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  • Amiante : un lycée mobilisé contre le déni - Libération
    https://www.liberation.fr/france/2018/10/11/amiante-un-lycee-mobilise-contre-le-deni_1684755

    Au groupe Georges-Brassens, en banlieue parisienne, les professeurs exercent leur droit de retrait depuis une semaine. Une manifestation nationale est prévue ce vendredi.

    En temps normal, il est discret. « Une petite souris », disent les collègues. Consciencieux comme les scientifiques de son espèce (prof de physique-chimie) et réservé comme tout fonctionnaire dès qu’il s’agit de mettre en cause sa hiérarchie. Pas du style à s’enflammer devant un journaliste. Mercredi, à 8 heures, nous avons vu tout l’inverse. Cédric (1) s’est avancé, la colère contenue mais glacée : « La circulaire de juillet 2018 prévoit un droit d’alerte pour les fonctionnaires en cas de danger grave et imminent et de risque irréversible. Je considère que c’est le cas, la santé de mes élèves est menacée. » Ses mains tremblent, il parle fort. Il faut dire aussi que toutes les deux minutes, un avion passe si bas qu’il faut élever la voix pour s’entendre. La route qui borde l’établissement n’arrange rien.

    Bienvenue dans la cité scolaire Georges-Brassens, à Villeneuve-le-Roi (Val-de-Marne). Le cadre est idyllique : dans un couloir aérien d’Orly, l’établissement jouxte une déchetterie et une zone industrielle très fréquentée par les camions. Dans les parages, il y a aussi un dépôt pétrolier, classé Seveso. Les bâtiments ont été construits dans les années 60, sur une sablière… un sol instable, qui s’affaisse par endroits. « Nous avons toujours eu des problèmes de toutes sortes ici, l’histoire de l’amiante est venue s’y ajouter », résume Laurence, prof de SVT à Brassens depuis vingt-neuf ans.

    Preuves à revendre

    L’émotion est forte. Quasiment toute la salle des profs est devant les grilles du lycée, refusant en bloc de rejoindre les classes. Ils exercent leur droit de retrait depuis une semaine, estimant que leur santé et celle de leurs élèves étaient menacées par la présence d’amiante dans les plafonds de l’établissement « en mauvais état et encore plus fragilisé depuis l’incendie et l’inondation du 29 septembre », poursuit Cédric. Le matin de notre venue, l’équipe avait reçu une injonction du recteur pour qu’ils rejoignent fissa leurs postes. « Au vu des dernières analyses qui nous sont parvenues par la région - qui a la charge des bâtiments, j’insiste -, il n’y a pas de danger imminent. Donc le droit de retrait n’est pas valable », justifie l’académie de Créteil. Sauf que les 70 enseignants ont l’intime conviction du contraire. Et des preuves à revendre.

    « Nous ne prétendons pas que l’amiante tombe en permanence du plafond, encore heureux ! Mais, avec le vieillissement du bâti, elle peut tomber n’importe quand. Et il suffit d’une fois, on sait que l’amiante peut contaminer quelle que soit la durée d’exposition », déplore un ancien professeur qui a quitté l’établissement l’an dernier « sur les rotules ».

    Alain Bobbio, secrétaire général de l’Association nationale des victimes de l’amiante (Andeva), acquiesce. Il est de plus en plus sollicité par des professeurs et parents d’élèves : « Il y a un vrai problème d’amiante dans les écoles de ce pays, largement sous-estimé et méconnu. Le danger n’est pas derrière nous. Bien au contraire. Il s’aggrave avec le temps, à mesure que les bâtiments vieillissent. »

    L’Andeva organise une manifestation nationale ce vendredi pour alerter l’opinion sur la présence d’amiante dans les écoles, et « qu’enfin, les responsables agissent ». Trop souvent, dit Alain Bobbio, les autorités sont dans le déni. A commencer par les collectivités territoriales qui ont la charge de la construction et l’entretien des établissements scolaires. A l’écouter, elles préfèrent parfois fermer les yeux comme si le problème n’existait pas car, vu son ampleur, elles ne savent comment s’y atteler. Le cas du lycée Brassens à Villeneuve-le-Roi en est, pour lui, la parfaite illustration.

