• Trade Disruptions in the Red Sea
    eventc1000000 | PortWatch
    https://portwatch.imf.org/pages/573013af3b6545deaeb50ed1cbaf9444
    Trafic maritime au canal de Suez, au détroit de Bab-el-Mandeb et au cap de Bonne-Espérance
    (données quotidiennes à partir de janvier 2019 avec moyennes mobiles sur 7 jours)
    Ouah ! une nouvelle source #PortWatch mise en ligne par le FMI en partenariat avec Oxford University
    (version beta ouvert le 23/11/2023)

    Suez : la moitié du trafic par rapport à la même période l’année dernière

    Bab-el-Mandeb : 60% du trafic (-40% par rapport à la même période)

    Bonne-Espérance : +40% par rapport à la même période de l’année dernière

    • About | PortWatch
      https://portwatch.imf.org/pages/about

      PortWatch offers cutting edge analytical tools to help users assess the domestic and international trade impact of actual and future disasters, such as extreme weather events. Building on extensive research, PortWatch uses satellite-based vessel data and big data analytics to produce actionable insights for policymakers, international organizations and the general public.

      A key feature of PortWatch is its disaster alert system. After major disasters, PortWatch provides weekly email alerts on the realized and expected trade disruptions in affected countries. This information is intended to help policymakers, development partners and the public respond to disasters quickly and effectively. The email notifications are free of charge - please subscribe here.

      The platform allows users to explore how global supply chains are exposed to present and future disruptions to port activity. Users can simulate the indirect spillover effects of port disruptions to other countries in the maritime trade network. This can be done for both actual and hypothetical port closures. Spillover analysis reveals which countries and sectors are at risk of experiencing trade disruptions, which can help inform timely responses to shocks.

      PortWatch also offers climate scenario analysis, facilitating the identification of vulnerabilities within the maritime trade network. Such vulnerability analysis captures the impacts of more frequent and intense climate extremes in the future. The estimates are informed by modelled risk estimates at 1,400 ports worldwide for different types of disasters (cyclones, floods, and earthquakes). These data-driven insights are intended to facilitate international dialogue and help policymakers prioritize investments to increase resilience of vital economic infrastructure.

      A winner of the 2022 Climate Innovation Challenge, PortWatch is a collaborative project between the IMF and the Environmental Change Institute at the University of Oxford. The project team comprises researchers from a variety of disciplines, including macroeconomics, climate risk modelling, and data science. PortWatch was developed in cooperation with ESRI, the United Nations Global Platform, the World Bank, and the World Trade Organization. The project was made possible by seed funding from the Swiss State Secretariat for Economic Affairs.

      Official launch date: November 15, 2023 (beta version for public use and comment)

    • arf !

      The project was made possible by seed funding from the Swiss State Secretariat for Economic Affairs.

      rendu possible par un financement du Secrétariat d’État à l’économie suisse (SECO), branche du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche du Conseil fédéral de la Confédération (= ministère de l’économie)

    • https://fr.euronews.com/business/2024/01/16/conflit-en-mer-rouge-quelles-consequences-pour-leurope

      Les prix du carburant ont déjà augmenté en raison des tensions, le prix du baril de pétrole Brent ayant atteint le palier symbolique des 80 $ (73,12 €). La mer Rouge représente 12 % du commerce maritime mondial de pétrole et 8 % du gaz naturel liquéfié (GNL).

      Selon les chiffres officiels, la quantité de pétrole brut passant par le canal de Suez a augmenté de 60 % depuis 2020, l’Europe ayant enregistré une hausse de la demande par rapport aux niveaux les plus bas de la pandémie de COVID-19.

      Par ailleurs, l’Europe importe plus de pétrole des producteurs du Moyen-Orient via le canal de Suez depuis que l’UE a imposé des sanctions à la Russie en raison du conflit en Ukraine.

      Selon l’analyste de données sur le fret Vortexa, un détour résultant des perturbations de la mer Rouge pourrait entraîner une augmentation de 58 % à 129 % du temps de voyage nécessaire aux pétroliers sur les routes maritimes principales, y compris de l’Inde vers l’Europe et du Moyen-Orient vers l’Europe.

      (entre autres)

    • Deux Navy Seals disparaissent lors d’une mission secrète au large de la Somalie | Monde | 7sur7.be
      https://www.7sur7.be/monde/deux-navy-seals-disparaissent-lors-dune-mission-secrete-au-large-de-la-somalie

      Deux membres des Navy Seals ont disparu au large de la Somalie lors d’une mission secrète qui avait pour objectif d’intercepter des missiles iraniens, rapporte le ministère américain de la Défense. Des recherches impliquant navires, hélicoptères et drones n’ont, à l’heure actuelle, rien donné. Les autres membres de l’équipe ont quant à eux mené à bien leur mission, s’emparant avec succès d’une livraison d’armes iraniennes qui devait initialement tomber entre les mains des rebelles Houthis au Yémen.

      La mission secrète a débuté jeudi dernier au large des côtes somaliennes, dans les eaux internationales de la mer d’Arabie, indique la Centcom sur le réseau social X. Les Navy Seals, unité spéciale de la marine américaine, ont disparu après avoir tenté de monter à bord d’un boutre, un voilier traditionnel arabe.


      Le boutre ciblé par les NAVY Seals.
      © AP

      Le boutre transportait des composants de missiles balistiques ainsi que de croisière depuis l’Iran vers la région, explique The Telegraph.

      Puissant courant
      L’un des Seals se serait, d’après certaines rumeurs, fait emporter par un puissant courant. Un deuxième membre de l’équipe a par la suite plongé dans l’eau afin de le sauver. Aucune trace des deux Seals n’a été retrouvée depuis.

      Le reste de l’équipe a quant à lui pu monter à bord du bateau avant de mettre la main sur une dizaine de membres de l’équipage et des armes planquées sur le boutre. Ils ont par la suite entrepris de faire couler le navire.


      Composants de missiles iraniens.
      © AP

      Selon The Guardian, l’objectif de la mission était de transférer les armes sur un autre bateau. Les NAVY Seals ont mené leur opération depuis le porte-avion Lewis B Puller.

      Des membres du ministère américain de la Défense ont affirmé que les Seals avaient suivi un entraînement pour pouvoir survivre dans de telles conditions, précisant par ailleurs que les eaux du golfe d’Aden étaient chaudes. En d’autres mots : ce n’est pas l’hypothermie, mais bien l’épuisement, qui représente le plus grand risque. Des recherches approfondies sont toujours en cours.

      Selon l’armée américaine, c’est la première fois que des armes iraniennes destinées aux Houthis sont interceptées depuis le début des attaques des rebelles en mer Rouge. D’après une première analyse, il semblerait que les mêmes types d’armes soient utilisés par les Houthis lors de ces frappes.

    • Quelqu’un a une idée de ce qui se passe ?

      les bombardements des britannico-états-uniens sur le Yemen ont frappé, parait-il, des sites de lancement de missiles, mais, sans surprise sont loins d’être venus à bout de la capacité des rebelles à en tirer et à frapper d’autres navires.

      –> les états-uniens cherchent à couper, en amont, l’approvisionnement en missiles provenant d’Iran
      –> la navigation marchande se déroute par le cap de Bonne-Espérance (la tendance ne devrait pas s’arrêter là, vus les événements récents)

    • en arrière-plan, il y a aussi le projet #IMEC (India-Middle East–Europe Corridor)
      https://fr.wikipedia.org/wiki/India-Middle_East-Europe_Economic_Corridor

      certains voient dans l’accroissement de l’activité des Houthis une réponse à ce projet visant à perturber la branche Mer Rouge de ce corridor
      https://seenthis.net/messages/1036885

      • liste des pays mentionnés dans l’article WP[fr] : Inde, EAU, Arabie saoudite, Jordanie, Israël (auxquels il faut ajouter, dans la version WP[en] É.-U., UE, France, Allemagne et Italie, comme fondateurs) ; comparer avec la liste des membres de la coalition en Mer Rouge
      • filière des missiles tirés : Chine, Iran, Yemen

  • Guerre Israël-Hamas : pour la première fois, le Parlement européen appelle à un « cessez-le-feu permanent »
    18 janvier 2024 - Jean Delaunay

    https://www.observatoiredeleurope.com/guerre-israel-hamas-pour-la-premiere-fois-le-parlement-europe

    Le Parlement européen a appelé pour la première fois à un « cessez-le-feu permanent » à Gaza et au début d’efforts politiques pour trouver une solution à la guerre entre Israël et le Hamas.

    La résolution, purement symbolique et sans valeur juridique, a été approuvée jeudi par 312 voix pour, 131 contre et 72 abstentions dans l’hémicycle de Strasbourg, après qu’un compromis ait été trouvé pour apaiser les législateurs de centre-droit.

    L’appel au cessez-le-feu représente un changement significatif par rapport à la position précédente du Parlement, adoptée en octobre, qui appelait à une « pause » humanitaire pour intensifier le flux d’aide atteignant les civils de Gaza. Ce vote a été adopté par 500 voix pour, 21 contre et 24 abstentions.

    Cet appel aigu intervient alors que le bilan des morts à Gaza dépasse les 24 000, selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas.

    Alors que les groupes de gauche et centristes de l’hémicycle avaient ouvertement soutenu l’appel au cessez-le-feu, les membres du Parti populaire européen (PPE) de centre-droit, le plus grand groupe de la chambre, avaient exprimé des réserves.

    La résolution a été adoptée après l’approbation d’un amendement spécifiant qu’un cessez-le-feu devrait être conditionné à la libération de tous les otages détenus à Gaza et au « démantèlement » du Hamas, désigné organisation terroriste dans l’UE.

    #IsraelUE

    • 18 janvier 2024 - 13h45
      Les eurodéputés réclament un cessez-le-feu permanent à Gaza, sous conditions
      https://www.rfi.fr/fr/moyen-orient/20240118-en-direct-raids-isra%C3%A9liens-meurtriers-bande-de-gaza-palestine-et-n

      Les eurodéputés ont réclamé jeudi un cessez-le-feu « perm
      anent » à Gaza dans une résolution, non contraignante, qui conditionne toutefois cet arrêt des combats à la libération « immédiate » des otages encore détenus par le Hamas. Le Parlement européen, réuni à Strasbourg, appelle dans ce texte « à un cessez-le-feu permanent et à la reprise des efforts vers une solution politique, à condition que tous les otages soient immédiatement libérés sans conditions, et que l’organisation terroriste du Hamas soit démantelée ». Le projet de résolution déposé par la gauche sociale-démocrate, les Verts et le centre ne prévoyait à l’origine aucune condition à la mise en œuvre d’un cessez-le-feu. Mais les eurodéputés se sont ralliés à un amendement déposé par le Parti populaire européen (PPE, droite), premier groupe politique du Parlement de Strasbourg, introduisant cette conditionnalité. Le PPE avait refusé de s’associer à ce projet de résolution, jugeant qu’un appel au cessez-le-feu permanent « sape le droit d’Israël à se défendre et met encore davantage en danger la vie des otages toujours détenus par le Hamas », selon une déclaration du groupe publiée avant le vote. « Tout cessez-le-feu doit être soumis à des conditions », a encore affirmé le PPE. Le texte a été adopté par une majorité de 312 eurodéputés, 131 ont voté contre et 72 se sont abstenus. Le Parlement européen compte au total 705 députés. Le débat, souvent très vif, qui a précédé ce vote mardi, a mis en lumière les divisions qui traversent les groupes politiques et les 27 États membres depuis le début de la guerre entre le Hamas et Israël le 7 octobre. Lors de leur dernier sommet en décembre, les chefs d’État ou de gouvernement de l’UE n’étaient pas parvenus à trouver un accord sur une déclaration commune sur la situation à Gaza, compte tenu de ces divisions.

  • Why Israel’s Political and Military Leaders Want a Perpetual War - Israel News - Haaretz.com
    https://www.haaretz.com/israel-news/2024-01-17/ty-article/.premium/why-israels-political-and-military-leaders-want-a-perpetual-war/0000018d-125e-dac4-a9cf-527fb7820000

    (En prenant pour argent comptant les déclarations de l’armée sioniste quant aux pertes du Hamas)

    “The war has become the objective,” former Shin Bet security agency director Ami Ayalon told me in a recent Haaretz interview. The statement attracted wide attention in Israel and around the world among about half a million readers and followers on social media.

    And now that we have passed the 100-day milestone since Hamas’ surprise October 7 attack, the statement resonates all the more strongly.
    Many of the country’s decision-makers appear enamored of a situation in which the war continues with no end in sight and consider it an unavoidable necessity. At Sunday’s cabinet meeting, Prime Minister Benjamin Netanyahu reiterated that the war will continue for many more months. That’s no surprise.

