Le genre toujours au centre des loisirs - Libération
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Selon les recherches d’Yves Raibaud et Edith Maruéjouls, 75 % des budgets publics profitent directement ou indirectement aux garçons, toutes activités confondues : centres de loisirs, séjours de vacances, danse, foot, écoles de musique et même médiathèques. Les financements ne sont pas égalitaires. Des équipements publics, notamment sportifs, comme les city stades ou skate parcs, visent aussi une activité majoritairement masculine. Tandis que les lieux de pratique plus féminine comme les centres d’équitation sont moins aidés. Yves Raibaud : « Ce ne sont pas les filles qui s’autocensurent ou n’ont pas envie, on a juste privilégié la moitié de la population au détriment d’une autre à travers ce financement. » Le géographe a d’ailleurs mené un travail avec le conseil départemental de la Gironde pour parvenir à des arbitrages budgétaires égalitaires. « On l’a fait aussi avec la ville de Bordeaux sur leurs séjours d’été. Il doit y avoir autant de filles que de garçons pour des budgets équivalents. » La directrice de Larobe abonde : « Etre à égalité, c’est partager un budget, un espace, sinon on hiérarchise. On voit des maisons des jeunes, des centres occupés par 90 % de garçons. » Les filles viennent pour un cours de danse ou de l’aide aux devoirs mais ne restent pas. Une illusion de présence.
Au moment de la préadolescence, la fracture se creuse encore. Les travaux d’Edith Maruéjouls montrent que dès 12 ans, les filles disparaissent de ces structures. « Le groupe social des filles dans un micro-espace de loisirs ou sociétal, comme la cour de récré ou le centre, est relégué sur les bords. Elles ne prennent pas l’espace physique et sont réduites à leurs capacités à négocier. » La géographe mesure depuis deux ans un autre phénomène : « Ce que j’appelle la première charge mentale des filles : à cet âge, c’est la première fois qu’elles sont confrontées au harcèlement de rue en raison de leurs tenues vestimentaires, ce qui leur fait élaborer des stratégies d’évitement. » Un cercle vicieux en termes d’activités. Les filles étant moins présentes dans les centres, les activités risquent d’être encore plus orientées côté masculin.