la colonisation était synonyme de génocide », fustigeait-il en février.

      « Vincent est connu pour être à droite de la sociologie. Après, il n’y a aucun élément aujourd’hui permettant de prouver qu’il a tenu des propos islamophobes dans ses cours », nuance toutefois un professeur de l’IEP. « Ce qui est certain, c’est qu’il en fait une obsession. Mais il y a aussi une grande frayeur chez lui », ajoute son collègue.

      Après la mort de Samuel Paty par exemple, Vincent T. avait vivement réagi dans un mail envoyé à la présidence de l’université en octobre. « Les caricatures publiées par Charlie Hebdo sont devenues la ligne de démarcation entre la civilisation et la barbarie, entre nous et nos ennemis. Soit nous acceptons ces caricatures, soit nous les refusons : à chacun de choisir son camp », écrivait-il avant de demander à l’université de placarder les caricatures.

      « Dans le cadre de mes enseignements, il m’arrive, comme sûrement à d’autres collègues, de présenter ces dessins lorsque j’aborde l’affaire des caricatures. Pour cette raison, ma vie est donc potentiellement en danger. Elle cessera de l’être si toute l’université assume sa solidarité en placardant ces caricatures partout où elle le peut », ajoutait-il avant de conclure : « En l’absence d’une telle mesure élémentaire de solidarité et de courage, vous mettrez ma vie en danger. » La direction avait alors évoqué la possibilité de signaler des éléments à la police s’il en ressentait le besoin.

      Pour cette raison, certains professeurs et étudiants jugent le post Facebook de l’Union syndicale maladroit : « Cet appel à témoignage, même s’il ne mentionnait pas son nom, aurait dû rester sur des boucles internes et ne pas être affiché sur le réseau social. Vincent était trop identifiable. » Après avoir découvert ce post, l’enseignant envoie un mail aux étudiants : « Pour des raisons que je ne peux expliquer par mail, je demande à tous les étudiants qui appartiennent au syndicat dit “Union syndicale” de quitter immédiatement mes cours et de ne jamais y remettre les pieds. » « Je suis Charlie et je le resterai », conclut-il avant de revenir sur ses propos quelques jours plus tard.

      Le même jour, Klaus Kinzler envoie un autre mail présenté comme étant humoristique aux étudiants, mais aussi à la direction. « Bonjour surtout à nos petit.e.s Ayatollahs en germe (c’est quoi déjà l’écriture inclusive d’Ayatollah ?) ! », entame-t-il : « Je vois que ça commence à être une habitude chez vous, de lancer des fatwas contre vos profs. » En cause, une réunion assez houleuse entre ces profs, Kinzler et d’autres professeurs. L’enseignant d’allemand s’était permis de boire de l’alcool « pour supporter cette réunion » où il était de nouveau question de débattre de « l’islamophobie ».

      « Cela vous choque donc tellement, vous les “Gardien.n.e.s des bonnes mœurs” auto-proclamé.e.s, que, après quatre heures interminables passés avec vous, […] j’aie eu besoin de me verser quelques canons derrière la cravate pour ne pas péter un plomb ? », interroge Klaus Kinzler avant de réitérer son soutien à son collègue Vincent T. « Un enseignant “en lutte”, nazi de par ses gènes, islamophobe multirécidiviste », écrit-il en guise de signature.

      « C’est une succession de fautes, il est allé trop loin », estime l’un de ses collègues. Encore une fois, les étudiants avertissent immédiatement la direction qui ne réagit pas. L’Union syndicale se tourne aussi vers la justice et porte plainte (elle sera finalement classée), pour « diffamation et discrimination à raison des activités syndicales ». Quatre jours plus tard, les noms des deux enseignants étaient placardés sur les murs de l’IEP.

      Si, depuis, tout le personnel enseignant condamne sans réserve ce collage, certains reçoivent difficilement le discours que Klaus Kinzler va défendre à la télévision. Et ses accusations contre ses collègues, la direction, les étudiants et le labo de recherches Pacte. « Je condamne très fermement ces affichages mais conteste toute responsabilité du labo dans les accusations faites à l’encontre de ces deux professeurs dont l’un est aussi membre de Pacte », soutient Anne-Laure Amilhat-Szary, directrice du laboratoire.

      Tous les enseignants, Klaus Kinzler compris, tombent d’accord sur un point. La situation épidémique qui a donné lieu à ces innombrables échanges de courriels a clairement pu aggraver la situation. « Les réactions timides de la direction aussi », regrette un enseignant. Simon Persico, professeur à l’IEP, résume : « On a soutenu ces deux enseignants, condamné ces collages, mais l’affaire qui est relatée dans les médias prend une tournure présentant la communauté pédagogique comme des islamo-gauchistes inconséquents. C’est faux. Il faut apaiser ce débat qui a pris une ampleur inédite, aggravé par une situation de confinement très lourde pour les étudiants et qui empêche toute discussion sereine et respectueuse. »

      Pendant que deux inspecteurs généraux missionnés par Frédérique Vidal auditionnent les différents acteurs de cette affaire, Klaus Kinzler, lui, poursuivait son marathon médiatique. Il s’interroge aussi sur la suite. « Juste après l’émission que j’ai faite sur CNews, j’ai discuté vingt minutes avec Serge Nedjar, le patron de la chaîne, qui voulait que je vienne plus régulièrement. Ça m’a flatté », révèle-t-il avant de conclure : « Je vais y réfléchir. »

      https://www.mediapart.fr/journal/france/110321/accusations-d-islamophobie-la-direction-de-sciences-po-grenoble-laisse-le-

      –---

      Traduction de l’article en anglais :
      How ‘Islamophobia’ row erupted at French political sciences school
      https://www.mediapart.fr/en/journal/france/220321/how-islamophobia-row-erupted-french-political-sciences-school?_locale=en&o

      L’article complet :
      https://seenthis.net/messages/907329#message907675

      #affaire_de_Grenoble

    • Islamophobie à Sciences Po Grenoble : les faits alternatifs de Frédérique Vidal

      En pleine polémique après que les noms de deux professeurs accusés d’islamophobie aient été placardés sur les murs de l’IEP, la ministre de l’Enseignement supérieur y a vu une aubaine pour poursuivre sa croisade contre l’« islamo-gauchiste ». Quitte à, une fois de plus, mutiler les faits.

      Frédérique Vidal a donc récidivé en affairisme islamo-gauchiste. C’est en effet, comme aurait pu le dire Emmanuel Macron lui même (https://www.lesinrocks.com/2020/06/11/actualite/societe/macron-juge-le-monde-universitaire-coupable-davoir-casse-la-republique-e), un « bon filon » politique.

      Le 4 mars 2021, deux collages nominatifs, dénonçant l’islamophobie de deux enseignants, sont placardés sur les murs de l’Institut d’Etudes Politique de Grenoble (plus familièrement, Sciences Po Grenoble). Dans un contexte tendu, qui fait suite à l’assassinat de Samuel Paty le 16 octobre 2020, la direction de Sciences Po Grenoble signale ces faits à la justice le 5 mars. Enfin le 6 mars, le parquet de Grenoble ouvre une enquête pour « injure » et « dégradation publique ».

      L’affaire aurait pu en rester là si, le 8 mars, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Frédérique Vidal, ne s’était aussitôt saisie de cette affaire. Et n’avait diligenté une mission de l’#inspection_générale_de_l’éducation (https://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid157360/i.e.p.-grenoble-frederique-vidal-condamne-fermement-l), chargée d’évaluer dans quelle mesure il aurait, au sein de Science-Po Grenoble, été porté atteinte aux « libertés académiques » et au « pluralisme de la recherche ». Frédérique Vidal entendait sans doute ainsi poursuivre sa croisade contre la présence supposée d’un courant « islamo-gauchiste » dans l’enceinte de l’université française. Et ce, en dépit des réserves (https://www.uvsq.fr/communique-de-la-conference-des-presidents-duniversite) et protestations (https://www.cnrs.fr/fr/l-islamogauchisme-nest-pas-une-realite-scientifique) déjà pourtant exprimées, cet hiver, par la Conférence des présidents d’Université et le CNRS ; des inquiétudes (https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/04/islamo-gauchisme-nous-ne-pouvons-manquer-de-souligner-la-resonance-avec-les-) manifestées par de prestigieux chercheurs internationaux ; enfin, d’une pétition (https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/02/20/islamo-gauchisme-nous-universitaires-et-chercheurs-demandons-avec-force-la-d) d’universitaires français emmenée par Thomas Piketty, et appelant la ministre à démissionner.

      Las, la ministre avait, une fois de plus, mutilé les faits. Il est en effet apparu, après quelques jours de bruit médiatico-politique, que l’affaire était plus complexe qu’il n’y paraissait. Interrogée mercredi soir sur BFM (https://www.bfmtv.com/replay-emissions/120-pourcent-news/frederique-vidal-les-methodes-d-intimidation-n-ont-pas-leur-place-dans-les-un), Frédérique Vidal, semblait en effet découvrir, avec stupeur, le communiqué (https://www.europe1.fr/societe/sciences-po-grenoble-les-propos-dun-professeur-etaient-extremement-problemat) de la directrice de Science Po Grenoble, Sabine Saurugger. Celle-ci s’inquiétait, bien sûr, des répercussions des collages nominatifs, notamment pour la sécurité des deux enseignants mis en cause. Mais Sabine Saurugger rappelait, également, qu’un des deux enseignants en question avait auparavant fait l’objet d’un « rappel à l’ordre », dans le cadre d’une controverse interne à l’institut d’études politiques.

      Il semble donc qu’il faille, dans la compréhension de ce qui s’est passé à Sciences Po Grenoble — et avant de se précipiter pour intenter des procès en islamo-gauchisme, comme l’ont à nouveau fait la ministre, des éditorialistes et les réseaux sociaux — faire preuve de patience dans l’établissement des faits. Et surtout, d’un peu de probité dans la compréhension de ce qui s’est réellement joué. Aussi faut-il d’abord, selon les mots d’une enseignante de Grenoble, également mise en cause dans cette affaire, « rétablir l’ordre des choses ».
      L’ordre et la connexion des faits

      En décembre 2020, ces deux enseignants s’en étaient en effet vivement pris, par mails interposés, à une enseignante de Pacte, l’un des laboratoires de sciences sociales rattaché à l’IEP de Grenoble. Dans ces mails que nous avons pu consulter, l’un des enseignants écrit en effet, sans détour, qu’il « n’aime pas beaucoup cette religion [l’islam, ndlr] », qu’elle lui fait parfois « franchement peur », « comme elle fait peur à beaucoup de Français ». C’est dans ce contexte que cet enseignant et son collègue se sentent alors autorisés à contester l’existence d’un atelier d’un groupe de travail intitulé « Racisme, islamophobie, antisémitisme ». À contester de manière très véhémente, ensuite, les droits d’une enseignante à animer ce groupe de travail, en mélangeant à peu près tout : « Associer l’IEP de Grenoble au combat mené par des islamistes, en France et dans le monde, et de surcroît au moment où le gouvernement vient de dissoudre le CCIF, mais vous devenez fous ou quoi ? » Enfin, autorisés à remettre en question les titres et travaux de la directrice du laboratoire Pacte elle-même.

      Un communiqué du laboratoire Pacte, daté du 7 décembre 2020 et adressé à la direction et quatre étudiants, s’inquiète de ces mails et de leur véhémence et, sans nommer leurs auteurs, manifeste une inquiétude au regard du respect des libertés académiques : « Nier, au nom d’une opinion personnelle, la validité des résultats scientifiques d’une collègue et de tout le champ auquel elle appartient, constitue une forme de harcèlement et une atteinte morale violente ». Suite à quoi l’enseignante incriminée saisira le Défenseur des Droits, qui confirmera l’interprétation des faits, par un courrier officiel envoyé à l’IEP de Grenoble en janvier 2021.

      S’il s’est certes depuis excusé auprès de ses paires grenobloises, l’un des enseignants n’en est, à vrai dire, pas à son coup d’essai en matière de provocation intellectuelle et politique. Sur la foi d’autres mails, non moins embarrassants et diffusés dans le cadre d’une liste de diffusion de sciences politiques réputée, certains politistes et sociologues considèrent désormais que l’enseignant ne « respecte pas la déontologie minimale qu’on peut attendre d’un universitaire, en diffusant régulièrement des messages électroniques à connotation xénophobe et islamophobe sous des formes pseudo-humoristiques ».

      D’autres indiquent encore que certains de ses articles sur la socialisation politique des jeunes musulmans, sans doute publiés dans des revues de référence, se fondent sur des données et des échantillons trop étroits pour être tout à fait fiables. Ces sociologues et politistes reconnus, tout comme des enseignants grenoblois, nous ont dit préférer rester anonymes. En effet, depuis la médiatisation (https://www.lci.fr/societe/video-le-parti-pris-de-caroline-fourest-grenoble-aux-origines-de-l-intolerance-2) à grand bruit de cette affaire intra-universitaire par des éditorialistes coutumiers de ce genre de coup d’éclat, les deux enseignants qui courent à leur tour les plateaux de télévision pour crier au loup islamo-gauchiste et l’intervention de la ministre, le contexte s’est très fortement tendu. Non seulement, le nom et la photographie de la directrice du laboratoire Pacte sont jetés en pâture à la fachosphère sur Twitter. Mais celle-ci, tenue au silence par un droit de réserve suite à l’enquête judiciaire et l’enquête diligentée par la ministre, fait également, avec d’autres enseignants et étudiants, l’objet d’une protection judiciaire.

      Si la pratique des collages nominatifs est condamnable (et les communiqués (http://www.sciencespo-grenoble.fr/accusations-dislamophobie-aupres-de-deux-enseignants-de-sciences) de la direction de Sciences Po Grenoble, mais aussi du laboratoire (https://www.pacte-grenoble.fr/actualites/accusations-d-islamophobie-aupres-de-deux-enseignants-de-sciences-po- de sciences sociales, l’affirment nettement, sans équivoque aucune), il faut donc non moins rappeler, au nom du même principe — celui du respect inconditionnel de la liberté académique dont se réclame Frédérique Vidal —, l’ordre et la connexion des faits. Et qui a fait, en première instance, l’objet d’une forme d’intimidation intellectuelle et politique.

      L’affaire est grave. Elle n’est, en effet, pas réductible à un ou des conflits inter-personnels, ou même intérieurs au monde universitaire. Elle est politique, et met directement en cause le climat inflammable, et la stratégie de tension qu’ont, depuis des mois, et dans ce domaine comme dans d’autres, instauré le président de la République (https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/02/22/emmanuel-macron-empetre-dans-le-debat-sur-l-islamo-gauchisme_6070756_823448.), ses ministres (https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/23/polemique-apres-les-propos-de-jean-michel-blanquer-sur-l-islamo-gauchisme-a-), sa majorité (https://www.mediapart.fr/journal/france/230221/le-rappeur-medine-porte-plainte-contre-la-deputee-lrem-aurore-berge?onglet) et leurs relais (https://twitter.com/WeillClaude/status/1369975398919004163) médiatiques. Il serait évidement inconsidéré de comparer Emmanuel Macron à Donald Trump (http://www.regards.fr/politique/article/2022-pourquoi-macron-ferait-mieux-de-ne-pas-la-jouer-comme-clinton). Mais il faut bien admettre que les méthodes de communication employées par la macronie, ainsi que celles de certains médias, s’apparentent de plus en plus à celles du trumpisme et de Fox News.

      http://www.regards.fr/politique/societe/article/islamophobie-a-sciences-po-grenoble-les-faits-alternatifs-de-frederique-vida

    • Sciences-Po Grenoble : une semaine de tempête médiatique sur fond d’« islamo-gauchisme »

      L’#institut_d’études_politiques peine à émerger des polémiques alimentées par deux de ses professeurs sur fond de débat national sur la prétendue incursion d’« islamo-gauchisme » dans l’enseignement supérieur et la recherche.

      Sciences-Po Grenoble pensait avoir touché le fond après l’affichage non revendiqué, le 4 mars sur ses murs, des noms de deux de ses enseignants accusés d’être des « fascistes » aux penchants islamophobes. Si les auteurs de l’affiche restent inconnus jusqu’ici, la situation a tourné cette semaine au lynchage médiatique pour cet institut d’études politiques (IEP). Sans que sa communauté étudiante et enseignante, tétanisée, ne soit en mesure de calmer la tempête.

      L’affiche accusatrice a suscité un tollé national, d’autant que des syndicats étudiants locaux ont relayé momentanément et très « maladroitement » comme l’a reconnu l’Unef, une photo du collage. En plein week-end, le 6 mars, la justice lance une enquête pour « #injure_publique » et « #dégradation » ; des élus de tous bords et des membres du gouvernement s’émeuvent ; les directions de l’IEP et de l’Université Grenoble-Alpes (UGA) condamnent l’affichage tandis que le ministre de l’Intérieur place sous #protection_policière les enseignants visés.

      L’un d’eux, #Klaus_Kinzler, agrégé d’allemand, s’indigne à visage découvert : la #liberté_d’expression, en particulier au sujet de l’islam, est selon lui menacée au sein de l’IEP, explique-t-il dans plusieurs interviews aux médias nationaux durant le week-end. Rares sont les professeurs à répondre, et ils le font anonymement : la direction les a exhortés à la plus grande retenue. Lundi, après une AG, ils publient tout de même un communiqué prudent : s’ils condamnent « fortement et fermement » le collage, ils rappellent que les débats « doivent se tenir dans le respect des principes de modération, de respect mutuel, de tolérance et de laïcité ».

      « Grandes gueules »

      Cette réponse voilée à Klaus Kinzler fait référence à son rejet virulent, en décembre, du concept d’islamophobie au sein d’un groupe de travail réunissant des étudiants et l’une de ses collègues, maîtresse de conférences spécialiste du Maghreb colonial et membre du prestigieux Institut Universitaire de France. Lors de cette querelle et de ses suites, le prof d’allemand a franchi plusieurs lignes blanches, sur le fond comme sur la forme, et a été notamment recadré par la direction de Pacte, le labo de recherche en sciences sociales CNRS /Sciences-Po Grenoble /UGA.

      Klaus Kinzler intensifie encore sa campagne, enchaînant les interviews « en guerrier », non sans gourmandise. Sur CNews mardi, il dénonce les enseignants-chercheurs incapables de le soutenir alors qu’il « risque sa peau », « des grandes gueules enfermées dans leur tour d’ivoire, qui ne comprennent rien ». Le même jour, un collectif de syndicats grenoblois, dont la CGT Université, Solidaires étudiant·e·s, SUD éducation ou l’Unef, prend position contre ce « recours irraisonné aux médias » et demande à Sciences-Po « de condamner les propos » de l’enseignant.

      Le conseil d’administration de l’IEP franchit le pas dans la journée, enjoignant Klaus Kinzler à respecter « son devoir de réserve ». Le CA estime qu’il a « transgressé […] les règles établies et légitimes de l’échange académique » et tacle aussi le second enseignant visé par le collage, au nom de la « #liberté_syndicale ». Ce maître de conférences en science politique, T., soutien de Klaus Kinzler, engagé dans l’#Observatoire_du_décolonialisme et chroniqueur à #Atlantico, a tenté d’exclure de ses enseignements les syndicalistes étudiants qui cherchaient à vérifier s’il ne développait pas d’idées islamophobes dans l’un de ses cours, afin d’en demander la suppression le cas échéant. La directrice de l’IEP, #Sabine_Saurugger, professeure de sciences politiques, précise ce « rappel à l’ordre » à l’issue du CA : elle mentionne, sans détailler, « le ton extrêmement problématique » de Klaus Kinzler et la décision « clairement discriminatoire » de T..

      Inquiétude des étudiants

      Tout cela reste trop sibyllin face au germaniste survolté. Sur France 5 mercredi, il fustige « une nouvelle génération de maîtres de conférences et de professeurs bourrés d’#idéologie » qui « mélangent #militantisme et #science ». « Il est en roue libre, lâche Simon Persico, professeur de sciences politiques à l’IEP, le premier à s’exprimer publiquement. Il ment sans vergogne car il a d’abord reçu notre soutien, massif, face à cet affichage odieux. Sa stratégie de communication hyperviolente offre une vision mensongère de notre institut où l’on respecte le pluralisme. C’est gravissime. » Et de tenter d’expliquer la paralysie de l’institution : « Il est difficile de contrer ce récit journalistique dominant et consensuel, dans lequel notre collègue est présenté comme une victime de “l’islamo-gauchisme”… »

      Gilles Bastin, professeur de sociologie de l’IEP, complète : « Beaucoup parmi nous sont soucieux de ne pas souffler sur les braises : il y a une peur évidente que tout cela finisse mal. » Il a pourtant lui aussi décidé de rompre le silence : « Klaus Kinzler n’a jamais été censuré : c’est au contraire lui qui a imposé le retrait du terme “islamophobie” de la conférence du 26 janvier [celle qui était préparée par le groupe de travail de décembre au centre du conflit, ndlr], pour des raisons idéologiques et au moyen de pressions inacceptables. » Pour l’enseignant-chercheur, son collègue « s’inscrit dans la stratégie du gouvernement qui martèle que les sciences sociales sont “gangrénées” par un prétendu “islamo-gauchisme” ». Il dénonce « la gravité de cette attaque » qui vise « à en finir avec la liberté de la recherche ».

      Certains étudiants se disent, eux, « effarés » : « On voudrait tous que ça se calme et que cela soit réglé en interne », résume Chloé, en troisième année. Dans un texte publié par Mediapart, sept étudiants, après avoir disqualifié Klaus Kinzler pour ses propos « indignes » et T. pour son action « intolérable », dénoncent « l’absence de discussion » au sein de l’Institut et « une récupération du débat par des politiques et des médias ». Ces étudiants, engagés dans le combat contre les violences sexistes et sexuelles à Sciences-Po, exigent « d’être entendus et pris au sérieux », insiste Chloé. « Les promos sont de plus en plus résolues, poursuit Alex, lui aussi en troisième année. Les propos misogynes ou discriminatoires ne sont plus tolérés. Face à cette exigence, Kinzler et T. tombent de haut, tandis que la direction et l’administration sont à la rue. »

      Deux inspecteurs généraux, dépêchés par la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, sont au travail à Grenoble depuis mercredi pour tenter d’établir les responsabilités des uns et des autres. Réunis en AG ce vendredi, les enseignants et personnels de l’IEP ont voté à l’unanimité une motion de soutien à leur directrice et son équipe.

      https://www.liberation.fr/societe/sciences-po-grenoble-une-semaine-de-tempete-mediatique-sur-fond-dislamo-g
      #IEP

    • A propos de l’affaire de Grenoble : la science soumise aux passions ?

      Depuis le meurtre de Samuel Paty victime d’une campagne de délation, les tensions se multiplient dans l’enseignement et la recherche. À Grenoble, ce sont des étudiants de Sciences Po qui ont récemment dénoncé publiquement deux de leurs professeurs comme « fascistes » et « islamophobes ».

      Après Stéphane Dorin à Limoges, après Kevin Bossuet à Saint-Denis, après Didier Lemaire à Trappes, voici donc Klaus Kintzler à Grenoble. Klaus Kintzler est ce professeur d’allemand de l’université de Grenoble qui, après un différent avec l’une de ses collègues sur la scientificité du terme islamophobie, a vu son nom outé, avec celui de l’un de ses collègues, par un tag anonyme sur un mur de l’université de Grenoble, les accusant l’un et l’autre de fascisme et d’islamophobie.

      Depuis, les deux professeurs sont placés sous surveillance policière, l’enseignante qui avait échangé avec Kintzler s’est dite victime de harcèlement de sa part et a du être mise en maladie, et le laboratoire de recherche qui la soutient croule sous les injures voire les menaces.

      Dans le contexte de l’après Paty, et en plein débat autour de l’islamogauchsime, cette nouvelle affaire se révèle particulièrement complexe, et peut-être justement pour cela particulièrement révélatrice. Les tensions y sont à leur comble, y compris d’ailleurs lors de la préparation de cette émission. En jeu pourtant au départ, un simple intitulé scientifique pour une journée autour de l’égalité. Mais la Raison a besoin de la raison pour penser, c’est là sa limite. Quand les passions l’emportent, la science est-elle seulement possible ?

      https://www.franceculture.fr/emissions/signes-des-temps/nous-sommes-embarques

    • #Blanquer dans Le Parisien : le #maccarthysme_inversé

      Des professeurs sont accusés d’islamophobie, par exemple à l’IEP de Grenoble... Quel regard portez-vous sur cette affaire ?

      J’ai condamné avec fermeté ces logiques de fatwa. Toutes les idéologies, qui définissent des personnes par rapport à leurs appartenances, qu’elles soient raciales ou religieuses, avant de considérer leur appartenance à la République, mènent à des logiques de fragmentation. Ce n’est pas la société dont on a envie.

      Vous faites notamment référence à l’islamo-gauchisme, que vous avez récemment dénoncé ?

      Oui, mais pas seulement. J’ai dénoncé cela l’an dernier.Il y a aussi d’autres courants dans les sciences sociales qui ont beaucoup de mal à laisser vivre tous les courants de pensée. J’appelle cela du « #maccarthysme_inversé », qui consiste à exclure celui qui ne pense pas comme vous.

      https://www.leparisien.fr/politique/jean-michel-blanquer-on-ne-peut-fermer-l-ecole-que-lorsque-l-on-a-tout-es

      #Jean-Michel_Blanquer

    • "L’accusation d’islamophobie tue"

      Tweet officiel du Secrétariat général du #Comité_interministériel_de_prévention_de_la_délinquance_et_de_la_radicalisation (#SG-CIPDR) :

      Dans cette affaire, le terroriste est passé à l’acte pour tuer un enseignant après que ce dernier a été traité d’« islamophobe » par des militants islamistes.C’est l’accusation d’#islamophobie qui a poussé ce terroriste à assassiner #Samuel_Paty : l’accusation d’islamophobie tue.

      https://twitter.com/SG_CIPDR/status/1371504152308760582

      signalé ici sur seenthis :
      https://seenthis.net/messages/906546

    • merci pour la recension. cette histoire est tellement révélatrice des mécanismes en place, mais aussi, et ça c’est beaucoup trop gommé, de la retenue et tolérance des gens de « gauche » vis-à-vis des types comme lui...
      20 ans qu’il a semé sa petite terreur sans que rien ne bouge avant, c’est incroyable. J’avais relayé ce témoignage de Nicolas Haeringer qui l’avait comme prof y’a 20 ans et déjà... https://twitter.com/nicohaeringer/status/1368518279015370754
      Deux jours plus tard le témoignage de La Nébuleuse https://twitter.com/i_nebuleuse/status/1369204681742950406 venait enfoncer le clou...

    • Merci @val_k, je vais reprendre leurs témoignages ici, pour ne pas les perdre au cas où ils seraient supprimés.

      Témoignage 1 de @nicohaeringer, 07.03.2021 :

      Il y a 20 ans, j’ai eu (pendant trois ans) l’un des profs au cœur de la polémique sur l’islamophobie à l’IEP de Grenoble.
      Polémique dans laquelle certains s’engouffrent pour demander la #dissolutionUnef.
      Cet enseignant était assez unique. J’adorais l’allemand, et ses cours étaient géniaux : rigueur bien sûr, mais grande liberté de parole et de discussion.

      Il m’a souvent dit que s’il notait mes idées, il me mettrait 0, mais qu’il n’était là que pour noter mon allemand.
      On discutait, on s’engueulait en classe. Ça passait avec certains élèves, qui parlaient bien l’allemand et pouvaient prendre part aux discussions.
      Ça passait mal avec d’autres, qui ne pouvaient pas répondre à ses outrances verbales et ne savaient du coup pas comment se situer.
      Eux se faisaient rembarrer tant pour leurs idées que pour leur allemand et le prof ne voyait pas le malaise que ça créait.
      Il était sans filtre, jamais avare d’une exagération ou d’une provocation, parfois franchement borderline.
      Mais en même temps très proche des étudiant.e.s : on dînait chez lui, chaque année pour clore les cours, et les échanges se poursuivaient jusqu’au petit matin. Mais c’était pareil : tout le monde n’était de fait pas à l’aise.
      Par ailleurs quand on cherche à abolir la distance entre enseignant et étudiant.e.s, on n’abolit en fait pas la relation de subordination. D’ailleurs, certain.e.s le craignaient vraiment.
      En outre, même dans un cadre censément informel, il y a des choses qu’on ne peut pas dire sans y mettre les... formes, justement, puisqu’on est enseignant face à des étudiant.e.s.
      Il s’en fichait, jouait même de son côté provoc, mais nous étions nombreuses et nombreux à penser que ses outrances finiraient par le dépasser.