    Since the initial weeks of the war, many Israelis have sensed that war’s declared aims have been largely unrealistic and that Netanyahu’s hidden objectives are personal and political – evading testifying at his criminal corruption trial, preventing a resumption of the protests against his government and disrupting any attempt to hold early elections.
    This week in conversations with Israeli media outlets, American officials expressed major disappointment over the prime minister’s conduct. So what else is new? Did they expect Netanyahu to thank them for America’s diplomatic, military and moral support for Israel? Were they surprised that he has taken the aid for granted and isn’t taking the United States into account? Didn’t they know that he misleads, that he’s a manipulator who hasn’t read verse from the Book of Exodus that states “keep thee far from a false matter”?

    But Netanyahu isn’t alone in his efforts to prolong the war. He has partners among the political and military leadership. Defense Minister Yoav Gallant, National Unity Party leader Benny Gantz, IDF Chief of Staff Herzl Halevi, Shin Bet security agency director Ronen Bar and other senior Shin Bet officers and IDF generals share the wish to prolong the war, each for his own reasons.

    Gallant comes right behind Netanyahu in bearing responsibility for the political and security failure of October 7. Even if he deserves credit for warning last March that the government’s proposed judicial coup was damaging national security, he’s a full partner to the cabinet’s policies, procedures and decisions. After issuing his warning and being fired – and restored to office following a spontaneous protest – Gallant has continued to loyally serve Netanyahu’s malicious government.

    Gantz is not responsible for the failure. Together with his party colleague and fellow former IDF Chief of Staff Gadi Eisenkot, he has demonstrated national responsibility and statesmanship. Despite hesitations on the part of Netanyahu, who really didn’t want him, Gantz swallowed his pride and joined the war cabinet without conditions. But it quickly became apparent that he had no influence and that he and Eisenkot were merely there for show.

    Judging by Gantz’s conduct, the National Unity Party leader has no intention of giving Netanyahu an ultimatum, even after 100 days of war. Several weeks ago, he should have said the following: “If the government doesn’t initiate a comprehensive deal that would end the war and release most of the terrorists in exchange for all of the hostages, I and the National Unity Party will resign.”

    Gantz seems to be basking in his success in the polls , concerned that he would lose his high rating in the polls if he quits the government. From that perspective, there’s little difference between him and Netanyahu. In their management of the war, the decisions of both are also motivated by personal and political considerations.

    Netanyahu, who at the beginning of the war suffered anxiety and panic, recovered within a few days from the trauma and took control of managing the war, the decision-making and the public agenda. He appears at press conferences, is photographed with soldiers at the front and on the home front and releases several statements per day. He also manipulates families of the hostages, takes credit for himself for accomplishments of the entire intelligence and defense community and minimizes the importance of Gantz and Eisenkot.

    Also obvious is the responsibility of Chief of Staff Lt. Gen. Halevi, Intelligence Corps chief Maj. Gen. Aharon Haliva, military intelligence research department head Brig. Gen. Amit Saar, IDF Southern Command head Maj. Gen. Yaron Finkelman and other senior officers, as well as Ronen Bar and his staff. All of them, including Gallant, have admitted responsibility for the failures of October 7 – some more so and some less, some publicly and others privately – but none have publicly announced that they would resign.

    On Sunday, in an interview with Army Radio, former Shin Bet director Jacob Perry recounted that the agency’s current director, Ronen Bar, told his staff that he would resign after the war. Shin Bet staff were quick to make it clear that during the war’s first week, Bar had only told his staff that he was responsible for the agency’s failure to provide a timely warning that could have foiled the attack.

    What is driving the concern that Gallant, Halevi, Bar and their senior subordinates have an interest in continued combat? Apart from the need to salve their tormented consciences, there is the unstated assumption that the longer the military campaign lasts, the more military accomplishments there will be, which would mitigate the scope of their failures and permit them to emerge as partial successes.

    In fact, the IDF and Shin Bet can claim some successes. Most of Hamas’ military force has been severely damaged. It has lost 9,000 fighters (almost half of the force) and thousands more have been wounded. Its chain of command – of battalion and brigade commanders and its naval and air commanders – have been either killed, wounded or captured. The lion’s share of its rockets, particularly its long-range rockets, have been either destroyed or “wasted” when fired.

    On the other hand, the IDF’s efforts to rescue the hostages have failed. The theory embraced by Halevi, Bar and Gallant that only military pressure can bring about the hostages’ release has not proven itself. Of the 268 hostages, 121 were freed in exchange for a cease-fire and Israel’s release of terrorists. The promise to eliminate Hamas’ leadership in Gaza and abroad has also been shown to be arrogant.

    The IDF and Shin Bet have had difficulty through intelligence to find Hamas’ top three leaders in Gaza, Yahya Sinwar, Mohammed Deif, and Marwan Issa, and to reach them through military operations. The IDF and Shin Bet are also politically constrained from acting against Hamas’ leadership in Qatar and Turkey. The sole achievement in this regard has been the assassination of Saleh al-Arouri, for which Israel has not taken responsibility. The destruction of the tunnels in Gaza has also only been a partial success.
    Such limited achievements are tactical in any event. Strategically, Israel is losing the war. It has not managed, as Netanyahu and Gallant had promised, to bring about the collapse of Hamas and is now facing in a war of attrition. Statements made both before and during the war that Israel can fight simultaneously on multiple fronts are being proven to be vain boasting. Israel is perceived as a weak country, with 150,000 of its citizens internally displaced refugees.

    Talk of unity and the slogan “together we will win” are hollow lip service. Israel remains a divided and fractured country run by a reckless government that hasn’t changed and doesn’t intend to change direction and is unwilling to learn any real lessons. Evidence of that can be seen in the allocation of funding based on government coalition agreements and patronage appointments as well as a budget that doesn’t hold future promise.

    Above all, what stands out is a lack of political courage that would lead to the conclusion that it would be better to declare limited achievements now and cut our losses. Instead, the government and army prefer to evade making difficult or critical decisions to end the war, to restore calm to the borders with Gaza and Lebanon and to free the hostages, even at the painful price of the release of all the Palestinian prisoners from Israeli custody.

    Netanyahu, Gallant, and their coalition understand that if they act as expected of a country facing one of the most difficult times in its history – on their watch – their government would fall. And that’s the last thing that they want.

    • Unstaffed tills were supposed to revolutionise shopping. Now, both retailers and customers are bagging many self-checkout kiosks.
      I
      It’s a common sight at many retail stores: a queue of people, waiting to use a self-checkout kiosk, doing their best to remain patient as a lone store worker attends to multiple malfunctioning machines. The frustration mounts while a dozen darkened, roped-off and cashier-less tills sit in the background.

      For shoppers, self-checkout was supposed to provide convenience and speed. Retailers hoped it would usher in a new age of cost savings. Their thinking: why pay six employees when you could pay one to oversee customers at self-service registers, as they do their own labour of scanning and bagging for free?

      While self-checkout technology has its theoretical selling points for both consumers and businesses, it mostly isn’t living up to expectations. Customers are still queueing. They need store employees to help clear kiosk errors or check their identifications for age-restricted items. Stores still need to have workers on-hand to help them, and to service the machines.

      The technology is, in some cases, more trouble than it’s worth.

      “It hasn’t delivered anything that it promises,” says Christopher Andrews, associate professor and chair of sociology at Drew University, US, and author of The Overworked Consumer: Self-Checkouts, Supermarkets, and the Do-It-Yourself Economy. “Stores saw this as the next frontier… If they could get the consumer to think that [self-checkout] was a preferable way to shop, then they could cut labour costs. But they’re finding that people need help doing it, or that they’ll steal stuff. They ended up realising that they’re not saving money, they’re losing money.”
      One of the frustrations of self-checkout can be the extra work of having to find a specific PLU code to ring up a purchase (Credit: Alamy)

      Unexpected problems in the bagging area

      Many retail companies have invested millions – if not billions – of dollars in self-checkout technology, which Andrews says was first developed during the 1980s, and started appearing in stores in the 1990s. They’re not exactly cheap to get into stores: some experts estimate a four-kiosk system can run six figures.

      Despite the cost to install them, many retailers are reversing course on the tech. Target, for instance, is restricting the number of items self-checkout customers can purchase at one time. Walmart has removed some self-checkout kiosks in certain stores to deter theft. In the UK, supermarket chain Booths has also cut down on the number of self-service kiosks in its stores, as customers say they’re slow and unreliable.

      Dollar General, one of the fastest-growing retailers in the US, is also re-thinking its strategy. In 2022, the discount chain leaned heavily into self-checkout technology – it’s not uncommon to see only one or two employees staffing an entire Dollar General store in some areas. Despite the investment, they are now planning to increase the number of employees in stores “and in particular, the checkout area”, according to the company’s CEO, Todd Vasos.

      “We had relied and started to rely too much this year on self-checkout in our stores,” he said during the company’s Q3 2023 earnings call on 7 December 2023. “We should be using self-checkout as a secondary checkout vehicle, not a primary.” (Dollar General did not respond to the BBC’s requests for comment).
      Some data shows retailers utilising self-checkout technology have loss rates more than twice the industry average
      Some retailers cite theft as a motivator for ditching the unstaffed tills. Customers may be more willing to simply swipe merchandise when using a self-service kiosk than they are when face-to-face with a human cashier. Some data shows retailers utilising self-checkout technology have loss rates more than twice the industry average.

      In addition to shrink concerns, experts say another failure of self-checkout technology is that, in many cases, it simply doesn’t lead to the cost savings businesses hoped for. Just as Dollar General appears poised to add more employees to its check-out areas, presumably increasing staffing costs, other companies have done the same. Despite self-checkout kiosks becoming ubiquitous throughout the past decade or so, the US still has more than 3.3 million cashiers working around the nation, according to data from the US Bureau of Labor Statistics.

      Humans or machines?

      Consumers want this technology to work, and welcomed it with open arms. However, years later, they’re still queueing for tills; waiting for store-staff assistance with errors or age checks; and searching high and low for the PLU code of the Walla Walla Sweet Onions they’re trying to purchase.

      In a 2021 survey of 1,000 American shoppers, 60% of consumers said they prefer to use self-checkout over a staffed checkout aisle when given the choice, yet 67% of consumers have had the technology fail while trying to use it.

      Experts say some self-checkout kiosks may stand abandoned as some shoppers transition backed to staffed tills (Credit: Alamy)
      The bottom line is businesses want to cut costs, and shoppers want to get in and out of a store. If self-checkout isn’t the answer, they’ll find another avenue.

      “It’s not that self-checkout technology is good or bad, per se… [but] if we try self-checkout and realise we’re not benefitting from it, we might switch back to not using it,” says Amit Kumar, an assistant professor of marketing and psychology at the University of Texas, who studies consumer behaviour and decision-making.

      That appears to be happening in many cases, as customers’ frustrations with the technology persist. But Andrews says that while stores may change up their strategies – as seen with Dollar General and others – many large retail chains are likely to keep kiosks in stores due to sunk costs. “They spent billions putting it in stores, and are hoping they can still get the public to buy into it,” he says.

      Retailers may continue to rely on the technology, but many aren’t putting all their farm-fresh eggs in the self-checkout basket. Instead, they’re increasingly giving customers the option to choose between human and machine.

      For the customers that do choose to do the labour themselves, there’s one thing Andrews believes won’t change. However ubiquitous the technology is, and however much consumers get used to using the kiosks, shoppers are likely to find themselves disappointed and frustrated most of the time.

      “It was part of a larger experiment in retail in trying to socialise people into using it,” he says. Simply, “customers hate it”.

      #caisses_automatiques #grande_distribution #commerce #commerce_alimentaire #vol #solutionnsme_technologique

  • Ivan Illich - Le renoncement à la santé
    http://olivier.hammam.free.fr/imports/auteurs/illich/renoncement-sante.htm

    Je soupçonne Illich de partir d’un principe catho-libéral et je suis sûr qu’il a malmené beaucoup de jeunes esprits innocents par ses écrits. Pourtant son analyse des institutions et de leur pouvoir est toujours un puissant outil de critique. Je continue donc à lui chercher la bonne place au milieu de mon bric-a-brac intellectuel.

    Sa critique de l’hôpital (qu’il rapproche de l’école, de l’armée et de la prison) et de la profession médicale, de son idéologie, sa terminologie et son pouvoir tellement hypocrites est incontournable depuis qu’on a pris connaissance des docteurs Mengele et Shirō Ishii / 石井 四郎 .