    Devant les grilles, les profs empilent les épisodes dans le désordre, alignent les termes techniques. On cause « flocages », « score », « fibres », « cancérogénicité sans seuil »… « Nous n’avons pas eu d’autres choix que de devenir des experts scientifiques en amiante, justifie Cyril, jeune professeur de lettres. C’est compliqué pour nous de remettre en cause notre hiérarchie, mais à partir du moment où le doute s’installe… » Cécile, prof de lettres, le coupe. « Il ne s’agit pas d’un combat politique ou syndical. Là, il est question de santé publique. Je ne ferais pas entrer mes filles dans ce bâtiment, donc je ne fais pas entrer les élèves. C’est aussi simple que ça. » Tous parlent de « responsabilité morale ». Et ce sentiment d’être abandonnés par leur institution, comme si elle ne prenait pas la mesure de ce qui est en train de se jouer.

    Mousse blanche

    Leur combat remonte au 23 novembre 2017. Ce jour-là, une collègue découvre dans sa classe une sorte de mousse blanche au sol, visiblement tombée du plafond. Elle a le réflexe d’avertir sa proviseure, et un professeur en lutte à l’époque contre la ventilation défectueuse. Lui comprend tout de suite. Il suspecte la présence d’amiante, cette fibre 400 fois plus fine qu’un cheveu et très cancérogène. Ce matériau isolant, interdit dans les constructions depuis 1997, était largement utilisé avant cette date. La proviseure enclenche la procédure de mise en sécurité, les autorités sont prévenues, la salle fermée par précaution. Le 1er décembre, un employé de la société Innax, envoyé par la région Ile-de-France, pénètre dans la salle pour effectuer des prélèvements de flocages et constate « un taux de 11,4 fibres d’amiante par litre d’air, très supérieur à la norme de 5 fibres par litre d’air ». Les jours passent. L’équipe continue de faire cours dans les salles d’à côté, les agents d’entretien lavent les sols. « Le 15 décembre, notre proviseure reçoit un coup de fil : une équipe spécialisée dans le désamiantage est dépêchée pour enlever les ordinateurs de la salle, car ils sont contaminés… voilà comment on a appris officiellement la présence d’amiante », raconte un enseignant.

    Les professeurs entrent alors dans une lutte ouverte. Ils perdent confiance dans les autorités et entreprennent de farfouiller dans les caves du lycée, à la recherche des archives. Bingo ! La présence d’amiante apparaît dans des documents écrits dès 1987, dans une lettre d’une association de parents : « Le danger augmente à mesure que les plafonds se dégradent. Faudra-t-il alerter la presse et organiser une journée portes ouvertes ? » Cette lettre figure dans l’enquête du CHSCT académique transmise à la région et à l’éducation nationale, et que Libération a pu consulter. A l’époque, face à la mobilisation des parents, les plafonds avaient été recouverts d’une couche pour isoler l’amiante - « Les remplacer coûtait plus cher… le problème, c’est qu’avec le temps, cette deuxième couche s’est à son tour détériorée », précise l’association Andeva qui aide les enseignants dans leur lutte. Sylvette, professeure d’arts plastiques au lycée depuis 1991 : « Pendant des années, à chaque fois qu’on posait la question, les autorités nous répondaient dans les yeux : "Non, il n’y a pas d’amiante". Ils nous soutenaient que c’était une légende urbaine ! Mes élèves manipulaient les dalles du plafond pour y suspendre leurs travaux… je le porte sur la conscience, je ne leur pardonnerai jamais. »