      20 ans après, ça semble être le cas.
      Est-ce une raison pour le jeter en pâture ? Assurément pas.
      Mais on ne peut pas non plus faire de cette histoire un avatar de la ’cancel culture’, d’autant qu’il tenait souvent des propos démesurés, pas moins outranciers que ceux qui sont utilisés aujourd’hui contre lui.
      Le problème est là. Il aurait dû être rappelé à l’ordre avant par sa hiérarchie, pour lui signifier qu’un enseignant, aussi brillant soit-il ne peut pas tout dire & ne peut pas publiquement dénigrer sans argument les travaux de ses collègues.
      Qu’il n’est pas possible de provoquer autant ses propres étudiants, sans tenir compte de ce que ça... provoque chez elles et eux. Pour moi, le vrai problème est là.
      Et parmi ses provocations régulières, il s’en prenait effectivement vertement à l’islam, en particulier après le 11 septembre 2001 (je l’ai eu en 98, 99 et 2001).
      Ça n’a pas eu de conséquences à l’époque, ça ne passe plus aujourd’hui - tant mieux.
      Il ne s’en est pas rendu compte, et personne visiblement dans la hiérarchie de l’IEP ne lui a jamais rien dit.
      L’UNEF n’y est pour rien, strictement rien et appeler à sa dissolution (a fortiori dans le contexte actuel pour les étudiant.e.s) est totalement à côté de la plaque.
      Mais c’est ce à quoi le gouvernement a ouvert la porte, en mettant sur un même plan le CCIF et génération identitaire et en fantasmant sur l’islamogauchisme à l’université.
      Dans l’affaire de Grenoble, on a un prof qui provoque, franchit les lignes rouges.
      Cette affaire devrait se régler en interne, et la direction aurait dû réagir bien avant.
      Evidemment, ça ne signifie pas qu’il soit acceptable de s’en prendre à lui & de le jeter ainsi en pâture. Mais là encore : la responsabilité n’est pas celle pointée par Marianne et cie.
      Bon et moi ça me tiraille, évidemment : j’avais beaucoup d’affection pour ce prof, malgré tout.
      Sans doute car à l’époque, je n’avais pas conscience que derrière les outrances et la provoc il n’y a pas que des idées sans conséquences mais des formes d’oppression et de domination.
      Je doute que s’il était mon prof aujourd’hui, j’aurais pu ressentir la même affection pour lui. Et oui, les temps changent et certains choses qui pouvaient « passer » il y a 20 ans ne « passent » plus aujourd’hui.
      Ça n’est pas la « cancel culture ».
      C’est simplement que certains mécanismes par lesquels s’exercent cette domination et cette oppression sont remis en cause. Tant mieux.
      La question, c’est : que fait-on de celles et ceux qui ne savent pas, ne veulent pas, ne peuvent pas en tenir compte ?
      Et la réponse ne peut pas être et ne pourra plus jamais être « on se tait, on les laisse dire et faire » - même s’il faut, évidemment, que chacun.e puisse continuer à exprimer ses opinions.

      https://twitter.com/nicohaeringer/status/1368518279015370754

      –---

      Témoignage 2 de @i_nebuleuse, 09.03.2021

      Des étudiant·es d’il y a 20 ans témoignent, moi j’aurais pu écrire plus ou moins la même chose pour des cours et propos tenus il y a un peu moins de 10 ans... et surtout j’ai même pas eu besoin de vérifier les noms des profs accusés, je savais très bien qui c’était.
      Difficile de croire que les directions successives l’ignorait, alors que les étudiant-es de toutes les promo en discutaient régulièrement. C’est la conscience et la volonté de se mobiliser qui a changé côté étudiant·es (pour ça comme pour les violences sexuelles)
      Et à un moment on ne peut pas demander de dénoncer mais pas trop fort, de se mobiliser mais surtout sans donner de noms, et d’agir « en interne » quand les directions savent très bien nous entourlouper (on est à sciences po hein) et n’agissent pas depuis 20 ans.
      Bref soutien à l ’@unefgrenoble et aux étudiant·es mobilisées dans les IEP et dans toutes les Universités. On a l’impression que ça bouge bien trop lentement et c’est vrai, mais un énorme pas a été franchi en 10 ans.
      Ah et évidemment des gens se demandent si on peut accuser à base de propos isolés ou je ne sais quoi. Non hein on parle de 20 ans de propos islamophobes tenus pas seulement en situation de débat mais dans une salle de cours devant des étudiant·es.
      Avec cette idée que la salle de classe est, justement, un espace de débat etc (comme si y’avait pas d’ascendant dans ce contexte...). Je comprends le thread que j’ai partagé, c’était aussi un prof apprécié, évidemment davantage par des personnes blanches pas visées par les propos.
      Mais bref le rapport de force s’est un peu inversé, ce qui prend de cours l’IEP c’est que dans le fond tout le monde devait être convaincu que ça resterait au chaud entre les murs de l’établissement. Hé non, c’est fini.

      https://twitter.com/i_nebuleuse/status/1369204681742950406

    • Impostures médiatiques ou postures politiques ? À propos de l’affaire Sciences Po Grenoble, d’un article de Mediapart et du Sénat

      Mediapart publie un article retraçant et analysant les événements qui ont eu lieu, à partir de novembre 2020, à Sciences Po Grenoble, quand un groupe de travail intitulé « Racisme, islamophobie, antisémitisme » a été mis au programme de la semaine de l’égalité et très durement critiqué par un enseignant du même institut. Le Défenseur des droits, interpellé, a estimé que le droit au respect de l’enseignante, membre du groupe de travail et attaquée par son collègue, a été bafoué. Le 6 mars 2021, des collages, nominatifs, sont affichés sur les murs de Sciences Po, et la nouvelle s’invite dans les médias nationaux. « Un traitement médiatique biaisé » dénoncent des enseignant·es et étudiant·es. Médiapart fait le point sur la suite des événements, à plusieurs voix.

      Pour Academia, cette relation, importante, illustre de façon exemplaire la #cancelculture — mieux dénommée « harcèlement » — que subissent les personnes minoritaires dans l’institution universitaire : les femmes, en particulier les maîtresses de conférences, et les étudiant·es. Cette culture du harcèlement repose à la fois sur le dénigrement public des personnes, mais aussi sur l’absence de réactions des institutions responsables de la protection des étudiant·es et des agent·es. On a eu tout récemment l’exemple avec l’ENS de Lyon, en dépit d’une couverture médiatique accablante, établissant comme l’établissement participe pleinement de la culture du viol dénoncée par le mouvement #MeToo. Les universités doivent cesser d’ignorer leur participation à la maltraitance active, par défaut d’action et l’omerta qu’elles organisent, de leurs personnels et des étudiant·es.

      L’ « affaire » de Sciences po est particulièrement grave, car la version des harceleurs a immédiatement été instrumentalisée par les médias qui montent la sauce « islamo-gauchiste » depuis janvier. « Il est logique de voir CNews, liée aux opérations africaines de Bolloré, militer contre l’étude des séquelles du colonialisme », écrivait Philippe Bernard dans Le Monde du 6 mars 2021. La chaîne a renchéri hier, avec l’intervention de son présentateur-vedette, qui a donné le nom d’une directrice de laboratoire, engageant aussitôt une campagne d’injures et de diffamation par les activistes d’extrême droite sur les réseaux sociaux1. L’inaction — par paresse ou par déni — des institutions explique pour l’essentiel la persistance de pratiques qui mettent en danger la santé et la sécurité des personnes victimes. Mais l’absence de lutte contre les pratiques anti-démocratiques au sein des universités met en danger les institutions elles-mêmes désormais.

      La médiatisation à outrance de l’affaire Sciences Po Grenoble a lieu dans un moment politique particulier, sur lequel Academia est déjà longuement intervenu : l’examen de la loi « confortant le respect des principes de la République » par la Commission de la Culture du Sénat, qui doit donner son « avis » sur le texte pour les sujets qui la concernent : la culture, l’éducation, l’enseignement supérieur et la recherche2.

      Or, depuis mercredi 10 mars 2020, en raison du traitement médiatique organisé par les grands groupes de presse aux puissants intérêts industriels dans l’extraction néo-coloniale et dans la vente d’armes, les attaques parlementaires se multiplient à toute vitesse, et même les organisations syndicales sont désormais visées. Ainsi, à l’Assemblée, alors que les étudiant·es connaissent la plus grave crise sociale et sanitaire depuis des dizaines d’années, une députée — Virginie Duby-Muller, première vice-présidente du parti Les Républicains, formant avec les députés Damien Abad et Julien Aubert, ainsi qu’avec le Ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, les « cadets Bourbons » de la précédente mandature — a ainsi été jusqu’à demander la dissolution de l’UNEF. Du côté du Sénat qu’Academia craint comme la peste brune, Nathalie Delattre, apparentée à gauche, co-secrétaire du Mouvement radical et sénatrice de la Gironde, vient de reprendre à son compte la demande des députés Damien Abbad et de Julien Aubert du 25 novembre dernier et exige « une commission d’enquête sur la laïcité à l’université ». Pire, sur la base des fausses informations et d’une méconnaissance ignominieuse de l’affaire de Grenoble, des amendements attaquant directement les franchises universitaires des étudiant·es – car les étudiants sont aussi protégés par les franchises, ce que certain·es semblent avoir oublié – viennent d’être déposés par le sénateur Piednoir, d’après nos informations (ces amendements ne sont pas encore publiés).

      Et pourtant, la grande orchestratrice de l’attaque contre les universitaires et les étudiant·es, Frédérique Vidal, est encore en poste.

      Cibler les universitaires dans leur ensemble : tel est l’objet de cette puissante attaque médiatique commencée il y a plus de deux mois. L’affaire Sciences Po Grenoble se trouve ainsi fallacieusement médiatisée à outrance, dans un contexte où tout est bon pour cibler individuellement ou collectivement les universitaires qui contestent la politique du gouvernement, ou mettent en cause, par leurs travaux, l’ordre patriarcal et capitaliste. C’est le cas de l’extrême droite qui recourt à ses méthodes habituelles pour stigmatiser des personnes, à l’instar de la récente « liste des 600 gauchistes complices de l’islam radicale [sic] qui pourrissent l’université et la France » par laquelle Philippe Boyer, un jardinier de Nancy aux opinions très droitières, a lié les noms de centaines de collègues ayant demandé la démission de Frédérique Vidal à leurs pages professionnelles.

      Mais qui est responsable de tout cela ? Après ce qui vient de se passer concernant les deux enseignants de Sciences Po Grenoble, le rôle des grands groupes médiatiques est évident, mais aussi celui de la ministre elle-même. Philippe Boyer lui-même ne s’y est d’ailleurs pas trompé — du moins quand les instances universitaires ont entrepris de défendre leurs agents. S’il doit être poursuivi pour diffamation ou injure, il faut également porter plainte contre la Ministre, a-t-il rétorqué.

      Toujours soutenue par Jean Castex et Emmanuel Macron, « la ministre Frédérique Vidal est entièrement responsable de la situation« . Pour la CGT FercSup, la ministre

      a créé les conditions pour que le travail, la recherche universitaires soient stigmatisés, pour que des personnels de son ministère soient montrés du doigt, dénoncés et leurs noms jetés en pâture sur la place publique. Par ses propos et déclarations, par ses attaques publiques, elle a mis en danger des personnels de son ministère, malgré les alertes et les courriers.

      « Elle a ainsi engagé sa responsabilité pénale. Elle pourra ensuite démissionner. »

      –-----

      Note 3 du billet :

      NDLR. Vincent T. est un actif contributeur à la liste Vigilance Universités qu’Academia a évoquée à plusieurs reprises. Voici les propositions qu’il fait pour l’avenir des SHS dans un courriel du 7 février 2021, à 21h43, dans un fil de discussions intitulé « Note sur la pénétration des idéologies identitaristes dans l’ESR – Re : questions en vue de l’audition » : « Le texte de présentation me paraît très bien, mais il manque un aspect essentiel : que propose Vigilance universités ? C’est très bien d’alerter, mais il faut aussi faire avancer le schmilblick.
      Pour aller droit au but, je suggère quatre pistes dont voici leurs grandes lignes :
      1/ interdire toutes les manifestations religieuses dans les locaux des universités, ce qui inclut évidemment les signes d’appartenance, mais aussi le prosélytisme direct ou indirect.
      2/ renforcer l’apprentissage de l’esprit rationnel dans les programmes des universités, ce qui inclut le développement d’une approche critique des religions, des fausses croyances et autres fadaises qui ont abouti à faire croire que le voile ou le mariage précoce sont des instruments de l’émancipation féminine
      3/ arrêter le financement des projets qui sont portés par les nouvelles idéologies décoloniales, indigénistes, néoféministes et tutti quanti
      4/ empêcher les recrutements correspondant aux sus-dites idéologies.
      Il s’agit certes d’un programme ambitieux, et sans doute un peu brutal, je le conçois, mais je pense qu’il faut désormais taper du poing sur la table. Et puis vous savez bien que dans une négociation, il faut demander beaucoup pour obtenir peu. L’interdiction de l’écriture inclusive et des signes religieux, ce serait déjà top. »

      https://academia.hypotheses.org/31564

      #Vincent_T

    • C’était en 2014, un collègue de Vicent T, Pierre Mercklé, lui répond :

      Les chiffres de l’islamophobie

      Vincent Tournier, un « collègue » grenoblois, a posté aujourd’hui un message assez déconcertant sur la liste de diffusion des sociologues de l’enseignement supérieur. En réaction à l’annonce de la conférence-débat que nous organisons le 11 avril prochain à l’occasion de la parution du prochain numéro de Sociologie, consacré à la « sociologie de l’islamophobie », voici ce que Vincent Tournier a écrit, et que je reproduis ici dans son intégralité :

      Voilà qui nous change un peu des journées d’études sur le genre. Cela dit, pour information, voici les statistiques sur les atteintes aux lieux de culte en France (source : CNCDH, rapport 2013), en prévision du numéro que vous ne manquerez pas de consacrer, j’imagine, à la sociologie de la christianophobie.

      Cordialement,

      Vincent Tournier

      –---

      Evidemment, quand il y a des chiffres, à l’appui d’un argument, je suis peut-être un peu plus attentif… Ce qu’on remarque d’abord, c’est qu’il y a des chiffres, mais qu’il manque l’argument. C’est probablement que les chiffres sont censés parler d’eux-mêmes : « voici les chiffres »… Alors qu’est-ce que Vincent Tournier veut leur faire dire ? Vue l’allusion à la « christianophobie » juste avant le tableau, j’imagine que le tableau est censé montrer une augmentation des atteintes aux lieux de culte chrétiens, qui sont bien plus nombreuses que les atteintes aux liens de culte musulmans et israélistes, ce qu’occulterait la focalisation sur une prétendue montée de « l’islamophobie ». Et de fait, le nombre d’atteintes semble bien avoir doublé entre 2008 et 2012…

      Sauf que… mon « collègue » (j’insiste sur les guillemets) lit très mal ces chiffres. Il y a au moins deux choses à en dire, qu’auraient sans doute immédiatement remarquées n’importe lequel de mes étudiants de Master…

      Premièrement, si le nombre d’atteintes aux lieux de culte chrétiens a été multiplié par 2 entre 2008 et 2012, pour les lieux de culte musulmans il a dans le même temps été multiplié… par 7 (84 divisé par 14, au cas où mon « collègue » ne saurait plus comment calculer un rapport) !

      Et deuxièmement, même pour une seule année donnée, par exemple pour 2012, la comparaison du nombre d’atteintes aux différents lieux de culte n’a aucun sens si elle n’est pas rapportée au nombre total de lieux de culte de chaque obédience, pour mesurer ce qu’on appelle une « prévalence ». En 2011, selon Wikipedia, il y avait en France 280 lieux de prière israélites, 2400 lieux de prière musulmans et 48000 lieux de prière chrétiens (catholiques et protestants). Autrement dit, le taux d’atteintes est de 143 pour 1000 pour les lieux de prière israélites, de 35 pour 1000 pour les lieux de prière musulmans, et de 11 pour 1000 pour les lieux de prière chrétiens. On pourrait même être encore plus rigoureux, en rapportant au nombre de lieux de prière non pas la totalité des atteintes, mais seulement les atteintes aux lieux de prière. Cela revient à retirer du calcul les atteintes aux cimetières, ce qui se justifie par le fait d’une part que 99,6% des atteintes aux cimetières chrétiens ne sont pas identifiées comme des atteintes racistes (les 0,4% restants sont associés à des inscriptions satanistes ou néo-nazies, selon le rapport 2012 de la CNCDH, pp. 132-133 : www.cncdh.fr/sites/default/files/cncdh_racisme_2012_basse_def.pdf), et d’autre part que l’islamophobie n’y trouve pas non plus une voix d’expression, puisqu’il n’y a qu’un seul cimetière musulman en France (à Bobigny). Il reste alors, en 2012, 100 atteintes pour 1000 lieux de prière israélites, 35 atteintes pour 1000 lieux de prière musulmans, et 7 atteintes pour 1000 lieux de prière chrétiens. Autrement dit, un lieu de prière musulman a 5 fois plus de risques d’être atteint qu’un lieu de prière chrétien… On se fera une idée plus complète de la réalité statistique de l’islamophobie, cela dit, en se reportant justement aux chapitres « Chiffrer l’islamophobie » et « Des opinions négatives aux actes discriminatoire » du récent livre d’Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed (Islamophobie, La Découverte, 2013, voir le compte rendu de Damien Simonin dans Lectures : https://journals.openedition.org/lectures/12827), justement invités de notre débat du 11 avril : https://journals.openedition.org/sociologie/2121.

      La question est du coup la suivante : mon « collègue » est-il nul en statistiques, ou bien est-il de mauvaise foi ? Dans cet article de la Revue française de sociologie paru 2011 (https://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RFS_522_0311), il utilisait également des données quantitatives pour démontrer que « les conditions actuelles de la socialisation des jeunes musulmans favorisent un ensemble de valeurs et de représentations spécifiques susceptibles de provoquer des tensions avec les institutions tout en donnant un certain sens à la violence ». La manipulation y était plus habile : je penche donc pour la seconde hypothèse. Mais dans un cas comme dans l’autre, il est permis de s’interroger sur la porosité persistante des critères de la science dans notre discipline.

      https://pierremerckle.fr/2014/03/les-chiffres-de-lislamophobie

    • Professeurs accusés d’islamophobie : « Cette affaire est une illustration des pressions politiques et économiques qui s’exercent sur l’université »

      Un collectif d’enseignants de l’Institut d’études politiques de Grenoble s’alarme, dans une tribune au « Monde », de l’#instrumentalisation après le collage sauvage d’affiches mettant en cause deux enseignants.

      –------

      Depuis plusieurs jours, l’Institut d’études politiques de Grenoble et le laboratoire Pacte sont au centre de l’attention médiatique et de campagnes haineuses et calomnieuses sur les réseaux sociaux à la suite du collage sauvage d’affiches mettant en cause très violemment deux enseignants accusés d’islamophobie et de fascisme.

      Les enseignants, chercheurs, étudiants, personnels et responsables de ces deux institutions ont apporté aux deux enseignants attaqués un soutien très clair en condamnant fermement l’injure et l’intimidation dont ils ont été victimes dans un contexte particulièrement inquiétant. Ce collage, qui a fait l’objet d’une saisine du procureur de la République par la directrice de l’Institut d’études politiques, est odieux. Il met en danger non seulement les deux enseignants cités mais aussi l’ensemble des personnels et des étudiants qui forment notre communauté et sur lesquels pèse aujourd’hui un poids trop lourd à porter.

      Incendie médiatique hors de contrôle

      En dépit de ce soutien, nous assistons à la propagation d’un incendie médiatique apparemment hors de contrôle dans lequel se sont associées des forces qui dépassent largement le cadre auquel aurait dû se limiter ce collage, y compris pour assurer la sécurité des personnes citées. Cet incendie est attisé depuis plus d’une semaine par les commentaires de ceux qui, tout en ignorant généralement les circonstances de cette affaire, s’en emparent pour stigmatiser la prétendue faillite de l’université et la conversion supposée de ses enseignants, particulièrement dans les sciences sociales, à l’« islamo-gauchisme ».

      Les circonstances qui ont conduit aux collages commencent à être connues. Parmi elles, les pressions inacceptables exercées en novembre et décembre 2020 pour faire supprimer le mot « islamophobie » d’une conférence organisée par l’Institut ont joué un rôle déterminant. Il appartient désormais aux différentes instances qui sont saisies des faits de rétablir la vérité qui a été tordue et abîmée sur les plateaux de télévision et les réseaux sociaux.

      Il nous revient en revanche, comme enseignants et comme chercheurs, d’alerter sur la gravité de ce qui est en train de se passer depuis ces collages. Nous assistons en effet à la mise en branle dans les médias d’un programme de remise en cause inédite des libertés académiques – en matière de recherche comme d’enseignement – ainsi que des valeurs du débat intellectuel à l’université.

      Les principes du débat d’idées

      La première liberté qui a été bafouée dans cette affaire n’est pas, en effet, la #liberté_d'expression ou d’opinion, comme le prétendent de nombreux commentateurs mal informés brandissant à contresens l’argument de la #cancel_culture. Les deux enseignants visés par les collages ont en effet eu tout loisir de s’exprimer pendant cette affaire.

      Ce qui est en jeu, et qu’ils ont délibérément refusé de respecter, ce sont les principes du #débat_d'idées dans le cadre régi par l’université. Au premier rang de ces principes figure la nécessité de faire reposer son enseignement et ses recherches sur l’analyse des faits et de les séparer clairement de l’expression de valeurs, de la manifestation de préjugés et de l’invective.

      Cette affaire est une illustration des pressions politiques et économiques qui s’exercent aujourd’hui sur l’université dans son ensemble en France. Comment ne pas voir dans les tensions qu’a connues notre établissement ces derniers mois, un des effets de la misère psychique et matérielle imposée à toute la communauté académique – particulièrement aux étudiants – par la pandémie et la fermeture des campus.

      Dans ce contexte, où chacun frôle et certains dépassent l’épuisement, invoquer seulement la « radicalisation gauchiste » des syndicats étudiants, c’est alimenter une polémique dont l’agenda politique est assez évident au vu des acteurs qui ont porté cet argument.

      Parole violemment hostile aux sciences sociales

      Comment ne pas voir non plus derrière la libération généralisée d’une parole violemment hostile aux sciences sociales sur les plateaux de télévision l’effet d’une stratégie politique navrante du gouvernement depuis des mois.

      Celle-ci a culminé, il y a quelques semaines, avec le projet d’une enquête sur la prétendue « #gangrène » de l’« islamo-gauchisme » dans nos disciplines. Il est difficile de trouver des raisons autres que purement électorales aux chimères « islamo-gauchistes » du gouvernement, lesquelles ont soulevé de très vives protestations dans toutes les parties de l’espace académique. Il nous paraît aussi évident qu’en soufflant sur les braises depuis des mois le gouvernement a inspiré l’offensive contre les sciences sociales à laquelle nous assistons aujourd’hui.

      Le sentiment qui nous envahit est un mélange de #colère et de #tristesse. La tristesse de voir triompher ceux qui pratiquent la #censure et piétinent la tradition d’#ouverture et d’#argumentation_rationnelle du #débat_intellectuel, préférant manier l’#outrance, le #mépris et l’#ironie. La tristesse de les voir préférer le soutien des défenseurs les plus extrêmes de la pensée réactionnaire à la critique de leurs pairs. La colère de constater les ravages causés par leurs propos sur tous nos étudiants et sur notre communauté.

      La colère encore de voir le nom de Samuel Paty [professeur d’histoire-géographie assassiné, à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), le 16 octobre 2020] entraîné dans une polémique idéologique à laquelle il est étranger et instrumentalisé pour organiser des campagnes haineuses à l’encontre d’enseignants, de chercheurs en sciences sociales, d’étudiants et de membres du personnel administratif des universités.

      Il nous reste heureusement la possibilité de retourner à notre travail. Celui que nous faisons toutes et tous depuis des années en délivrant des cours et en animant des débats argumentés sur des enjeux non moins sensibles que l’islam, comme la colonisation, les génocides et les crimes contre l’humanité, le terrorisme, la place de la science dans la société, les pratiques policières, les politiques migratoires, le populisme, le racisme, la domination masculine, le genre et la sexualité, les crises écologiques ou encore les inégalités. Pour combien de temps encore ?

      Liste complète des signataires (tous enseignent à Sciences Po Grenoble) :

      Stéphanie Abrial, ingénieure de recherche en science politique

      Marie-Charlotte Allam, enseignante-chercheure en science politique

      Chloë Alexandre, enseignante-chercheure en science politique

      Amélie Artis, m aîtresse de conférences en économie

      Gilles Bastin, professeur de sociologie

      Renaud Bécot, m aître de conférences en histoire

      Céline Belot, chargée de recherches en science politique

      Marine Bourgeois, m aîtresse de conférences en science politique

      Arnaud Buchs, maître de conférences en économie

      Hélène Caune, maîtresse de conférences en science politique

      Laura Chazel, enseignante-chercheure en science politique

      Camille Duthy, enseignante-chercheure en sociologie

      Frédéric Gonthier, professeur de science politique

      Florent Gougou, maître de conférences en science politique

      Martine Kaluszynski, directrice de recherche en science politique

      Séverine Louvel, maîtresse de conférences en sociologie

      Antoine Machut, enseignant-chercheur en sociologie

      Raul Magni-Berton, professeur de science politique

      Sophie Panel, maîtresse de conférences en économie

      Franck Petiteville, professeur de science politique

      Simon Persico, professeur de science politique

      Catherine Puig, professeure agrégée d’espagnol

      Sébastian Roché, directeur de recherches en science politique

      Guilaume Roux, chargé de recherches en science politique

      Simon Varaine, enseignant-chercheur en science politique

      Robin Waddle, professeur agrégé d’anglais

      Sonja Zmerli, professeure de science politique

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/17/professeurs-accuses-d-islamophobie-cette-affaire-est-une-illustration-des-pr

    • Zwei Professoren müssen um ihr Leben fürchten

      Wegen angeblicher Islamophobie haben Studenten in Grenoble zwei Hochschullehrer angeprangert. Die Politik verurteilt den „Versuch der Einschüchterung“. Der Fall weckt Erinnerungen an den enthaupteten Lehrer Samuel Paty.

      Zwei Universitätsprofessoren in Grenoble müssen um ihr Leben fürchten, weil Studenten ihre Namen in großen Lettern an das Unigebäude plakatiert und sie der Islamophobie bezichtigt haben. „Faschisten in unseren Hörsälen! Professor K. Entlassung! Die Islamophobie tötet!“, stand an der Fassade. Auch in den sozialen Netzwerken hielten die von der Studentengewerkschaft Unef unterstützten Aktivisten den beiden Professoren islamfeindliche Haltungen vor. Knapp fünf Monate nach der Ermordung des Geschichtslehrers Samuel Paty durch einen Islamisten hat die neue Affäre Frankreich aufgeschreckt.

      (paywall)

      https://www.faz.net/aktuell/politik/ausland/islamophobie-in-grenoble-professoren-muessen-um-ihr-leben-fuerchten-17233557.ht

      –-> ce qui se dit en Allemagne : 2 profs ont peur pour leur vie...

    • Hochschullehrer in Gefahr wegen angeblicher „islamophober“ Einstellungen

      An der Universität von Grenoble lehnte ein Professor die Gleichsetzung von Antisemitismus mit „Islamophobie“ ab. Damit trat er eine gewaltige Welle der Entrüstung los. Aktivistische Studentengruppen brandmarkten ihn und seine Unterstützer als „Faschisten“ und warfen ihnen vor, selbst „islamophob“ zu sein. Die beigeordnete Innenministerin Marlène Schiappa kritisiert die Vorwürfe der Aktivisten scharf und sieht deutliche Parallelen zum Fall Samuel Paty.

      Professor Klaus Kinzler von der Universität in Grenoble steht neuerdings im Licht der Öffentlichkeit, seit er von einer Kampagne der Studentengewerkschaft UNEF (Union nationale des étudiants de France) medial als Rechtsextremer und Islamhasser diffamiert wird. Studenten hatten zusätzlich zu ihrer Rufmordkampagne in großen Lettern an das Universitätsgebäude „Faschisten in unseren Hörsälen! Professor Kinzler Entlassung! Die Islamophobie tötet!“ plakatiert, wie die FAZ berichtete.
      Was war geschehen?

      Kinzler, der als Professor für deutsche Sprache und Kultur am Institut des Sciences Po bereits seit 25 Jahren angestellt ist, äußerte in einem Mailverlauf mit einer Kollegin Ende 2020 Kritik an den Inhalten und dem Titel eines Universitätsseminars, welches Antisemitismus, Rassismus und Islamophobie gleichwertig nebeneinander behandeln sollte: „Ich habe mich beispielsweise dagegen gewehrt, dass Rassismus, Antisemitismus und Islamophobie in einem Atemzug genannt werden“, erklärte Kinzler. „Die Diskriminierung von Arabern fällt in meinen Augen unter die Kategorie Rassismus und hat nichts mit Islamophobie zu tun. Die ersten beiden sind im Übrigen Straftatbestände, die Islamophobie ist es nicht. Der Begriff ist einfach zu schwammig“, rechtfertigte der Professor sich für seine Kritik. Für ihn seien Rassismus, welcher der Sklaverei zugrunde liege, oder Antisemitismus für etliche Tote verantwortlich, während es keine bekannten Todesopfer von Islamophobie gebe. Er zweifle nicht daran, dass es auch Anfeindungen gegen Muslime gebe, jedoch sei es nicht rechtfertigbar, diese auf die gleiche Stufe wie Antisemitismus und Rassismus zu stellen.

      Er selbst zeigte sich offen für eine Diskussion über den Begriff der Islamophobie, welcher durchaus begründbar auch als „Propagandawaffe von Extremisten“ bezeichnet werden kann. Daraufhin wurde Klaus Kinzler jedoch aus der Arbeitsgruppe zum Seminarinhalt ausgeschlossen. Vincent T., ebenfalls Politikprofessor, sprang seinem Kollegen in Folge zur Seite und geriet auf Facebook ebenfalls ins Visier der Studentengewerkschaft UNEF. Eine Kollegin aus Kinzlers Institut zeigte sich über dessen Aussagen so empört, dass sie sich kurzerhand eine Woche krankschreiben ließ. Die Affäre zog laut Kinzler im Anschluss ohne sein weiteres Zutun immer weitere Kreise und erreichte nun sogar die politische Bühne.

      So verteidigte die beigeordnete Innenministerin Marlène Schiappa das Recht des Professors, seine Einschätzung zu dem Begriff der Islamophobie kundzutun und kritisierte die Kampagne der studentischen Aktivisten scharf: „Nach der Enthauptung Samuel Patys ist das eine besonders widerliche Tat, denn er war genauso den sozialen Netzwerken zum Fraß vorgeworfen worden“, erklärte Schiappa im Fernsehsender BFM-TV. „UNEF hat in Kauf genommen, die beiden Professoren in Lebensgefahr zu bringen“, zeigte sich die Politikerin empört und bezeichnete es als verstörend, dass die Studentengewerkschaft in den sozialen Netzwerken zu einer beleidigenden Hasskampagne gegen die Professoren mobil gemacht habe. Der lokale Verantwortliche der Gewerkschaft Thomas M. weigerte sich, ebenfalls auf BFM-TV, die Aktion zu verurteilen und sprach sich für das Recht der Studierenden aus, die „islamophobe Haltung“ ihrer Professoren zu kritisieren.