    Ces monstres nous ont révélé l’essence de leur profession en poussant la praxis médicale à l’extrême sans se soucier des excuses habituelles pour l’exercice du pouvoir médical . Par eux nous avons identifié le patient-marchandise soumis à l’autorité médicale par la force et la mystification.

    Illich nous fournit l’analyse structurelle et étihque de l’organisation qui sert de cadre pour l’excercice du pouvoir sur nous.

    Unit 731 /731部隊 / Nana-san-ichi Butai
    https://en.m.wikipedia.org/wiki/Unit_731

    Repris du site Sorceresses Reborn / Le Cercle des Sorcières Disparues (site web disparu)

    Voici vingt ans, j’ai publié un ouvrage intitulé Némésis médicale. Il s’ouvrait sur cette phrase, « l’entreprise médicale est devenue un danger majeur pour la santé ». A l’époque, cette formulation était puissamment chargée de sens. La lirais-je chez un auteur d’aujourd’hui que je riposterais : « Et puis après ? ». En effet, le danger majeur ne réside plus dans l’entreprise médicale, mais dans la quête de la santé.

    Dans la discussion universelle actuelle sur les systèmes de santé, deux mots reviennent très fréquemment : santé et responsabilité. Ces termes entrent dans deux types de discours. D’un côté les soins de santé sont considérés comme une responsabilité incombant à l’état, aux professionnels ou aux gestionnaires ; de l’autre, on estime que chacun doit être responsable de sa santé. « Prendre en main la responsabilité de sa santé », tel est actuellement le slogan qui a la préférence, et est en passe d’être annexé par le sens commun. Le fait que je parle au Québec, dans une communauté politique qui s’efforce de distancier ses principes directeurs des modes internationales, m’encourage à critiquer ces positions. Voilà pourquoi je veux argumenter le bien-fondé d’opposer un « NON » catégorique à l’idée de rendre publiquement les citoyens comptables de leur santé. Et aujourd’hui, en 1994, je suis loin d’être le seul à adopter cette attitude.

    Mais il y a un risque. Notre « non merci ! » devant la perspective d’une nouvelle politique sanitaire peut être interprétée et exploitée de cinq façons différentes pour faire exactement l’inverse de ce à quoi nous visons.

    1. En premier lieu, certains comprennent que le « non » à la santé sous la responsabilité personnelle de chacun implique qu’une mise en tutelle du citoyen s’impose. La santé, prétend-on, est trop précieuse pour être laissée à la discrétion des profanes. Je rejette catégoriquement cette arrogante imputation d’incapacité. Depuis trente ans, j’ai défendu publiquement la décriminalisation totale des pratiques d’auto-intoxication, ce qui n’implique nullement que je leur donne une caution morale. Et je persiste à prôner l’abolition de toutes les dispositions légales à l’encontre de la consommation de drogues et des méthodes curatives non classiques ou non homologuées. Dans le sillage de Paul Goodman, je fonde mon insistance sur le respect que nous devons à la dignité des plus faibles.

    2. Deuxièmement, mon « non » fondamental n’a aucun rapport avec la rareté présumée des agents curatifs. Aujourd’hui, des populations succombent en masse à la famine et non par manque d’interventions médicales ou chirurgicales. Et plus les gens sont pauvres, plus ils sont susceptibles d’être les victimes impuissantes d’une médecine au rabais. Pendant vingt ans, j’ai défendu l’idée que la consommation médicale, au-delà d’un seuil très bas, devrait être frappée de taxes de luxe comme le sont l’alcool. le tabac et les loteries. En taxant les dialyses, les pontages et les ACT, on obtiendrait les moyens de financer pour tous — même à Sumatra — des interventions telle que l’appendicectomie.

    3. En élevant mon « non », je ne me pose pas en penseur planétaire s’efforçant de frayer la voie à une dictature écologique. Je n’imagine pas qu’il puisse exister un quelconque système de régulation capable de nous sauver du déluge de poisons, de radiations de biens et de services qui rendent plus malades que jamais les hommes et les animaux. Ce monde ne comporte pas d’issues de secours. Je vis dans une réalité fabriquée, constamment plus éloignée de la création. Je sais aujourd’hui ce que cela signifie et quelles horreurs menacent chacun de nous. Il y a quelques décennies, je l’ignorais. Il me semblait alors possible de prendre ma part de responsabilité dans le monde. « Être bien portant » ou « être bien soigné » se ramène à une combinaison de trois facteurs : prestations techniques, protection de l’environnement et adaptation aux conséquences de la technologie, facteurs qui constituent inévitablement des privilèges.

    Dans la vallée mexicaine qui m’est familière, le village continue de dénommer ses fêtes populaires d’après le cycle de plantation et de croissance du maïs bleu mais il y a déjà quinze ans que cette céréale elle-même n’est plus qu’un souvenir. Et l’argent manque pour financer les techniques de culture d’hybrides, par ailleurs destructrices. Et il n’y a aucune protection contre les nuages délétères que répand la grande exploitation agro-alimentaire du lieu. Mais on ouvre de nouveaux centres voués à la pédagogie sanitaire, ce qui permet de jeter quelques rognures à la piétaille enthousiaste des verts. C’est pourquoi mon « non » n’est pas assurément un « oui » à la pédagogie de la santé qui implique la gestion de systèmes toxiques.

    4. Si je dis « NON » , ce n’est pas pour défendre une nouvelle éthique de la souffrance SOUS la direction de conseillers des endeuillés et d’accompagnateurs des moribonds qui trouvent dans la maladie et la mort modernes un moyen de se révéler à eux-mêmes. Je ne me range pas non plus dans le camp de ces gnostiques et philosophes qui gèrent le remodelage de ce monde artificiel. Aujourd’hui, j’ai appris ce qu’est l’impuissance. La « responsabilité » est désormais une illusion. Ils nous proposent d’admettre les inéluctables épidémies de l’âge postindustriel comme une sorte de santé sublimée. Je ne réserve nul « oui » au monde de la sujétion totale, à la médiatisation de l’impudence, tellement en vogue chez les philosophes du postmodernisme. Moi, je m’applique à cultiver l’indignation. L’air moderne de souffrir exige d’affronter une angoisse sans précédent. Il ne peut être enseigné mais seulement appris dans une amitié toujours renforcée. Ce qui nous accable aujourd’hui est entièrement nouveau. Ce qui détermine notre époque depuis Rachel Carson c’est l’acceptation réaliste croissante d’une perniciosité sans fin qui est aujourd’hui le thème de pompeux débats sur les orientations et les besoins en matière d’atome, de gènes et d’interventions neurologiques. Voilà les maux qui nous laissent sans voix. Contrairement à la mort, à la pestilence et aux démons, ces maux-là n’ont aucun sens. Bien que dus à l’homme, ils révèlent d’un ordre non humain. Ils nous réduisent à l’impuissance, à l’incapacité, à l’aboulie. Ces maux, nous pouvons les subir, en pâtir, mais non leur donner un sens, les interpréter. Seul celui qui trouve sa joie dans ses amis est capable de leur résister. Aussi y a-t-il un univers entre notre « non » et toutes les acceptations dociles des retombées secondaires du progrès.

    5. Enfin, il serait stupide ou malveillant de taxer d’indifférence cynique le « NON » à la pénalisation des comportements antihygiéniques. Au contraire ! Dans mes réflexions, la première place est occupée par la multitude par des gens innombrables dont quatre décennies de développement ont détruit l’espace architectural, technique et culturel d’où les arts traditionnels de souffrir et de mourir tiraient leur sève. Aujourd’hui, la vaste majorité des hommes est pauvre, et les sous-développés deviennent encore plus pauvres. Lorsque nous disons « non » à l’implantation de systèmes qui promeuvent la quête de la « santé », chez nous ou à l’extérieur, nous parlons avant tout de quelque chose qui m’apparaît impensable : quatre milliards d’hommes plongés dans la misère neuve du développement. Nous ne pourrons tenter d’être à côté d’eux que si nous disons d’abord « Non merci ». Les motifs de mon « non » éthique ne me mettent donc pas au service de ces cinq réalités actuelles que sont : le paternalisme professionnel, l’idéologie de la rareté, l’esprit de système, la psychologie de la libération et ce « sens commun » désormais à la mode qui affirme que l’auto-assistance, l’autonomie, ou même la responsabilité de soi-même sont, pour les pauvres, les seules chances de survivre en supportant les conséquences de l’enrichissement du reste du monde. Je formule mon « non » éthique à la poursuite de ma santé sous ma propre responsabilité parce que moi je veux chercher mon équilibre dans l’apprentissage de l’art de souffrir et de l’autolimitation dans la recherche du soulagement. La poursuite de la santé normative (conforme aux normes) ne pourrait qu’entraîner l’intériorisation des systèmes mondiaux dans le moi, à la manière d’un impératif catégorique. Le renoncement à la « santé » que j’oppose à cette autolimitation réaliste me semble être le point de départ d’une conduite éthiquement esthétiquement et eudémoniquement adaptée à notre temps. Mais, pour suivre cette argumentation, il nous faut d’abord remonter à la sociogenèse historique de ce à quoi nous voulons renoncer.

    La conception moderne de la santé

    La conception de la santé dans la modernité européenne représente une rupture par rapport à la tradition d’Hippocrate et de Galien familière à l’historien. Pour les philosophes grecs, la « santé » se concevait comme une combinaison harmonieuse, un ordre équilibré, un jeu réciproque des éléments fondamentaux. Etait en bonne santé celui qui s’intégrait dans l’harmonie de la totalité de son monde selon le temps et le lieu où il voyait le jour. Pour Platon, la santé était une vertu somatique. Mais depuis le XVIIe siècle, la volonté de maîtriser la nature a remplacé l’idéal de « la santé » par la conception d’une condition humaine dont on peut régir les paramètres. Dans la Déclaration d’indépendance des Etats-Unis est affirmé le droit à la recherche du bonheur. Le droit à la santé se matérialisa de façon parallèle en France. Dès lors, on s’estimait aussi fond à dire « ma santé » qu’à dire « mon corps ». A l’instar de l’idée voulant que l’Etat garantisse la recherche du bonheur, la quête moderne de la santé est le fruit d’un individualisme possessif.

    Il ne pouvait y avoir moyen plus brutal, et en même temps plus convaincant, de légitimer une société fondée sur l’avidité personnelle. De façon parallèle, la notion de responsabilité de l’individu fut admise dans les sociétés gouvernées démocratiquement. La responsabilité revêtit alors la forme d’un pouvoir éthique sur des régions toujours plus lointaines de la société et sur des formes toujours plus spécialisées de prestations par des services « générateurs-de-bonheur ».

    De nos jours, la santé et la responsabilité sont des concepts normatifs qui n’indiquent plus aucune voie à suivre. Si j’essaie de structurer ma vie en fonction de tels idéaux irrécouvrables, ils deviennent pernicieux — je me rends malade. Pour vivre convenablement aujourd’hui, il me faut renoncer de façon décisive à la santé et à la responsabilité. Je dis renoncer et non point ignorer, et je n’emploie pas ce terme pour connoter l’indifférence. Je dois accepter l’impuissance, déplorer ce qui a disparu, renoncer à l’irrécouvrable. Je dois assumer l’impuissance qui peut même me priver de mon conscient, de mes sens.

    Je crois profondément à la possibilité de renoncement. Et ce n’est pas par calcul. Le renoncement signifie et exige plus que le [fait de] pleurer l’irrécouvrable. Il peut vous libérer de l’impuissance. Il n’a aucun rapport avec la résignation , l’incapacité ou même le refoulement. Mais, de nos jours, le renoncement n’est pas un concept familier. Nous n’avons plus de mot pour désigner le renoncement courageux discipliné, lucide sur soi-même qui s’accomplit en commun — or c’est ce que j’évoque ici. Je l’appellerai l’ascèse. J’aurais préféré un autre terme, car l’ascèse nous fait songer à Flaubert et à son saint Antoine au désert, qui repousse la tentation du vin, de la chair et des parfums. En effet, le renoncement dont je parle n’a pas grand-chose à voir avec cette attitude.

    Une époque abstraite

    Nous vivons dans une époque abstraite et désincarnée. Les certitudes sur lesquelles elle repose sont largement dépourvues de sens. Mais leur acceptation mondiale leur confère une apparence d’indépendance par rapport à la culture et à l’histoire. Ce que j’appellerai l’ascèse épistémologique ouvre la voie à l’abandon de ces certitudes axiomatiques sur lesquelles se fonde en notre temps la vision du monde. J’évoque ici une discipline conviviale et pratiquée de façon critique. Les prétendues valeurs de la santé et de la responsabilité font partie des certitudes que je viens d’évoquer. Quand on les examine en profondeur, on constate que ce sont des phénomènes puissamment morbides et des facteurs de désorientation. Voilà pourquoi je considère l’incitation à assumer la responsabilité de ma santé dénuée de sens, fallacieuse, indécente et, d’une façon très particulière, blasphématoire.

