Grève du bac, un mouvement social inédit (Revue de presse)
La perspective de mener un mouvement revendicatif au moment des épreuves du baccalauréat a été longtemps tabou, tant pour les syndicats que pour l’immense majorité des enseignant·es, notamment militant·es. Pour les premiers, ils y voyaient un mode revendicatif condamné à l’impopularité, pour les seconds qui sont souvent parmi les plus impliqué·es pour la réussite des élèves c’était un “crève-cœur” que de l’envisager.
Cette année le pas a été franchi [1]. D’abord par un appel à la grève de la surveillance parti du terrain et relayé ensuite par des syndicats qui craignaient un décalage avec la base. Ce mouvement a eu peu d’effet car la surveillance a pu être assurée par d’autres personnels de l’Éducation Nationale (hiérarchie locale, administratifs, précaires). Mais il a été l’occasion de mobilisations devant les établissements ou rectorats localement [2]. Les chiffres des grévistes annoncés par le ministère calculés avec une grande mauvaise foi [3] font passer, à tort, une montée forte de l’exaspération pour un mouvement ultra-minoritaire.
Des appels à la rétention des notes[4], voire à la grève des corrections, remontent maintenant d’AG d’établissements [5][6] et commencent à être repris par certains syndicats, cette étape sera plus difficile à négocier médiatiquement car les effets sur les candidats seront réels.
D’après les remontés de collègues du secondaire se dessine un mouvement inédit porté par des enseignant·es habituellement peu mobilisé·es et éloigné·es des syndicats. Une "radicalisation" sans doute à associer à la dynamique des "stylos rouges", cousins lointains des "gilets jaunes" [7].
Les raisons de l’exaspération sont notamment :
– la perte notable de pouvoir d’achat de la profession sur une génération, et sur la dernière décennie de rigueur budgétaire, associée à un sentiment de déclassement ;
– Le #ProfBashing permanent des médias et du personnel politique en dépit de conditions de travail ressenties comme de plus en plus dures, ainsi que ce qui s’apparente à la dénonciation incessante de leur incompétence tandis que les rapports internationaux pointent le manque de formation initiale et continue ;
– le durcissement des conditions sociales (retraites, congés) alors que le métier ne séduit plus et peine à recruter et que les démissions s’envolent.
[1] Grève du bac : une session 2019 sous tension sans être pour autant menacée (Le Monde)
▻https://www.lemonde.fr/education/article/2019/06/14/greve-du-bac-une-session-2019-sous-tension-sans-etre-pour-autant-menacee_547
A l’appel d’une intersyndicale opposée à la réforme de l’examen, des enseignants n’excluent pas une grève de la surveillance au premier jour des épreuves écrites, lundi 17 juin.
[2] Le rectorat de Toulouse face aux profs et aux parents (La Dépêche)
▻https://www.ladepeche.fr/2019/06/14/le-rectorat-de-toulouse-face-aux-profs-et-aux-parents,8256331.php
[3] Surveillance du bac : le taux de grévistes était-il de 5,4%, comme le dit le ministère de l’Education nationale ? (France Info)
▻https://www.francetvinfo.fr/societe/education/reforme-du-bac/surveillance-du-bac-le-taux-de-grevistes-etait-il-de-5-4-comme-le-dit-l
La « grève de la surveillance » a débuté le 17 juin, premier jour des épreuves du baccalauréat de l’édition 2019. Le ministère de l’Education nationale reconnaît que son calcul est basé sur l’ensemble des enseignants, même ceux qui ne surveillent pas les épreuves.
[4] Bac 2019 : Quelle sera l’ampleur du mouvement de rétention des notes par les profs en colère ? (20 minutes)
▻https://www.20minutes.fr/societe/2546043-20190622-bac-2019-ampleur-mouvement-retention-notes-profs-colere
Après la grève de la surveillance le jour de l’épreuve de philo, les profs fourbissent de nouvelles armes. Plusieurs collectifs d’enseignants en colère, qui dénoncent la réforme du lycée, ont appelé leurs collègues à la rétention des notes du bac.
[5] Comment je me suis « radicalisé » : un professeur de philosophie explique pourquoi il bloquera les notes du baccalauréat (France 3 Occitanie)
►https://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/haute-garonne/toulouse/comment-je-me-suis-radicalise-professeur-philosophie-ex
Contre la réforme Blanquer, en Occitanie, des professeurs rentrent en désobéissance civile. Ils ont décidé de geler les notes du baccalauréat.
[6] La grève des examens tourne à celle des corrections (Le Café Pédagogique)
▻http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2019/06/20062019Article636966253952915897.aspx
[7] Les « stylos rouges » s’inspirent des « gilets jaunes » (Le Figaro)
▻http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2019/01/03/01016-20190103ARTFIG00230-les-stylos-rouges-s-inspirent-des-gilets-jaunes.p
Pour séduire davantage le grand public et trouver un second souffle, des enseignants ont créé un collectif de revendications sociales sur Internet… sans leurs syndicats.
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