      Auch Marine Le Pen griff die Debatte dankend auf und sah sich darin bestätigt, dass es an Universitäten eine „abstoßende, sektiererische Islamo-Linke gibt, die keine Grenzen kennt“. Das Verhalten der Aktivisten spielt somit auch der rechtspopulistischen Partei Frankreichs Rassemblement National in die Hände, der Marine Le Pen vorsteht.
      „Intellektueller Terrorismus“

      Mittlerweile hat sich auch die Staatsanwaltschaft in Grenoble wegen öffentlicher Beleidigung und Sachbeschädigung eingeschaltet. Die Hochschulministerin Frédérique Vidal verurteilte den „Versuch der Einschüchterung“ von Universitätsprofessoren, der nicht toleriert werden könne. Sie ordnete eine interne Untersuchung am Institut d’études politiques von Grenoble zu dem Fall an. Eine ihrer Vorgängerinnen im Hochschulministerium, die Regionalratspräsidentin der Hauptstadtregion Valérie Pécresse, nannte die Vorkommnisse an der Universität sogar „intellektuellen Terrorismus“.

      Beinahe ironisch mutet die Diffamierungskampagne gegen Kinzler an, wenn man die Tatsache berücksichtigt, dass der gebürtige Schwabe mit einer Muslimin verheiratet ist. „Ich habe wirklich keinen Kreuzzug gegen den Islam geplant. Ich wollte nur das Konzept der Islamophobie kritisch hinterfragen“, rechtfertigte sich der Professor und kündigte an, sich nach der unfreiwilligen Öffentlichkeit, die ihm zuteil wurde, nun eine Auszeit zu gönnen.

      Als Märtyrer will Klaus Kinzler sich nicht bezeichnen, auch will er sich nicht mit dem ermordeten Samuel Paty gleichsetzen, jedoch sieht er eine Gefahr in der Dynamik der Debattenkultur: „Wenn es so weitergeht, dann können wir unsere Uni eigentlich zusperren, das Gebäude verkaufen und einen Supermarkt daraus machen. Wozu dann noch ein Institut d’études politiques, wenn man jeden schützen müsse vor Argumenten, die ihm nicht gefallen würden?“, warnt der Professor vor einer im eigenen „Safe Space“ dauerempörten Studentenschaft.

      Solche Fälle, in denen an Universitäten Dozenten für meist vernünftig begründbare Meinungen und Aussagen von aktivistischen Gruppen heftiger, diffamierender Kritik ausgesetzt sind, stellen leider mittlerweile keine Einzelfälle mehr dar. In Deutschland wurde etwa Susanne Schröter für ihre Kritik am Politischen Islam zur Zielscheibe von empörten Studenten und Aktivisten. Für die USA lässt sich der Biologieprofessor Bret Weinstein beispielhaft erwähnen, der für seine Kritik an der universitären Praxis des „Day of Absence“, bei dem keine weißen Personen an der Universität erscheinen sollten, schlussendlich als Rassist dargestellt wurde und seine universitäre Laufbahn beenden musste.

      Die Universitäten und ihre Vertreter knicken nur allzu oft vor lautstark empörten Aktivisten ein. Auch die Ausladung von Rednern oder das Niederbrüllen von Diskutanten reihen sich in derartige Fälle ein. Ein solches Klima an Hochschulen lässt sich an vielen Orten feststellen und könnte zur ernsthaften Gefahr für die Meinungsfreiheit und die Debattenkultur werden.

      https://hpd.de/artikel/hochschullehrer-gefahr-wegen-angeblicher-islamophober-einstellungen-19081

    • Wegen Kritik an Islamophobie-Begriff: Hochschullehrer in Frankreich als Faschist beschimpft

      Der deutsche Hochschullehrer in Frankreich Klaus Kinzler hat den Begriff „Islamophobie“ kritisiert und wird seitdem von Kollegen und Studenten als „Faschist“ angefeindet. In einem Interview mit der „Welt“ erklärte er, was es damit auf sich hat und wie es in Frankreich um die Debattenkultur bestellt ist.
      In den sozialen Medien sei er im Rahmen einer Kampagne der Studentengewerkschaft durch den Schmutz gezogen worden. Dort habe man ihn als Rechtsextremisten und Islamophoben dargestellt, erzählt der 61-Jährige. Später hätten Studenten seinen Namen mit dem Slogan „Islamophobie tötet“ an den Wänden plakatiert. Nach seiner Ansicht rührt diese Feindseligkeit von einer mangelnden Diskussionsbereitschaft.

      „Debattiert oder gestritten wird nicht mehr, weil sich Leute verletzt fühlen könnten. Das ist es, was sich in den letzten Jahren verändert hat: Es gibt einen politischen Aktivismus, der sich als Wissenschaft verkleidet. Es gibt eine Sensibilität und Verletzlichkeit, das, was Caroline Fourest die ‚Generation Beleidigt‘ nennt“, eklärt er gegenüber der Welt.

      Klaus Kinzler unterrichtet seit 25 Jahren deutsche Sprache und Kultur an dem Institut des Sciences Po, einer privaten Elitehochschule in Grenoble. Seitdem er in einem E-Mailaustausch mit einer Kollegin den Begriff „Islamophobie“ kritisiert hat, ist er mit Anfeindungen konfrontiert. Nach seinen Worten wurde er sogar zusammen mit einem anderen Kollegen als „Faschist“ gebrandmarkt. Das will er sich nicht gefallen lassen und setzt sich mit Argumenten zur Wehr.

      An Begriff „Islamophobie“ Streit entfacht
      Von Frankreich hätten viele das Bild, dass es ein laizistisches Land sei, in dem die Religion kritisiert werden dürfe. Aber es gebe Tabus, an die man nicht rühren dürfe, so der Hochschullehrer weiter.

      „Ich habe mich beispielsweise dagegen gewehrt, dass Rassismus, Antisemitismus und Islamophobie in einem Atemzug genannt werden“, erklärte Kinzler. „Die Diskriminierung von Arabern fällt in meinen Augen unter die Kategorie Rassismus und hat nichts mit Islamophobie zu tun. Die ersten beiden sind im Übrigen Straftatbestände, die Islamophobie ist es nicht. Der Begriff ist einfach zu schwammig.“

      Eine Gleichsetzung des Begriffs mit Antisemitismus lehnt der Hochschullehrer ebenfalls ab. Letzterer habe Millionen Tote zur Folge gehabt, Genozide ohne Ende. Dann gebe es Rassismus, Sklaverei. Auch das habe in der Geschichte zu zig Millionen Toten geführt. „Aber wo seien die Millionen Toten der Islamophobie?“

      „Ich bestreite nicht, dass Menschen muslimischen Glaubens diskriminiert werden. Ich weigere mich nur, das auf die gleiche Stufe zu stellen. Ich halte das für ein absurdes Täuschungsmanöver.“
      Angst vor Auseinandersetzungen an Unis
      Dass ihn die Studenten zur Zielscheibe von Anfeindungen gemacht hätten, findet Kinzler mit Blick auf die Debatte um die Islamophobie sogar nützlich, „sonst wäre das ja wieder unter den Teppich gekehrt worden“. Er stellt auch nicht in Abrede, dass sie mit Sicherheit nichts vortäuschten und sich wirklich verletzt fühlten. In Bezug auf Studenten wiederum, welche auf umstrittene Themen sensibel reagieren würden, meint der Hochschullehrer:

      „Wer böse ist, könnte sagen: Sein Platz ist nicht an der Uni, wenn er sich durch Argumente verletzt fühlt. Aber bei uns tut man alles, damit sie nicht verletzt werden. Man erspart ihnen jede Form von Auseinandersetzung. Das ist ja das Skandalöse.“
      Wenn es so weitergehe, dann können „wir unsere Uni eigentlich zusperren“, das Gebäude verkaufen und einen Supermarkt daraus machen, kritisiert er. Wozu dann noch ein „Institut d’études politiques“, wenn man jeden schützen müsse vor Argumenten, die ihm nicht gefallen würden?
      In dem Zusammenhang spricht er von „safes spaces“, Sicherheitsblasen. Diese würden dafür geschaffen, damit die jungen Menschen nicht behelligt würden mit Dingen, mit denen man sich früher selbstverständlich auseinandergesetzt habe.
      „Wir haben hier an unserem Institut viele Lehrkräfte, die den Studenten nach dem Mund reden und die Vorurteile, die sie schon haben, bekräftigen. Einer wie ich stört. Für viele bin ich hier: ‚Klaus, der Extremist‘. 25 Jahre lang war das schlimmste Schimpfwort Liberaler oder Neo-Liberaler. Jetzt bin ich Rechtsradikaler, ein Islamophober und ein Faschist“, beklagt Kinzler.
      „Ich bin kein Märtyrer“
      Laut Kinzler schlägt ihm eine offene Feindseligkeit entgegen. Von den 50 Kollegen seien 35 gegen ihn, „sie hassen mich inzwischen“. Nur 15 stünden auf der Seite der Freiheit. Auch seine Direktorin habe sich nicht hingestellt und gesagt: „Der Kinzler ist ein Demokrat und kein Faschist.“
      Vor dem Hintergrund der islamistisch motivierten Enthauptung des Schullehrers Samuel Paty geht Kinzler auch auf die Frage ein, ob er nun Angst habe. Seine Antwort: Nein. Die Aktion der Studenten gegen ihn zeige aber, dass sie keine erwachsenen, verantwortlichen Personen seien. Er will aber auch nicht mit dem ermordeten Lehrer verglichen werden.
      „Ich fühle mich aber auch nicht als Samuel Paty. Ich bin kein Märtyrer. Ich stehe nur zu meinen Überzeugungen. Ich bin auch nicht der Opfertyp, sondern war immer ein Kämpfer. Wenn mich jemand angreift, dann wehre ich mich. Den Vergleich mit Samuel Paty finde ich eher unpassend und vielleicht sogar gefährlich.“
      Der 47-jährige Geschichtslehrer Samuel Paty war Mitte Oktober 2020 von einem 18 Jahre alten Angreifer nahe Paris ermordet worden. Das von Ermittlern als islamistisch motivierter Terrorakt eingestufte Verbrechen löste im ganzen Land Entsetzen aus. Paty hatte das Thema Meinungsfreiheit gelehrt und dabei Karikaturen des Propheten Mohammed gezeigt. Der 18-Jährige, der von der Polizei getötet wurde, hatte dies zuvor in sozialen Netzwerken als sein Tatmotiv angegeben.
      Sind Sie in den sozialen Netzwerken aktiv? Wir auch! Werden Sie SNA-Follower auf Telegram, Twitter oder Facebook! Für visuelle Inhalte abonnieren Sie SNA bei Instagram und YouTube!

      https://snanews.de/20210309/islamophobie-hochschullehrer-beschimpft-1208300.html

    • Die Sozialstruktur der Infektionen

      Im Interview mit der SZ beklagt Soziologe Oliver Nachtwey, dass es in Deutschland keine Statistiken zu sozialen Aspekten der Coronakrise gibt. Und er hat eine Vermutung, warum das so ist. In der NZZ kritisiert die Kunstsoziologin Nathalie Heinich die „Vermischung zwischen Aktivismus und Forschung“ in den Geisteswissenschaften, ebenso der Altphilologe Jonas Grethlein in der FAZ. In Grenoble solidarisieren sich Professoren mit zwei als „Islamophobe“ attackierten Kollegen... äh, nicht so wirklich.

      Wissenschaft
      In Grenoble sind zwei Professoren in sozialen Medien und über Graffiti an Uni-Gebäuden als „Islamophobe“ und Faschisten an den Pranger gestellt worden (unser Resümee). In Frankreich hat die Affäre nach dem Mord an Samuel Paty, der mit einer ähnlichen Kampagne anfing, Aufsehen erregt. Hadrien Brachet berichtet für die Zeitschrift Marianne über die Atmopshäre an der Uni Grenoble, wo sich Professoren in einem Papier äußerten: „Merklich hin- und hergerissen zwischen der Verurteilung der Graffiti und Sympathie für andere Kollegen beklagen sie in dem Kommuniqué ’gefährliche Handlungen’ und rufen zur ’Befriedung’ auf, ohne jedoch eine Unterstützung der Angegriffenen zu formulieren. Der Repräsentant des wichtigsten Studentenverbands prangert seinerseits eine ’instrumentalisierte Polemik’ an und fordert sogar Sanktionen gegen die beiden der ’Islamophobie’ bezichtigen Professoren an.“ In der Welt wird Klaus Kinzler, einer der beiden attackierten Professoren, interviewt, das Interview steht leider nicht online.

      Der „Islamogauchismus“, die Allianz zwischen linken Intellektuellen und reaktionären Islamisten, ist nicht das Hauptproblem an den französischen Universitäten, meint die Kunstsoziologin Nathalie Heinich im Interview mit der NZZ, sondern „die Vermischung zwischen Aktivismus und Forschung. ... Wenn wir so weitermachen, entwickelt sich die Uni zu dem Ort, an dem in Dauerschleife rein ideologische Arbeiten über Diskriminierung entstehen. Damit man mich richtig versteht: Gegen Diskriminierung zu kämpfen, ist absolut richtig und legitim - in der Arena der Politik. Es gibt Parteien und Assoziationen dafür. An der Uni dagegen sind wir angestellt, um Wissen zu schaffen und weiterzugeben, und nicht, um die Welt zu verändern.“

      Der klassische Philologe Jonas Grethlein erzählt auf der Geisteswissenschaften-Seite der FAZ aus Cambridge und Oxford, wo Altphilologen Sensibilisierungskurse über ihren „strukturellen Rassismus“ belegen sollen und kritisiert Bestrebungen, sein Fach nach den Kriterien der „Critical Race Theory“ um den amerikanischen Althistoriker Dan-el Peralta neu zu orientieren: „Dan-el Peralta, Professor für römische Geschichte in Princeton, hat wiederholt festgestellt, als Schwarzer und Immigrant könne er Unterdrückung und andere Phänomene in der Antike anders und besser erschließen als seine weißen Kollegen. Hier wird die Identität des Wissenschaftlers zum Grund für neue Erkenntnisse, die Identitätslogik ist mit der Erkenntnislogik verbunden. ... Altertumswissenschaftler betrachten vergangene Kulturen wie die Antike im Horizont ihrer eigenen Zeit. Aber wenn dieser Horizont so übermächtig wird, dass sie die antiken Werte und Praktiken primär als Bestätigung oder Widerspruch zu ihren eigenen Vorstellungen sehen, dann verspielen sie die Möglichkeit, neue Perspektiven auf die Gegenwart zu gewinnen.“

      https://www.perlentaucher.de/9punkt/2021-03-10.html

    • Faut écouter cette séquence avec les deux avocates de Vincent T. pour y croire :

      Prof accusé d’islamophobie : son avocate dénonce des « accusations déshonorantes qui mettent sa vie en danger »

      Début mars, des collages anonymes ont imputé à deux professeurs de Sciences Po Grenoble des propos islamophobes. L’un d’entre eux va porter plainte « contre tous ceux qui l’ont calomnié », ont affirmé ses avocates sur BFMTV.

      « On le diabolise, on le stigmatise, on le traite d’islamophobe et on le tétanise. » Depuis plusieurs jour, Vincent Tournier est au coeur d’une polémique à l’Institut d’études politiques de Grenoble. Lui et un autre professeur ont été nommément visés par des affichettes sur les murs de l’école les accusant d’islamophobie.

      « Il n’a pas compris la brutalité et l’étendue de l’agression intellectuelle dont il a fait l’objet (...) Le contenu de son enseignement est totalement détourné », le défend l’une de ses avocates, Me #Aude_Weill-Raynal, sur BFMTV ce vendredi.

      A l’origine de ces tensions, l’appel lancé par l’Union Syndicale de Sciences Po Grenoble sur Facebook demandant aux étudiants de témoigner sur d’éventuels « propos problématiques » qui auraient été tenus lors du cours de Vincent Tournier de « Méthodes des sciences sociales ». Ce dernier a alors exigé par mail que les étudiants appartenant au syndicat « quittent immédiatement (ses) cours et n’y remettent jamais les pieds ».

      Le professeur s’apprête à déposer plainte

      Dans cette escalade, le syndicat a déposé plainte pour « discrimination syndicale », finalement classée sans suite depuis. « Vincent Tournier a un cours sur l’islam. Il y a tenu des propos qui ne sont peut-être pas dans la ligne de ce que certains attendaient pour le disqualifier », commente son avocate.

      Et Me #Caroline_Valentin, son autre conseil, d’ajouter : « Cette accusation est déshonorante et met sa vie en danger, il a eu peur, il s’est senti outragé. »

      L’avocate affirme que son client - qui bénéficie désormais d’une protection mise en place par le ministère de l’Intérieur - va porter plainte « contre tous ceux qui l’ont calomnié ».

      –---

      Sur les syndicats étudiants, Me Caroline Valentin affirme que l’islamophobie est le « délit de #blasphème. L’islam c’est le blasphème musulman. » (minute 3’40)

      https://www.bfmtv.com/police-justice/prof-accuse-d-islamophobie-son-avocate-denonce-des-accusations-deshonorantes-

      –---

      Sur l’islamophobie comme « délit de blasphème », voir aussi #Zineb_El_Rhazoui, à partir de la minute 1’12 :

      "Pour moi l’accusation d’islamophobie n’est que le terme occidental pour dire blasphème. (...) Dans le monde musulman, là où l’islam a le pouvoir coercitif, on n’a pas accusé les gens d’islamophobie, on les a tout bonnement accusées de blasphème. Cette accusation n’étant pas possible ici en occident, on invente cette accusation d’islamophobie qui est un mot-valise absurde, on psychiatrise l’autre, on l’accuse d’être phobique, donc c’est quelque chose qui relève de la psychiatrie. Et naturellement doit-on blâmer les gens d’avoir peur. Doit-on blâmer les gens d’avoir peur ? Quand un enfant à peur, la réaction naturelle, c’est de le consoler, de le rassurer et non pas de le blâmer à cause de ça.


      https://twitter.com/lci/status/1371161097747726340

    • Sur la page wikipedia du laboratoire pacte, le 21.03.2021 :

      En 2021, la presse évoque le cas de deux professeurs accusés d’« islamophobie » dont les noms ont été placardés sur les murs de l’IEP suscitant des craintes pour leur sécurité. Fin 2020, l’un des enseignants avait exprimé ses doutes quant à la pertinence du concept d’islamophobie utilisé pour désigner des discriminations dont feraient l’objet des musulmans en raison de leur religion. Il refuse notamment que ce terme soit accolé à celui d’antisémitisme. Une chercheuse en désaccord après un échange de courriels se plaint alors de « harcèlement ». En décembre, dans un communiqué officiel signé par Anne-Laure Amilhat Szary, directrice du laboratoire, le PACTE avait apporté son soutien à Claire M., l’enseignante, qui s’était plainte de harcèlement6. Pour Klaus Kinzler, le professeur incriminé, c’est d’abord le laboratoire Pacte qui a publié un communiqué officiel l’accusant sans « aucun fondement de harcèlement et de violence, d’atteinte morale violente » contre sa collègue7.


      https://fr.wikipedia.org/wiki/Laboratoire_Pacte

    • De quoi la campagne contre l’«islamo-gauchisme» est-elle le nom?

      La campagne idéologique réactionnaire lancée par le gouvernement a le mérite de poser clairement les lignes de démarcation : un #fascisme rampant qui organise la chasse à courre contre les intellectuels idéologiques de l’égalité, de l’#internationalisme et de l’#émancipation. Annihiler les « islamogauchistes » c’est vouloir supprimer la #subversion de la #pensée_engagée.

      L’enquête

      Les derniers événements de l’IEP de Grenoble ont été l’objet d’une minutieuse et précise enquête de 15 pages, publiée dans Mediapart par le journaliste David Perrotin, enquête référentielle qui permet d’appréhender les différentes étapes de l’affaire. Cette enquête incarne une idée simple mais peu appliquée dans le métier journalistique et médiatique - qui n’a pas fait d’enquête n’a pas droit à la parole, une logique requise pour se forger un point de vue, au-delà des faits.

      SURTOUT se rappeler que le point de départ de cette affaire et son point central, ce sont les charges répétées, et réussies par ailleurs, d’un professeur de l’IEP pour supprimer le mot « islamophobie » lors d’une préparation à une conférence organisée par l’IEP dans la cadre de la semaine pour l’égalité intitulée « racisme, antisémitisme, islamophobie ».

      Pour l’enseignant, le mot islamophobie ne pouvait se trouver accolé au mot antisémitisme parce que cela représentait « une insulte aux victimes réelles (et non imaginaires) du racisme et de l’antisémitisme ».

      Le raisonnement

      Légitimer le statut de #victime comme seul référent catégoriel pour situer la place des musulmans des arabes et des juifs dans l’histoire réduit considérablement la visibilité du pourquoi ils sont, ou pas, désignées « #victimes ».

      Pour le professeur, en effet, les agressions et les propos anti-musulmans, les discriminations contre les populations arabes, tout cela regroupé sous le nom contemporain d’islamophobie n’existeraient pas, sinon de l’ordre de l’affabulation.

      Il s’agit selon ses mots d’effacer toute trace d’une réalité réelle en France, les faits connus, relatés par les tribunaux ou par les médias des agressions physiques et des propos antimusulmans.

      Dire que tout cela n’existe pas puisque c’est #imaginaire, c’est vouloir effacer un réel discriminatoire pour se dispenser d’en regarder les effets dévastateurs, sinon s’en dédouaner.

      À la lecture de ces propos, on peut se poser légitimement la question de savoir qui sont les affabulateurs. Ceux qui sont désignés, ou celui qui les désigne.

      Ou bien le professeur ne lit pas les journaux et ne regarde pas les médias qui relatent les incidents islamophobes, ou bien il s’agit de quelque chose de plus grave dont ses propos seraient le nom.

      Le professeur dit « ne pas avoir de sympathie pour l’islam ». C’est son droit.

      Mais si les musulmans inventent et imaginent être des victimes,

      Si, selon lui, ils n’ont pas le droit d’être positionnés à côté des victimes juives, si seuls les #juifs peuvent bénéficier du statut de victimes, ces propos installent une obscène #hiérarchie_victimaire,

      Si les victimes musulmanes sont imaginaires, il s’agit rien moins que d’invalider l’#histoire_coloniale française, celle de la #guerre_d'Algérie, entre autres, où, si on suit le raisonnement du professeur, il n’y aurait eu aucune victime. La guerre coloniale française étant sans doute, dans l’esprit des musulmans, une #affabulation.

      Enfin, il n’est pas interdit de penser, toujours selon le raisonnement du professeur, que si les musulmans sont affabulateurs de leur victimisation, ils le sont encore plus de leur propre histoire, de leur révolte anti-coloniale.

      La guerre de libération nationale algérienne contre l’empire colonial français doit être un pur fantasme musulman.

      Nous sommes bien au-delà de propos « hautement problématiques » comme le faisait remarquer la directrice de l’IEP.

      Ces propos hallucinants sont à recadrer dans un contexte plus large, celui de la campagne lancée par le gouvernement et relayée par la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et l’innovation, Frédérique Vidal.

      La ministre a annoncé vouloir demander une enquête au CNRS sur « l’islamogauchisme » qui, selon elle, « gangrène la société dans son ensemble et l’université en particulier ». Retenons l’ordre, société d’abord, université ensuite.

      Sur ce terme valise et attrape-tout, la ministre, interviewée par Jean Pierre Elkabach sur CNEWS a repris à son compte l’expression proposée par le journaliste « il y a une sorte d’alliance entre Mao Tsé-toung et l’ayatollah Khomeini ».Alain Finkelkraut en 2010 dénonçait déjà l’islamogauchisme comme « l’union des gens de l’immigration et d’intellectuels progressistes ».

      Ne rions pas, la chose est dite.

      De quoi cela est-il le nom ?

      Qu’est ce qui est visé par l’expression « #gangrène_islamogauchiste » ?

      Est ciblée une idéologie progressiste, l’union possible de ceux qu’on appelle aujourd’hui les prolétaires nomades et des intellectuels, des prises de position sur l’égalité et l’internationalisme, un corpus de travaux, de publications sur l’héritage colonial dans les sociétés des anciennes puissances coloniales.

      Ces études examinent, mettent en perspective l’héritage colonial toujours actif qui se manifeste, entre autres, par un #racisme_culturel levant haut le drapeau de la « supériorité » de la chère civilisation occidentale, par une succession de lois discriminatoires et par des actes de racisme

      Travailler à démonter cet #héritage_colonial dans le contemporain est une réponse, parmi d’autres, pour contrer l’hydre identitaire qui revient en force dans le monde actuel.

      Résumons l’idéologie de la campagne.

      Islamo, signifierait altérité, autre, islamistes, ex colonisés, musulmans, bref une multitude de sens exprimant les variations contemporaines d’un racisme anti musulman et arabe ,

      gauchiste, ce qui reste- ou plutôt revient en première ligne, comme arme de pensée et de réflexion sous le substrat générique de marxisme, à savoir l’anti identitaire, l’internationalisme, l’égalité, l’émancipation.

      La #subjectivité

      C’est donc une bataille contre tous les intellectuels, penseurs et acteurs engagés de l’émancipation.

      Il y a aussi dans cet acharnement réactionnaire, une bataille contre la « subjectivité » de l’engagement, c’est-à-dire contre « le #parti_pris » d’un individu qui le transforme en sujet pensant. Les « islamo gauchistes » sont des gens qui pensent, qui ont des idées, des batailles, qui écrivent et qui s’engagent pour elles. Annihiler les « islamogauchistes » c’est vouloir supprimer la subversion de la #pensée_engagée.

      Penser, c’est violent, me disait déjà une élève.

      Penser c’est prendre parti, s’engager pour une idée et c’est bien cet #engagement_subjectif qui est visé frontalement.

      C’est donc une #bataille_idéologique et politique de grande envergure que le gouvernement a décidé de lancer. Et pour ce faire, parce qu’il la prend très au sérieux et nous aussi, il lance ses chiens, ses meutes intellectuelles, ses piqueurs de tout bord dont l’extrême droite, entre autres, pour, rien moins qu’éradiquer, supprimer cet espace subjectif et politique

      L’imposture

      L’#imposture est cependant complète. Pour expliquer sa campagne dans l’opinion, il désigne comme seuls idéologues, porteurs de « fatwah », censeurs de la liberté d’opinion et de la liberté académique, les professeurs, les enseignants chercheurs, les étudiants mobilisés, les agents administratifs,

      les désignant comme « gangrène, ceux qui se situent« entre Mao Tsé-toung et l’ayatollah Komeini » (si ce n’est pas idéologique ça), comme identitaires et communautaristes…

      S’intéresser à l’histoire coloniale de son pays équivaudrait donc à être identitaire.

      Il laisse se déchainer les réseaux sociaux qui organisent contre ces enseignants, un harcèlement mortifère.

      La directrice du Laboratoire Pacte reçoit tous les jours des menaces de mort et voit sa photo publiée sur les réseaux sociaux avec notamment pour légende « Être nostalgique des années 40 ».

      Pour ceux qui n’auraient pas encore compris ou qui feignent ne pas comprendre, ceux qui hurlent contre les islamo-gauchistes hurlent aussi contre ceux, appelés dans les années 40, « les judéo-bolchéviques ». Le même procédé est à l’œuvre : islamo versus judéo, bolchéviques versus gauchistes Mao, même gangrène. On connait la suite.

      Ceux qui organisent la campagne violente contre l’émancipation traitent leurs cibles de sectaires, de censeurs et d’idéologues. Vieux procédé de retournement que nous retournons contre eux.

      Cette #campagne_idéologique réactionnaire lancée par le gouvernement a le mérite de poser clairement les lignes de démarcation : un fascisme rampant qui organise la #chasse_à_courre contre les intellectuels idéologiques de l’égalité, de l’internationalisme et de l’émancipation.

      Propositions

      La riposte ne peut être qu’internationale.

      Renforçons les liens de solidarité avec ceux qui ont pris position dans les journaux contre cette campagne,

      échangeons par le biais d’une feuille de journal,

      une sorte de « lettre internationale » qui formerait réseau, récolterait les informations sur les différentes situations, les articles, les prises de position, les propositions à venir.

      Sol. V. Steiner

      https://blogs.mediapart.fr/sol-v-steiner/blog/190321/de-quoi-la-campagne-contre-l-islamo-gauchisme-est-elle-le-nom

    • Et cette Une de Valeurs actuelles...


      Censure, sectarisme… L’université française, le laboratoire des fous

      L’affaire de Sciences Po Grenoble révèle un enseignement supérieur soumis à la censure, au sectarisme et aux délires progressistes. Récit d’une dérive.

      Trente-cinq ans d’enseignement paisible, puis la bascule. Klaus Kinzler a eu le malheur de récuser la pertinence scientifique du terme d’"islamophobie", le voilà accusé d’islamophobie. Et, bien sûr, de fascisme. Avant lui, Sylviane Agacinski, Alain Finkielkraut, François Hollande (!) s’étaient vu refuser l’accès à l’université par des étudiants peu soucieux de se frotter à la contradiction. Pièces de théâtre annulées, conférences empêchées, professeurs placardisés... La censure n’est pas nouvelle. La décapitation de Samuel Paty aura quand même réveillé des consciences assoupies : cette fois-ci, le professeur peut compter sur quelques soutiens publics. D’autres persistent à nier.