    Ce qu’on appelle la « santé » est aujourd’hui une source de confusion pour bien des gens. Les experts dissertent savamment sur les « systèmes de santé ». Certaines personnes croient qu’à défaut d’un accès à des traitements élaborés et coûteux, les maladies séviraient. Chacun s’inquiète de l’augmentation des « dépenses de santé ». On s’entend même parler d’une « crise des soins de santé ». Je souhaite donner mon sentiment sur ces questions.

    Tout d’abord, je crois nécessaire de réaffirmer la vérité de la condition humaine : j’ai mal. Je souffre de certains troubles. Il est certain que je mourrai. Certains éprouvent plus intensément la douleur, d’autres sont atteints de troubles plus débilitants, mais nous affrontons tous pareillement la mort.

    En regardant autour de moi, je constate que nous avons une grande capacité de nous porter mutuellement assistance, particulièrement lors des naissances, des accidents et des trépas — et ainsi en va-t-il ailleurs dans le temps et l’espace. A moins d’être désaxées par des nouveautés historiques, nos maisonnées, en étroite coopération avec la communauté environnante, ont été admirablement accueillantes, c’est-à-dire, de manière générale, aptes à répondre positivement aux véritables besoins humains : vivre, célébrer et mourir.

    En opposition avec ce vécu, certains d’entre nous en sont venus à croire aujourd’hui que nous avons un besoin désespéré de fournitures marchandes standardisées, entrant toutes sous le label de la « santé », conçues et fournies par un système de services professionnels. Certains s’efforcent de nous convaincre que le nouveau-né arrive en ce monde non seulement sans forces ni capacités, nécessitant donc les tendres soins de la maisonnée — mais aussi malade, exigeant un traitement spécifique administré par des experts autocertifiés. D’autres croient qu’il faut constamment aux adultes des médicaments et des interventions pour qu’ils atteignent la vieillesse, tandis que les mourants ont besoin de soins médicaux dits palliatifs.

    L’asservissement au mythe technique

    Nombreux sont ceux qui ont oublié — ou ne sont plus capables d’en jouir — ces façons de vivre régies par le bon sens, qui contribuent au bien-être des personnes et à leur capacité de guérir d’une maladie. Beaucoup se sont laissés asservir à un mythe technique qui s’autoglorifie, et dont cependant ils se plaignent parce que, de manière impersonnelle, il appauvrit le plus grand nombre et enrichit une minorité.

    Je constate, pour le déplorer, que beaucoup d’entre nous entretiennent l’étrange illusion que tout un chacun a « droit » à quelque chose qui s’appelle les « soins de santé ». Ainsi se trouve-t-on légitimé à recevoir le plus récent assortiment de thérapies techniques, fondé sur le diagnostic d’un professionnel quelconque, afin de survivre plus longtemps dans un état qui est souvent affreux, douloureux ou simplement fastidieux.

    J’estime le temps venu d’énoncer clairement que ces conditions et ces situations spécifiques sont des facteurs de morbidité, bien plus que ne le sont les maladies elles-mêmes. Les symptômes que la médecine moderne s’efforce de traiter n’ont guère de rapport avec l’état de notre corps ; ils sont, bien davantage, les signes des préjugés et des désordres propres aux façons modernes de travailler, de se distraire, de vivre.

    Pourtant, beaucoup d’entre nous sont fascinés par l’éclat des « solutions » high-tech. Nous croyons pathétiquement aux remèdes miracles, nous croyons faussement que toute douleur est un mal qu’il faut supprimer, nous voulons retarder la mort à n’importe quel prix.

    J’en appelle à l’expérience personnelle de chacun, à la sensibilité des gens ordinaires, par opposition au diagnostic et aux décisions des professionnels. J’en appelle à la mémoire populaire, par opposition aux illusions du progrès. Prenons en considération les conditions de vie dans notre cercle familial et dans notre communauté, et non pas la qualité des prestations de « soins de santé » ; la santé n’est pas une marchandise qu’on distribue, et les soins ne peuvent être prodigués par un système.

    Oui, nous avons mal, nous tombons malade, nous mourons, mais également nous espérons, nous rions, nous célébrons ; nous connaissons les joies de prendre soin les uns des autres ; souvent nous sommes rétablis et guéris par divers moyens. Nous n’avons pas à suivre un chemin uniformisé et banalisé de notre vécu.

    J’invite chacun à détourner son regard, ses pensées, de la poursuite de la santé, et à cultiver l’art de vivre. Et, tout aussi importants aujourd’hui, l’art de souffrir, l’art de mourir.

    Les droits et libertés des malades

    Je revendique certaines libertés pour ceux qui préfèrent célébrer l’existence plus que de préserver la « vie » :

    la liberté de juger moi-même si je suis malade ;
    la liberté de refuser à tout moment un traitement médical ;
    la liberté de choisir moi-même un remède ou un traitement ;
    la liberté d’être soigné par une personne de mon choix, c’est-à-dire par quiconque dans la communauté s’estime apte à guérir, qu’il s’agisse d’un acupuncteur, d’un homéopathe, d’un neurochirurgien, d’un astrologue, d’un sorcier, ou de toute autre personne ;
    la liberté de mourir sans diagnostic.

    Il ne m’apparaît pas qu’il soit nécessaire aux Etats d’avoir une politique nationale de « santé », cette chose qu’ils accordent à leurs citoyens. Ce dont ces derniers ont besoin, c’est de la courageuse faculté de regarder en face certaines vérités :

    nous n’éliminerons jamais la douleur ;
    nous ne guérirons jamais toutes les affections ;
    nous mourrons certainement.

    Voilà pourquoi, en tant que créatures pensantes, nous devons bien voir que la quête de la santé peut être source de morbidité. Il n’y a pas de solutions scientifiques ou techniques. Il y a l’obligation quotidienne d’accepter la contingence et la fragilité de la condition humaine. Il convient de fixer des limites raisonnées aux soins de santé classiques. L’urgence s’impose de définir les devoirs qui nous incombent en tant qu’individus, ceux qui reviennent à notre communauté, et ceux que nous laissons à l’État.

    Ivan Illich
    L’Agora, Juillet/Août 1994

    • Grave :
      https://agora.qc.ca/documents/le_renoncement_a_la_sante

      ... le texte de la conférence qu’il a prononcé, au milieu de la décennie 1990, à un congrès de l’Association des directeurs généraux des services de santé et des services sociaux du Québec.

      Ces messieurs n’ont pu comprendre les réflexions d’Illich que dans le sens d’une justification de mesures d’austérité.

      Ivan Illich décrit très bien l’alinéation du malade/patient de sa maladie et de da vie en général. Il ne voit par contre pas que ce ne sont pas les prouesses du progrès technique, il mentionne la dialyse, qui éloignent l’homme de sa propre existence. Il aurait pu nous faire comprendre les raisons et conséquences de phénomènes qu’il décrit en situant les soignants et patients dans le système économique qui les fait marcher, en analysant la repartition du pouvior et des gains entre les membres du système médical.

      I.I. est une source d’inspiration toujours surprenante. Pour mettre ses trouvailles au service de tous la plus gande part du travail reste à faire.

      Parfois j’ai l’impression qu’Illich voit le monde de la perspective du magicien (jésuite) qui est en train de perdre le contrôle de ses brebis au profit des nouveaux sorciers biochimistes et médecins.

      #privatisation #aliénation #lutte_des_classes #capitalisme #iatrocratie

    • Je ne sais pas trop ce que c’est que catho-libéral, mais que Ivan Illich ait un soubassement mystique dans son approche de la maladie (et de la guérison) semble logique et probable. Moi ce que j’aime beaucoup chez lui, c’est que sous une apparence radicale (stop à l’école), il y a beaucoup de nuance dans sa pensée qui échappe résolument aux raccourcis (il vaudrait mieux dire par ex si on veut raccourcir : trop d’école tue l’école, trop de vitesse tue la vitesse, etc.). L’arbitrage intime « à quel moment je continue les soins, à quel moment je les arrête ? » est tellement intime, à la confluence de notre instinct de survie, de notre quête de sens (ou perte), de notre appétit social (ou désappétit), de l’arbitrage personnel entre qualité et quantité de vie... J’ai bien peur que la réflexion théorique prenne peu de temps à interroger en profondeur les motivations subtiles de celleux qui à un moment donné choisissent de ne plus se soigner. La dernière fois que je suis passé à l’hosto, on m’a mis un code barre au poignet et la suite ressemblait joliment à un parfait process industriel. Pour un petit passage en ambulatoire, j’ai fait le dos rond, mais pour ceux qui sont abonnés, je peux comprendre qu’on aspire à une autre dimension de vie, fut-elle plus courte.
      Pas sûr qu’Illich ait été jésuite. Mais attaché à l’exercice de la liberté par le discernement intérieur, c’est sûr. Et puis on ne peut pas lui reprocher de ne pas s’être appliqué à lui-même ses idées, ça change de pas mal d’autres. Je l’admire pas mal pour ça. En tous cas merci pour ce partage d’un texte que je ne connaissais pas.

  • « Faire du brevet l’examen de l’entrée en seconde, c’est la fin programmée du collège unique », Claude Lelièvre

    Invité à préciser ce qu’il entendait par « libéralisme avancé », le président de la République Valéry Giscard d’Estaing (« VGE ») déclarait, sur RTL, le 20 mai 1975 : « Il y a dans la pensée de gauche des éléments positifs importants dont je compte bien m’inspirer ; ce qui fait que, dans l’action libérale avancée, il y a beaucoup d’idées de gauche qui doivent être mises en œuvre. »

    Quelques-unes d’entre elles ont alors défrayé la chronique : création d’un secrétariat à la condition féminine, loi Veil sur l’IVG, abaissement de l’âge de la majorité à 18 ans, regroupement familial pour les immigrés, collège unique.

    On aurait pu penser qu’avec son antienne du « en même temps », la présidence d’Emmanuel Macron s’inscrirait dans cette filiation. On voit clairement qu’il n’en est rien. La loi Veil sur l’IVG a été adoptée avec l’appui de l’ensemble des députés de gauche le 20 décembre 1974 et une minorité de parlementaires de droite.

    A contrario, la récente loi sur l’immigration a été adoptée avec l’appui de l’ensemble des députés du Rassemblement national. Par ailleurs, Michelle Perrot, la grande spécialiste de l’histoire des femmes, a pu se dire « scandalisée » par les propos d’Emmanuel Macron concernant l’affaire Depardieu.

    Rupture avec la « tradition républicaine »

    La conception du « collège unique » est une version française de l’« école de base » suédoise (sociale-démocrate), de la « comprehensive school » (travailliste), de la « Gesamtschule » (sociale-démocrate). Dans le cadre du « libéralisme avancé », le collège unique a été voulu et porté personnellement par Valéry Giscard d’Estaing, mais a rencontré de nombreuses oppositions, en particulier dans son propre camp politique. Encore en octobre 1991, Alain Juppé (alors secrétaire général du RPR) proclamait qu’il fallait « casser le collège unique ». Mais, dans son livre paru en vue de la campagne présidentielle de 2017, il ne prônait plus que quelques aménagements.

    Marine Le Pen, elle, a proposé dans son programme pour l’élection présidentielle de 2022 une arme de « destruction massive » afin d’en finir avec le collège unique : « Le diplôme national du brevet deviendra un examen d’orientation post-troisième. » L’ex-ministre de l’éducation nationale, Gabriel Attal, a repris pour l’essentiel cette prescription en annonçant que le brevet serait désormais une condition nécessaire pour entrer en seconde (générale et/ou technologique ?), ce qu’il n’a jamais été jusque-là. Faire du brevet l’examen de l’entrée en seconde, c’est choisir sans appel que le collège doit être une propédeutique au lycée, et non pas la deuxième phase d’une instruction obligatoire (pour tous).

    C’est la fin programmée du collège unique et de son sens originel initié dans le cadre du libéralisme « avancé ». « VGE » avait été très net, en 2001 : « Le débat doit se concentrer sur cette question : quels savoirs donner à cet ensemble de jeunes qui constituent un acquis culturel commun ? On n’a guère avancé depuis vingt-cinq ans. Au lieu d’avoir rabattu tout l’enseignement des collèges vers l’enseignement général, les rapprochant des classes de la 6e à la 3e des lycées d’autrefois, en un peu dégradé, il aurait mieux valu en faire une nouvelle étape de la construction du cycle scolaire. »

    Le renoncement aux ambitions portées par le libéralisme « avancé » dans certains domaines peut parfois aller plus loin et rompre non seulement avec le « libéralisme avancé » mais même avec la simple « tradition républicaine ». On peut en prendre pour exemple significatif la volonté réitérée constamment ces derniers mois par l’ex-ministre de l’éducation nationale d’aller vers une forte « labellisation » ministérielle des manuels scolaires.