    Contre-expertises

    Dans toute cette histoire, le décalage est saisissant entre l’angoisse et la colère du corps enseignant et le discours calme et rassurant des autorités, pourtant adeptes du principe de précaution, a fortiori quand il est question de santé et d’enfants. Après l’épisode du 23 novembre 2017 et les six semaines de droit de retrait exercé par les professeurs, la région a diligenté des expertises et contre-expertises, par plusieurs sociétés. « Toutes les analyses montrent que la qualité de l’air est normale. Il n’y a pas de dissimulation, d’aucune façon », insiste encore aujourd’hui la région, ne niant pas la présence d’amiante dans les plafonds. Et celle réalisée par Innax, avec un taux deux fois supérieur ? « Cela reste un mystère », admet-on du côté de l’académie. La salle où les taux ont été mesurés est néanmoins toujours fermée. « Nous avons mis en place le protocole requis », reprend la région. Un technicien vient chaque semaine avec des « pompes à air » (pour prélever des échantillons en vue d’analyses) dans certaines classes. Et la région de tacler les anciens élus d’Ile-de-France : « Le lycée Brassens est symptomatique de l’état dans lequel l’ancienne majorité a laissé les lycées franciliens. Un tiers d’entre eux sont vétustes. Nous avons engagé un plan exceptionnel de 5 milliards d’euros entre 2017 et 2027. » Les travaux de reconstruction de Brassens, promis depuis des lustres, doivent débuter prochainement. Des préfabriqués sont en train d’être installés à l’arrière du lycée, le déménagement est prévu début novembre. « Il n’y aura plus de problème, il va être démoli et reconstruit. »

    Braham, jeune prof de philo, parle bas. Son père a un cancer à cause de l’amiante. Pour lui, « jamais une telle situation ne se serait passée dans une banlieue chic. Ils auraient agi. »

    (1) Nous avons choisi de ne pas mentionner le nom de famille des professeurs.
    Marie Piquemal Photos Stéphane Remael

    #amiante #quartiers_populaires #discriminations #santé #droit_de_retrait #école #éducation

  • Des nouvelles du front
    Chanter « Hécatombe »

    Groupe Kropotkine de la Fédération anarchiste

    Le procès de Michel du Groupe Kropotkine, qui a osé chanter « Hécatombe » de Brassens devant la préfecture de police de Paris le 18 juin dernier, aura lieu le 13 décembre prochain à 9h00 devant la 28ème chambre correctionnelle du Palais de Justice de Paris.

    Rappel des faits :

    Samedi 18 juin 2011, face à la préfecture de Police de Paris, une soixantaine de personnes s’est retrouvée pour entonner « Hécatombe », en hommage à Brassens et en solidarité avec les personnes de Cherbourg et de Toulouse qui ont fait l’objet de répression policière pour avoir eux-mêmes honoré ce monument de la chanson française. Après deux tours de chants dans une ambiance bon enfant et pacifiste, les gendarmes mals inspirés venus en nombre, ont procédé, après les sommations d’usage, à l’évacuation de la chorale vers la bouche du métro Cité-Palais-de-Justice. Cette évacuation n’étant manifestement pas assez rapide au goût des pandores, ces derniers ont bousculé les personnes présentes dans l’escalier du métro, entraînant des chutes et de nombreuses protestations. Michel du Groupe Kropotkine, déséquilibré, s’est raccroché à ce qu’il pouvait : l’oreillette du gendarme mobile derrière lui. Menotté et amené au commissariat du 4ème, il a passé 21 h en garde à vue en compagnie d’un deuxième chanteur, Jean-Paul, à qui il est arrivé à peu près la même chose. Ils ont été convoqués devant la « justice » le 30 août 2011 pour y répondre de violences envers un agent de la force publique dans l’exercice de ses fonctions.

    Mardi 13 décembre à 9h00

    28ème chambre correctionnelle

    Palais de justice de Paris

    4 boulevard du Palais

    M° Cité
    http://kropotkine.cybertaria.org