      Jean Sévillia, lui, n’est pas franchement étonné, qui signait un livre intitulé le Terrorisme intellectuel il y a vingt et un ans... Aujourd’hui très éloigné du monde universitaire, il convoque pourtant le souvenir de ses propres années de fac : « Le variant est l’idéologie dominante, l’invariant réside dans les méthodes employées pour la défendre. » À l’époque, les affrontements physiques sont quasiment quotidiens dans le Quartier latin, et les tentatives d’ostracisme omniprésentes. « On retrouve les vieilles méthodes efficaces de l’antifascisme : mensonge, amalgame, diabolisation et stigmatisation », développe le journaliste. Stalinisme, tiers-mondisme, marxisme, antiracisme, européisme... Les sujets changent mais quiconque s’interpose est déclaré fasciste. Sévillia concède cependant une différence de taille : « À l’époque, le professeur pouvait demander à l’élève estampillé fasciste de dérouler ses arguments dans l’amphithéâtre. » Les élèves lisent alors, le débat est encore possible.

      Les nouveaux révolutionnaires ne font même plus semblant de débattre ; débattre, c’est déjà accorder le point à son adversaire.

      Un bond dans le temps et l’on se retrouve dans la très progressiste université d’Evergreen, aux États-Unis. Entre-temps, la French theory s’est exportée outre-Atlantique. C’est sur ce campus que le professeur Bret Weinstein a tenté de s’opposer à la tenue d’une journée interdite aux élèves blancs. Suffisant pour que les étudiants le poussent vers la sortie, sans autre forme de procès. L’enseignant a bien tenté de rappeler qu’il avait « toujours voulu parler du racisme, l’étudier... », les étudiants n’ont pas attendu la fin de sa phrase pour clore le débat : « On n’a pas besoin de l’étudier, on le vit. »

      Les nouveaux révolutionnaires ne font même plus semblant de débattre, ils se drapent dans une victimisation très largement fantasmée pour consacrer l’inutilité de la connaissance. Débattre, c’est déjà accorder le point à son adversaire. On pourrait se rassurer en accablant les États-Unis... puis on entend Geoffroy de Lagasnerie. Philosophe et sociologue, l’autoproclamé héritier — bien français —de Bourdieu, Deleuze et Derrida est au micro de France Inter le mercredi 30 septembre dernier, lorsqu’il expose très sereinement sa pensée : « Le but de la gauche, c’est de produire des fractures, des gens intolérables et des débats intolérables dans le monde social. [...] je suis contre le paradigme du débat », entame-t-il. Le jeune professeur insiste : « J’assume totalement le fait qu’il faille reproduire un certain nombre de censures dans l’espace public, pour rétablir un espace où les opinions justes prennent le pouvoir sur les opinions injustes. » Qui serait alors chargé de discriminer le juste et l’injuste ? Lagasnerie refuse que ce soit la loi, il préfère que ce soit « l’analyse sociologique ». De telles déclarations ne provoquent pas l’indignation des étudiants, encore moins des professeurs.

      Et pourtant, c’est bien cette "analyse sociologique" qui inquiète par son sectarisme inversement proportionnel à son exigence académique. Lorsque la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, ose évoquer la pénétration de « l’islamo-gauchisme » à l’Université, la réaction est immédiate : tribune des présidents d’université, appels à la démission, indignation du CNRS... Pourquoi ? Le manque d’assise scientifique du terme. Silence, en revanche, lorsque des chercheurs abusent des concepts d’islamophobie, de privilège blanc ou de violences de genre. Et pour cause : certains travaux universitaires s’appliquent désormais à légitimer les concepts générés par les cultural studies américaines, plus militantes qu’académiques.

      Les études scientifiques en question

      En 2017, une journaliste et deux universitaires anglo-saxons ont tenté de dénoncer le phénomène. « Soyons clairs, nous ne pensons pas que les sujets comme le genre, la race ou la sexualité ne méritent pas d’être étudiés », expliquait alors l’un des universitaires avant de poursuivre : « Le vrai problème, c’est la façon dont ces sujets sont actuellement étudiés. Une culture émerge dans laquelle seules certaines conclusions sont autorisées : comme celles qui désignent systématiquement la blancheur de peau ou la masculinité comme la cause du problème. » Ils ont donc rédigé une vingtaine d’études bidon qu’ils ont ensuite proposées à des revues universitaires dotées d’un comité de relecture par des pairs. Résultat ? Sept papiers ont été acceptés, quatre publiés.

      Il faut se pencher sur ces études pour saisir l’ampleur du malaise : l’une d’elles s’intitule "Réactions humaines face à la culture du viol et performativité queer dans les parcs à chiens urbains de Portland, Oregon", une autre affirme que les hommes peuvent combattre leur « homohystérie » par l’usage d’un sextoy, une autre encore — qui avait reçu des retours plutôt enthousiastes — préconisait de faire porter des chaînes fictives aux élèves blancs pour les confronter à la « fragilité de leurs privilèges ».

      L’expérience n’a pas été réalisée en France, mais les universitaires les plus militants abusent déjà du vocabulaire légitimé par de semblables "études". En face, des conférences sont annulées, des thèses refusées, des professeurs virés... Et la contestation s’affaiblit. C’est cet état des lieux qui poussait récemment la sociologue et philosophe Renée Fregosi à déclarer sur FigaroVox qu’« il serait plus important de garantir le pluralisme des approches théoriques et des méthodes d’analyse ». L’enjeu ? Non plus seulement protéger, mais rétablir la liberté académique. Faute de quoi seront dégainées à l’infini les accusations d’homophobie, de xénophobie, de transphobie, de racisme, de fascisme pour empêcher tout débat... et triompherait vraiment le totalitarisme de la bêtise.

      https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/societe/censure-sectarisme-luniversite-francaise-le-laboratoire-des-fous-1

    • #Gilles_Bastin (sociologue du laboratoire pacte) sur twitter, 14.03.2021 :

      #IEPGrenoble Comme promis quelques remarques sur un point très important de ce qui est en train de se passer dans l’espace public autour de l’idée selon laquelle la « #liberté_d'expression » n’est plus garantie l’Université.
      C’est un thème que l’on retrouve répété à l’envi par la personne qui se présente depuis des jours sur les plateaux télé comme une victime de la censure de ses collègues. Beaucoup d’articles de presse ont commencé à parler de l’affaire sous cet angle.
      Et malheureusement j’ai entendu au cours de la semaine qui vient de s’écouler de nombreuses personnes sensées parler aussi de « liberté d’expression », de la nécessité de la garantir à toutes et tous, etc.
      Un des premiers problèmes qui se pose si l’on accepte cette lecture de l’affaire c’est qu’il se trouvera toujours un juriste pour dire que l’islamophobie n’est pas punie en tant que telle par la loi en France…
      … et que la seule limite à son expression est la #diffamation. Cela me semble problématique et complètement non pertinent ici pour trois raisons :
      1. Dans l’affaire qui a commencé avec les échanges d’e-mails mis sur la place publique, la ligne de défense de la personne qui se plaint aujourd’hui d’avoir été empêché de s’exprimer consiste à dire qu’il n’a jamais diffamé notre collègue organisatrice de la conférence.
      Mais ce n’est pas ce qui lui est reproché ! Le @Defenseurdroits qui est saisi de l’affaire le dit d’ailleurs très bien en pointant le non respect du devoir de réserve d’une part et du principe de laïcité d’autre part.
      Pour le dire autrement, la liberté d’expression est une chose, la préservation d’un espace public pacifié par le #devoir_de_réserve et la laïcité en est une autre.
      La stratégie des « guerriers » (sic) de la liberté d’expression (une version actualisée de la stratégie de la terre brulée) conduit à la disparition de tout espace possible pour que s’exerce cette liberté pour celles et ceux qui se refusent à user des mêmes armes qu’eux.
      Mais ça, le juge pénal ne peut pas s’en saisir, semble-t-il…
      2. Quelles sont les conséquences de l’incendie ? L’institution a essayé de l’éteindre sans abandonner le cadre d’analyse légal en termes de liberté d’expression. Ceci a conduit la collègue organisatrice à accepter de retirer le projet de conférence.
      La leçon : les guerriers (re-sic) de la liberté d’expression ont réussi à faire retirer un mot qui ne leur plaisait pas d’une manifestation organisée dans une Université. Cela s’appelle de la #censure ! Au nom de la liberté d’expression si l’on veut mais de la censure !
      Cela s’appelle aussi, pour utiliser un terme dont se sont délectés les plateaux télé sans comprendre qu’ironiquement il fallait l’appliquer à leur invité et pas à ses collègues « islamo-gauchistes », de la #cancel_culture (faire supprimer un mot dans une conférence…).
      3. j’ajoute un point vraiment important et qui n’a pas été soulevé jusque là : le cadre « liberté d’expression » autorise aussi dans cette affaire deux hommes blancs non musulmans à dire dans l’espace public, sans que rien ne les arrête, que l’islamophobie n’existe pas.
      Il n’est pas nécessaire d’avoir lu Goffman ou Fanon (mais ça aide) pour comprendre qu’il y a là une façon choquante de nier l’#expérience_vécue de celles et ceux qui, musulmans ou présumés tels, ont une autre perception des choses sans avoir les moyens ou l’envie de l’exprimer
      Bref, il me semble nécessaire d’abandonner la référence à la question de la liberté d’expression dans l’analyse des faits qui ont conduit à l’incendie #IEPGrenoble et de poser d’autres questions qui sont au moins aussi importantes pour l’avenir du #débat_public.

      https://twitter.com/gillesbastin/status/1371105738202959873

    • Tribune : « Oui, il y a une haine ou une peur irrationnelle des musulmans en France »

      Deux Insoumis de la région grenobloise ont réagi à la tribune de la députée de l’Isère #Emilie_Chalas consacrée aux termes “islamo-gauchisme” et “islamophobie” (https://www.placegrenet.fr/2021/03/13/tribune-emilie-chalas-islamo-gauchisme-islamophobie/457979). Julien Ailloud, co-animateur d’Eaux-Claires Mistral Insoumis Grenoble, et Amin Ben Ali, co-animateur de Tullins insoumise, tous deux signataires de l’appel du Printemps Isérois (https://www.placegrenet.fr/2021/01/07/elections-departementales-la-gauche-essaie-de-sunir-au-sein-du-printemps-iserois/425133), livrent une réplique au vitriol au point de vue de la parlementaire LREM. En novembre 2019, ils avaient déjà signé une tribune pour exprimer leur fierté concernant l’appel de la France insoumise de participer à la #marche_contre_l’islamophobie.

      Nombreux sont les intellectuels qui ont, depuis les élections présidentielles et législatives de 2017, analysé le discours des “marcheurs”. Au-delà des anglicismes, du vocabulaire type « start-up » et de la traditionnelle langue de bois, les macronistes ont une spécificité commune : celle de déstructurer la langue et le langage. La récente tribune d’Émilie Chalas ne déroge pas à cette mauvaise habitude, à la fois médiocre et cynique.

      Prenant pour prétexte l’actualité à l’IEP de Grenoble, Émilie Chalas n’analyse en rien ces évènements. Elle s’appuie sur ce fait divers pour faire le procès des tenants de l’« islamo-gauchisme », qu’elle dit minoritaires, alors que la ministre Frédérique Vidal nous parlait « d’une société gangrenée » par ce mal. La réalité, c’est que la distance entre l’extrême droite et la majorité parlementaire s’est encore réduite, cette analyse de la ministre intervenant quelques jours après que Gérald Darmanin ait trouvé Marine Le Pen insuffisamment préoccupée par l’islam, trop « molle » selon lui.

      Alors, dans le débat public, nous avons d’abord eu droit à l’utilisation du mot « #islamisme » dans son utilisation politique, mais sans savoir qui la ministre visait. En effet, à entendre les débats parlementaires sur la loi contre les séparatismes, une femme voilée est une islamiste en puissance mais, « en même temps », d’après le président de la République lui-même, manifester contre les violences policières comme en juin 2020 est une manifestation du séparatisme… De là à penser que, dans la tête de la majorité, tous les islamistes sont séparatistes et tous les séparatistes sont islamistes, il n’y a qu’un pas.

      « Un flagrant délit de contradiction » concernant le terme islamophobie

      Nous avons ici un flagrant délit de contradiction : alors que LREM et ses alliés passent leur temps à se dire « pragmatiques », ils ont en réalité les deux pieds dans l’idéologie, faute de prendre en compte le travail sérieux des chercheurs et enquêteurs, repoussant (ou ne s’intéressant pas) aux travaux universitaires et aux rapports ministériels. Ces derniers démontrent pourtant que le processus de radicalisation n’est que très peu influencé par « l’#islamisme_politique ». Il ne s’agit pas d’un déni que de le dire.

      Les recherches d’#Olivier_Roy, spécialiste renommé de l’islam, et les rapports de #Dounia_Bouzar, responsable de la déradicalisation sous le mandat de François Hollande, expliquent très clairement qu’il n’existe pas de continuum entre « islamisme » et « terrorisme ». Le terrorisme se nourrit de paramètres variés et complexes : penser que combattre l’islamisme politique suffirait à combattre le terrorisme relève soit de la naïveté, soit de l’incompétence.

      Concernant plus précisément la tribune de Mme Chalas, il est terrible d’observer qu’une députée soit aussi légère dans l’utilisation des mots et dans le maniement des concepts. Nous expliquant sans sourciller que le terme islamophobie vient de l’islam radical, elle change de version dans le même texte en disant que ce terme « a été créé en 1910 par des administrateurs-ethnologues français pour désigner “un #préjugé contre l’islam” »… mais qu’il serait instrumentalisé pas les islamistes ; et notamment « les frères musulmans » qui sont, comme tout le monde sait, si influents en France.

      Il convient ici de noter que de toute sa tribune, Mme la députée ne mentionnera pas les nombreuses organisations nationales et internationales qui prennent au sérieux le terme et le concept d’islamophobie : Commission nationale consultative des droits de l’Homme en France, Conseil de l’Europe, Conseil des droits de Homme de l’Onu, etc.

      « Face aux dominants, soutien aux dominés »

      Dans le même temps, Mme Chalas nous explique que le terme d’« islamo-gauchiste » ne souffre d’aucune #récupération_politique de l’extrême droite, en justifiant qu’il fut créé par un chercheur du CNRS au début des années 2000 pour désigner le soutien des organisations de gauche à la lutte palestinienne. À cet instant, la rigueur de notre députée ne l’interroge pas sur le fait qu’un terme inventé pour une définition précise soit utilisée pour dénoncer tout autre chose, ou encore que cette expression ait été en sommeil pendant des années, absente du débat public jusqu’à ce que les politiciens et médias d’extrême droite ne la remettent en circulation. C’est au mieux un manque de précision et, au pire, une #manipulation_politique grossière…

      Bien entendu, il ne sera fait aucune mention du fait que la Conférence des présidents d’université (CPU) a refusé l’emploi de ce terme, tout comme le CNRS lui-même dans un communiqué intitulé « L”“islamo-gauchisme”n’est pas une réalité scientifique ».

      Il n’est pas nécessaire d’être députée pour saisir que la prise de position d’une institution pèse plus lourd qu’un seul de ses chercheurs dont le terme a été galvaudé depuis sa création.

      Cette tribune d’Émilie Chalas aura au moins permis quelques avancées. Nous savons maintenant qu’en plus de pervertir les mots, les macronistes souffrent d’un défaut conséquent de rigueur scientifique et méthodologique, dévoilant au grand jour leur absence de colonne vertébrale intellectuelle. Et alors que le monde entier commémore les deux ans de l’attentat de Christchurch contre deux mosquées, Mme Chalas choisit cette séquence pour nier l’islamophobie, malgré 51 victimes causées par Brenton Tarrant, par ailleurs donateur et « membre bienfaiteur » de l’association récemment dissoute Génération identitaire.

      En ce qui nous concerne, une chose est certaine : oui, il y a une #haine et/ou une #peur_irrationnelle des musulmans et des musulmanes en France, quel que soit le terme pour l’exprimer. Le fait que plusieurs médias et membres du personnel politique les pointent régulièrement pour cible n’y est pas étranger. Il ne s’agit pas d’« islamo-gauchisme » que de le dire, mais simplement de rendre compte des tensions qui traversent notre société, comme l’a récemment rappelé un sondage dont 43 % des répondants trouvent qu’il y a trop de musulmans en France. Et face à ce constat, nous nous tenons à la ligne que notre famille politique à toujours tenue : face aux dominants, soutien aux dominés !

      Julien Ailloud & Amin Ben Ali

      https://www.placegrenet.fr/2021/03/20/tribune-oui-il-y-a-une-haine-ou-une-peur-irrationnelle-des-musulmans-en-france/464663

      signalé par @cede ici :
      https://seenthis.net/messages/907660

      Tribune d’Emilie Chalas ci-dessous dans le fil de discussion.

    • Émilie Chalas : « Islamo-gauchisme, islamophobie, de quoi parle-t-on à travers ces mots ? »

      Suite à l’affaire des collages nominatifs contre deux professeurs de Sciences Po Grenoble accusés d’islamophobie, Émilie Chalas, députée LREM de l’Isère et conseillère municipale d’opposition de Grenoble a tenu à réagir. Elle appelle ainsi à « la nécessaire clarification des lignes des uns et des autres » sur les termes “laïcité”, “islam politique”, et “islamo-gauchisme”.

      Les récentes actualités obligent à ce que les lignes des uns et des autres soient clarifiées.

      A Trappes, nous avons eu affaire au témoignage d’un professeur qui en dit long sur la #radicalisation_islamiste d’une minorité en France qui exerce une pression agressive et grandissante. Cette pression, construite autour d’arguments qui esquivent les vraies questions, est un réel danger pour la laïcité, pour l’égalité entre les femmes et les hommes, pour la République.

      A Sciences Po Grenoble, on accuse et on jette en pâture des professeurs au nom d’une « islamophobie » présumée. Ces enseignants témoignent ouvertement d’un climat hostile, qui devient parfois insoutenable dans nos universités. Ce qui se passe tragiquement à Grenoble est l’exemple de faits qui s’enchaînent, et qui provoque la surenchère et l’exacerbation de ceux qui font de la propagande politique avec un outil à la mode : le mot « islamophobie ».

      Déni et surenchère

      Dès qu’il est question de radicalisation islamiste, quelle que soit la ville et quel que soit l’événement, surgissent deux postures anti-républicaines et déconnectées de la réalité. Le déni d’un côté, et la surenchère de l’autre.

      La France subit une montée en puissance de l’islamisme politique, portée par une minorité anti-républicaine qui n’a d’autre objectif que de détruire nos valeurs de liberté, d’égalité, et de fraternité. C’est un fait. Une autre minorité estime que ces faits sont faux et que tout cela n’est pas si grave, que ces sujets seraient « montés en épingle » par les médias et les politiques, ces derniers qu’elle qualifie bien sûr d’extrême-droite, quelle que soit leur sensibilité.

      On arrive même à entendre des discours de #victimisation qui renverse la responsabilité victime/bourreau. C’est le #déni.

      De l’autre côté, il y a la surenchère d’une troisième minorité, celle-ci d’extrême droite, qui porte des discours racistes et anti-musulmans et affirme que tous les musulmans sont radicalisés.
      Sortir de ce clivage des extrêmes et prendre de la hauteur permet de poser quelques réalités et quelques bases d’un débat un peu plus sain pour répondre aux questionnements qui sont aujourd’hui présents en France.

      Le problème de l’islamisme existe bel et bien en France

      Contre le déni et la surenchère, il faut l’affirmer et le réaffirmer haut et fort : oui, le problème de l’islamisme existe bel et bien en France. Et non, ce problème d’islamisme n’est pas insurmontable. Non, la bataille n’est pas perdue. Non, la situation n’est pas irréversible. C’est justement notre cause.

      Dans certaines villes, comme à Grenoble, certains élus surfent sans sourciller dans le déni en affirmant qu’il n’y a aucun véritable problème et que tous ceux qui en perçoivent sont des fascistes ou, à minima, des anti-musulmans. Ce qui est faux bien évidement.

      Certains jouent d’ambiguïté avec l’islamo-gauchisme.

      De quoi parle-t-on alors à travers ce mot ?

      La définition pourrait être la suivante : l’islamo-gauchisme est l’idéologie gauchiste de l’indulgence et de l’excuse à l’égard de l’islamisme radical pouvant aller jusqu’à la minimisation, voire la dénégation de sa dangerosité, car l’#idéologie_gauchiste voit dans l’islamisme radical un allié dans sa lutte contre le capitalisme et dans sa stratégie de convergence des luttes de tous les opprimés.

      « Islamo-gauchisme », un terme qui émane du CNRS…

      Selon l’islamo-gauchisme, c’est parce les musulmans sont aujourd’hui les nouvelles classes populaires et qu’elles sont par conséquent les nouvelles victimes du capitalisme, par l’exploitation, la domination, la discrimination et la ghettoïsation, que l’islamisme radical est né et s’est développé pour précisément défendre ces nouvelles classes populaires musulmanes et mener une lutte révolutionnaire contre le capitalisme.

      Et c’est là, selon l’islamo-gauchisme, la raison politiquement nécessaire et donc suffisante pour laquelle il faudrait faire preuve d’une certaine indulgence et d’une bonne dose d’excuses à l’égard de l’islamisme radical, et en faire un allié.

      Par ailleurs, soyons bien vigilants : le terme “islamo-gauchisme” n’est pas un terme d’extrême droite, ni un terme inventé par l’extrême droite. C’est un terme relatif à des travaux de recherche sur des faits politiques concrets, travaux de recherche qui émanent du CNRS. En effet, c’est #Pierre-André_Taguieff, politologue, sociologue, historien des idées et directeur de recherche au CNRS, qui a forgé le terme d’islamo-gauchisme en 2002 en observant l’alliance idéologique et politique entre la gauche révolutionnaire et l’islamisme radical qui défilait dans les rues lors des manifestations pro-palestiniennes au début des années 2000 suite à la deuxième Intifada.

      « Islamophobie », un terme issu de l’idéologie islamiste radicale

      Alors que le terme d’islamo-gauchisme émane de recherches menées au CNRS sur la base d’observations factuelles, le terme d’islamophobie émane, lui, de l’idéologie islamiste radicale. C’est en effet un terme vieux de plus d’un siècle (il a été créé en 1910 par des administrateurs-ethnologues français pour désigner « un préjugé contre l’islam » répandu dans les populations chrétiennes) qui a été récupéré par les Frères musulmans et certains salafistes. Et ce pour condamner, non pas les préjugés chrétiens contre l’islam, mais toute critique contre l’islamisme radical, en prétendant que critiquer l’islamisme radical, c’est critiquer l’islam, et critiquer l’islam c’est se rendre coupable de racisme anti-musulman.

      L’islamo-gauchisme est par ailleurs une réalité pour bon nombre de nos concitoyens. Selon un #sondage en date du 19 février 2021, effectué par Ifop-Fliducial, 58 % des Français considèrent que « l’islamo-gauchisme est une réalité ». Un autre sondage du 23 février 2021, réalisé par Odoxa-Blackbone consulting, obtient les chiffres de 69 % des Français qui affirment qu’il y a en France « un problème avec l’islamo-gauchisme ». Selon ce même sondage Odoxa-Blackbone consulting, 66 % des Français sont « d’accord avec les propos de Frédérique Vidal sur l’islamo-gauchisme à l’université ».

      Voilà des résultats de sondages qui, pour le moins, interpellent.

      Sans aucun doute, il y a matière à débattre sans honte, sans crainte, sans reproche, et à vérifier ce qu’il se passe dans nos associations et dans nos universités pour reprendre l’actualité. Ni raciste, ni anti-musulman, ce débat doit avoir lieu sans tomber dans la surenchère, qui ferait là le lit de l’extrême droite et de l’islamisme politique.

      Ne nous laissons pas piéger : les valeurs et les principes de la République française sont notre cause.

      Émilie Chalas

      https://www.placegrenet.fr/2021/03/13/tribune-emilie-chalas-islamo-gauchisme-islamophobie/457979

    • Le modèle #Sciences_Po dans la tourmente avec les #polémiques sur la « #culture_du_viol » et l’« #islamophobie »

      Ces épisodes font suite à deux autres événements à très haute tension : la vague #sciencesporcs, lancée le 7 février par une ancienne élève de l’IEP de Toulouse, la blogueuse féministe #Anna_Toumazoff, pour dénoncer « la culture du viol » dont se rendraient « complices » les directions des IEP en ne sanctionnant pas systématiquement les auteurs de #violences_sexistes et sexuelles. Enfin, le 4 mars, le placardage des noms de deux professeurs d’allemand et de science politique sur les murs de l’IEP de Grenoble, accusés de « fascisme » et d’ « islamophobie », après avoir signifié, avec véhémence parfois, leur opposition à une collègue sociologue sur la notion d’islamophobie. Le syndicat étudiant US a appelé à suspendre un cours d’un de ces enseignants dans le cas où son appel à témoignages lancé sur Facebook permettrait d’établir le caractère islamophobe de certains contenus.

      https://seenthis.net/messages/909152

    • Sciences Po Grenoble, un repaire d’« islamogauchistes » ?

      La découverte de collages accusant deux professeurs d’être des fascistes relance l’emballement médiatique contre l’"islamogauchisme" à l’université. La gravité de l’affaire tient bien sûr à l’injure dont ces enseignants sont victimes. Elle tient aussi à la polémique que les médias fabriquent, exposant deux chercheuses à la vindicte publique et appelant à la censure des savoirs critiques. (Mars 2021)

      L’#emballement_médiatique autour de l’affaire de l’IEP de Grenoble dévoile les méthodes d’une agressive campagne de #disqualification des #savoirs_critiques à l’université. L’affaire commence le 4 mars par la découverte d’un acte aussi choquant que dangereux : juste en dessous de l’inscription « Sciences Po Grenoble », gravée au-dessus du porche d’entrée, des collages s’étalent : « Des fascistes dans nos amphis. X et Y démission. L’islamophobie tue ». Deux enseignants de l’établissement, un professeur d’allemand et un maître de conférences en science politique, sont attaqués nommément et publiquement. Les affiches sont immédiatement retirées, mais l’UNEF de Grenoble en relaie les photographies sur les réseaux sociaux, avant, deux jours plus tard et alors que la polémique enfle déjà, de les supprimer (https://twitter.com/unefgrenoble/status/1368523235101380609), de s’excuser et de condamner l’affichage.

      Le ministère de l’Enseignement et de la recherche (MRSEI) diligente une mission de l’Inspection générale de l’Éducation, le ministère public ouvre une enquête pour #injure_publique et dégradation de biens et les enseignants sont mis sous protection policière. Un mois plus tard, le déroulement des faits n’est toujours pas établi officiellement et les coupables restent inidentifiés. La gravité de l’affaire tient bien sûr à l’injure dont ces enseignants sont victimes ainsi qu’à leur exposition à de potentielles vengeances terroristes : le traumatisme né de l’assassinat de Samuel Paty continue de nous bouleverser. Mais elle tient également à la manière dont l’un d’eux a utilisé sa mise en lumière médiatique pour sacrifier d’autres collègues à la #vindicte_publique, en exploitant la fable dangereuse d’un supposé « islamogauchisme » à l’université.

      Dans les médias vrombissants, ce dont l’ « islamogauchisme » est le nom

      Dans un contexte post-traumatique, on aurait pu s’attendre à ce que les médias protègent l’identité des deux victimes et, en l’absence de coupables identifiés, soient prudents avant d’accuser. Pourtant, des chaînes de télévision, de radio, des journaux surexposent immédiatement le professeur d’allemand. Celui-ci peut dénoncer en boucle, dans un tourbillon de paroles, les résultats d’une « campagne de haine » de la part de ses collègues qu’il qualifie à l’occasion de « grandes gueules » (https://www.cnews.fr/videos/france/2021-03-09/il-y-une-majorite-de-mes-collegues-qui-me-hait-maintenant-le-temoignage-de) ou de « têtes de béton » (https://www.cnews.fr/videos/france/2021-03-09/il-y-une-majorite-de-mes-collegues-qui-me-hait-maintenant-le-temoignage-de). Sans précaution, sans enquête, sans donner la parole à d’éventuel·les contradicteur·rices, des journalistes, des éditorialistes, des chroniqueur·euses, des essayistes extrapolent à partir d’un récit qu’ils et elles ne vérifient pas.

      Alors que résonnent encore les paroles de Frédérique Vidal à l’Assemblée nationale (https://www.soundofscience.fr/2671) qui déclarait vouloir lancer une enquête contre les sciences sociales, l’affaire de l’IEP de Grenoble autorise le #procès_médiatique du concept d’islamophobie dans le champ académique. L’enjeu n’est plus même d’établir si l’université serait « gangrénée » : ce qui est asséné, c’est l’urgence de la surveiller … pour sauver la liberté de pensée.

      Tout est allé très vite, puis il y eut ce moment vertigineux où, sur le plateau de Cnews (https://www.valeursactuelles.com/societe/video-il-y-a-une-pression-a-vouloir-interdire-lislamophobie-eric-z), un éditorialiste connu pour ses idées d’extrême droite et récemment condamné pour injure et provocation à la haine contre l’islam et l’immigration a recollé les morceaux d’un discours que tant de médias essaimaient. Selon lui, l’« islamogauchisme », c’est critiquer l’islamophobie à l’œuvre dans la société française : les universitaires qui documentent et analysent les discriminations spécifiques vécues par les personnes perçues comme musulmanes expriment en réalité des opinions complices avec l’islam politique. C’est bien les maillons de cette #rhétorique qui, dès le 4 mars, capturent l’espace médiatique. Entre autres innombrables exemples, sur BFM (https://www.bfmtv.com/societe/grenoble-une-enquete-ouverte-apres-des-accusations-d-islamophobie-contre-deux), un journaliste de Marianne affirme que, à l’université, « le mot islamophobie a été imposé par des activistes » ; par trois fois, un journaliste de France culture qualifie d’« opinion » (https://www.franceculture.fr/emissions/linvitee-des-matins/liberte-dexpression-liberte-denseigner-le-casse-tete-des-professeurs-a

      ) les travaux sur les discriminations liées à l’islamophobie cités par un professeur du Collège de France qui par trois fois dément ; ou encore, sur Public Sénat (https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/laicite-a-l-universite-bientot-une-commission-d-enquete-au-senat-188006), une sénatrice du Rassemblement démocratique et social européen (RDSE), déclare que « les idéologies ne doivent plus pouvoir s’imposer comme elles le font au cœur de notre université » et elle dénonce à la fois la « pression de l’islamisme » et le « militantisme d’extrême gauche ».