    Le choix des manuels scolaires, question vive

    La question du choix des manuels scolaires a été une question vive lors de l’instauration de l’école républicaine et laïque, sous la IIIe République. Le 6 novembre 1879, le directeur de l’enseignement primaire, Ferdinand Buisson, dans une note adressée à Jules Ferry, indique qu’« il y aurait de graves inconvénients à imposer aux maîtres leurs instruments d’enseignement » et qu’« il n’y en a aucun à leur laisser librement indiquer ce qu’ils préfèrent ».

    En conséquence, Jules Ferry signe, le 16 juin 1880, un arrêté qui fait largement appel au concours des maîtres et il souligne que « cet examen en commun deviendra un des moyens les plus efficaces pour accoutumer les enseignants à prendre eux-mêmes l’initiative, la responsabilité et la direction des réformes dont leur enseignement est susceptible ». Le 13 octobre 1881, une circulaire établit, pour les professeurs de collèges et lycées, des réunions mensuelles en leur confiant le choix des livres de classe.

    L’école républicaine instituée sous la IIIe République s’est ainsi distinguée nettement de ce qui l’a précédée et de ce qui l’a suivie dans ce domaine. Par exemple, François Guizot, ministre de l’instruction publique en 1833, a fait paraître des manuels scolaires officiels dans les cinq matières principales de l’école primaire. Et, dès l’arrivée de Philippe Pétain au pouvoir, un décret du 21 août 1940 a mis un terme à l’attitude libérale qui avait prévalu : ce décret ne traite plus de la liste « des livres propres à être mis en usage » mais de celle « des livres dont l’usage est exclusivement autorisé ».

    A la Libération, le 9 août 1944, une ordonnance annule « tous les actes relatifs à l’interdiction de livres scolaires ou instituant des commissions à l’effet d’interdire certains livres ».

    En miroir, on peut rappeler la réponse du ministre de l’éducation nationale Alain Savary à une question écrite de parlementaires en avril 1984 à propos d’un manuel incriminé : « Le ministre ne dispose pas du pouvoir d’injonction lui permettant de faire retirer ni même de faire amender un ouvrage. Il n’exerce aucun contrôle a priori sur le contenu des manuels scolaires et il n’a pas l’intention de modifier la politique traditionnellement suivie à cet égard. Il n’existe pas de manuels officiels, pas plus qu’il n’existe de manuels recommandés ou agréés par le ministère de l’éducation nationale. Il y a eu dans le passé des tentatives allant dans ce sens, avec risques de censure. »

    Oui, dans bien des domaines, on est désormais loin de l’horizon d’un certain libéralisme « avancé » qui se voulait « moderniste » : ce qui se profile, c’est presque sans fard un libéralisme « d’attardés » plus ou moins assumé.

    Claude Lelièvre est l’auteur de L’Ecole d’aujourd’hui à la lumière de l’histoire (Odile Jacob, 2021).

    https://www.lemonde.fr/education/article/2024/01/16/faire-du-brevet-l-examen-de-l-entree-en-seconde-c-est-la-fin-programmee-du-c

    #école #BEPC #collège

    • « Si le récit égalitaire perdure, l’Etat organise une forme d’optimisation scolaire », Laurent Frajerman
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/16/si-le-recit-egalitaire-perdure-l-etat-organise-une-forme-d-optimisation-scol

      L’ancien ministre Gabriel Attal avait annoncé, en novembre 2023, avant sa nomination comme premier ministre le 9 janvier, un important train de mesures pour réformer l’éducation nationale, incluant d’aborder la « question du tabou du #redoublement » et de créer des #groupes_de_niveau au collège. Au regard des enquêtes internationales, personne ne conteste plus la baisse du niveau des #élèves français, même de ceux qui figurent parmi les meilleurs.

      L’ex-ministre en avait conclu que l’#enseignement doit se montrer plus exigeant, ce qui correspond à un sentiment très majoritaire. Outre les menaces qu’elles font peser sur la liberté pédagogique, on peut douter que les mesures soient à la hauteur de l’enjeu. Toutefois, ces critiques ne peuvent dissimuler que cela fait plus de dix ans que la dynamique positive qui a démocratisé l’école française a disparu. La panne du modèle actuel, miné par la #ségrégation_sociale et des cures d’#austérité à répétition, impose des changements. Tout l’enjeu étant de savoir si c’est pour revenir aux années 1950 ou pour relancer sa démocratisation.

      Les politiques éducatives menées depuis le général de Gaulle œuvraient pour la scolarisation de tous les élèves du même âge dans une structure identique, dans l’objectif de leur délivrer le même enseignement. En conséquence, les classes ont été marquées par une hétérogénéité croissante, avec son corollaire : une baisse d’exigence, afin de faciliter l’accès de tous les élèves aux anciennes filières élitistes.

      Avec succès, puisque l’#accès_aux_études a été considérablement élargi. Cela s’accompagne du passage presque automatique en classe supérieure. A la fin des années 1960, le redoublement constituait la règle : un tiers des élèves redoublait la classe de CP, contre 1,3 % aujourd’hui. En 2021, seulement 12 % des élèves arrivaient en seconde avec du retard. Devenu résiduel, le redoublement a changé de nature, ne concernant plus que des élèves en forte difficulté, qu’elle soit structurelle ou conjoncturelle.

      Classes moyennes supérieures

      Les enseignants affichent leur scepticisme. Ils ne considèrent pas le redoublement comme une recette miracle, car il peut générer ennui et découragement. Toutefois, ils se trouvent démunis devant l’écart grandissant entre les meilleurs élèves, qu’il faut stimuler, et ceux qui cumulent les difficultés de compréhension. Ils constatent que plus les années de scolarité passent, plus l’échec s’enkyste, moins la notion de travail scolaire ne revêt de sens, générant quelquefois une attitude perturbatrice.

      Gabriel Attal en a tiré d’ailleurs argument pour dénoncer l’absurdité de cette situation et la souffrance qu’elle génère pour les élèves. Nombre d’enseignants vivent une situation d’autant plus ingérable que, paradoxalement, si l’affichage est homogène, le rêve de l’école commune s’éloigne.

      Jusque-là, la sociologie de l’éducation dénonçait les limites de cette politique de massification. Les inégalités sociales étant structurelles, le système est d’abord soumis aux effets de la #ségrégation-spatiale. Quoi de commun entre un collège en éducation prioritaire et un autre situé en centre-ville d’une métropole ?

      Quatre types d’école cohabitent, donc : l’#école_publique normale, celle en #éducation_prioritaire, l’école publique élitiste, et l’#école_privée. Aujourd’hui, avec le développement d’un #marché_scolaire, nous vivons une nouvelle phase. L’Etat aggrave la fracture existante en créant des établissements dérogatoires et de nouvelles #filières_élitistes sélectionnant par les langues, critère socialement discriminant. Pire, il subventionne massivement sa propre concurrence, l’enseignement privé.

      Le privé accueille de plus en plus d’élèves des milieux favorisés, au détriment de la mixité sociale. Les difficultés se concentrent alors dans l’école publique « normale ». Seule à supporter réellement les contraintes de la démocratisation, celle-ci n’en est que plus répulsive pour les classes moyennes et supérieures, générant un terrible cercle vicieux. Si le récit égalitaire perdure, l’Etat organise en réalité une forme d’#optimisation_scolaire au détriment de ceux qui n’ont pas d’échappatoire.

      Depuis une quinzaine d’années, les enquêtes internationales nous alertent sur l’aggravation du poids des #inégalités_sociales dans les résultats scolaires. Ce constat est dissimulé par l’invisibilisation de la #compétition. D’un côté, les notes ont été remplacées par les compétences, de l’autre, elles connaissent une inflation qui, malheureusement, ne reflète pas une hausse du niveau réel. En 2022, 59 % des bacheliers ont obtenu une mention. Ils étaient moins de 25 % en 1997… Le flou qui en résulte bénéficie aux familles les plus informées sur la règle du jeu, ou capables de payer coachs et cours particuliers.

      Politique éducative « discount »

      Le second vice de fabrication de la démocratisation scolaire est son caractère « discount ». Par exemple, l’argent économisé par la quasi-suppression du redoublement n’a guère été réinvesti dans des dispositifs permettant d’épauler les élèves en difficulté. Autrefois, les enseignants encadraient les élèves dans leurs exercices et l’apprentissage du cours en dehors des heures de classe. Aujourd’hui, ce type de travail est généralement confié à des étudiants bénévoles ou à des animateurs ou surveillants peu qualifiés. Même dans le dispositif « Devoirs faits » en collège, la présence d’enseignants est optionnelle.

      De nombreux choix proviennent de la #rationalisation_budgétaire : chasse aux options, suppression progressive des dédoublements de classe. Par exemple, en 2010, un élève de 1re L avait obligatoirement six heures de cours en demi-groupe (en français, langues, éducation civique, mathématiques et sciences). Aujourd’hui, les établissements ont toujours la latitude de créer de tels groupes, mais en prenant dans une enveloppe globale qui se réduit d’année en année et sans qu’un nombre maximum d’élèves ne soit prévu.
      Le pouvoir d’achat des #enseignants a baissé d’environ 20 %, source d’économie massive sur les salaires. Les effets commencent seulement à en être perçus : crise du recrutement, hausse exponentielle des démissions et professeurs en place démotivés par le déclassement de leur métier. Les promoteurs de cette politique leur préfèrent des enseignants précaires et sous-qualifiés, sommés de suivre les injonctions pédagogiques du moment. Remarquons que ces #contractuels sont nettement plus nombreux dans les établissements difficiles de l’enseignement public…

      Depuis 2002, les gouvernements de droite et de centre droit suppriment des postes d’enseignant. Malgré le redressement opéré sous François Hollande, le solde reste négatif, avec moins 36 500 postes. Le second degré a été particulièrement affecté, avec un solde de moins 54 700 postes, au nom de la priorité au primaire. Un maillon essentiel de la chaîne éducative a donc été fragilisé, alors que c’est le lieu de maturation des contradictions du système. Quel sens cela a-t-il d’habituer un élève de REP + à des classes de quinze élèves pour, devenu adolescent, le mettre dans une classe de vingt-cinq au collège ? Ces politiques de ciblage, censées produire des résultats visibles à un moindre coût, créent souvent inégalités et incohérences.

      Aujourd’hui, la France dépense 1 point de moins du PIB pour l’éducation qu’en 1995. Si on appliquait aujourd’hui les ratios en usage à l’époque, le budget consacré à l’avenir du pays augmenterait de 24 milliards d’euros, dont 15,5 milliards d’euros dépensés par l’Etat. Ce sous-investissement chronique se paie par la crise de notre #système_scolaire. Un débat sans arguments d’autorité s’impose donc, sous peine que les idéaux généreux et les politiques cyniques aboutissent définitivement à une école à plusieurs vitesses, dans laquelle les #classes_populaires seront assignées à un enseignement public dégradé.

      Laurent Fajermann est professeur agrégé d’histoire au lycée Lamartine, sociologue, chercheur associé au Centre de recherches sur les liens sociaux, du CNRS

    • Philippe Mangeot (philippe.duke ) sur Instagram :

      Lecture effarée du rapport de l’enquête administrative de l’Inspection générale sur le collège Stanislas, que publie dans son intégralité @mediapart. Toutes les informations qui circulaient sur les pratiques de cet établissement privé sous contrat sont corroborées et objectivées : contournement de la loi et de Parcoursup, pédagogie brutale et assumée comme telle, programmes non respectés, enseignement sexiste et homophobe..

      À ce stade, le scandale n’est pas seulement que la ministre de l’Éducation nationale ait choisi d’y inscrire ses enfants, contournant l’enseignement public au profit d’une école privée où se cultive l’entre-soi. Il est que le ministère dirigé à l’époque par Gabriel Attal a mis ce rapport sous le boisseau depuis qu’il lui a été rendu en juillet dernier, refusant de le rendre public.

      Mais il est également que cette institution privée, qui viole en toute impunité le contrat qui la lie à l’État, est mieux dotée, sur fonds publics, que la quasi-totalité des établissements scolaires publics de Paris, comme l’a révélé en janvier dernier une enquête de @lemondefr. L’argent public favorise Stanislas, c’est-à-dire les familles les plus fortunées : les « trois petits garçons » de Madame Oudéa-Castéra ont coûté plus cher à l’État.que les élèves du public.

