Projet de réforme du dialogue social : « un retour de quarante ans en arrière »

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  • Projet de réforme du dialogue social : « un retour de quarante ans en arrière »
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    Suite à l’échec des négociations sur le dialogue social entre le patronat et les confédérations syndicales de salariés, le gouvernement Valls a décidé de reprendre le dossier, et a annoncé un projet de loi sur le sujet. Sous prétexte d’ « adapter les règles de la représentation au nombre de salariés de l’entreprise », il est notamment question de fusionner les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dans les comités d’entreprise (CE). Échange sur le sujet avec Stéphane, militant à la CGT, secrétaire d’un des CHSCT de l’entreprise Schindler.

    L’idée principale, c’est que le patronat veut détruire les CHSCT. Parce que le CHSCT dispose de compétences étendues pour s’occuper de l’organisation du travail, et peut notamment mettre en place des enquêtes et des expertises sur différents sujets. Les patrons ont donc le sentiment qu’on touche à leurs prérogatives.

    Ce que je comprends du projet du gouvernement, c’est qu’il s’agit de donner des garanties à la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (CGPME), en leur assurant qu’il n’y aura pas de CHSCT dans leurs entreprises. Le gouvernement envisage la création d’une instance unique qui regrouperait les compétences du CE, des délégués du personnel (DP) et du CHSCT. C’est un retour de quarante ans en arrière, avant les lois Auroux !

    (...)

    Vouloir passer par des accords, c’est s’assurer que le projet de la direction passe, sauf révolution dans l’entreprise. Avec la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, les projets d’entreprise sont désormais pliés en 4 mois maximum. Et il sera difficile de mobiliser les salariés d’une entreprise autour de la survie et des prérogatives du CHSCT : il est déjà difficile de mobiliser sur ce qui les concerne au quotidien. Le gouvernement en profite pour poursuivre le détricotage du code du Travail entamé sous l’ère Sarkozy.

    (...)

    Quand un salarié se blesse, le CHSCT est l’espace où l’on peut batailler sur les questions d’équipement et de protection collective. Mais c’est aussi l’espace où l’on peut aborder la question des troubles psychosociaux ; la blessure invisible, c’est-à-dire la blessure morale, psychologique, entre aussi dans le champ de compétence des CHSCT. Le CHSCT peut interpeller la direction, l’inspection du travail, le médecin du travail, les contrôleurs CARSAT [4] quand l’organisation du travail est susceptible d’engendrer des troubles psychosociaux. Or, c’est un sujet dont les entreprises ne veulent absolument pas parler.

    Derrière le projet du gouvernement, c’est surtout la possibilité pour le CHSCT de recourir à un expert extérieur qui est en ligne de mire, pour des questions financières et judiciaires. Alors que la parole syndicale est suspecte (elle serait « idéologique », « politique », « déconnectée des réalités économiques »), le rapport de l’expert permet de la soutenir et de l’accréditer, surtout face aux juges. Ce qui est déterminant compte-tenu de la judiciarisation actuelles des relations sociales. Aujourd’hui, dans mon entreprise, à chaque fois que le CHSCT lance une procédure de droit d’alerte pour dénoncer un danger grave et imminent, il est contesté au tribunal par la direction. Pareillement, les expertises que nous votons sont systématiquement contestées devant les tribunaux.

    #patronat #syndicalisme #Macron #santé

    • Quand, au sein de notre entreprise, les instances de coordination des CHSCT ont demandé des expertises, comme la loi l’autorise, on a été qualifiés de « fous furieux », et on a entendu la DRH nier les difficultés soulevées par les experts. Même les interventions des médecins du travail ou du contrôleur CRAMIF [6] ont été mises en cause. Et il n’y a même plus d’institution pour rappeler les employeurs à l’ordre : avec la réorganisation par Michel Sapin de leur administration, les inspecteurs du travail ont perdu 20 % de leurs effectifs.

      quand tout aura été pété sous les effets de la loi Macron et de ce nouveau projet, il restera plus grand chose pour se défendre...

    • vu l’importance du sujet (l’idée est quand même de faire table rase de de 30 ans de luttes dans les boîtes sur la question des conditions de travail et de la santé des salariés), ça vaut p’t’être un petit tour sur @rezo ? cc @moderne @fil