      Plus que toute autre, cette séquence médiatique a confondu les discours et les faits, a vidé les mots de leur substance dans une cacophonie bloquant toute possibilité d’analyse. La confusion intellectuelle profitant rarement à l’information, il semble important de reprendre le chemin des faits pour comprendre leur torsion. Finalement, qui a été victime de censure à l’IEP de Grenoble ? Qui a été jeté en pâture sur les réseaux sociaux ? Qui pourrait être censuré à l’université ? Et si intention de censure il y a, quels sont les savoirs particulièrement visés ?

      Islamophobie : le mot qui censure

      Chaque année, à l’IEP de Grenoble, les étudiant·es et les enseignant·es organisent une « Semaine pour l’égalité et contre les discriminations ». À l’automne, dans le cadre de leur préparation et après un sondage en ligne, le comité de pilotage a validé un atelier intitulé « Racisme, islamophobie, antisémitisme ». Le professeur d’allemand victime des collages a reconnu s’être inscrit à cet atelier pour en contester le titre : selon lui, le terme « islamophobie » ne devait pas y figurer, car il est « l’arme de propagande d’extrémistes plus intelligents que nous ». Pandémie oblige, la préparation se déroule à distance et, dans un échange de mails, une enseignante-chercheuse en histoire rattachée au laboratoire du CNRS Pacte défend la pertinence intellectuelle de l’atelier.

      Dans les médias, le professeur d’allemand réduit l’affaire des collages à l’« islamogauchisme » de ses collègues. L’affichage serait l’ultime étape d’une « campagne de diffamation et finalement de haine de plus en plus violente » (https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/03/07/enquete-pour-injure-publique-apres-des-accusations-d-islamophobie-a-sciences) qui aurait fait suite au conflit l’ayant opposé à sa collègue historienne autour du mot « islamophobie ». Sur BFM (https://www.bfmtv.com/societe/grenoble-une-enquete-ouverte-apres-des-accusations-d-islamophobie-contre-deux), il regrette d’ailleurs amèrement n’être soutenu par aucun·e collègue de son établissement, ce que ceux et celles-ci démentiront dans une tribune du Monde (https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/03/17/professeurs-accuses-d-islamophobie-cette-affaire-est-une-illustration-des-pr). Sur Europe 1 (https://www.europe1.fr/societe/grenoble-un-professeur-accuse-dislamophobie-regrette-le-manque-de-soutien-de), il affirme que les vrais responsables ne sont pas les étudiant·es, mais ses collègues « loin à gauche et (qui) ont plutôt des sympathies pour ceux qui défendent le terme islamophobie ». Dans Le Monde (https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/03/08/sciences-po-grenoble-enquete-ouverte-apres-les-accusations-d-islamophobie-co), il confirme que ces mêmes collègues auraient voulu le « punir (…) pour avoir exprimé un avis différent de la doxa d’extrême gauche ». Sur France 5 (https://www.youtube.com/watch?v=UU2oFWzDm3s

      ), il prétend avoir été « annulé » et « exclu du groupe de travail parce que les étudiants se disaient blessés par (ses) paroles ».

      Les médias font #caisse_de_résonance. France bleu (https://www.francebleu.fr/infos/education/le-nom-de-deux-professeurs-accuses-d-islamophobie-placardes-a-l-entree-de) précise que l’enseignante-chercheuse mise en cause était rattachée au laboratoire Pacte, justement « opposé à la volonté de la ministre de l’Enseignement supérieur d’enquêter sur l’islamogauchisme ». Pour la République des Pyrénées (https://www.larepubliquedespyrenees.fr/2021/03/08/islamo-gauchisme-l-illustration-grenobloise,2796550.php), l’enseignant a fait l’objet de « harcèlement interne ». Sur le plateau de LCI (https://www.lci.fr/societe/video-le-parti-pris-de-caroline-fourest-grenoble-aux-origines-de-l-intolerance-2), un journaliste influent se demande « comment une telle volonté de faire taire est possible » et une journaliste de L’Opinion, visant les collègues du professeur, se scandalise de « ce que ces gens foutent à Sciences Po ». Dans Marianne (https://www.marianne.net/agora/les-signatures-de-marianne/iep-de-grenoble-ou-sont-les-fascistes), une journaliste titre sur les « fascistes » de l’IEP de Grenoble.

      Pourtant … Selon les dires du professeur d’allemand lui-même, il avait participé sans retenue aux discussions de préparation de l’atelier. Entre les lignes mêmes de son discours émerge un récit différent dont le murmure reste couvert par le vacarme de la polémique : « chasse à l’homme » (https://www.francebleu.fr/infos/education/le-nom-de-deux-professeurs-accuses-d-islamophobie-placardes-a-l-entree-de) selon ses propres mots, « campagne de haine », « terrorisme intellectuel » (https://www.lefigaro.fr/flash-actu/sciences-po-grenoble-pecresse-denonce-un-terrorisme-intellectuel-20210307), « chasse aux sorcières », « police de la pensée », « cancel culture », « virus mortifère » … « Affaire sordide démontrant toute la réalité d’un islamo-gauchisme répugnant » tranche Marine Le Pen (https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/laicite-a-l-universite-bientot-une-commission-d-enquete-au-senat-188006). Tout de même, on apprend dans Le Monde (https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/03/08/sciences-po-grenoble-enquete-ouverte-apres-les-accusations-d-islamophobie-co) que le professeur d’allemand avait en réalité gagné la partie puisque l’institution avait fini par retirer le mot « islamophobie » du titre de l’atelier sans que sa collègue ne s’oppose d’aucune manière à cette décision. Et une semaine après le début de l’affaire, le 12 mars, une enquête détaillée de David Perrotin dans Mediapart (https://www.mediapart.fr/journal/france/110321/accusations-d-islamophobie-la-direction-de-sciences-po-grenoble-laisse-le-) en délivrait finalement une toute autre version.

      Dans l’échange initial de mails qui semble avoir tout déclenché, et dont un groupe d’étudiant·es étaient en copie, l’historienne reconnaissait le droit de questionner le terme « islamophobie », mais affirmait – références bibliographiques à l’appui – la validité scientifique du concept. En réponse, le professeur d’allemand se moquait des sciences sociales qu’il qualifiait de « molles », dénonçant la position de sa collègue comme une « imposture » et accusant un champ académique « devenu partisan et militant ». On apprend également deux choses importantes : contrairement à ses affirmations, d’une part le professeur n’a jamais été exclu d’un groupe de travail qu’il a en fait quitté après avoir obtenu gain de cause ; d’autre part il n’a jamais été dénoncé par un communiqué public.

      Les révélations de Mediapart sont troublantes. Les extraits des courriels font clairement apparaître que le professeur d’allemand n’a pas été censuré et que ses propos outrepassaient les limites : saisi, le Défenseur des droits a d’ailleurs estimé qu’il avait bafoué les droits de sa collègue au titre des textes de loi encadrant l’Éducation. Pourtant, plusieurs journalistes avaient affirmé avoir lu ces échanges : par exemple, sur LCI (https://www.lci.fr/societe/video-le-parti-pris-de-caroline-fourest-grenoble-aux-origines-de-l-intolerance-2), l’une avait loué le « répondant » du professeur d’allemand, raillant l’historienne qui, selon elle, « n’avait rien à dire ». Ainsi, alors même qu’ils et elles disposaient de nombreux éléments matériels, des journalistes ont considéré que celui qui avait agressé une collègue et obtenu la suppression du mot « islamophobie » avait été victime de censure. Plus inquiétant encore que cette inversion dans les ternes du jugement, l’article de David Perrotin n’a pas suffi à fixer les faits : deux jours après sa parution, Le Point (https://www.lepoint.fr/debats/klaus-kinzler-a-l-universite-le-gauchisme-culturel-est-une-realite-10-03-202), dans une nième interview du professeur d’allemand, republiait les contrevérités que Mediapart venait de démasquer. Tout se passe donc comme si, le simple usage du mot « islamophobie » autorisait toutes les violences et les accusations en retour : paradoxalement, ceux et celles qui l’interdisent s’estiment à bon droit censuré·es.

      Accusations, dénigrement, menaces sur les réseaux sociaux : les victimes qui ne comptent pas

      Dès leur découverte, les collages nominatifs sont dénoncés par l’ensemble de la classe politique et les deux principaux syndicats étudiants locaux nient être à l’origine du délit. Pourtant, alors que les coupables ne sont pas identifiés, des journalistes (https://www.cnews.fr/france/2021-03-07/grenoble-enquete-ouverte-apres-des-accusations-dislamophobie-sciences-po-10553) et des politiques les accusent. Valérie Pécresse n’hésite pas : dans Le Figaro (https://www.lefigaro.fr/flash-actu/sciences-po-grenoble-pecresse-denonce-un-terrorisme-intellectuel-20210307), elle leur reproche « d’avoir mis une cible dans le dos des enseignants » et estime qu’« il faut que l’université porte plainte contre ces étudiants ». L’ancienne ministre qui naguère, au sujet des affaires liées à Nicolas Sarkozy (https://www.radioclassique.fr/magazine/videos/sarkozy-jai-de-la-peine-a-croire-a-cette-affaire-je-respecte-la-preso), expliquait que la présomption d’innocence l’emportait sur tout autre principe va cette fois beaucoup plus vite en besogne.

      Si « les étudiant·es » sont collectivement dénoncé·es, la presse livre le nom de l’historienne et aussi de la directrice du Pacte. Car le professeur d’allemand cible d’emblée ce laboratoire lui reprochant de l’avoir « harcelé » suite à un « entretien tout à fait anodin entre deux professeurs » puis de l’avoir « jeté en pâture » aux étudiants.

      On sait pourtant, grâce à Mediapart, que non seulement l’entretien n’était pas « anodin », mais agressif, mais plus encore que le laboratoire Pacte n’a rien diffusé : sans citer le nom du professeur, il s’est contenté d’adresser aux personnes concernées un communiqué de soutien à l’enseignante-chercheuse. Et c’est en fait le professeur lui-même qui a publié sur son blog les échanges de mails et le communiqué de Pacte, non sans l’avoir falsifié en créant un biais cognitif pour s’ériger en victime.

      Pourtant, le 9 mars, sur Cnews, un chroniqueur n’hésite pas à qualifier la directrice du Pacte, de « militante ». Or, cette professeure des universités, membre honoraire de l’Institut universitaire de France, docteure, agrégée et ancienne élève de l’ENS Fontenay n’a pas seulement réussi des concours parmi les plus difficiles de la République, mais est aussi une géographe dont les travaux sont reconnus internationalement. Sur les réseaux sociaux, son nom et sa photographie circulent. Entre deux messages antisémites, des personnes se présentant comme « patriotes », proches de « Générations identitaires » ou de « Marine » l’accusent d’avoir lancé une « fatwa » contre deux professeurs, l’insultent, l’intimident et vont jusqu’à la menacer de mort. Aucun·e des journalistes, chroniqueur·euse, éditorialiste, animateur·rice ne regrettera d’avoir jeté son nom en pâture, comme si la violence de l’extrême droite ne comptait pas.

      L’indifférence des médias à l’intégrité morale et physique d’universitaires accusés d’ « islamogauchisme » s’était déjà manifestée lorsqu’en octobre, sur les réseaux sociaux, le sociologue Éric Fassin avait été menacé de « décapitation » par un néonazi. Au moment même de l’affaire de l’IEP de Grenoble, un homme proche de l’extrême droite diffusait, sur ces mêmes réseaux sociaux, un lien vers son blog où il publiait une liste d’universitaires ciblant les « 600 gauchistes complices de l’Islam radicale [sic] qui pourrissent l’université et la France ». Aucun journaliste ne s’en est ému et deux journaux, classés à gauche, ont refusé la tribune de ces universitaires qui s’alarmaient d’être ainsi lâchés à la haine publique.

      Tout aussi grave, le silence institutionnel assourdissant. L’IEP de Grenoble soutient certes les deux collègues de Pacte mises en cause, en leur assurant la protection fonctionnelle, mais n’a pas pris publiquement leur défense. Un mois après les faits, la mission pourtant « flash » de l’inspection générale du MRSEI a peut-être rendu ses conclusions, mais rien n’en a filtré. Le ministère a laissé attaquer un laboratoire que ses propres instances d’évaluation ont pourtant considéré comme « produisant une recherche de qualité exceptionnelle » (https://www.hceres.fr/sites/default/files/media/downloads/a2021-ev-0380134p-der-pur210020925-032594-rf.pdf) sans juger utile de se manifester dans les médias. Il a laissé prendre à partie, sans aucune forme de contre-communication, sa directrice dont le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) louait pourtant le « pilotage fondé sur la transparence et la confiance » (https://www.hceres.fr/sites/default/files/media/downloads/a2021-ev-0380134p-der-pur210020925-032594-rf.pdf).

      Quand l’opinion censure le travail scientifique

      L’affaire de l’IEP de Grenoble éclaire la #double_censure qui, selon de nombreux médias, menace aujourd’hui l’université. Pour ces journalistes, le simple fait qu’un atelier soit intitulé « Racisme, islamophobie, antisémitisme » censurerait les adversaires de l’islamophobie. De plus, lorsque l’historienne maintient que l’islamophobie est un concept reconnu dans le champ académique, elle censurerait le professeur d’allemand intuitu personae. Ainsi, lorsque sur France infos (https://www.francetvinfo.fr/faits-divers/je-pense-a-ce-qui-est-arrive-a-samuel-paty-le-nom-de-deux-professeurs-a) celui-ci affirme que « la liberté d’expression n’existe plus à Sciences Po » parce que « débattre de l’Islam (y) est devenu impossible », ses propos expriment la conviction déjà consolidée de bien des journalistes.

      Ceux et celles-là analysent l’échange de mails comme un débat d’opinion où toutes les opinions ne se vaudraient pas, et en même temps, comme une controverse scientifique tronquée puisque l’une des parties « se drape(rait) dans les atours de la science » pour porter des idées militantes. Confondant tout, ils et elles défendent la liberté de quiconque de contester des recherches dont la scientificité ne résisterait pas à la simple opinion du professeur d’allemand.

      Sur BFM (https://www.dailymotion.com/video/x7zt61o

      ), une essayiste affirme que « l’islamophobie est une idéologie pure ». Pour elle, c’est « l’opinion qui prévaut dans les sciences sociales. Ils sont en train de dire l’islamophobie ça existe parce que ce labo nous l’a dit ». Certes, le professeur d’allemand exprime également son opinion, mais elle aurait plus de valeur que celle du « laboratoire » parce qu’elle est « divergente ». La polémiste-essayiste conclut en remerciant « Frédérique Vidal qui bien fait de mettre les pieds dans le plat : les sciences sociales fabriquent de la censure ».

      Pour une journaliste de Marianne (https://www.marianne.net/agora/les-signatures-de-marianne/iep-de-grenoble-ou-sont-les-fascistes), il s’agit d’une controverse scientifique entre pair·es : en écho à l’argument du professeur d’allemand sur BFM, selon lequel « si critiquer les résultats d’une collègue est un harcèlement, c’est la fin de la science », elle interroge : « comment une enseignante peut-elle se plaindre officiellement de harcèlement parce qu’un de ses collègues, dans des courriels longs et argumentés (…) récuse une part de (ses) travaux ? ».

      Or, la discussion entre les deux collègues est très éloignée de la fameuse disputatio universitaire, car les deux collègues n’y sont pas exactement à égalité : l’historienne des sociétés colonisées du Maghreb parle depuis son champ de recherche, tandis que le professeur d’allemand polémique avec fureur. L’argumentation du professeur d’allemand entrelace ses goûts, ses dégoûts, ses opinions, l’invective ainsi qu’une série de banalités qui infusent aujourd’hui le débat et dont on oublie qu’elles sont nées à l’extrême droite : il a peu de sympathie pour l’Islam, préfère le Christ qui pardonne à la femme adultère, rappelle que les musulmans ont été de « grands esclavagistes », que beaucoup d’entre eux sont des « antisémites virulents », s’étonne de ne pas les voir par millions dans la rue se désolidariser des terroristes et tient à affirmer que le racisme vise aussi les blancs. Lorsqu’il argue que les trois concepts du titre ne devraient pas être alignés, sa collègue historienne répond qu’« utiliser un concept ne dispense pas d’en questionner la pertinence ». Le titre aurait pu être interrogé lors de l’atelier et la juxtaposition de termes peut valoir autant alignement que désalignement, engager à confronter les unes aux autres des notions qui apparemment se font écho : tout est affaire de problématisation. Certes, la « Semaine pour l’égalité et contre les discriminations » est une activité extracurriculaire proposée par Science Po Grenoble : ce n’est ni un cours ni un colloque scientifique. Cela ne veut pas dire que les professeurs volontaires pour y participer le fassent hors de leur cadre professionnel : ils interviennent là dans leur environnement de travail et doivent se conformer aux règles qui le régissent, notamment celles de « bienveillance », « objectivité » et « laïcité », trois piliers du Code de l’Éducation.

      La polémique telle que les médias la fabrique retourne donc tous les principes de la #déontologie professionnelle et de l’#éthique scientifique : l’agressivité, l’absence de collégialité, l’opinion partisane et le mépris des savoirs deviennent, par exemple sur LCI, « l’esprit critique et la raison » (https://www.lci.fr/societe/video-le-parti-pris-de-caroline-fourest-grenoble-aux-origines-de-l-intolerance-2).

      Limiter la liberté académique au nom de la liberté

      Écrits à l’automne, les mails du professeur d’allemand annoncent les propos de Frédérique Vidal cet hiver. Le premier dénonçait « les conclusions strictement hallucinantes » des « ”gender studies”, ”race studies” et autres ”études postcoloniales” (liste loin d’être exhaustive !) ». Sur Cnews et à l’Assemblée nationale, la seconde cible en février les mêmes champs d’études auxquels elle ajoute les études décoloniales et l’intersectionnalité. Et l’un comme l’autre fourrent ces différents champs d’études dans le grand sac de l’ « islamogauchisme ».

      En pleine polémique, dans un éditorial de La République des Pyrénées (https://www.larepubliquedespyrenees.fr/2021/03/08/islamo-gauchisme-l-illustration-grenobloise,2796550.php), un écrivain et journaliste note que « si ce qui s’est passé à Grenoble n’est pas la manifestation de l’islamogauchisme, cela y ressemble beaucoup ». En cohérence avec l’imaginaire de la pandémie, il fustige le « virus mortifère (…) qui se propage (…) à l’université où des minorités agissantes mènent des campagnes contre des enseignants qui ne s’inscrivent pas dans leur doxa racialiste, décoloniale, intersectionnelle et autres ».

      Sur BFM (https://atlantico.fr/article/video/le-debat-sur-l-islamo-gauchisme-est-il-possible-iep-grenoble-islamophobie-), un journaliste d’Atlantico, invité régulier de France Info, prétend que cela le « fait rire » quand il entend que « l’islamogauchisme n’existe pas (…) La complaisance d’une certaine gauche avec les arguments de l’Islam politique, ça a été étudié dans le monde entier ». Et de poursuivre, comme si le lien logique s’imposait : « c’est la même chose avec les études de genre (…) Ce qui est très grave dans une démocratie, c’est la prétention scientifique des études de genre. C’est complètement contraire à la liberté académique et c’est contraire à la liberté d’expression et cela ne correspond pas à ce que l’on peut attendre dans une démocratie ».

      Principe fondamental reconnu par les lois de la République et consacré par la décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 1984, la liberté académique est celle que le droit garantit aux universitaires de mener les recherches et les enseignements qu’ils et elles veulent, sans subir de pressions économiques ou politiques. Ce jour-là sur BFM, avec brutalité et sans limites, un journaliste a déclaré que des pans entiers des sciences sociales –auxquels lui-même ne connaît rien– mettent en péril la démocratie : en quelque sorte, l’usage de la liberté académique dans le champ des études de genre menace la liberté académique ; la seule solution semble alors bien de supprimer la liberté académique … pour les chercheur·es en études de genre.

      Pour certain·es journalistes, les sciences sociales usurpent donc le nom de science dès lors qu’elles troublent le sens commun : les savoirs critiques sont dangereux pour la société. Il reste un point, vérifiable, sur lequel on ne saurait leur donner raison : loin d’avoir été étudié dans « le monde entier », l’islamogauchisme semble être une obsession française. Pour objectiver sa fragilité empirique, on pourra, par exemple, consulter dans la revue Mouvements (https://mouvements.info/trois-mythes-sur-l-islamo-gauchisme-et-laltermondialisme) un récent article de Timothy Peace. La bibliothèque numérique Jstor qui archive douze millions d’articles de revues scientifiques de 160 pays dans 75 disciplines, signale trois références pour « islamo-gauchisme » et 17 pour « #islamo-leftism » ; seules quatre se réapproprient la notion tandis que les autres la déconstruisent. À titre de comparaison, le mot-clé « islamophobia » propose 5388 références : pas de doute, la « notion fourre-tout inventée de toute pièce » (https://www.europe1.fr/societe/grenoble-un-professeur-accuse-dislamophobie-regrette-le-manque-de-soutien-de) que le professeur d’allemand a dénoncée lors de sa semaine de célébrité médiatique nomme un champ de recherche. Comme tous les autres, il est traversé par la construction de controverses : celles-ci se déploient selon des méthodologies éprouvées et dont les chercheur.es doivent pouvoir rendre compte. L’opinion libre peut bien sûr questionner ces résultats à tout moment, mais ne peut les nier sans se soumettre à son tour à la rigueur qui fait la science. Le nier c’est sombrer dans un monde de post-vérité que d’aucuns appellent de leurs vœux du fait de son potentiel électoral. Le débat ouvert autour des sciences humaines et sociales doit en effet interpeler les mondes scientifiques dans toute leur diversité, c’est la seule échelle possible de riposte à la violence de l’offensive idéologique en cours.

      https://blogs.mediapart.fr/edition/fac-checking/article/140421/sciences-po-grenoble-un-repaire-d-islamogauchistes

    • Sciences Po Grenoble : « Un crash-test du débat public pour 2022 »

      En mars, la mise en cause de deux profs avait suscité un large emballement médiatique et politique. En première ligne dans cette affaire, ciblée et harcelée, la chercheuse Anne-Laure Amilhat-Szary contre-attaque. Elle s’exprime pour la première fois dans « À l’air libre ».

      https://www.youtube.com/watch?v=3S91o5G6wvk

    • #CNews, première chaîne d’#intox de France… avec le soutien de l’Élysée

      Une autre affaire montre que ce goût pour la #délation peut avoir de graves conséquences sur les personnes désignées à la furie de la fachosphère.. Jeudi soir, l’émission À l’air libre, réalisée par Mediapart, reçoit #Anne-Laure_Amilhat_Szary, directrice à Grenoble du laboratoire Pacte du CNRS. Je conseille vivement de regarder son témoignage (en accès libre) pour prendre la mesure de la gravité des agissements de M. Pascal Praud. Ce dernier a mis en cause l’universitaire lors de l’affichage des noms de deux professeurs de Sciences Po Grenoble accusés d’islamophobie. Affichage que l’intéressée a toujours vigoureusement condamné. Affichage consécutif à une controverse entre un prof militant et une chercheuse de son laboratoire qu’Anne-Laure Amilhat-Szary a défendue dans un communiqué ensuite falsifié par #Klaus_Kinzler, le prof en question.

      Pascal Praud s’est empressé d’inviter ce professeur, qui déclare alors : « Un grand chercheur directeur de laboratoire de recherche se met en dehors de la science. Il ne comprend même pas, c’est une femme d’ailleurs, elle ne comprend même pas ce que c’est, la science. — Ce laboratoire, Pacte, avec cette dame…, rebondit Pascal Praud. Je vais citer son nom, Anne-Laure Amilhat-Sza… Szaa… Szary. » La délation est un métier. « Cette dame-là, c’est la directrice du laboratoire mais cette dame, c’est une militante. — C’est une militante. C’est des gens qui ne réfléchissent même pas. — Oui mais qui se croient tout permis et qui avancent avec le sentiment d’impunité. C’est très révélateur, on voit le #terrorisme_intellectuel qui existe dans l’université à travers leur exemple. »

      https://www.telerama.fr/sites/tr_master/files/styles/simplecrop1000/public/assets/images/capture_decran_2021-05-07_a_14.02.17.png?itok=DB-qutXJ

      Sur le plateau de Mediapart, Anne-Laure Amilhat-Szary raconte la suite. « La ministre de l’Enseignement supérieur dit que c’est insensé de livrer des noms d’enseignants-chercheurs à la vindicte des réseaux sociaux, or ça a été mon cas. J’ai fait l’objet d’une campagne diffamatoire avec menaces de mort nombreuses et répétées. » Au point de devoir porter plainte pour « #cyber-harcèlement et menaces de mort ». « Comment vous avez vécu tout ça ?, demande Mathieu Magnaudeix. — Mal. Et comme la preuve que l’intersectionnalité est une bonne grille d’analyse puisque j’ai fait l’objet d’insultes islamophobes, antisémites, sexistes, avec une critique de mon physique avec mon portrait transformé… Je vous laisse imaginer le pire. » Le pire sciemment provoqué par Pascal Praud.

      https://www.telerama.fr/sites/tr_master/files/styles/simplecrop1000/public/assets/images/capture_decran_2021-05-07_a_13.42.37_0.png?itok=No7NkS6H

      « Je n’ai pas de protection judiciaire, regrette Anne-Laure Amilhat-Szary. Elle a été demandée et on n’en a plus jamais entendu parler. La ministre a défendu des personnes qui ont effectivement été mises en danger par des affichages criminels et moi, je me débrouille toute seule. » Comme se débrouillent toutes seules les journalistes #Morgan_Large et #Nadiya_Lazzouni, respectivement victimes d’#intimidations (dont un sabotage de voiture) et de menaces de mort, sans qu’elles obtiennent la #protection_policière demandée — et soutenues par de nombreuses organisations de journalistes.

      https://seenthis.net/messages/915846

    • Retour à Sciences Po Grenoble, où l’ambiance reste très dégradée trois mois après l’affaire des affiches dénonçant des professeurs

      Au cœur de vives polémiques à Grenoble et à Paris au mois de mars 2021, l’Unef a retrouvé une relative sérénité. L’affaire des réunions non mixtes a poussé le Sénat à adopter un amendement qui ne s’appliquera probablement pas au syndicat.

      « Des fascistes dans nos amphis », « L’islamophobie tue ». Le 4 mars 2021, la branche de l’Unef Grenoble relaie sur son compte Twitter des collages situés sur la façade de Sciences Po, avec le nom de deux professeurs, accusés d’islamophobie. Le syndicat retire son tweet mais la polémique prend une ampleur nationale. Quelques jours plus tard, le syndicat étudiant au niveau national est accusé de discriminations à la suite de la mise en place de réunions non-mixtes. La cellule investigation de Radio France a voulu savoir, deux mois après, ce qu’il reste de ces évènements.
      Des accusations d’islamophobie

      À Grenoble, la situation est encore tendue, et l’incompréhension demeure. Fin novembre 2020, dans le cadre de la préparation de l’édition 2021 de la Semaine de l’égalité, deux professeurs de Sciences Po Grenoble (IEPG, Institut d’études politiques de Grenoble) s’opposent à une enseignante-chercheuse membre du laboratoire de sciences sociales Pacte à propos des termes d’une table ronde intitulée « Racisme, antisémitisme et islamophobie ». Les deux professeurs, dont fait partie Klaus Kinzler, qui enseigne l’allemand au sein de l’IEPG, demandent à ce que soit retiré le mot islamophobie, considérant que ce terme ne vise pas des personnes en raison de leur race ou de leur origine, mais juste une religion.

      Le débat s’enflamme. La querelle est mise sur la place publique. Les deux professeurs deviennent des cibles sur les réseaux sociaux. « Le 22 février 2021, des étudiants de l’Union syndicale Sciences Po Grenoble [une scission de l’Unef], le syndicat majoritaire à l’IEPG, lancent sur Facebook un appel à témoignages sur d’éventuels propos problématiques qui auraient pu être tenus dans un cours qui s’appelle ’Islam et musulmans en France’, raconte Simon Persico, professeur à Sciences Po Grenoble. Cet appel à témoignages contient des accusations, même si le nom de l’enseignant n’apparaît pas. »

      Appel à témoignage lancé sur Facebook par l’Union syndicale Sciences Po Grenoble.

      Sous la pression, l’enseignante retire l’islamophobie de l’intitulé du débat. La rupture est consommée entre le laboratoire Pacte et les deux opposants. Le climat se dégrade. L’enseignante se voit prescrire un arrêt maladie, et les deux professeurs opposés au débat se disent harcelés. « Il y a eu deux étapes, explique Klaus Kinzler. L’une vient de collègues, des chercheurs qui m’accusent en public de harcèlement. Il y a ensuite une deuxième tentative par des étudiants extrémistes, qui disent que je suis un extrémiste de droite et islamophobe. »
      "Bonjour à nos ayatollahs en germe"

      Fin février, Klaus Kinzler, qui se voit reprocher d’avoir bu une bière devant son écran lors d’un conseil de vie étudiante, écrit un mail « humoristique » aux étudiants syndiqués qui commence par « Bonjour tout le monde ! Bonjour surtout à nos petit.e.s Ayatollahs en germe » (sic). Un mail qu’il conclut en signant par : « Un enseignant ’en lutte’, nazi de par ses gènes, islamophobe multirécidiviste (…) recherché intensément par la branche islamo-gauchiste d’Interpol Grenoble. » Des propos qui ne vont pas apaiser les choses.