      L’anagramme de Stanislas dit une vérité : la complaïisäncé : des pouvoirs publics à l’égard d’un établissement qui devrait n’avoir aucune place dans « l’École de la République », comme dit la ministre, nous salit tous et toutes.

  • Affaire Oudéa-Castéra : Mediapart publie le rapport sur Stanislas caché par les ministres | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/160124/affaire-oudea-castera-mediapart-publie-le-rapport-sur-stanislas-cache-par-


    Depuis août, le ministère de l’éducation refuse de rendre publique l’enquête administrative visant l’établissement privé catholique où sont scolarisés les enfants de la ministre. Discours homophobes, sexisme, humiliations… : le rapport demande à Stanislas de se mettre en conformité avec la loi. 
    https://justpaste.it/ata60

    • En guise de conclusion, les inspecteurs livrent de nombreuses recommandations pour que l’établissement se mette en conformité avec la loi. Et notamment :
      *Faire respecter le caractère facultatif de l’instruction religieuse.
      Renforcer le contrôle sur les intervenants dans la catéchèse afin de prévenir les propos contraires aux valeurs de la République, voire pénalement répréhensibles.
      *Demander aux corps d’inspection de contrôler l’effectivité des enseignements de sciences de la vie et de la terre (SVT) en lien avec l’éducation à la sexualité, en particulier ceux relatifs à la prévention des risques (grossesses non désirées, IST, VIH/sida) afin de ne pas porter atteinte à la santé des élèves.
      *Demander aux corps d’inspection de contrôler l’effectivité de l’information et de l’éducation à la sexualité prévue par l’article L 312-16 du Code de l’éducation.
      *Travailler à une évolution du projet éducatif et des règles de vie, notamment relatives à la tenue vestimentaire, afin de renforcer, conformément aux valeurs de la République, l’égalité filles-garçons et le respect des différences au sein de l’établissement...

    • La Mairie de Paris suspend son financement à l’établissement privé Stanislas
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/01/17/la-mairie-de-paris-suspend-son-financement-a-l-etablissement-prive-stanislas

      « dans l’attente des clarifications requises de la part de l’Etat »

      [...] La Ville de Paris a versé, au titre de l’année scolaire 2022-2023, pour les écoles maternelle, élémentaire et le collège de l’établissement Stanislas un montant de 1 373 905 euros, correspondant aux 483 élèves scolarisés en école maternelle et élémentaire, et aux 1 329 élèves au collège, dans le cadre des règles sur le financement des établissements privés sous contrat par les collectivités.

      La Ville de #Paris paie 758e/an pour chaque enfant de riche scolarisé là, sachant que 37% des élèves parisiens sont scolarisés dans le privé.
      #école_privée #école

    • Effectivement, ce sont des images formidables de solidarité internationale, comme celles qui nous viennent, par exemple, d’Algérie ou du Maroc. On ne pourra pas dire que le génocide se perpétue dans l’indifférence et, même s’il ne s’agit pas de se bercer de trop d’illusions, les chefs d’État sont bien obligés de prendre en compte se qui se passe dans les rues de leurs pays.

      Ces manifestations massives, tout comme les campagnes de boycott peuvent jouer un rôle déterminant, surtout dans les pays du « Nord global », pour obtenir, à court terme, un cessez-le feu. Voilà pourquoi, plus qu’en Algérie ou au Maroc, la rue de Londres, de Paris, de Berlin ou de New-York aura peut être plus de poids pour obtenir ce cessez-le-feu.

      Quant à savoir ce qui se passera pour l’avenir du peuple de Palestine, le « jour d’après » cet hypothétique cessez-le-feu, tout le monde sait bien que c’est une autre affaire. Rien ne sera joué – à commencer par la sécurité des Israéliens – tant que le projet sioniste ne sera pas fondamentalement remis en cause en Israël et par les puissances impériales, en particulier aux USA, pour envisager la coexistences des populations sur ce territoire, dans un autre cadre. Autant dire que l’hypothèse semble aujourd’hui totalement inimaginable.

      Pour revenir aux images impressionnantes des manifestations londoniennes, on est bien obligé de les mettre en rapport avec ce qui se passe en France et notamment à Paris sur le même sujet. Même s’il ne s’agit pas se savoir qui a la plus belle ou qui fait la plus grande, force est de reconnaître que le contraste est pour le moins spectaculaire.

      Le comble du ridicule étant ce 6 janvier, quand dans un froid glacial nous nous sommes retrouvé·es à une poignée de manifestant·es, au pied de l’Opéra Bastille, pour terminer sous un kiosque de la place de la Nation, encadré·es par une rangée de flics, afin de ne pas perturber la circulation. La manif de samedi dernier (13 janvier) à Paris était plus consistante mais on est quand même loin du compte pour imposer en France la nécessité immédiate d’un cessez-le feu à Gaza.

      L’article référencé ci-dessous (16 décembre), donne quelques pistes d’explication mais j’avoue humblement que je peine quand même à comprendre pourquoi il semble impossible d’organiser en France la solidarité avec autant de force que dans d’autres pays.

      https://www.mediapart.fr/journal/politique/161223/la-solidarite-avec-la-palestine-sur-un-point-de-bascule

    • @cabou : Je suis comme toi, sans réelle explication par rapport à l’atonie française... J’ai relu l’article de Médiapart, avec ses arguments sans doute réels mais qui ne me paraissent pas embrasser la totalité des causes possibles. Je ne sais pas si quelqu’un sur Seenthis a de meilleures explications...

    • D’autant qu’en Angleterre, la presse baigne dans la même propagande qu’en France :
      https://www.arretsurimages.net/chroniques/sur-le-gril/israel-gaza-plaidoirie-sudafricaine-et-silence-mediatique

      À l’international, on observe une tendance semblable à celle de Franceinfo : la plaidoirie sud-africaine n’a pas été retransmise sur la BBC ou SkyNews le 11. Mais celle d’Israël a fait l’objet d’une diffusion en direct sur les deux chaînes. Le monde - en tout cas, le monde médiatique occidental - ferme les yeux, ou n’en ouvre qu’un.

    • J’ai participé à plusieurs des manifestations à Paris : celle fin novembre était assez nombreuse (20.000 ?) mais elle a été totalement ignorée des médias qui le lendemain se sont focalisés sur la grande manifestation contre l’antisémitisme : est ce que cela ne contribue à l’invisibilisation et produit in fine de la démotivation ? Par ailleurs, si la sociologie des participants inclue c’est beaucoup de personnes issues de l’immigration, il y aussi beaucoup de jeunes, étudiants etc. Ce samedi à Paris, de République à Barbès, ce n’était pas ridicule sans être massif (quelques milliers ?) mais évidemment très loin des dizaines de milliers ++ à Londres et ailleurs

    • Comme le dit l’une des personnes dans ce film, l’Angleterre est historiquement liée à la colonisation de la Palestine et à la création de l’État d’Israël. C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles la mobilisation pour la Palestine atteint ce niveau là-bas.

      J’étais ce soir à la rencontre organisée par l’UCL, qui s’est déroulée ce soir à la librairie de Beaux Lendemains, à Bagnolet, en présence d’Alain Gresh et d’Hélène Aldeguer, à propos de leur livre Un chant d’Amour.

      Selon les participants, l’explication du faible niveau de mobilisation en France serait à trouver, d’une part, dans le contexte de montée du racisme et de répression violente du mouvement social et, d’autre part, dans l’intense propagande réactionnaire du pouvoir assimilant la solidarité avec la Palestine à de l’antisémitisme. Pourquoi pas ?

  • Bâtir Aussi : rêver au-delà de l’Antémonde
    https://friction-magazine.fr/batir-aussi-rever-plus-loin-que-lantemonde

    En ce mois de Mai 2018, alors que la grève dure, que le mécontentement se propage, que le Black Bloc crame des Mac Do et que des dizaines de lycéens sont en GAV, un livre assez inattendu (mais tombant drôlement à pic) vient de paraître : Bâtir Aussi, Fragments d’un monde révolutionné. A l’origine de l’ouvrage, Les Ateliers de l’Antémonde, un mystérieux collectif d’auteurEs composé « de personnes engagées dans les luttes anticapitalistes et féministes » et « passionnées par la bidouille ». 

    « Les haraks dessinent leur quotidien en fonction de leurs ressources et de leurs rêves. »

    Le livre est en fait un recueil de nouvelles d’anticipation qui partent d’une même hypothèse : en 2011, les printemps arabes ont inspiré d’autres révoltes et le Monde tout entier s’embrase — bienvenue à l’ère de l’Haraka, c’est à dire après ‘l’Antémonde’. « Les productions industrielles, les Etats et toutes les hiérarchies vacillent » explique la quatrième de couv. Un peu partout, des militants autonomistes tiennent tête à la police et aux fachos qui tentent de rétablir l’ordre.

    En 2012 mais aussi, surtout, en 2021, le collectif nous raconte donc sept courtes histoires : sept fragments d’un futur possible qui laissent imaginer à quoi ressemblerait le Monde si, demain, la ZAD se propageait partout. 

    Voir au-delà de notre Antémonde mais, surtout, plus loin que la simple révolte : tel est l’objectif des auteurEs qui tentent ici d’imaginer les nouveaux gestes quotidiens, les routines collectives, les questionnements émergents comme les problèmes à résoudre après ce soulèvement global : « Comment vivre avec l’héritage de l’Antémonde ? Comment faire le tri des objets et des savoirs d’une époque aux traces tenaces ? Les haraks dessinent leur quotidien en fonction de leurs ressources et de leurs rêves. »

    https://antemonde.org

    #science-fiction #anticipation #littérature #zad #communes #vivre_la_commune #Les_Ateliers_de_l’Antémonde

    • 2011, les printemps arabes ont donné le ton à d’autres révoltes. Un mouvement mondialisé s’étend, c’est l’Haraka. Les productions industrielles, les États et toutes les hiérarchies vacillent. Des dynamiques populaires s’entrechoquent pour répondre aux nécessités de la survie et dessiner un futur habitable.

      2021, les communes libres s’épanouissent sur les ruines du système. Comment vivre avec l’héritage de l’Antémonde ? Comment faire le tri des objets et des savoirs d’une époque aux traces tenaces ? Les haraks dessinent leur quotidien en fonction de leurs ressources et de leurs rêves. Des dynamos aux rites funéraires, des lave-linge aux assemblées, ces nouvelles d’anticipation politique racontent non pas une utopie parachutée, hors-sol, mais des routines collectives qui se confrontent à la matière, à ce qui résiste dans les têtes, bâtissant un monde qui s’espère sans dominations.

  • Retour sur insurrection. Sur l’interprétation de Mai 68 (I)
    https://blogs.mediapart.fr/etienne-balibar/blog/140119/retour-sur-insurrection-sur-l-interpretation-de-mai-68-i-0

    Par Etienne Balibar

    Les notes que je propose ici sont trop longues, trop compliquées pour communiquer au lecteur une idée simple et claire de ce qu’on doit placer sous ce nom qui est une date : « Mai 68 ». Et pourtant elles seront encore trop courtes pour apporter les preuves de tout ce que je vais devoir avancer. J’ai toujours pensé que « Mai 68 » désignait en effet un événement, mais je n’ai jamais cru qu’il fût possible d’en donner une description ou une définition unifiée. Cela ne correspondait pas à mon expérience. Je vois cet événement comme une conjonction dont, à mesure que le temps passe, et que les mythes s’accumulent, il est de plus en plus important de restituer les composantes dans leur complexité réelle.

    Et même, tout en rassemblant pour la circonstance mes souvenirs et mes réflexions, en les comparant avec ce que d’autres ont proposé, j’en suis venu à la conclusion que ce qu’il fallait avant tout exposer était cette complexité même, de telle façon, sans doute, que certaines lignes de force deviennent perceptibles, mais sans imposer à la multiplicité des composantes le tracé d’une « diagonale » permettant de les hiérarchiser. Une telle diagonale ne pourrait procéder que d’une décision à la fois réductrice et arbitraire. Je proposerai donc simplement, suivant un certain ordre, mais de façon intrinsèquement discontinue, une série de sept considérations.

    Le plan de publication est le suivant :
    (I) Historicité de l’événement – Révolution, contre-révolution – Mouvements décalés : une synthèse disjonctive ;
    (II) Centralité du système scolaire ? – Crise de l’Etat national-social ;
    (III) Qu’est-ce que la « politique » ? – Une « révolution culturelle » ?