      « J’étais extrêmement déprimé, se justifie aujourd’hui le professeur, les premiers étudiants commençaient à me dire en cours : ’Pourquoi vous n’aimez pas les musulmans ?’ Je sentais que je ne pouvais plus enseigner dans ces conditions, je me suis mis en congé maladie. »

      Cinq jours plus tard, le 4 mars, ces collages avec les noms de deux professeurs apparaissent sur la façade de Sciences Po Grenoble. Ils sont tweetés par une responsable de l’Unef Grenoble dans la foulée. « La condamnation de ces affiches a été extrêmement rapide et ferme par la direction et toutes les instances de Sciences Po, puis par tous les collègues, se souvient Simon Persico. L’Unef Grenoble va alors très vite faire marche arrière. »

      Les instances parisiennes de l’Unef interviennent en effet pour faire retirer le tweet. « Ça ne correspondait pas du tout à notre mode d’action, confirme Mélanie Luce, la présidente de l’Unef. Pour nous, quels que soient les propos tenus, ce n’est pas avec ce qu’on appelle le ’name and shame’ [nommer pour faire honte] qu’on va régler nos problèmes. Les dénonciations publiques ne sont en aucun cas une solution. »
      "Ils resteront des cibles"

      Malgré la suppression du tweet, les noms des deux professeurs se répandent, une enquête est ouverte par le parquet de Grenoble, car l’incident se produit après l’assassinat de Samuel Paty. Beaucoup redoutent les conséquences de cette exposition publique. « Ce collage ne partira jamais d’Internet, redoute Amaury Pelloux-Gervais, étudiant en droit et président de l’Uni Grenoble. Des gens penseront toujours que ces professeurs sont islamophobes. Ils resteront des cibles. »

      Le ministère de l’Intérieur envoie alors des policiers pour surveiller le domicile de cinq personnes, dont celui des professeurs concernés et du leader de l’Union syndicale de Sciences Po. « Très vite, le nom de ce dernier circule, mis en pâture sur les réseaux sociaux, critiqué comme s’il était complice de ces actes-là, se souvient encore l’universitaire Simon Persico. La collègue qui organisait la conférence sur l’islamophobie est, elle aussi, mise sous protection, ainsi que la directrice du laboratoire Pacte. »

      Tous sont devenus des cibles d’anonymes qui se déchaînent sur les réseaux sociaux. Les deux enseignants opposés au débat sur l’islamophobie, classés plutôt à droite, sont visés par une sphère de gauche, tandis qu’Anne-Laure Amilhat-Szary, directrice du labo Pacte auquel appartient l’enseignante qui voulait organiser le débat sur l’islamophobie, se sent, elle, menacée par l’extrême droite : « Je suis mise en cause par des propos diffamatoires qui ont un caractère sexiste. On me dit que je n’ai pas les capacités pour diriger un laboratoire, on s’attaque à mon apparence, on se demande si je suis ’baisable’ ou pas... On s’attache à détruire mon être intime de femme. »

      Une ambiance détestable qui ne date pas d’hier

      Plus de deux mois après ces évènements, les tensions entre certains étudiants et certains professeurs, mais aussi entre les enseignants eux-mêmes, n’est toujours pas retombée. Klaus Kinzler n’a toujours pas réintégré sa classe à Sciences Po. « On m’a déconseillé dans la situation actuelle d’être en contact avec les étudiants, déplore-t-il. L’atmosphère est encore très pourrie à l’IEPG. Des mails circulent où on nous reproche tous les maux. On est persona non grata, comme des pestiférés. »

      Un rapport du ministère de l’Enseignement supérieur indique que « le collage du 4 mars est l’aboutissement d’une crise qui naît d’une controverse entre deux enseignants, et tourne au règlement de comptes orchestré par une organisation étudiante ». Mais cette crise ne date pas d’hier. Selon Amaury Pelloux-Gervais, de l’Uni, « une capture d’écran de 2017 montrait déjà que sur un groupe Facebook d’étudiants de Sciences Po, un message de l’Unef Grenoble, aujourd’hui l’Union syndicale, demandait des témoignages d’islamophobie, de sexisme, de racisme de la part des mêmes professeurs ».
      « Ils ont fait de la surenchère »

      Outre leurs divergences politiques et idéologiques sur l’islam, il y aurait aussi une fracture générationnelle entre enseignants, selon Klaus Kinzler, qui estime que les jeunes professeurs seraient plus radicaux qu’avant : « On a assisté à un changement générationnel. Des professeurs de la vieille école, non politisés, érudits, d’une très grande culture et très respectés, ont cédé leur place à une nouvelle génération de jeunes maîtres de conférences et professeurs dans les 35 ans, qui sont extrêmement militants et politisés. »

      Les professeurs de sciences sociales, notamment ceux du laboratoire Pacte, réfutent cette analyse. Eux ont le sentiment que leurs deux collègues ont fait de la surenchère. « La campagne médiatique dans laquelle ils se sont engagés nous a blessés, regrette Simon Persico, également membre de Pacte. Cela a contribué à rendre public des noms de collègues, qui se sont fait menacer, insulter. Et cela a dressé un tableau de Sciences Po Grenoble très caricatural, comme si on était un lieu dans lequel on ne pouvait pas avoir de discussion sereine, dans lequel la liberté d’expression était bafouée alors que ce n’est pas du tout le cas. On est habitués au débat pluraliste, respectueux des opinions diverses. » Simon Persico leur reproche aussi de remettre en cause l’intérêt des sciences sociales. « En disant qu’elles ne servaient à rien, voire qu’elles n’étaient pas des sciences, cela nous a beaucoup blessés puisque c’est le cœur de notre métier, notre conviction profonde. »

      Le 4 mai 2021, le procureur de Grenoble a ouvert une enquête pour « injure, diffamation, harcèlement et cyberharcèlement ». Elle cible surtout les étudiants qui ont placardé les affiches. Le rapport de l’inspection générale de l’éducation, quant à lui, met en cause le comportement de l’Union syndicale Sciences Po Grenoble. Mais il pointe aussi des erreurs et des manquements de tous les acteurs de cette affaire, qui ont créé un climat de tension.
      Autre polémique : les réunions non-mixtes

      L’Unef a par ailleurs été dans le viseur de nombreuses personnalités politiques, pour avoir organisé des réunions non-mixtes. Le 19 mars 2021, le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer réagit sur RMC : « C’est profondément scandaleux, des gens qui se prétendent progressistes et qui distinguent les gens en fonction de la couleur de leur peau, nous mènent vers des choses qui ressemblent au fascisme. »

      L’idée de mettre en place des réunions non-mixtes n’est pas récente. En 2013, l’Unef constate que la culture dominante en son sein est très machiste. Le syndicat décide de lancer des groupes de parole réservés aux femmes. « Elles voulaient se réunir pour parler des violences qu’elles ont pu subir, et ne pas se retrouver face à quelqu’un qui aurait pu commettre ces violences, explique Mélanie Luce, l’actuelle présidente de l’Unef. Le sexisme intériorisé fait qu’une femme a beaucoup plus de difficulté à prendre la parole dans un cadre collectif qu’un homme. »

      « C’est le principe de fonctionnement des Alcooliques Anonymes, abonde Anne-Laure Amilhat-Szary, directrice du laboratoire Pacte à Grenoble. Des gens osent parler de leurs défauts, de leurs problèmes, parce qu’ils sont entre eux et qu’ils sentent que la règle est la bienveillance. Des réunions non-mixtes, il y en a à tous les étages. Les francs-maçons en sont un exemple privilégié, à l’autre extrémité du champ social. »
      Abolir la culture du sexisme

      Au sein de l’Unef, ces réunions appelée non-mixtes, mais dont la participation est libre, ont lieu une à deux fois par an. Elles réunissent des membres du bureau national et des militants des sections locales. « On ne cite pas de nom, tout est anonyme. L’objectif n’est pas la délation, assure Mélanie Luce. Il est d’identifier les problématiques globales qui émergent. Ensuite, un compte rendu est fait, dans un cadre mixte. »

      À la suite de ces réunions, le bureau national de l’Unef a lancé des procédures d’exclusion contre des cadres du syndicat. Depuis 2018, il a ainsi exclu quatre personnes, et quatre autres ont démissionné d’eux-mêmes. Le syndicat fait aussi remonter des signalements aux autorités universitaires. C’est notamment le cas à Paris-Dauphine, où un premier dossier est instruit par l’administration.
      Prise en compte de toutes les discriminations

      Le modèle de ces réunions non-mixtes contre le sexisme, a ensuite été reproduit pour les personnes LGBT+, puis aux personnes racisées, c’est-à-dire qui subissent des discriminations liées à leur apparence, leur accent, leur nom ou encore leur origine. « Les femmes ont ouvert le champ », affirme Tidian Bah, étudiante d’origine guinéenne, en première année à Sciences Po.

      Farah, qui a participé en avril 2021 à une réunion de ce type, raconte : « C’est la première fois que j’ai parlé concrètement du racisme et du sexisme que je pouvais subir dans la société. On vide son sac, et on vide aussi les émotions que l’on peut vivre au quotidien. »

      Cette récente prise en compte des discriminations raciales dans les préoccupations de l’Unef s’explique notamment par l’augmentation de la diversité au sein des universités et des instances dirigeantes. « Il y a encore dix ou vingt ans, les congrès universitaires étaient extrêmement blancs, alors que l’université été déjà investie par les enfants et les petits enfants issus de l’immigration », analyse Robi Morder, spécialiste des mouvements étudiants. La disparition progressive des associations communautaires liées au pays d’origine a aussi « forcé » les syndicats étudiant à s’approprier ces préoccupations.
      « L’Unef a perdu sa grille d’analyse des rapports sociaux traditionnels »

      Au printemps 2021, la polémique autour des réunions non-mixtes s’est focalisée sur le fait d’exclure les participants en fonction de critères raciaux. L’Unef soutient que personne n’est officiellement exclu. « Tout le monde est au courant de ces réunions. C’est à chacun de savoir où est sa place, se défend Mélanie Luce. Il n’y a pas de vigile à l’entrée pour dire à telle personne de couleur : ’Tu ne vas pas rentrer.’ Par contre, lors du compte rendu, chacun va pouvoir attentivement écouter ce qui va être dit par ces personnes sur ce qu’elles peuvent vivre au quotidien et dans l’organisation. »

      « Personne n’est en capacité d’exclure une quelconque personne à partir du moment où la militante ou le militant vient et décide de venir en réunion », confirme Maha Rejouani, ancienne vice-présidente étudiante pour l’Unef à Paris-Dauphine. Cette approche risque de rendre inopérant l’amendement « Unef » voté récemment par le Sénat, qui interdit d’exclure quiconque en fonction de sa race ou de son origine.

      Pour Theo Florens, un ancien membre du bureau national de l’Unef, ces réunions sont symptomatiques d’une évolution du positionnement politique du syndicat. La lutte contre le sexisme et les discriminations sur les campus a supplanté, selon lui, la grille historique de la « lutte des classes ». « Aujourd’hui, l’Unef trouve bien souvent plus pertinent d’analyser les conflits interpersonnels via le prisme des discriminations, des dominés/dominants, explique-t-il, ce qui n’est pas le prisme des gens qui sont moyennement ou pauvrement dotés en capital et des autres qui le sont. Quand on est pauvre, qu’on soit blanc ou racisé, on a toujours moins de chances de réussir sa vie que quand on est passé par Henri IV ou Sciences Po. » Ce faisant, le syndicat accompagne une tendance qui traverse aujourd’hui d’autres sphères de la société. Y compris des sphères officielles.

      https://www.francetvinfo.fr/societe/religion/religion-laicite/retour-a-sciences-po-grenoble-ou-lambiance-reste-tres-degradee-trois-mo

    • A Sciences Po Grenoble, « Mme D. » contre-attaque après le rapport de l’inspection générale

      Accusée par l’inspection générale d’avoir « dramatisé la polémique » entre deux professeurs, Anne-Laure Amilhat Szary s’étonne de ne bénéficier d’aucun soutien après avoir reçu des menaces de mort.

      L’apaisement est encore loin, à Sciences Po Grenoble, deux mois après la publication du rapport de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (Igésr), commandé par la ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal. Après la découverte, le 4 mars, sur les murs de l’Institut d’études politiques (IEP) d’affiches accusant de « fascisme » et d’« islamophobie » deux enseignants – diffusées sur les réseaux sociaux par des étudiants –, les inspecteurs généraux ont conduit une enquête, dont les conclusions, rendues le 8 mai, ont étonné Anne-Laure Amilhat Szary, l’une des protagonistes de l’affaire, appelée « Mme D. » dans le rapport.

      Il faut revenir quelques mois en arrière pour comprendre comment on en est arrivé là. Le 7 décembre 2020, cette professeure de géographie, directrice de Pacte, un laboratoire du CNRS en sciences sociales rattaché à l’IEP et à l’université Grenoble-Alpes, publie un communiqué, tamponné du logo de l’université, pour prendre la défense d’une collègue historienne, membre de Pacte, qui est impliquée dans un violent échange de courriels avec un professeur d’allemand – dont le nom, Klaus Kinzler, sera placardé le 4 mars sur les murs de Sciences Po. En cause : le recours à la notion d’« islamophobie ». Alors que la chercheuse de Pacte justifie l’usage d’un « concept heuristique utilisé dans les sciences sociales », M. Kinzler récuse avec véhémence l’apposition du terme auprès des mots « racisme » et « antisémitisme » dans l’intitulé d’un débat prévu à l’IEP à l’occasion de la Semaine de l’égalité et de la lutte contre les discriminations.

      Dans ce communiqué, la direction du laboratoire de recherche incrimine le professeur d’allemand et estime que « nier, au nom d’une opinion personnelle, la validité des résultats scientifiques d’une collègue et de tout le champ auquel elle appartient, constitue une forme de harcèlement et une atteinte morale violente ».

      « Terrorisme intellectuel »

      L’inspection générale reproche à « Mme D. » d’avoir « dramatisé la polémique en se plaçant sur le terrain d’une mise en cause de la recherche en sciences sociales » et d’avoir mis « l’ensemble des enseignants de l’IEP en situation de devoir choisir leur camp ». Elle préconise à son encontre une convocation disciplinaire à un entretien avec ses supérieurs (le président de l’université et le président du CNRS), en présence de la directrice de l’IEP, « pour lui rappeler solennellement le rôle qui est le sien en qualité de directrice de laboratoire, lequel ne l’autorise ni à signer un communiqué par délégation du président de l’université ni à s’immiscer dans la gestion des ressources humaines de l’IEP ». En guise de sanction, une « notification écrite à l’intéressée des fautes qu’elle a commises dans cette lamentable affaire sera versée à son dossier administratif », tacle le rapport.

      Les inspecteurs ajoutent que ce « communiqué » de Pacte « a donné une dimension inespérée » à l’organisation étudiante de l’IEP, l’Union syndicale, en lui permettant « d’utiliser la renommée de ce laboratoire réputé pour développer, à partir du 9 janvier 2021, une campagne d’accusations d’islamophobie sur les réseaux sociaux » à l’encontre de Klaus Kinzler et d’un autre enseignant, Vincent Tournier, chargé d’un cours sur l’islam.

      Sur les réseaux sociaux, Anne-Laure Amilhat Szary fait face à un déferlement de haine lorsque certains médias relatent « l’affaire », voyant dans Sciences Po Grenoble une incarnation de « l’islamo-gauchisme » sur lequel Frédérique Vidal veut lancer une « enquête ». Le paroxysme est atteint sur CNews, le 9 mars, lorsque l’animateur Pascal Praud déclare voir en la chercheuse « le terrorisme intellectuel qui existe dans l’université ».

      A ses côtés en plateau, Klaus Kinzler est venu témoigner de sa vision des faits. A l’évocation d’Anne-Laure Amilhat Szary, il décrit « un grand chercheur directeur de laboratoire de recherche [qui] se met en dehors de la science ». « Il ne comprend même pas, c’est une femme d’ailleurs, elle ne comprend même pas ce que c’est, la science », lâche le professeur d’allemand. Le lendemain de l’émission, la directrice de Pacte demande à bénéficier d’une protection fonctionnelle qui lui sera aussitôt accordée par sa tutelle, le président de l’université Grenoble-Alpes.

      Le 15 avril, elle porte plainte pour « diffamation », « diffamation à caractère sexiste » contre Pascal Praud et Klaus Kinzler, « cyberharcèlement » et « menace de mort », devant le parquet de Paris. « D’aucuns n’ont pas craint de la dénoncer comme ayant été à l’origine de cette affaire. Cela est évidemment faux », affirme dans un communiqué son avocat, Me Raphaël Kempf.

      La mission d’inspection recommande aussi un rappel à leurs obligations de fonctionnaires à la professeure d’histoire et à Klaus Kinzler, tout nouveau manquement de la part de ce dernier engageant des poursuites disciplinaires. « On se retrouve avec des agressés et des agresseurs renvoyés aux mêmes types de sanctions, c’est très problématique », commente aujourd’hui Anne-Laure Amilhat Szary, qui se demande pourquoi « le rapport ne couvre aucun des faits postérieurs au 4 mars, malgré leur gravité ». Elle regrette l’absence de prise de position publique des trois tutelles responsables du laboratoire – l’université, le CNRS et l’IEP. « La ministre a publiquement manifesté son indignation et son soutien quand le nom de mes collègues a été affiché, mais n’a pas réagi quand j’ai été à mon tour dangereusement menacée », constate la chercheuse.
      « Grand silence » du CNRS

      A l’issue d’un « entretien solennel » qui a eu lieu vendredi 18 juin, le président de l’université Grenoble-Alpes, Yassine Lakhnech, n’aurait pas prévu – comme souhaité par l’Igésr – d’inscrire au dossier administratif de Mme Amilhat Szary la notification écrite qui lui a été remise. « Le président de l’université s’est engagé à ne pas verser cette lettre à son dossier administratif », précise un des délégués de la CGT de l’université ayant accompagné la directrice de Pacte. Pour le syndicaliste, le rapport d’inspection est lacunaire en ne faisant pas mention des menaces de mort et insultes qu’a subies Mme Amilhat Szary. « Je suis moi-même témoin de cette parole décomplexée, raciste, y compris dans le milieu de la recherche. Ces propos n’auraient jamais été tenus il y a deux ou trois ans », complète Pierre Giroux, secrétaire régional du syndicat CGT du CNRS. Il regrette que Mme Vidal ait pu « encourager ce mouvement en affichant une volonté autre que celle de l’apaisement ».

      Afin de clore l’affaire, plusieurs dizaines de directeurs de laboratoire ont appelé le président du CNRS à prendre publiquement position, au-delà du soutien individuel qu’il a témoigné au cours des derniers mois à Mme Amilhat Szary. « Nous sommes profondément choqués de l’absence de soutien institutionnel public, quand une directrice est menacée de mort et cible d’attaques racistes et antisémites dans l’exercice de ses fonctions », ont-ils écrit dans un communiqué lu à la tribune, le 22 juin, interpellant Antoine Petit, le président du CNRS, lors d’une réunion de l’Institut des sciences humaines et sociales du CNRS.

      « Ce grand silence est problématique, car l’institution a l’air de renvoyer dos à dos les protagonistes, s’alarme une participante. Résumer la situation à une opposition entre deux points de vue serait très grave. Il s’agit de rappeler qu’une simple opinion ne vaut pas les résultats d’une recherche. Et ça, il faut que le président du CNRS aille le dire sur les plateaux TV ! »

      Signe du caractère extrêmement sensible du sujet, ni Yassine Lakhnech, ni la directrice de l’IEP, Sabine Saurugger, ni Antoine Petit n’ont donné suite à nos sollicitations d’entretien.

      https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/07/02/a-sciences-po-grenoble-mme-d-contre-attaque-apres-le-rapport-de-l-inspection

  • #Intersectionnalité : une #introduction (par #Eric_Fassin)

    Aujourd’hui, dans l’espace médiatico-politique, on attaque beaucoup l’intersectionnalité. Une fiche de poste a même été dépubliée sur le site du Ministère pour purger toute référence intersectionnelle. Dans le Manuel Indocile de Sciences Sociales (Copernic / La Découverte, 2019), avec Mara Viveros, nous avons publié une introduction à ce champ d’études. Pour ne pas laisser raconter n’importe quoi.

    « Les féministes intersectionnelles, en rupture avec l’universalisme, revendiquent de ne pas se limiter à la lutte contre le sexisme. »

    Marianne, « L’offensive des obsédés de la race, du sexe, du genre, de l’identité », 12 au 18 avril 2019

    Une médiatisation ambiguë

    En France, l’intersectionnalité vient d’entrer dans les magazines. Dans Le Point, L’Obs ou Marianne, on rencontre non seulement l’idée, mais aussi le mot, et même des références savantes. Les lesbiennes noires auraient-elles pris le pouvoir, jusque dans les rédactions ? En réalité si les médias en parlent, c’est surtout pour dénoncer la montée en puissance, dans l’université et plus largement dans la société, d’un féminisme dit « intersectionnel », accusé d’importer le « communautarisme à l’américaine ». On assiste en effet au recyclage des articles du début des années 1990 contre le « politiquement correct » : « On ne peut plus rien dire ! » C’est le monde à l’envers, paraît-il : l’homme blanc hétérosexuel subirait désormais la « tyrannie des minorités ».

    Faut-il le préciser ? Ce fantasme victimaire est démenti par l’expérience quotidienne. Pour se « rassurer », il n’y a qu’à regarder qui détient le pouvoir dans les médias et l’université, mais aussi dans l’économie ou la politique : les dominants d’hier ne sont pas les dominés d’aujourd’hui, et l’ordre ancien a encore de beaux jours devant lui. On fera plutôt l’hypothèse que cette réaction parfois virulente est le symptôme d’une inquiétude après la prise de conscience féministe de #MeToo, et les révélations sur le harcèlement sexiste, homophobe et raciste de la « Ligue du Lol » dans le petit monde des médias, et alors que les minorités raciales commencent (enfin) à se faire entendre dans l’espace public.

    Il en va des attaques actuelles contre l’intersectionnalité comme des campagnes contre la (supposée) « théorie du genre » au début des années 2010. La médiatisation assure une forme de publicité à un lexique qui, dès lors, n’est plus confiné à l’univers de la recherche. La polémique a ainsi fait entrevoir les analyses intersectionnelles à un public plus large, qu’articles et émissions se bousculent désormais pour informer… ou le plus souvent mettre en garde. Il n’empêche : même les tribunes indignées qui livrent des noms ou les dossiers scandalisés qui dressent des listes contribuent, à rebours de leurs intentions, à établir des bibliographies et à populariser des programmes universitaires. En retour, le milieu des sciences sociales lui-même, en France après beaucoup d’autres pays, a fini par s’intéresser à l’intersectionnalité – et pas seulement pour s’en inquiéter : ce concept voyageur est une invitation à reconnaître, avec la pluralité des logiques de domination, la complexité du monde social.

    Circulations internationales

    On parle d’intersectionnalité un peu partout dans le monde – non seulement en Amérique du Nord et en Europe, mais aussi en Amérique latine, en Afrique du Sud ou en Inde. Il est vrai que le mot vient des États-Unis : c’est #Kimberlé_Crenshaw qui l’utilise d’abord dans deux articles publiés dans des revues de droit au tournant des années 1990. Toutefois, la chose, c’est-à-dire la prise en compte des dominations multiples, n’a pas attendu le mot. Et il est vrai aussi que cette juriste afro-américaine s’inscrit dans la lignée d’un « #féminisme_noir » états-unien, qui dans les années 1980 met l’accent sur les aveuglements croisés du mouvement des droits civiques (au #genre) et du mouvement des femmes (à la #race).

    Cependant, ces questions sont parallèlement soulevées, à la frontière entre l’anglais et l’espagnol, par des féministes « #chicanas » (comme #Cherríe_Moraga et #Gloria_Anzaldúa), dans une subculture que nourrit l’immigration mexicaine aux États-Unis ou même, dès les années 1960, au Brésil, au sein du Parti communiste ; des féministes brésiliennes (telles #Thereza_Santos, #Lélia_Gonzalez et #Sueli_Carneiro) développent aussi leurs analyses sur la triade « race-classe-genre ». Bref, la démarche intersectionnelle n’a pas attendu le mot intersectionnalité ; elle n’a pas une origine exclusivement états-unienne ; et nulle n’en a le monopole : ce n’est pas une « marque déposée ». Il faut donc toujours comprendre l’intersectionnalité en fonction des lieux et des moments où elle résonne.

    En #France, c’est au milieu des années 2000 qu’on commence à parler d’intersectionnalité ; et c’est d’abord au sein des #études_de_genre. Pourquoi ? Un premier contexte, c’est la visibilité nouvelle de la « #question_raciale » au sein même de la « #question_sociale », avec les émeutes ou révoltes urbaines de 2005 : l’analyse en termes de classe n’était manifestement plus suffisante ; on commence alors à le comprendre, pour les sciences sociales, se vouloir aveugle à la couleur dans une société qu’elle obsède revient à s’aveugler au #racisme. Un second contexte a joué un rôle plus immédiat encore : 2004, c’est la loi sur les signes religieux à l’école. La question du « #voile_islamique » divise les féministes : la frontière entre « eux » et « nous » passe désormais, en priorité, par « elles ». Autrement dit, la différence de culture (en l’occurrence religieuse) devient une question de genre. L’intersectionnalité permet de parler de ces logiques multiples. Importer le concept revient à le traduire dans un contexte différent : en France, ce n’est plus, comme aux États-Unis, l’invisibilité des #femmes_noires à l’intersection entre féminisme et droits civiques ; c’est plutôt l’hypervisibilité des #femmes_voilées, au croisement entre #antisexisme et #antiracisme.

    Circulations interdisciplinaires

    La traduction d’une langue à une autre, et d’un contexte états-unien au français, fait apparaître une deuxième différence. Kimberlé Crenshaw est juriste ; sa réflexion porte sur les outils du #droit qu’elle utilise pour lutter contre la #discrimination. Or aux États-Unis, le droit identifie des catégories « suspectes » : le sexe et la race. Dans les pratiques sociales, leur utilisation, implicite ou explicite, est soumise à un examen « strict » pour lutter contre la discrimination. Cependant, on passe inévitablement de la catégorie conceptuelle au groupe social. En effet, l’intersectionnalité s’emploie à montrer que, non seulement une femme peut être discriminée en tant que femme, et un Noir en tant que Noir, mais aussi une femme noire en tant que telle. C’est donc seulement pour autant qu’elle est supposée relever d’un groupe sexuel ou racial que le droit peut reconnaître une personne victime d’un traitement discriminatoire en raison de son sexe ou de sa race. Toutefois, dans son principe, cette démarche juridique n’a rien d’identitaire : comme toujours pour les discriminations, le point de départ, c’est le traitement subi. Il serait donc absurde de reprendre ici les clichés français sur le « communautarisme américain » : l’intersectionnalité vise au contraire à lutter contre l’#assignation discriminatoire à un groupe (femmes, Noirs, ou autre).

    En France, la logique est toute différente, dès lors que l’intersectionnalité est d’abord arrivée, via les études de genre, dans le champ des sciences sociales. La conséquence de cette translation disciplinaire, c’est qu’on n’a généralement pas affaire à des groupes. La sociologie s’intéresse davantage à des propriétés, qui peuvent fonctionner comme des variables. Bien sûr, on n’oublie pas la logique antidiscriminatoire pour autant : toutes choses égales par ailleurs (en l’occurrence dans une même classe sociale), on n’a pas le même salaire selon qu’on est blanc ou pas, ou la même retraite si l’on est homme ou femme. Il n’est donc pas ou plus possible de renvoyer toutes les explications à une détermination en dernière instance : toutes les #inégalités ne sont pas solubles dans la classe. C’est évident pour les femmes, qui appartiennent à toutes les classes ; mais on l’oublie parfois pour les personnes dites « non blanches », tant elles sont surreprésentées dans les classes populaires – mais n’est-ce pas justement, pour une part, l’effet de leur origine supposée ? Bien entendu, cela ne veut pas dire, à l’inverse, que la classe serait soluble dans une autre forme de #domination. En réalité, cela signifie simplement que les logiques peuvent se combiner.

    L’intérêt scientifique (et politique) pour l’intersectionnalité est donc le signe d’une exigence de #complexité : il ne suffit pas d’analyser la classe pour en avoir fini avec les logiques de domination. C’est bien pourquoi les féministes n’ont pas attendu le concept d’intersectionnalité, ni sa traduction française, pour critiquer les explications monocausales. En France, par exemple, face au #marxisme, le #féminisme_matérialiste rejette de longue date cette logique, plus politique que scientifique, de l’« ennemi principal » (de classe), qui amène à occulter les autres formes de domination. En 1978, #Danièle_Kergoat interrogeait ainsi la neutralisation qui, effaçant l’inégalité entre les sexes, pose implicitement un signe d’égalité entre « ouvrières » et « ouvriers » : « La #sociologie_du_travail parle toujours des “#ouvriers” ou de la “#classe_ouvrière” sans faire aucune référence au #sexe des acteurs sociaux. Tout se passe comme si la place dans la production était un élément unificateur tel que faire partie de la classe ouvrière renvoyait à une série de comportements et d’attitudes relativement univoques (et cela, il faut le noter, est tout aussi vrai pour les sociologues se réclamant du #marxisme que pour les autres. »

    Or, ce n’est évidemment pas le cas. Contre cette simplification, qui a pour effet d’invisibiliser les ouvrières, la sociologue féministe ne se contente pas d’ajouter une propriété sociale, le sexe, à la classe ; elle montre plus profondément ce qu’elle appelle leur #consubstantialité. On n’est pas d’un côté « ouvrier » et de l’autre « femme » ; être une #ouvrière, ce n’est pas la même chose qu’ouvrier – et c’est aussi différent d’être une bourgeoise. On pourrait dire de même : être une femme blanche ou noire, un garçon arabe ou pas, mais encore un gay de banlieue ou de centre-ville, ce n’est vraiment pas pareil !

    Classe et race

    Dans un essai sur le poids de l’#assignation_raciale dans l’expérience sociale, le philosophe #Cornel_West a raconté combien les taxis à New York refusaient de s’arrêter pour lui : il est noir. Son costume trois-pièces n’y fait rien (ni la couleur du chauffeur, d’ailleurs) : la classe n’efface pas la race – ou pour le dire plus précisément, le #privilège_de_classe ne suffit pas à abolir le stigmate de race. Au Brésil, comme l’a montré #Lélia_Gonzalez, pour une femme noire de classe moyenne, il ne suffit pas d’être « bien habillée » et « bien élevée » : les concierges continuent de leur imposer l’entrée de service, conformément aux consignes de patrons blancs, qui n’ont d’yeux que pour elles lors du carnaval… En France, un documentaire intitulé #Trop_noire_pour_être_française part d’une même prise de conscience : la réalisatrice #Isabelle_Boni-Claverie appartient à la grande bourgeoisie ; pourtant, exposée aux discriminations, elle aussi a fini par être rattrapée par sa couleur.

    C’est tout l’intérêt d’étudier les classes moyennes (ou supérieures) de couleur. Premièrement, on voit mieux la logique propre de #racialisation, sans la rabattre aussitôt sur la classe. C’est justement parce que l’expérience de la bourgeoisie ne renvoie pas aux clichés habituels qui dissolvent les minorités dans les classes populaires. Deuxièmement, on est ainsi amené à repenser la classe : trop souvent, on réduit en effet ce concept à la réalité empirique des classes populaires – alors qu’il s’agit d’une logique théorique de #classement qui opère à tous les niveaux de la société. Troisièmement, ce sont souvent ces couches éduquées qui jouent un rôle important dans la constitution d’identités politiques minoritaires : les porte-parole ne proviennent que rarement des classes populaires, ou du moins sont plus favorisés culturellement.

    L’articulation entre classe et race se joue par exemple autour du concept de #blanchité. Le terme est récent en français : c’est la traduction de l’anglais #whiteness, soit un champ d’études constitué non pas tant autour d’un groupe social empirique (les Blancs) que d’un questionnement théorique sur une #identification (la blanchité). Il ne s’agit donc pas de réifier les catégories majoritaires (non plus, évidemment, que minoritaires) ; au contraire, les études sur la blanchité montrent bien, pour reprendre un titre célèbre, « comment les Irlandais sont devenus blancs » : c’est le rappel que la « race » ne doit rien à la #biologie, mais tout aux #rapports_de_pouvoir qu’elle cristallise dans des contextes historiques. À nouveau se pose toutefois la question : la blanchité est-elle réservée aux Blancs pauvres, condamnés à s’identifier en tant que tels faute d’autres ressources ? On parle ainsi de « #salaire_de_la_blanchité » : le #privilège de ceux qui n’en ont pas… Ou bien ne convient-il pas de l’appréhender, non seulement comme une compensation, mais aussi et surtout comme un langage de pouvoir – y compris, bien sûr, chez les dominants ?

    En particulier, si le regard « orientaliste » exotise l’autre et l’érotise en même temps, la #sexualisation n’est pas réservée aux populations noires ou arabes (en France), ou afro-américaines et hispaniques (comme aux États-Unis), bref racisées. En miroir, la #blanchité_sexuelle est une manière, pour les classes moyennes ou supérieures blanches, de s’affirmer « normales », donc de fixer la #norme, en particulier dans les projets d’#identité_nationale. Certes, depuis le monde colonial au moins, les minorités raciales sont toujours (indifféremment ou alternativement) hypo- – ou hyper- –sexualisées : pas assez ou bien trop, mais jamais comme il faut. Mais qu’en est-il des majoritaires ? Ils se contentent d’incarner la norme – soit d’ériger leurs pratiques et leurs représentations en normes ou pratiques légitimes. C’est bien pourquoi la blanchité peut être mobilisée dans des discours politiques, par exemple des chefs d’État (de la Colombie d’Álvaro Uribe aux États-Unis de Donald Trump), le plus souvent pour rappeler à l’ordre les minorités indociles. La « question sociale » n’a donc pas cédé la place à la « question raciale » ; mais la première ne peut plus servir à masquer la seconde. Au contraire, une « question » aide à repenser l’autre.

    Les #contrôles_au_faciès

    Regardons maintenant les contrôles policiers « au faciès », c’est-à-dire fondés sur l’#apparence. Une enquête quantitative du défenseur des droits, institution républicaine qui est chargée de défendre les citoyens face aux abus de l’État, a récemment démontré qu’il touche inégalement, non seulement selon les quartiers (les classes populaires), mais aussi en fonction de l’âge (les jeunes) et de l’apparence (les Arabes et les Noirs), et enfin du sexe (les garçons plus que les filles). Le résultat, c’est bien ce qu’on peut appeler « intersectionnalité ». Cependant, on voit ici que le croisement des logiques discriminatoires ne se résume pas à un cumul des handicaps : le sexe masculin fonctionne ici comme un #stigmate plutôt qu’un privilège. L’intersectionnalité est bien synonyme de complexité.

    « Les jeunes de dix-huit-vingt-cinq ans déclarent ainsi sept fois plus de contrôles que l’ensemble de la population, et les hommes perçus comme noirs ou arabes apparaissent cinq fois plus concernés par des contrôles fréquents (c’est-à-dire plus de cinq fois dans les cinq dernières années). Si l’on combine ces deux critères, 80 % des personnes correspondant au profil de “jeune homme perçu comme noir ou arabe” déclarent avoir été contrôlées dans les cinq dernières années (contre 16 % pour le reste des enquêté.e.s). Par rapport à l’ensemble de la population, et toutes choses égales par ailleurs, ces profils ont ainsi une probabilité vingt fois plus élevée que les autres d’être contrôlés. »

    Répétons-le : il n’y a rien d’identitaire dans cette démarche. D’ailleurs, la formulation du défenseur des droits dissipe toute ambiguïté : « perçus comme noirs ou arabes ». Autrement dit, c’est l’origine réelle ou supposée qui est en jeu. On peut être victime d’antisémitisme sans être juif – en raison d’un trait physique, d’un patronyme, ou même d’opinions politiques. Pour peu qu’on porte un prénom lié à l’islam, ou même qu’on ait l’air « d’origine maghrébine », musulman ou pas, on risque de subir l’#islamophobie. L’#homophobie frappe surtout les homosexuels, et plus largement les minorités sexuelles ; toutefois, un garçon réputé efféminé pourra y être confronté, quelle que soit sa sexualité.

    Et c’est d’ailleurs selon la même logique qu’en France l’État a pu justifier les contrôles au faciès. Condamné en 2015 pour « faute lourde », il a fait appel ; sans remettre en cause les faits établis, l’État explique que la législation sur les étrangers suppose de contrôler « les personnes d’#apparence_étrangère », voire « la seule population dont il apparaît qu’elle peut être étrangère ». Traiter des individus en raison de leur apparence, supposée renvoyer à une origine, à une nationalité, voire à l’irrégularité du séjour, c’est alimenter la confusion en racialisant la nationalité. On le comprend ainsi : être, c’est être perçu ; l’#identité n’existe pas indépendamment du regard des autres.

    L’exemple des contrôles au faciès est important, non seulement pour celles et ceux qui les subissent, bien sûr, mais aussi pour la société tout entière : ils contribuent à la constitution d’identités fondées sur l’expérience commune de la discrimination. Les personnes racisées sont celles dont la #subjectivité se constitue dans ces incidents à répétition, qui finissent par tracer des frontières entre les #expériences minoritaires et majoritaires. Mais l’enjeu est aussi théorique : on voit ici que l’identité n’est pas première ; elle est la conséquence de #pratiques_sociales de #racialisation – y compris de pratiques d’État. Le racisme ne se réduit pas à l’#intention : le racisme en effet est défini par ses résultats – et d’abord sur les personnes concernées, assignées à la différence par la discrimination.

    Le mot race

    Les logiques de domination sont plurielles : il y a non seulement la classe, mais aussi le sexe et la race, ainsi que l’#âge ou le #handicap. Dans leur enchevêtrement, il est à chaque fois question, non pas seulement d’#inégalités, mais aussi de la #naturalisation de ces hiérarchies marquées dans les corps. Reste que c’est surtout l’articulation du sexe ou de la classe avec la race qui est au cœur des débats actuels sur l’intersectionnalité. Et l’on retrouve ici une singularité nationale : d’après l’ONU, les deux tiers des pays incluent dans leur recensement des questions sur la race, l’#ethnicité ou l’#origine_nationale. En France, il n’en est pas question – ce qui complique l’établissement de #statistiques « ethno-raciales » utilisées dans d’autre pays pour analyser les discriminations.

    Mais il y a plus : c’est seulement en France que, pour lutter contre le racisme, on se mobilise régulièrement en vue de supprimer le mot race de la Constitution ; il n’y apparaît pourtant, depuis son préambule de 1946 rédigé en réaction au nazisme, que pour énoncer un principe antiraciste : « sans distinction de race ». C’est aujourd’hui une bataille qui divise selon qu’on se réclame d’un antiracisme dit « universaliste » ou « politique » : alors que le premier rejette le mot race, jugé indissociable du racisme, le second s’en empare comme d’une arme contre la #racialisation de la société. Ce qui se joue là, c’est la définition du racisme, selon qu’on met l’accent sur sa version idéologique (qui suppose l’intention, et passe par le mot), ou au contraire structurelle (que l’on mesure à ses effets, et qui impose de nommer la chose).

    La bataille n’est pas cantonnée au champ politique ; elle s’étend au champ scientifique. Le racisme savant parlait naguère des races (au pluriel), soit une manière de mettre la science au service d’un #ordre_racial, comme dans le monde colonial. Dans la recherche antiraciste, il est aujourd’hui question de la race (au singulier) : non pas l’inventaire des populations, sur un critère biologique ou même culturel, mais l’analyse critique d’un mécanisme social qui assigne des individus à des groupes, et ces groupes à des positions hiérarchisées en raison de leur origine, de leur apparence, de leur religion, etc. Il n’est donc pas question de revenir aux élucubrations racistes sur les Aryens ou les Sémites ; en revanche, parler de la race, c’est se donner un vocabulaire pour voir ce qu’on ne veut pas voir : la #discrimination_raciste est aussi une #assignation_raciale. S’aveugler à la race ne revient-il pas à s’aveugler au racisme ?

    Il ne faut donc pas s’y tromper : pour les sciences sociales actuelles, la race n’est pas un fait empirique ; c’est un concept qui permet de nommer le traitement inégal réservé à des individus et des groupes ainsi constitués comme différents. La réalité de la race n’est donc ni biologique ni culturelle ; elle est sociale, en ce qu’elle est définie par les effets de ces traitements, soit la racialisation de la société tout entière traversée par la logique raciale. On revient ici aux analyses classiques d’une féministe matérialiste, #Colette_Guillaumin : « C’est très exactement la réalité de la “race”. Cela n’existe pas. Cela pourtant produit des morts. [...] Non, la race n’existe pas. Si, la race existe. Non, certes, elle n’est pas ce qu’on dit qu’elle est, mais elle est néanmoins la plus tangible, réelle, brutale, des réalités. »

    Morale de l’histoire

    A-t-on raison de s’inquiéter d’un recul de l’#universalisme en France ? Les logiques identitaires sont-elles en train de gagner du terrain ? Sans nul doute : c’est bien ce qu’entraîne la racialisation de notre société. Encore ne faut-il pas confondre les causes et les effets, ni d’ailleurs le poison et l’antidote. En premier lieu, c’est l’#extrême_droite qui revendique explicitement le label identitaire : des États-Unis de Donald Trump au Brésil de Jair Bolsonaro, on assiste à la revanche de la #masculinité_blanche contre les #minorités_raciales et sexuelles. Ne nous y trompons pas : celles-ci sont donc les victimes, et non pas les coupables, de ce retour de bâton (ou backlash) qui vise à les remettre à leur place (dominée).

    Deuxièmement, la #ségrégation_raciale que l’on peut aisément constater dans l’espace en prenant les transports en commun entre Paris et ses banlieues n’est pas le résultat d’un #communautarisme minoritaire. Pour le comprendre, il convient au contraire de prendre en compte un double phénomène : d’une part, la logique sociale que décrit l’expression #White_flight (les Blancs qui désertent les quartiers où sont reléguées les minorités raciales, anticipant sur la ségrégation que leurs choix individuels accélèrent…) ; d’autre part, les #politiques_publiques de la ville dont le terme #apartheid résume le résultat. Le #multiculturalisme_d’Etat, en Colombie, dessinerait une tout autre logique : les politiques publiques visent explicitement des identités culturelles au nom de la « #diversité », dont les mouvements sociaux peuvent s’emparer.

    Troisièmement, se battre pour l’#égalité, et donc contre les discriminations, ce n’est pas renoncer à l’universalisme ; bien au contraire, c’est rejeter le #communautarisme_majoritaire. L’intersectionnalité n’est donc pas responsable au premier chef d’une #fragmentation_identitaire – pas davantage qu’une sociologie qui analyse les inégalités socio-économiques n’est la cause première de la lutte des classes. Pour les #sciences_sociales, c’est simplement se donner les outils nécessaires pour comprendre un monde traversé d’#inégalités multiples.

    Quatrièmement, ce sont les #discours_publics qui opposent d’ordinaire la classe à la race (ou les ouvriers, présumés blancs, aux minorités raciales, comme si celles-ci n’appartenaient pas le plus souvent aux classes populaires), ou encore, comme l’avait bien montré #Christine_Delphy, l’#antisexisme à l’antiracisme (comme si les femmes de couleur n’étaient pas concernées par les deux). L’expérience de l’intersectionnalité, c’est au contraire, pour chaque personne, quels que soient son sexe, sa classe et sa couleur de peau, l’imbrication de propriétés qui finissent par définir, en effet, des #identités_complexes (plutôt que fragmentées) ; et c’est cela que les sciences sociales s’emploient aujourd’hui à appréhender.

    _____________

    Ce texte écrit avec #Mara_Viveros_Vigoya, et publié en 2019 dans le Manuel indocile de sciences sociales (Fondation Copernic / La Découverte), peut être téléchargé ici : https://static.mediapart.fr/files/2021/03/07/manuel-indocile-intersectionnalite.pdf

    À lire :

    Kimberlé Crenshaw, « Cartographies des marges : intersectionnalité, politique de l’identité et violences contre les femmes de couleur » Cahiers du Genre, n° 39, février 2005, p. 51-82

    Défenseur des droits, Enquête sur l’accès aux droits, Relations police – population : le cas des contrôles d’identité, vol. 1, janvier 2017

    Christine Delphy, « Antisexisme ou antiracisme ? Un faux dilemme », Nouvelles Questions Féministes, vol. 25, janvier 2006, p. 59-83

    Elsa Dorlin, La Matrice de la race. Généalogie sexuelle et coloniale de la nation française, La Découverte, Paris, 2006

    Elsa Dorlin, Sexe, race, classe. Pour une épistémologie de la domination, Presses universitaires de France, Paris, 2009

    Didier Fassin et Éric Fassin (dir.), De la question sociale à la question raciale ? Représenter la société française, La Découverte, Paris, 2009 [première édition : 2006]

    Éric Fassin (dir.), « Les langages de l’intersectionnalité », Raisons politiques, n° 58, mai 2015

    Éric Fassin, « Le mot race – 1. Cela existe. 2. Le mot et la chose », AOC, 10 au 11 avril 2019

    Nacira Guénif-Souilamas et Éric Macé, Les féministes et le garçon arabe, L’Aube, Paris, 2004

    Colette Guillaumin, « “Je sais bien mais quand même” ou les avatars de la notion de race », Le Genre humain, 1981, n° 1, p. 55-64

    Danièle Kergoat, « Ouvriers = ouvrières ? », Se battre, disent-elles…, La Dispute, Paris, 2012, p. 9-62

    Abdellali Hajjat et Silyane Larcher (dir.), « Intersectionnalité », Mouvements, 12 février 2019

    Mara Viveros Vigoya, Les Couleurs de la masculinité. Expériences intersectionnelles et pratiques de pouvoir en Amérique latine, La Découverte, Paris, 2018

    https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/050321/intersectionnalite-une-introduction#at_medium=custom7&at_campaign=10

    #définition #invisibilisation #antiracisme_universaliste #antiracisme_politique #racisme_structurel

    voir aussi ce fil de discussion sur l’intersectionnalité, avec pas mal de #ressources_pédagogiques :
    https://seenthis.net/messages/796554

  • A Cléon, un enfant exclu de son collège pour avoir dénoncé son professeur de sport
    7 mars 2021 Par Rémi Yang
    https://www.mediapart.fr/journal/france/070321/cleon-un-enfant-exclu-de-son-college-pour-avoir-denonce-son-professeur-de-

    Dans la périphérie de Rouen, un élève de sixième a dû changer d’établissement après avoir relayé une accusation d’agression sexuelle de la part d’un prof de sport. Plusieurs enfants avaient pourtant témoigné. L’enseignant nie en bloc.

    Cléon (Seine-Maritime).– La famille Jaafar n’arrive toujours pas à digérer la situation. Dans le salon de leur maison à Cléon, en Normandie, Karim et Chérifa tournent l’affaire en boucle. À la colère s’ajoutent le dégoût, la tristesse, l’incompréhension et un profond sentiment d’injustice, alors que leur fils rentre tout juste de l’école. L’année dernière, après le déconfinement et la rentrée de mai, Ibrahim*, 12 ans, a dû prendre ses marques dans un nouvel établissement après avoir été définitivement exclu du collège Jacques-Brel de Cléon (Seine-Maritime).

    Cet élève aujourd’hui en cinquième, dynamique en classe, « intelligent et mature », comme l’a décrit sa professeure de français lors du conseil de discipline, est accusé par le proviseur d’avoir porté « atteinte à l’intégrité morale » de son professeur de sport, Monsieur L.

    Le 16 janvier 2020, lors d’une séance de gymnastique, Ibrahim raconte avoir vu l’enseignant tenir une élève par l’entrejambe lors d’une démonstration de parade. Après en avoir discuté avec d’autres camarades qui ont vu la même chose, il décide d’en parler à d’autres professeurs. Madame R., sa professeure de français, fait remonter l’information au principal, Monsieur C., qui déclenche une enquête interne.

    Le lendemain, l’infirmière scolaire convoque quatre élèves, dont la fille qui aurait été victime des attouchements. Dans son témoignage, que Mediapart a pu consulter, l’infirmière écrit que cette dernière nie avoir été touchée. Cependant, l’infirmière confie qu’un « autre élève [lui] a aussi dit que Monsieur L. l’avait touché au niveau des fesses pendant qu’il était sur un gros ballon de gym ».

    Pendant les jours qui suivent, le chef d’établissement recueille les témoignages d’Ibrahim et de ses amis, de la victime supposée et du professeur de sport. Il fait signer aux élèves des rapports d’incident que nous avons pu consulter. Dans cinq d’entre eux, certains collégiens affirment avoir été victimes d’attouchements ou vu le professeur « toucher les fesses » d’autres élèves.

    « Je fais ce rapport, car j’entends que Monsieur L. a fait des attouchements aux parties intimes pendant le cours de sport. Peut-être que pour les autres il n’a pas fait exprès, mais moi il me l’a fait une fois l’année dernière en cours d’UNSS [l’Union nationale du sport scolaire regroupe les associations sportives des collèges et lycées et prône une éducation sportive, humaniste et citoyenne. Les profs d’EPS doivent assurer trois heures de cours hebdomadaires – ndlr] », écrit un élève.

    Certains élèves de sixième prennent la défense de Monsieur L. et dénoncent des « rumeurs » en évoquant des « gestes mal interprétés ».

    Dans la foulée, Ibrahim, alors délégué suppléant, rédige une pétition affirmant que « Monsieur L. est un pervers », qu’il fait signer aux élèves qui le veulent. « Le proviseur nous avait dit que les accusations étaient graves et qu’on ne pouvait pas les proférer sans preuve », se souvient Ibrahim. « Pour mon fils, la pétition était une preuve qu’il allait fournir. Du côté de la direction, ça a été interprété comme une cabale contre le professeur », complète sa mère.

    Le collège Jacques-Brel à Cléon (Seine-Maritime). © RY Le collège Jacques-Brel à Cléon (Seine-Maritime). © RY

    Un petit mois plus tard, Monsieur C. convoque un conseil de discipline pour statuer sur le cas d’Ibrahim, à l’issue duquel l’élève est renvoyé définitivement. Peu de temps après, Monsieur L. dépose une plainte contre Ibrahim pour « dénonciation calomnieuse », dans laquelle il estime que les accusations d’Ibrahim lui portent préjudice « à double titre », étant donné qu’il dirige la filière gym du collège en plus d’y être professeur. « J’ai cru comprendre que le problème venait du fait que je leur demandais de se toucher », explique alors le prof, qui affirme, dans sa plainte consultée par Mediapart, avoir rappelé à ses élèves « l’intérêt des parades pour des raisons de sécurité » et que « cela faisait partie du programme des compétences travaillées ».

    Contacté par Mediapart, le prof de sport a indiqué que le rectorat ne l’autorisait pas à répondre à nos questions.

    La famille Jaafar, elle, souligne la sévérité de la sanction prononcée contre leur fils.

    « C’est un enfant ! Il peut très bien avoir mal interprété un geste, mais il aurait fallu en parler avec nous, lui expliquer avec pédagogie que c’était une démonstration pour une parade », soulève sa mère, Chérifa.

    « Renvoyer un élève de sixième, c’est extrêmement rare, commente Lydia Advenier, membre de l’exécutif du Syndicat national des professionnels de la direction de l’éducation nationale (SNPDEN). C’est d’une violence, par rapport à ce qui lui est reproché… » La syndicaliste s’étonne de la gestion interne et du « traitement disproportionné » de ce dossier.

    Dans ce genre de situation, elle juge nécessaire de recourir au proviseur de vie scolaire, un intermédiaire entre le rectorat et l’établissement dont l’un des rôles est d’apporter un point de vue extérieur. Elle estime néanmoins que le proviseur aurait agi selon son bon droit. « La manière dont on exerce ce métier dépend vraiment de notre personnalité. Chaque chef d’établissement ne va pas traduire un élève en conseil de discipline pour la même raison. »

    Des signalements antérieurs évoqués

    Le traitement du cas d’Ibrahim soulève également un débat sur les signalements des violences sexuelles. Le chef d’établissement aurait-il dû faire remonter le signalement d’Ibrahim au procureur de la République plutôt que d’enquêter en interne ?

    Dans une circulaire éditée en 2006 concernant les conduites à tenir en cas de « révélation d’un élève à un adulte de l’EPLE (établissement public local d’enseignement) concernant une agression sexuelle par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions », le ministère précise : « Il n’est jamais procédé à des interrogatoires ni à des investigations. »

    Contacté, le ministère de l’éducation nationale rappelle que « si, en qualité de fonctionnaire, dans l’exercice de ses fonctions, [tout personnel de l’éducation nationale] acquiert la connaissance d’un crime ou de délit, il est tenu d’en aviser sans délai le procureur de la République (article 40 du code de procédure pénale) ».

    Pourtant, le rectorat de Rouen estime que la procédure a bien été respectée. « En l’espèce, au vu des différents témoignages recueillis, les accusations portées par certains élèves ne sont pas fondées. Il n’y avait pas lieu, dans cette situation, d’appliquer l’article 40 », explique l’académie de Normandie.

    Une lecture des événements que Me Zadourian, l’avocate de la famille Jaafar, ne partage pas. « Ce n’est ni aux professeurs, ni aux chefs d’établissement, ni au rectorat de définir si ce que l’enfant a vu est bien constitutif d’un crime ou d’un délit. Ils ne peuvent pas se substituer au procureur de la République, fait-elle valoir. Ici, la professeure de français aurait dû signaler les faits au procureur dès que les enfants lui en ont parlé, avant même de faire remonter au chef d’établissement. »

    Surtout, les signalements émis par Ibrahim et ses camarades de classe ne seraient pas les premiers concernant Monsieur L. Pendant le conseil de discipline, Fatoumata*, déléguée des élèves, a affirmé qu’en 2018, alors qu’elle était en sixième et que Monsieur C. n’était pas encore à la tête de l’établissement, seize fiches de signalement provenant de différentes classes auraient été remises au conseiller principal d’éducation (CPE). Mais le témoignage de Fatoumata n’a pas été retenu, car elle était membre du conseil de discipline. « Lorsque j’en ai parlé, je me souviens que tous les professeurs étaient surpris, rembobine-t-elle. Le CPE [lui aussi présent au conseil de discipline – ndlr] a juste dit qu’il ne s’en rappelait pas. »

    Lorsque Ibrahim, son père et Me Zadourian sont sortis de la salle le temps de la délibération du conseil de discipline, Fatoumata raconte avoir subi des pressions. « Les autres professeurs m’ont dit de me taire, sans m’expliquer. »

    « Notre société est en pleine révolution, avec #MeToo et ce qu’il se passe avec les enfants en ce moment… Et là où l’école est censée être leur temple, la parole de l’enfant passe derrière tout. Même pire, elle est sanctionnée », déplore Lynda Advenier.

    Depuis l’exclusion du petit Ibrahim, la famille Jafaar se bat pour que la sanction soit effacée du dossier scolaire de leur fils. « On ne veut pas qu’il retourne dans ce collège, mais une exclusion définitive peut s’avérer très handicapante au moment du choix de son lycée ou sur Parcoursup, relève Chérifa. Et puis, il s’agit aussi d’obtenir justice pour Ibrahim, qu’il comprenne qu’il n’a rien fait de mal. »

    Après être passée devant le rectorat de Rouen, qui a confirmé la décision du conseil de discipline, la famille Jaafar a déposé un recours pour excès de pouvoir au tribunal administratif. En parallèle, ajoute leur avocate, Chérifa et Karim prévoient de porter plainte contre l’établissement pour harcèlement et subornation de témoin.

  • Ist die Zeit reif für eine David-Bowie-Straße?
    https://www.faz.net/aktuell/feuilleton/ist-die-zeit-reif-fuer-eine-david-bowie-strasse-17162585.html

    25.01.2021 von Tobias Rüther - Im Januar vor fünf Jahren ist David Bowie gestorben. Schnell war damals unter seinen Fans die Idee entstanden, jene Hauptstraße im Berliner Stadtteil Schöneberg, wo der englische Popkünstler Mitte der siebziger Jahre gewohnt hatte, in „David-Bowie-Straße“ umzubenennen. Dagegen sprach damals noch die Rechtslage: Fünf Jahre müssen zwischen dem Tod und solch einer Umbenennung liegen. Und vielleicht auch, dass die Hauptstraße 155 dann ja nicht mehr Hauptstraße 155 hieße: eine Adresse, die genau wie die Kreuzung Haight Ashbury in San Francisco, Fixpunkt der Hippies, zum Synonym geworden ist für eine Konstellation der Kulturgeschichte.

    David Bowie hat zwar nicht lange in der Hauptstraße 155 gewohnt. Aber doch lang genug, um in dieser Zeit zwischen 1976 und 1978 körperlich und künstlerisch durchzupusten, die Popmusik mit komischen elektronischen Geräuschen zu verändern und der Stadt ein bisschen Starpower zu hinterlassen.

    Beide zehren bis heute davon. Beiden, Bowie wie Berlin, ist eigentlich erst später so richtig klargeworden, wie viel mythisches Potential in dieser Anekdote steckte: ein berühmter Popstar in einer geteilten Stadt. Bowie hat gern davon erzählt und sich in seinen letzten Lebensjahren selbst als Berliner besungen (auf den Platten, die er damals im Hansa Studio aufnahm, kam Berlin wortwörtlich noch nicht vor, selbst in der Mauerhymne „Heroes“ nicht).

    Seine Hauptstraße 155 wiederum ist heute eine feste Adresse bei Stadtführungen. Dort hatte der Regierende Bürgermeister Müller ein Dreivierteljahr nach Bowies Tod eine Gedenktafel enthüllt. Die war dann kurz darauf wieder verschwunden und musste ersetzt werden – was lustigerweise genauso zum Kunstdieb Bowie passt, der sich permanent bei anderen Genres bediente, wie zu Berlin, wo Kopien von Gewesenem oder gleich ganz Verlorenes noch immer am liebsten angebetet werden.

    Den Wunsch der Fans, einen Teil der vierspurigen, bezirksverbindenden Hauptstraße nach Bowie umzubenennen, hatte dann 2017 auch eine Schöneberger Politikerin der Grünen aufgegriffen, Catherina Pieroth, und schon damals wurde diskutiert, ob es nicht auch ein Platz in der Nähe von Bowies alter Wohnung sein könnte.

    Genau das hat jetzt die CDU von Tempelhof und Schöneberg gefordert: Sie schlägt nicht den nahen Kaiser-Wilhelm-Platz vor, sondern die noch nähere und namenlose Kreuzung, an der auch der U-Bahnhof Kleistpark liegt. „David-Bowie-Platz“: Weil fünf Jahre seit dem Tod verstrichen sind, wäre das tatsächlich möglich, nur hatte sich Berlin eigentlich vorgenommen, vorerst nur Frauen so zu beehren.

    In diesen fünf Jahren hat zudem die #MeToo-Bewegung dafür gesorgt, dass man sich endlich genauer anschaut, wie sich Geniekult und das Herunterspielen von sexuellem Missbrauch zueinander verhalten. Bowie und seine minderjährigen Groupies, dieses Kapitel seines Lebens nicht als Geschichte von Kavaliersdelikten oder Rock-’n’-Roll-Legende abzutun, sondern aufzuarbeiten wäre der erste Schritt. Danach kann man dann ja weiter diskutieren, ob man einen Heldenplatz für Bowie in Berlin braucht. Lieder davon kann man nämlich seit langem singen. Bowie hat sie selbst geschrieben.

    #Berlin #Schöneberg #Hauptstraße #Grunewaldstraße #Langenscheidtstraße #Musik #Geschichte #Straßenumbenennung

  • My father, Amos Oz, sadistically abused me. The punishment was endless: The first chapter of Galia Oz’s new book
    Read the full first chapter of ’Something Disguised as Love’ by Galia Oz
    Galia Oz | Feb. 25, 2021 | 11:51 AM | 9

    SOMETHING DISGUISED AS LOVE
    https://www.haaretz.com/israel-news/.premium.HIGHLIGHT.MAGAZINE-my-father-amos-oz-sadistically-abused-me-the-pu


    When I was a child, my father beat me, cursed me and humiliated me. The violence was creative: He dragged me from the house and tossed me into the yard. He called me filth. This wasn’t a passing loss of his temper or a slap on the cheek here and there, but a routine of sadistic abuse. My crime was me myself, and so the punishment was endless. He had a need to be sure I would break.