    #Mai_68 #insurrection #Balibar

  • L’empreinte étatique de la mémoire
    https://laviedesidees.fr/Gensburger-Qui-pose-les-questions-memorielles

    Sarah Gensburger bat en brèche l’idée d’un État dépassé par la fragmentation et la multiplication des demandes mémorielles. L’État est le principal créateur de nos cadres mémoriels, les utilisant même comme un puissant moyen de réaffirmation de sa légitimité. À propos de : Sarah Gensburger, Qui pose les questions mémorielles ?, CNRS Éditions

    #Histoire #mémoire
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240115_gensburger.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240115_gensburger.docx

    • Qui pose les questions mémorielles

      Depuis plusieurs décennies, le langage de la «  mémoire  » est devenu dominant pour dire les rapports sociaux au passé. «  Demandes sociales de mémoire  » et «  concurrence des mémoires  » se seraient substituées au grand récit national, plaçant les pouvoirs publics en position d’arbitre entre des aspirations éclatées et rivales.
      C’est cette vision convenue, source de tant d’articles, de rapports ou d’essais, que cette vaste enquête entend mettre à l’épreuve des faits. Qui pose les questions mémorielles ?
      Quels sont les acteurs et les actrices qui parlent de «  mémoire  » au sein de l’État ou en relation avec lui ? Depuis quand, à propos de quoi et de quelles manières ? Avec quelles réalisations concrètes et quels résultats ?
      Multipliant les points d’observation, ce travail retrace l’émergence de la mémoire comme secteur d’action publique, ouvre la «  boîte noire  » de l’État, interroge la constitution et le développement des associations mémorielles, étudie les pratiques mises en œuvre à différents niveaux et questionne leurs effets attendus – ou inattendus. Autant de facettes d’une véritable sociologie de la mémoire qui prend le contrepied de nombre d’évidences partagées.

      https://www.cnrseditions.fr/catalogue/histoire/qui-pose-les-questions-memorielles
      #Etat #mémoire #livre #Sarah_Gensburger

  • « C’est le temps des chasses aux sorcières en Israël » : un enseignant maintenu à l’isolement pour un post s’inquiétant des morts de Gaza
    Posted on janvier 14, 2024 | Emma Graham-Harrison| Quique Kierszenbaum | The Guardian | Traduction CG pour l’AURDIP

    Meir Baruchin, qui a été licencié et emprisonné pour avoir critiqué l’armée, dit que beaucoup de ceux qui sont d’accord avec lui ont peur de le dire publiquement


    https://aurdip.org/cest-le-temps-des-chasses-aux-sorcieres-en-israel-un-enseignant-maintenu-a-l

    L’accusation improbable d’une intention de trahison a envoyé début novembre Meir Baruchin, un enseignant d’histoire et d’éducation civique aux cheveux gris et à la voix douce, dans l’aile des cellules d’isolement de la tristement célèbre prison de l’« Enceinte russe » à Jérusalem.

    Les preuves rassemblées par la police qui l’a menotté, puis a roulé jusqu’à son appartement et l’a mis à sac sous ses yeux, consistaient en une série de posts de lui sur Facebook, déplorant les civils tués à Gaza, critiquant l’armée israélienne et mettant en garde contre les guerres de vengeance.

    « Des images horribles affluent de Gaza. Des familles entières sont effacées. Je ne mets d’habitude pas en ligne des photos comme celle-ci, mais regardez ce que nous faisons par vengeance », disait un message du 8 octobre, sous une photo de la famille d’Abu Daqqa, tuée dans l’une des premières frappes aériennes sur Gaza. « Quiconque pense que ceci est justifié à cause de ce qui est arrivé hier devrait se désabonner. Je demande à tous les autres de faire tout ce qui est possible pour arrêter cette folie. Arrêtons-la maintenant. Pas plus tard, maintenant !!! »

    C’était le lendemain de l’attaque horrible du Hamas sur Israël, quand le pays titubait devant le massacre de 1200 personnes et le kidnapping de plus de 240.

    Il savait que son opinion sur l’armée israélienne était controversée ; à une époque moins instable, trois ans plus tôt, des critiques similaires lui avaient coûté un poste d’enseignant dans la ville de Rishon LeZion, près de Tel Aviv. Il pensait aussi qu’exprimer cette opinion était d’une importance vitale à un moment où le pays décidait de la manière de réagir.

    « La plupart des Israéliens ne savent pas grand chose sur les Palestiniens. Ils pensent que ce sont des terroristes, tous, ou de vagues images sans nom, sans visage, sans famille, sans maison, sans espoirs », a dit Baruchin. « Ce que j’essaie de faire dans mes posts est de présenter les Palestiniens comme des êtres humains ». (...)

  • Rima Hassan, la Palestine chevillée au cœur
    https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2024/01/14/rima-hassan-la-palestine-chevillee-au-c-ur_6210708_4500055.html

    La juriste franco-palestinienne de 31 ans a imposé une voix nouvelle dans les médias français, portant la colère désabusée de son peuple. Menacée de mort après ses prises de parole à la suite des attaques du Hamas du 7 octobre, elle a quitté la France pour la Syrie, où elle est née, et la Jordanie, où elle prépare un livre sur son engagement.

    Son irruption, il y a un an, dans le petit monde des intervenants sur le conflit israélo-palestinien ayant les faveurs des médias avait fait grand bruit. Ses deux participations à « C ce soir », l’émission de débat de France 5, les 30 janvier et 28 février 2023, avaient bousculé un exercice d’ordinaire très codifié. « Au nom de quoi je ne pourrais pas revenir dans le village de mes grands-parents ? », s’était exclamée la juriste franco-palestinienne Rima Hassan, 31 ans, petite-fille de Palestiniens chassés de leur terre à la création d’Israël, en 1948.

    Face à des universitaires reconnus, parfois du double de son âge, la jeune femme avait brandi des mots peu entendus sur les plateaux télévisés, notamment celui d’« apartheid », le terme utilisé par les ONG de défense des droits humains pour décrire le régime d’oppression auquel les Palestiniens sont soumis. « Il faut arrêter de nous mentir, il n’y aura pas d’Etat palestinien », avait-elle martelé, en plaidant, à la place, pour la création d’un Etat binational.

    Avec sa longue chevelure de jais et sa force tranquille, Rima Hassan a donné un visage à la colère des Palestiniens, à leur défiance croissante vis-à-vis de la solution à deux Etats, à leur rejet de la sémantique d’Oslo, ce ­processus de paix failli, qui a servi, à leurs yeux, de paravent à la perpétuation de l’occupation israélienne. En deux apparitions médiatiques, la présidente de l’Observatoire des camps de réfugiés, une ONG dont elle est la fondatrice, a été érigée dans les milieux propalestiniens au rang de « nouvelle Leïla Shahid », ­l’ex-déléguée générale de la Palestine en France, une oratrice de choc, longtemps prisée des médias parisiens.

    Alors quand les bombes ont recommencé à pleuvoir sur Gaza, dans la foulée du massacre commis par les commandos du Hamas, le 7 octobre, on s’attendait à ce que Rima Hassan remonte au créneau. Mais après deux interventions dans Mediapart et Blast, qui lui ont valu une cascade de menaces de mort par SMS et messages vocaux (« on va t’attraper salope, regarde bien derrière toi quand tu marches », « on va te violer et te brûler vive »), la diplômée en droit international a pris la tangente.

    Volonté de préserver sa liberté de parole

    Elle n’a pas renouvelé son contrat avec la Cour nationale du droit d’asile, où elle travaillait depuis six ans. Elle a renoncé au poste qu’Amnesty International lui offrait, comme chargée de plaidoyer sur les questions de migration, de peur que cette fonction restreigne sa liberté de parole sur la question palestinienne. Et elle a pris un billet d’avion. Direction la Syrie, plus précisément le camp de réfugiés palestiniens de Nayrab, près d’Alep, où elle est née et a vécu ses dix premières années.

    « Dans cette période horrible, j’ai ressenti le besoin d’être proche de mon peuple. On vit ce qui se passe à Gaza comme une ­deuxième Nakba », dit-elle, en référence à l’exode forcé de sept cent cinquante mille Palestiniens en 1948, lors de la création d’Israël. Son départ constituait aussi un acte de protestation contre le climat qui prévalait alors sur la scène politico-médiatique française, marquée par les déclarations de « soutien inconditionnel » à Israël et les soupçons de sympathie pro-Hamas, voire d’antisémitisme, auxquels s’exposaient alors ceux critiquant cette ligne, comme l’ancien premier ministre Dominique de Villepin.

    « J’en veux à nos responsables politiques de n’avoir pas su créer des espaces d’empathie collective à l’égard des victimes des deux camps », déclare la trentenaire qui, dès le 7 octobre, a écrit sur son compte X (ex-Twitter) qu’il est « moralement inacceptable de se réjouir de la mort de civils ». « Très vite, le système politico-médiatique nous a demandé de transformer notre empathie naturelle en un soutien à l’Etat d’Israël, poursuit-elle. Sur les ­plateaux télé, on en est même arrivé à se demander si une vie palestinienne vaut une vie ­israélienne. C’était lunaire. »

    Premier acte militant à 15 ans

    Ce retour en Syrie, Rima Hassan l’a vécu comme une session de rattrapage. Car lorsqu’elle est arrivée en France, en 2002, dans le sillage de sa mère divorcée, installée comme cuisinière à Niort, la jeune fille a mis entre parenthèses son identité arabo-­palestinienne. « Il fallait survivre dans un nouvel environnement », raconte-t-elle. Le souvenir de son grand-père maternel, un communiste qui professait que « le retour en Palestine ne se fera pas grâce aux armes, mais grâce aux études », l’incite à se concentrer sur l’apprentissage de la langue et des codes de son pays d’adoption.

    Son premier acte militant, à l’âge de 15 ans, consiste à aller assister à une conférence sur le thème de la Palestine et du droit international à Poitiers. La découverte des conventions de Genève et des grandes résolutions de l’ONU constitue une révélation pour l’adolescente élevée dans un HLM tapissé de posters à la gloire de l’Intifada. « C’est tellement plus simple de s’inscrire dans le champ du droit plutôt que dans celui de l’idéologie », confie-t-elle.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Conflit israélo-palestinien : de l’espoir d’Oslo aux réalités d’Hébron

    Dans la foulée, elle se plonge dans des lectures, notamment la Lettre à un ami juif, de l’écrivain franco-palestinien Ibrahim Souss (Seuil, 1988), vibrant appel à la reconnaissance mutuelle. « J’ai pleuré tes morts, penche-toi sur les miens », implore l’auteur, qui revient alors de la visite d’un camp d’extermination nazi. Ce texte sur l’invisibilisation des Palestiniens éclaire la frustration qu’elle éprouve dans la relation avec son petit ami de l’époque, qui insiste pour la présenter comme « syrienne » à ses parents.

    En 2010, elle obtient la nationalité française. C’est un tournant. Elle réserve aussitôt un billet d’avion pour Tel-Aviv, avec une association propalestinienne (EuroPalestine), dans l’espoir de découvrir enfin la terre de ses aïeux. Mais, à l’aéroport Charles-de-Gaulle, elle est empêchée d’embarquer avec quelques autres militants de culture arabe. « Toute l’énergie que j’ai mobilisée depuis, c’est pour apaiser la colère que j’ai ressentie ce jour-là. »

    La « double peine » des Palestiniens de France

    En Syrie, pays où elle n’a pas pu rentrer pendant dix ans, en raison de la guerre civile qui l’a ravagé, Rima Hassan a renoué avec son père, un ex-mécano de l’armée de l’air syrienne, resté dans le camp de Nayrab. Tout en bataillant sur les réseaux sociaux, elle s’est attelée à la rédaction d’un livre sur son cheminement et son combat contre la « double peine » infligée selon elle aux Palestiniens de France : « On est des victimes et on doit chaque jour réexpliquer notre condition de victime à un monde qui est totalement sourd. »

    Bien que loin de Paris, l’experte en migrations, classée par le magazine Forbes parmi « les quarante femmes d’exception qui ont marqué l’année 2023 », a été ­rattrapée par l’onde de choc du 7 octobre. Une grande marque française qu’elle conseillait sur les enjeux d’insertion des réfugiés a suspendu son contrat pour quelques mois. Le groupe redoutait que son activisme sur Internet parasite le prudent silence auquel il s’est astreint sur les événements en Israël et à Gaza.

    Début décembre, après son séjour en Syrie et un passage au Liban, Rima Hassan a posé sa valise en Jordanie. En plus de son livre, elle planche sur une exposition de photos, des portraits de Palestiniens au visage masqué par un keffieh, qu’elle prend elle-même. Un jeu sur la dualité de ce morceau d’étoffe, vecteur autant d’affirmation que d’enfermement.