    We lived on a kibbutz. My bed, my clothes – it was all at the children’s house. I only visited my parents for a few hours each day. But even that was too much. This is not your house, they told me, go to the children’s house. The norms of the communal sleeping quarters for kibbutz children at the time were already problematic; my neglect went far beyond that.

    My father beat my mother. It happened in my presence. But she completely abnegated herself before him, and on the rare occasions when she dared to show anger or pain he crushed and silenced her. When it came to me, they were a united front. She cooperated with him and found excuses to distance me. I was rejected and hated, but they didn’t shut me out completely. Tyranny requires victims and, like all battered children, I came back again and again seeking closeness, hoping that something would change.

    There was terror at home, and constant pretending in front of strangers. I write the word terror, because the threat of violence always hung in the air, and that was enough to sow fear and maintain control. The intimidation and pretense were intertwined: Our family microcosm, in which one horrible incident followed another, existed not only to satisfy some cruel impulse in my father, but also to keep a threat continuously hanging over our heads, preventing any complaints from leaking into the outside world.

    And there was this thing that assumed the guise of love, that was presented as an absolute fact in public and within the family circle, which erased all doubts and preemptively silenced any rebellious thoughts. To this day, I can hardly believe how effective and hermetic this structure was. I was a child, but there was no childhood. Decades passed before I understood that the violence did not disappear when I became an adult; it just took on a different form. That this pattern of intimidation and denial never changed until the day my father died.

    When I started to write, I felt like I was walking a very narrow path. The shame and guilt, which are the price of ongoing abuse, had planted the understanding within me that this happened only to me, that I’d never be able to explain it and that there was also no reason to publish it. There was also the question of how what I wrote would be read; when it comes to a famous man and autobiographical writing, it is all too easy to assume that the account is lowly gossip, “dirty laundry.” That is not the case here. My confession goes only as far as is necessary to put this part of my biography into a broader context. This book is about me, but I am not the only one. Homes like the one I grew up in somehow manage to float in space, far from the reach of social workers, beyond the range of influence of revolutions like #MeToo, without leaving a mark on social media. Nightmarish and isolated, they shrewdly encrypt their secrets like crime families. The only way I can write about this is to overcome the silence and secrecy, the habit of keeping everything bottled up inside and the fear of what people will say. I’m not really overcoming it, of course. But I am writing.

    As far back as I can remember, I knew what awaited me at home, but I couldn’t give it a name. The beatings, insults and curses – it was as if they didn’t really happen. By the standards of those years, no crime was committed in our home. In the early 70s, the United Nations Convention on the Rights of the Child had not yet been signed, and Israel had not yet passed the Prevention of Domestic Violence Law. When Knesset member Marcia Freedman brought the issue of battered women up for discussion in parliament in 1976, she was heckled with dismissive and mocking comments.

    My father professed himself to be a good person, and anything that contradicted this idea was considered unthinkable. He was the epitome of a sensitive soul; his persona was built upon an impeccable morality, and the cult of personality that grew to surround him left no room for complaint even then. In any case, there was no one around who would argue with him. These axioms made his assaults so effective that, for many years, I couldn’t call a spade a spade, because my mind simply couldn’t grasp the idea that a good person like him could be synonymous with evil. In every possible equation, private or public, he placed himself on the humane, admirable and compassionate side. I could only believe that, regardless of my actions, I was inherently bad. That I was a disgrace, an embarrassment.

    That cutting cry – filth! – was not just a device for policing and intimidation, it was a definition (He sometimes applied the same epithet to others who opposed him, but never to their faces, of course). His outbursts were portrayed as a necessary defensive response to the anguish and sorrow I caused him. He alone was the victim. And it was all my fault, almost always.

    Like many children in my situation, I was a collaborator. I hid the bruises under long sleeves, even in the summer. I made every effort to ensure that no one would know, and no one would see. I also talked myself into believing that nothing really happened. And if it did, then it was my fault. I taught myself that it didn’t really hurt. That it was only a dark cloud passing over me.

    Spontaneous protest was not an option. The positive façade we put on was not just for strangers; it wasn’t possible to talk about the truth among ourselves, either, and there was never any outlet for the frustration and hurt. Very real and tangible incidents evaporated into the air, were erased. It sometimes seems that the need to keep things hidden is a distinct type of violence all on its own. But it is also an inseparable part of “the situation” that I will talk about here.

    Book editor: Yael Gover / Translation: Anne Hartstein Pace / English editing: Linda Dayan

    Published in Hebrew by Kinneret, Zmora, Dvir — Publishing House Ltd.

  • Sexual violence against boys is far more common than we think - The Washington Post
    https://www.washingtonpost.com/magazine/2021/02/22/why-we-dont-talk-about-sexual-violence-against-boys-why-we-should/?arc404=true

    Boys are more likely than girls to die in their second decade of life, and they use more alcohol and tobacco, habits that erode their health as they age, Blum said. But even more troubling, Blum’s team found that boys suffered higher levels of physical violence, neglect and sexual abuse by adults than girls. And the more a boy was victimized, the more likely he was to do violence to others.
    Those findings should serve as a gut punch. We can’t solve the problem of violence against girls and women without also addressing violence against men and boys. And we won’t succeed in teaching our sons to care for other people’s bodies until we learn to care for theirs.

    • Yet we rarely hear about any of this on the news. We hardly ever talk about it. Stories of sexual misconduct are everywhere, but the tellers of those stories are mostly girls and women. The stories of men and boys still remain mostly hidden, unacknowledged and undiscussed.

    • The default in discussions about sexual violence is to think of boys and men as perpetrators and women as victims. But that is an oversimplification that is built on a damaging stereotype about male invulnerability, and it obscures the truth: Boys can be victims, and boys can need help. We’ve just built a world that makes it hard for them to admit it — and for the rest of us to acknowledge it. If we want to raise boys differently, we must start believing that they are equally capable of feeling pain and doing violence.

    • ah là je comprends enfin ce truc du viol comme rapport de pouvoir, tout sauf du sexe donc (ça parle d’une agression de vestiaire de foot avec un manche à balais) :

      The freshman intuitively understood and endorsed the argument that scholars make in academic circles: This kind of sexual assault has nothing to do with sex. It’s about power. It’s about older boys establish­ing their place at the top, putting younger players in their place.

    • @tintin, here you are :

      Raising a boy sometimes feels like traveling in a foreign land. When I gave birth to my daughter, three years before my son was born, I had no idea how to be a mother. But after decades of navigating life as a woman, I knew unequivocally what I wanted for her: to see herself as capable of anything, constrained by none of the old limits on who women must be and how they must move through the world. She could be fierce and funny and loving and steely-spined.

      “I am strong and fearless,” I taught her to say when she was 2, as she hesitated on the playground, her lips quivering as she considered crossing a rope-netting bridge strung 10 feet above the ground. There was nothing premeditated about that little sentence. It just ap­peared on my tongue, distilling what I wanted her to be and how I hoped she would think of herself.

      I had no such pithy motto for my son. Reminding a boy to be strong and fearless seemed unnecessary and maybe even counterproduc­tive, fortifying a stereotype instead of unraveling it. What could I give him to help him ignore the tired old expectations of boys? I had no idea. I didn’t know how to help him resist the stresses and stereotypes of boyhood, because I had never grappled with the fact that boys face stresses and stereotypes at all.

      But of course they do. Boys learn that they’re supposed to be tough and strong and sexually dominant, according to a massive study of gender attitudes among 10- to 14-year-olds in the United States and countries across four other continents. Girls learn that they’re supposed to be attractive and submissive, according to the study, led by researchers at Johns Hopkins University.

      The global script clearly harms girls, who face disproportionate levels of sexual violence, not to mention greater risk of early pregnancy and leaving school. But Robert Blum, a physician who has studied adolescents for 40 years and is one of the Johns Hopkins scholars leading the study, wants people to understand that it also hurts boys. “The story about boys has yet to be told, and I think it’s a really important story,” Blum explained to me. “Our data suggest that the myth that boys are advantaged and girls are disadvantaged simply isn’t true.”

      The movement for gender equality has often focused on empowering girls. But as Blum sees it, achieving gender equality also requires attention for boys. They too need to know they are not circumscribed by ideas about who and how they should be.

      Boys are more likely than girls to die in their second decade of life, and they use more alcohol and tobacco, habits that erode their health as they age, Blum said. But even more troubling, Blum’s team found that boys suffered higher levels of physical violence, neglect and sexual abuse by adults than girls. And the more a boy was victimized, the more likely he was to do violence to others.

      Those findings should serve as a gut punch. We can’t solve the problem of violence against girls and women without also addressing violence against men and boys. And we won’t succeed in teaching our sons to care for other people’s bodies until we learn to care for theirs.

      The first I heard of “brooming” was in one of those interstitial moments, a busy day on pause, waiting for my car to be repaired at an auto shop before racing to work. It was pouring outside, so I huddled along with a half­-dozen other harried customers in a small room where a television blared a local news show. Five boys, football players at a high school just outside D.C., had been charged with rape and attempted rape in the alleged attacks of their teammates with the end of a wooden broomstick.

      Not only had I never heard of such a thing, but I had never even imag­ined it. Raped with a broomstick? Long after I left, I was still trying to wrap my head around it, and as details emerged in the following days and weeks, I could not look away.

      It had happened on the last day of October, Halloween, at Damascus High, a diverse public school with a powerhouse football program in Montgomery County, Md. My colleagues at The Washington Post, where I work as an investigative reporter, reported the wrenching details of the attack. Freshmen on the junior varsity team had been changing in a locker room after school when suddenly the lights went out, and they could hear the sound of someone banging a broomstick against the wall. The sophomores had arrived. “It’s time,” one of them said. They went from freshman to freshman, grabbing four of them, pushing them to the ground, punching, stomping. They pulled the younger boys’ pants down and stabbed the broom at their buttocks, trying — and at least once succeeding — to shove the handle inside their rectums. The victims pleaded for help, the attackers laughed at them, and a crowd of other boys looked on, watching the horror unspool.

      Whenever I learn of something unconscionable, I find myself looking for clues that it could never happen to me or the people I love. That’s human nature, I guess. But like any other kind of sexual assault, brooming is not a phenomenon confined to this one high school, or to any particular type of school or community. It cuts across racial and socioeconomic lines, shows up in elite private boys’ academies and coed public schools, in big cities and rural villages and small towns that dot the heartland.

      What do you think you know about boys and sexual violence? I thought I knew that boys are victims only rarely, and I automatically equated “child sexual abuse” with adults preying on kids. But I was wrong on both counts.

      Many boys are molested by adults, that’s true. But there are strong signs that children are even more likely to be sexually abused or sexually as­saulted by other children. In one study of 13,000 children age 17 and younger, three-quarters of the boys who reported being sexually victimized said the person who violated them was another child. In a little more than half those assaults, the violator was a girl. Most boys who had been assaulted had never told an adult.

      Though sexual violence mostly affects girls and women, male victims are still astonishingly common. I was shocked to learn that as many as 1 in 6 boys is sexually abused during childhood. About 1 in 4 men is a victim of some kind of sexual violence over the course of his lifetime, from unwanted contact to coercion to rape. LGBTQ men are at greater risk than heterosexual men: More than 40 percent of gay men and 47 percent of bisexual men say they have been sexually victimized, compared compared with 21 percent of straight men.

      In 2015, a national survey by the Centers for Disease Control and Pre­vention found that nearly 4 million men (and 5.6 million women) had been victims of sexual violence just in the previous year. More than 2 million of those men were subjected to unwanted sexual contact, and more than 800,000 said they were “made to penetrate” another person — an awkward term that doesn’t show up much in the media or in public debate. It means that a man was either too inebriated to consent or was coerced or threatened into sex.

      Just as with girls and women, violation of men and boys can involve physical force or emotional coercion. Just as with girls and women, boys and men sometimes have sexual experiences to which they cannot consent because they are underage or blackout drunk — experiences that we might reflexively call sex but that we should really understand as assault. And though the perpetrators in those cases can be other boys and men, they can also be girls and women. The overwhelming majority of male rape victims say that the person who violated them was another male, but most male victims of other kinds of sexual violence say they were violated by a female.

      Boys and men who survive sexual violence can experience serious psychological and emotional fallout, including post-traumatic stress, symptoms of depression and anxiety, suicidal thoughts, substance abuse problems and sexual dysfunction.

      Yet we rarely hear about any of this on the news. We hardly ever talk about it. Stories of sexual misconduct are everywhere, but the tellers of those stories are mostly girls and women. The stories of men and boys still remain mostly hidden, unacknowledged and undiscussed.

      The default in discussions about sexual violence is to think of boys and men as perpetrators and women as victims. But that is an oversimplification that is built on a damaging stereotype about male invulnerability, and it obscures the truth: Boys can be victims, and boys can need help. We’ve just built a world that makes it hard for them to admit it — and for the rest of us to acknowledge it. If we want to raise boys differently, we must start believing that they are equally capable of feeling pain and doing violence.

      When I first began learning about locker room assaults, I wanted to know what motivated a boy to hurt another boy in this way. But along the way, I became even more puzzled — and troubled — by the victims’ experiences. They had so much difficulty identifying what had happened to them as sexual assault, and felt too much shame to admit they were hurting.

      One boy was so distressed about the prospect of being attacked by his basketball teammates during a tournament trip that he called his mother, intending to ask her for help. As frightened as he was, when it came down to it, he couldn’t bring himself to tell her what was going on. “I was going to tell her when I first got on the phone with her, but I ended up not saying nothing,” he later said. “I was going to tell her, but I didn’t know how to say that.”

      I’ll call him Martin. He was a freshman on the varsity team at Ooltewah High School, near Chattanooga, Tenn. In December 2015, he and his teammates drove to a tournament in Gatlinburg, in the Great Smoky Mountains. They stayed in a cabin where there was a pool table down­stairs in the boys’ quarters. The coaches stayed upstairs.

      By the fourth day, Martin knew the upperclassmen were coming for him. They had already gone after the other three fresh­men; every evening, he had seen the brandishing of a pool cue and he had heard the screaming. He knew he was next; that’s when he called his mother. And yet he didn’t know how to ask for help without embarrassing himself and violating an unwritten code of silence. He just couldn’t get the words out.

      Soon after the phone call with his mother, three of Martin’s teammates assaulted him. Even after the attack — which ulti­mately landed him in the hospital with a months-long recovery ahead of him — Martin did not immediately tell the truth about what had been done to him. He told his coach that he and his attackers had been “wrestling” and he insisted he was fine — until he peed blood, then collapsed and had to go to the emergency room. It was only because of his extreme injury that the truth came to light.

      Later, during a sworn deposition, a lawyer asked Martin if the attack had to do with sexual orientation. Was the older boy gay? No, Martin said. It wasn’t that at all. “I feel like he tried to make me — belittle me,” he said. “Tried to make me feel like less than a man, less than him.” (I spoke to Martin’s lawyer but didn’t speak to Martin. This account is based on court records, media accounts and video testimony.)

      The freshman intuitively understood and endorsed the argument that scholars make in academic circles: This kind of sexual assault has nothing to do with sex. It’s about power. It’s about older boys establish­ing their place at the top, putting younger players in their place.

      This particular way of flexing power depends on the cluelessness or tacit acceptance of the adults who are paid to keep boys safe. It also depends on the silence of victims, who — like most teenagers — want desperately to belong, which means bearing pain, handling it and definitely not snitching. But it’s dangerous and unfair to expect boys to bear the responsibility for protecting themselves, Monica Beck, one of the attorneys who represented Martin in a lawsuit against the school sys­tem, told me. Boys, like girls, deserve the protection and help of their coaches, their teachers, their parents and their principals.

      After Martin collapsed and underwent surgery, he spent six days in the hospital and nine months recovering, including relearning how to walk. One of the attackers was convicted of aggravated rape, the other two of aggravated assault.

      Even with these horrifying facts, not everyone agreed that what happened to Martin should actually be considered sexual violence. The police officer who investigated the crime filed charges of aggravated rape, a crime that in Tennessee does not require sexual motivation. But he suggested in state court that what happened was not in fact a sexual assault. It was instead, he said, “something stupid that kids do” that “just happened” to meet the definition of aggravated rape.

      Later, Martin sued the school district for failing to protect his civil rights. As the trial approached, lawyers representing the school board asked the judge to prohibit Martin’s legal team from using certain terms in front of a jury: rape, aggravated rape, sexual battery, sexual assault.

      The judge never had to decide, because the school district’s insurance carrier settled with Martin for $750,000, avoiding a trial. But it’s notable that this was even a potential issue of debate. Imagine that a girl was attacked as Martin was. Would anyone doubt that it qualified as a sexual assault?

      Sports is a refuge for so many children and an engine for so much good. Kids can learn to communicate and depend on each other. They can learn to push and surpass their own athletic limits. They can learn to win, and to lose, with humility and grace. Kids who play organized sports tend to do better in school than kids who don’t, have stronger social skills and higher self-esteem, and are healthier physically and men­tally, according to the American Academy of Pediatrics.

      But as anyone who has spent much time on the sidelines of a youth soccer or basketball or football game can tell you, sports can also be de­structive. Coaches and parents can be verbally abusive, teaching kids that winning is more important than integrity and that disrespect is part of the game. Kids can learn to prize the use of force and violence.

      It’s this darker side of sports that turns it into a breeding ground for hazing, initiation rituals that older players use to belittle and humiliate junior teammates. For boys who find themselves on teams with such a poisonous culture, sports are not a refuge. They are a nightmare.

      Over the past generation, hazing pranks that once seemed innocuous — ­think dressing up in silly costumes or singing an embarrassing song in public — have evolved, becoming increasingly dangerous and sexual, according to social scientists who study hazing and consultants to high school athletic teams. Sexualized hazing, some argue, is an expression of a narrow version of masculinity that is celebrated in sports — a version of masculinity that is not just about strength but about dominating at all costs, about hiding pain and enduring weakness, and about degrading anyone or anything that seems feminine or gay. Even as a growing number of alternative niches gives boys places to thrive as proud geeks and artists and gender nonconformists, many sports have remained staunchly macho in this way.

      We don’t have comprehensive data on how common it is for boys to sexually assault other boys in the context of athletics. In 2000, researchers from Alfred University, a small private school in western New York, conducted the first national survey of high school hazing. They wanted to ask about sexualized hazing, but they were stymied. In those early days of the Internet, they had to send their survey out to students in the mail, and they got access to a database of student addresses only on the condition that they not ask any questions having to do with sex or sexuality. (In general, researchers have trouble getting permission to ask children under 18 questions about anything related to sex, sexual violence or abuse — which is understandable, but which also hobbles our understanding of kids’ experiences.)

      Norm Pollard, one of the lead researchers on the Alfred University sur­vey, found students’ replies to one open-ended question shocking. “They talked about being sexually assaulted at away matches, in the back of the bus and in locker rooms,” Pollard said. “It was devastating to read those reports from kids that were just trying to be part of a team or a club.”

      Psychologist Susan Lipkins has studied hazing since 2003, when she traveled to a small town near her home in New York to interview the parents and coach of high school football players who had been sexually abused by teammates at a preseason training camp. None of the victims reported the abuse to a coach, a parent or any other adult. It came to light only because one of the boys sought medical help — and the cover story he told doctors to explain his injuries didn’t make sense.

      She and other experts said they have seen noticeably more media reports and court filings alleging ritualized sexual violence among high school boys, leading them to believe that it is becoming more common and more severe. Boys tell each other and themselves that they are taking part in a tradition: This is what it takes to be part of the team, this is what it takes to belong. First you are assaulted; then you become a bystander, watching as others are brutalized; finally, you get your turn at the top, your turn to attack.

      Boys who report being sexually assaulted face the humiliation of hav­ing to describe how they were violated out loud, to another person, and then they face what Lipkins calls a “second hazing” — a blowback of harassment and bullying not unlike that heaped on female victims of rape. Lipkins noted that she has seen parents and students band together to protect their team, their coach, even local real estate values against allegations of sexualized hazing. “Communities support the perpetrators and say, You’re a wimp, why did you report it,” she said.

      As a result of all that pressure, she said, it’s common for boys to remain silent even after being assaulted. Not only do boys not want to tattle on their teammates, but they often don’t even recognize that they’re victims of an unacceptable violation and of a crime. No one has told them. “Hazing education is in the Dark Ages,” Lipkins said.

      She believes that young people and adults, includ­ing parents, coaches and administrators, need much more training to recognize this kind of behavior as an unacceptable form of harm rather than a tradition to be upheld. And Lipkins believes it won’t end until groups of players stand up together to stop it, either as active bystanders who protect victims or as victims who together find the courage to speak out.

      Of course, when they speak out, they need grown-ups to hear them and protect them. Coaches must understand that building a healthy team culture and guarding players’ safety are crucial parts of their job. And we par­ents must tell our boys the same thing we tell our girls — that their bodies are their own, that no one should touch them without their consent, that we will not tolerate violation of their physical autonomy.

      Boys who are raped or sexually assaulted face a particular kind of disbelief. They may not be accused, as girls often are, of reinterpreting a consensual sexual encounter as nonconsensual. They’re perhaps less likely to be accused of straight-up lying, or of being crazy. Instead, they’re accused of taking things too seriously. Sexual assault? No! It was just messing around. Just a joke. Just boys being boys. Just hazing.

      The language we use to describe what happens to boys helps feed the problem, argues Adele Kimmel, who has become one of the leading lawyers for male and female victims of sexual assault. “Terminology matters,” Kimmel, a wiry woman with jet-black hair, told me on a rainy day in downtown Washington at the sleek offices of the nonprofit firm Public Justice, where she is a senior attorney. “Some of these boys don’t even recognize that they’ve been sexually assaulted be­cause it’s been normalized by the adults. They call it these euphemistic terms — they call it horseplay, roughhousing, poking, hazing. They don’t call it sexual assault. They don’t call it rape.”

      Kimmel represented an Oklahoma middle school boy who was in music class when one of his football teammates held him down and assaulted him. The principal called it horseplay but acknowledged in an interview with a state investigator that if the same thing had happened to a girl, he would have considered it sexual assault. The boy was branded as a tattletale for reporting what had happened to him and became the target of fierce bullying at school. His father asked for help. “What do you want me to do, hold his hand?” the principal said, according to the lawsuit the family later filed.

      When we convey to boys that unwanted touch is a serious issue of sexual assault only when it affects girls and not when it affects boys, we are sending a message that only girls’ bodies are worthy of protection. That message leaves our sons vulnerable to abuse, and it presents them with a knotty question: Why should boys treat other people’s bodies with dignity and respect if their own bodies are not also treated with dignity and respect?

      Violence prevention programs often focus on debunking rape myths about female victims. No, wearing a short skirt is not the same thing as consenting to sex. But they less often delve into male victims — particularly those men who are violated by women. The idea that a man would have to be forced or coerced into sex with a woman runs counter to our cultural scripts about how sex works. But that’s just another misleading stereotype, and one that makes it hard for boys and men to recognize and deal with their own experiences. By now, for example, stories about college campus rape have firmly established that some men assault women who are too drunk to consent. There’s no counternarrative about men being raped when they have had too much to drink — usually, that’s just called sex. But whether they con­sider it assault, men on campus can and do have unwanted sex. One student at the Massachusetts Institute of Technology told me for a 2015 Washington Post series on sexual assault how uncom­fortable he felt when he was pursued by a woman he wasn’t interested in. He found himself unable to say no to her persistent advances, even though he knew he didn’t want to have sex with her. “You don’t want to be rude,” he said. “You don’t want to be weird.”

      College fraternities have a reputation for tolerating and even encour­aging sexual violence against women, and there is some evidence that fra­ternity brothers are at greater risk than other college men of committing assault. But there is also other, perhaps less widely known evidence that fraternity members are at greater risk than other students of being as­saulted themselves. In a study of fraternity men at one Midwestern college, more than a quarter — 27 percent — said that someone had had sex with them without their consent, either through the use of force or by taking advantage of them when they were drunk.

      But many people do not define a man pushed into nonconsensual sex as a person who has been sexually assaulted. A 2018 survey of 1,200 adults found that 1 in 3 would not quite believe a man who said he was raped by a woman, and 1 in 4 believed men enjoy being raped by a woman. There’s a belief that men cannot be raped be­cause women aren’t strong enough to physically force them, and a convic­tion that straight men want sex so much and so consistently that they just aren’t that bothered by a woman who refuses to listen when he says no. These ideas are embedded in our institutions, from media to medicine to law to scholarship.

      It wasn’t until 2012 that the FBI recognized that men could be raped. Until then, the bureau defined rape as “the carnal knowledge of a female, forcibly and against her will.” Now it uses gender-neutral terms; rape is defined as “the penetration, no matter how slight, of the vagina or anus with any body part or object, or oral penetration by a sex organ of another person, without the consent of the victim.”

      Scholars studying sexual violence have often asked men only about their own sexual aggression and women only about being violated, an approach that fails to acknowledge — much less measure — the existence of male victims, female perpetrators or same-sex assault. When researchers have asked about sexual violence in gender-neutral terms, they have made startling discoveries. One survey of 300 college men found that half had experienced some type of sexual victimization, and an astonishing 17 percent — nearly 1 in 5 — had been raped, meaning they had unwanted sex because they were threatened, physically forced or taken advantage of while too intoxicated to consent.

      Lara Stemple, an assistant dean at UCLA School of Law, is a feminist who has focused some of her research on highlighting the large number of men who have expe­rienced sexual violence and the institutional biases that have obscured their experiences. She told me that her efforts to bring attention to male victims — and to the surprisingly high rates of female perpetration of such violence — have at times triggered false accusations that she is aligned with men’s rights activists, who are known for anti-feminist and misogynistic language and ideology.

      But as Stemple argues, acknowledging the invisibility of men’s suffering does not mean dismissing or doubting violence against women. It is not one or the other. Both problems are tangled up in some of the same deeply ingrained notions about what it means — or what we think it means — to be a man.

      The #MeToo movement has been built out of stories, one after the other, a flood that helped us see how men in positions of power abuse women and then keep their violence secret. In those stories, the world saw evidence of a sprawling problem in urgent need of solutions. Women found solidarity in acknowledging what had happened to them and in declaring that it was not tolerable and was not their fault.

      Now boys need to hear more of these stories from men. Media coverage of high-profile cases of sexual violence against men and boys has helped open Americans’ eyes to the fact that the sexual victimization of boys is not just possible but deeply scarring, psychologist Richard Gartner, who specializes in treating male victims, told me. When Gartner began speaking publicly about male victims in the 1990s, he was often greeted with blank stares and dis­belief.

      But then came revelations about widespread abuse by Catholic priests, by Penn State assistant football coach Jerry Sandusky, by Boy Scout troop lead­ers. Those stories forced people to begin to recognize the vulnerability of young boys. When actor and former NFL player Terry Crews came for­ward to say he had been groped by a male Hollywood executive, it forced people to consider the vulnerability even of strong adult men. And it made room for more boys and men to come to terms with their own experiences as victims of abuse, Gartner says: “Every time that happens, some boy somewhere says, well, if he can come forward, maybe I should be talking to someone.”

      Perhaps it is starting to happen more often. Over the past few years, the women who came forward in droves to speak out about sexual violence were joined by men who said they had been abused, including allegedly by powerful, high-profile men such as actor Kevin Spacey and film director Bryan Singer. In one remarkable reckoning, more than 300 former Ohio State University students said they had been sexually abused by an Ohio State doctor, Richard Strauss, and sued the university for failing to protect them.

      In 2019, an independent investigation commissioned by the university found that Ohio State officials knew of complaints about Strauss as early as 1979 but allowed him to continue prac­ticing until he retired with honors two decades later. Strauss committed nearly 1,500 acts of sexual abuse, including 47 acts of rape, the university told fed­eral authorities in 2019. The stories Ohio State graduates tell about Strauss bear remarkable similarity to the stories that hundreds of women told about the abuse they suffered at the hands of Larry Nassar, the former Michigan State University physician and former USA Gymnastics national team doctor. If the collective power of Nassar’s victims forced the nation to con­front the ways in which institutions ignore girls and young women who report sexual assault, then the graduates of Ohio State may help force us to see how we have dismissed boys and young men.

      For now, though, many men still see reasons to keep their stories to themselves. Gartner has written extensively about the shame, trauma and confusion that his patients struggle with as they try to make sense of how they were victimized. Many fear that admitting violation will be seen as evidence of personal weakness. They fear they won’t be believed. And they fear they were somehow complicit.

      Boys who report assault or abuse need to hear from their parents and the people close to them that they are unconditionally loved. “The most important thing to say is, ‘I believe you, and it wasn’t your fault ... and we still love you,’ ” Gartner says. And parents who want to prevent their boys from being abused, he explains, should be telling their sons all the same things they tell their daughters about their right to control access to their bodies.

      When we fail to recognize and address violence against boys, not only are we failing to protect boys, but we also may be stoking violence against women. These problems are to some extent intertwined: While most do not go on to lives of violence, criminality or delinquency, victimized children are at greater risk of doing harm to others.

      If you had asked me, before I started this research, whether I believed that boys and men could be victims of sexual assault, I would have said of course. If you had asked me whether I bought into the notion that boys and men always want sex, I might have rolled my eyes: Um, no. But listening to the stories of male victims taught me that I didn’t com­pletely believe what I thought I believed. I noticed my own knee-jerk resistance to the reality that unwanted sexual contact can traumatize boys just as it does girls — and to the reality that it can matter just as much to them. Deep down, somewhere under my skin, I was holding on to some seriously wrongheaded assumptions — ideas so ingrained I did not even notice them, ideas that rendered boys as something less than human.