    « Etre réfugié, ça donne de la fierté, mais ça étouffe aussi, analyse-t-elle. Mes choix de vie ont été surdéterminés par cette identité. Je ne compte plus le nombre de soirées entre amis où j’ai été incapable de m’amuser tant mon esprit était accaparé par l’actualité. » Pour trouver l’inspiration, elle arpente les camps de réfugiés de la banlieue d’Amman, dans une quête entêtée de ses origines, une errance autour de la Palestine, le pays rêvé et interdit. Le retour en France n’est pas au programme. La relève de Leïla Shahid attendra.

  • « Le Conseil constitutionnel n’a jamais défendu les droits des étrangers », Danièle Lochak [Gisti]

    Que peut-on attendre de la saisine actuelle du Conseil constitutionnel à propos de la loi immigration ?

    Danièle Lochak : Il y a trois éléments à prendre en compte. D’abord un élément de contexte général : on ne peut pas attendre grand-chose du Conseil constitutionnel lorsqu’il s’agit des droits des étrangers. Historiquement, à quelques nuances et réserves d’interprétation près, il a toujours validé l’ensemble des mesures votées par le législateur et accompagné sans ciller toutes les évolutions restrictives en la matière.

    Ainsi en matière d’enfermement – ce qu’on appelle aujourd’hui la rétention – le Conseil constitutionnel a d’abord dit en 1980 que sa durée devait être brève et placée sous le contrôle du juge judiciaire, garant de la liberté individuelle. Mais la durée maximale de rétention a été progressivement étendue : de sept jours, elle est passée à dix en 1993, puis douze en 1998, puis 32 en 2003, puis 45 jours en 2011, et enfin, 90 jours en 2018 , sans que le Conseil constitutionnel y trouve à redire.

    Il a affirmé que la lutte contre l’immigration irrégulière participait de la sauvegarde de l’ordre public, dont il a fait un objectif à valeur constitutionnelle. On voit mal, dans ces conditions, comment des mesures qui ont pour objectif proclamé de lutter contre l’immigration irrégulière pourraient être arrêtées par le contrôle de constitutionnalité…

    Autre exemple : en 1993, lors de l’examen de la loi Pasqua, le Conseil constitutionnel a affirmé que les étrangers en situation régulière bénéficient du droit de mener une vie familiale normale. Mais une fois ce principe posé, il n’a censuré aucune mesure restreignant le droit au regroupement familial. Ainsi, même lorsqu’il a rappelé des principes et reconnu que les étrangers devaient bénéficier des garanties constitutionnelles, il a toujours trouvé des aménagements qui ont permis de valider les dispositions législatives restrictives.

    Le président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius a tancé le gouvernement, et rappelé que l’institution n’était pas « une chambre d’appel des choix du Parlement ». Le Conseil ne va-t-il pas se montrer plus sévère qu’à l’accoutumée ?

    D. L. : En effet, le deuxième élément qui change la donne est le contexte politique, avec un gouvernement qui annonce d’emblée que certaines dispositions sont contraires à la #Constitution et charge le Conseil constitutionnel de « nettoyer » la loi. C’est bien entendu grotesque : en élaborant la loi, les responsables politiques sont censés respecter la Constitution.

    Surtout, le Rassemblement national (#RN) s’est targué d’une « victoire idéologique ». C’est très habile de sa part. En réalité, voilà quarante ans que l’ombre portée du Front national (RN maintenant) pèse sur la politique d’immigration française. Depuis 1983 et l’élection partielle de Dreux où le #FN, allié à la droite, l’a emporté sur la liste de gauche menée par Françoise Gaspard, la droite court après l’extrême droite, et la gauche, de crainte de paraître laxiste, court après la droite sur les questions d’immigration.

    Hormis quelques lois, dont la loi de 1981 adoptée après l’arrivée de la gauche au pouvoir et celle de 1984 sur la carte de résident, ou encore la loi Joxe de 1989, la politique de la gauche n’a été qu’une suite de renoncements, maintenant l’objectif de « maîtrise des flux migratoires » et de lutte contre l’immigration irrégulière. Il n’y a que sur la nationalité qu’elle n’a jamais cédé.

    Cela étant, la revendication de victoire de la part du RN va probablement inciter le Conseil constitutionnel à invalider un plus grand nombre de dispositions de la loi que d’habitude, même si on ignore lesquelles.

    Dans la saisine du Conseil constitutionnel sont invoqués beaucoup de « cavaliers législatifs », des dispositions qui n’ont pas de rapport avec l’objet du texte. Le garant de la constitutionnalité de la loi va-t-il trouver là des arguments faciles pour censurer certaines dispositions ?

    D. L. : Oui, et c’est le troisième élément à prendre en considération dans les pronostics que l’on peut faire. La présence de nombreux cavaliers législatifs va faciliter la tâche du Conseil constitutionnel, car invalider une disposition pour des raisons procédurales est évidemment plus confortable que de se prononcer sur le fond. Le projet initial portait sur l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers. Or le texte final, « enrichi » d’une multitude d’amendements, est loin de se limiter à ces questions.

    Le Conseil constitutionnel peut très bien estimer que les dispositions sur la #nationalité, pour ne prendre que cet exemple, qui relèvent du Code civil, sont sans rapport avec l’objet du texte, et les invalider. Alors même qu’en 1993, il avait validé le retour à la manifestation de volonté pour acquérir la nationalité française à partir de 16 ans pour les enfants d’étrangers nés en France, mesure phare de la loi Pasqua1.

    Il peut aussi invoquer « l’incompétence négative », qui désigne le fait pour le Parlement de n’avoir pas précisé suffisamment les termes de certaines dispositions et laissé trop de latitude au gouvernement pour les mettre en œuvre, sans compter les dispositions qui sont manifestement inapplicables tellement elles sont mal conçues.

    Mais si les dispositions sont invalidées sur ce fondement, rien n’empêchera leur retour dans un prochain texte puisque le Conseil constitutionnel aura fait une critique sur la forme et ne se sera pas prononcé sur le fond. Et puis il faut être conscient que, même s’il invalide un plus grand nombre de dispositions que d’habitude, il restera encore suffisamment de mesures iniques qui rendront la vie impossible aux étrangers résidant en France, fût-ce en situation régulière et depuis de très longues années.

    Le Conseil constitutionnel a tout de même consacré le principe de fraternité en 2018, et mis fin – au moins partiellement – au #délit_de_solidarité_ qui punit le fait d’aider les exilés dans un but humanitaire.

    D. L. : Oui, c’est un exemple qu’on met souvent en avant. Le « délit de solidarité » – ce sont les militants qui l’ont nommé ainsi, bien sûr – punit l’aide à l’entrée, au séjour et à la circulation des étrangers en situation irrégulière sur le territoire français. A l’époque, les avocats du militant Cédric Herrou avaient posé une question prioritaire de constitutionnalité (#QPC) au Conseil constitutionnel en invoquant le principe de fraternité, qui figure dans la devise républicaine.

    Le Conseil constitutionnel a en effet consacré la valeur constitutionnelle du principe de fraternité, et son corollaire, la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire sans considération de la régularité de son séjour. Mais il a restreint la portée de cette liberté en n’y incluant pas l’aide à l’entrée sur le territoire, alors qu’à la frontière franco-italienne, par exemple, l’aide humanitaire est indispensable.

    Vous dressez un constat pessimiste. Cela vaut-il la peine que les associations continuent à contester les politiques migratoires devant les juges ?

    D. L. : Il faut distinguer les modes d’action. La saisine du Conseil constitutionnel après le vote de la loi est le fait de parlementaires et/ou du gouvernement, ou du président de la République.

    Les membres de la « société civile » (associations, avocats, professeurs de droit…) peuvent déposer des contributions extérieures, qu’on appelle aussi « portes étroites » . Celles-ci n’ont aucune valeur officielle, et le Conseil constitutionnel, même s’il les publie désormais sur son site, n’est obligé ni de les lire, ni de répondre aux arguments qui y sont développés.

    Les saisines officielles ont été accompagnées, cette fois, de très nombreuses portes étroites. Le #Gisti, une association de défense des droits des étrangers créée en 1972 et dont j’ai été la présidente entre 1985 et 2000, a décidé de ne pas s’y associer cette fois-ci, alors qu’il lui était arrivé par le passé d’en rédiger.

    Outre que le Gisti ne fait guère confiance au Conseil constitutionnel pour protéger les droits des étrangers, pour les raisons que j’ai rappelées, l’association a estimé que la seule position politiquement défendable était le rejet de la loi dans sa globalité sans se limiter aux dispositions potentiellement inconstitutionnelles. Elle ne souhaitait pas non plus prêter main-forte à la manœuvre du gouvernement visant à instrumentaliser le contrôle de constitutionnalité à des fins de tactique politicienne.

    Cela ne nous empêchera pas, ultérieurement, d’engager des contentieux contre les #décrets_d’application ou de soutenir les étrangers victimes des mesures prises sur le fondement de cette loi.

    Les associations obtiennent-elles plus de résultats devant le Conseil d’Etat et la Cour de Cassation ?

    D. L. : Les recours devant le Conseil d’Etat ont été historiquement la marque du Gisti. Il a obtenu quelques beaux succès qui lui ont valu de laisser son nom à des « grands arrêts de la jurisprudence administrative ». Mais ces succès ne doivent pas être l’arbre qui cache la forêt car, dans l’ensemble, ni le #juge_administratif – le plus sollicité – ni le #juge_judiciaire n’ont empêché la dérive constante du droit des étrangers depuis une quarantaine d’années.

    Ils n’ont du reste pas vraiment cherché à le faire. Les juges sont très sensibles aux idées dominantes et, depuis cinquante ans, la nécessité de maîtriser les flux migratoires en fait partie. Dans l’ensemble, le Conseil d’Etat et la Cour de Cassation (mais le rôle de celle-ci est moindre dans des affaires qui mettent essentiellement en jeu l’administration) ont quand même laissé passer moins de dispositions attentatoires aux droits des étrangers que le Conseil constitutionnel et ont parfois refréné les ardeurs du pouvoir.

    Il est vrai qu’il est plus facile pour le juge administratif d’annuler une décision du gouvernement (un décret d’application, une #circulaire), ou une mesure administrative individuelle que pour le juge constitutionnel d’invalider une loi votée par le parlement.

    Les considérations politiques jouent assurément dans le contentieux administratif – on l’a vu avec l’attitude subtilement équilibrée du Conseil d’Etat face aux dissolutions d’associations ou aux interdictions de manifestations : il a validé la #dissolution du CCIF (Collectif contre l’islamophobie en France) et de la (Coordination contre le racisme et l’islamophobie), mais il a annulé celle des Soulèvements de la Terre.

    Ces considérations jouent de façon plus frontale dans le contentieux constitutionnel, devant une instance qui au demeurant, par sa composition, n’a de juridiction que la fonction et craint d’être accusée de chercher à imposer « un gouvernement des juges » qui fait fi de la souveraineté du peuple incarnée par le Parlement.

    En s’en remettant au Conseil constitutionnel et en lui laissant le soin de corriger les dispositions qu’il n’aurait jamais dû laisser adopter, le gouvernement a fait assurément le jeu de la droite et de l’extrême droite qui vont évidemment crier au gouvernement des juges.

    Quelles seront les solutions pour continuer à mener la bataille une fois la loi adoptée ?

    D. L. : Les mêmes que d’habitude ! Le Conseil constitutionnel n’examine pas la conformité des lois au regard des conventions internationales, estimant que ce contrôle appartient à la Cour de cassation et au Conseil d’Etat. On pourra alors déférer à ce dernier les décrets d’application de la loi.

    Même si ces textes sont conformes aux dispositions législatives qu’ils mettent en œuvre, on pourra tenter de démontrer qu’ils sont en contradiction avec la législation de l’Union européenne, avec des dispositions de la Convention européenne telles qu’elles sont interprétées par la Cour de Strasbourg ou encore de la convention sur les droits de l’enfant.

    Ultérieurement, on pourrait envisager de demander à la Cour européenne des droits de l’homme la condamnation de la France. Mais on ne peut le faire qu’à l’occasion d’une affaire individuelle, après « épuisement » de tous les recours internes. Donc dans très longtemps.

    https://www.alternatives-economiques.fr/daniele-lochak-conseil-constitutionnel-na-jamais-defendu-droi/00109322

    (sauf pour les questions et la mention D.L., le graissage m’est dû)

    #loi_Immigration #xénophobie_d'État #étrangers #droit_du_séjour #lutte_contre_l’immigration_irrégulière #regroupement_familial #carte_de_résident #droit_du_sol #acquisition_de_la_nationalité #rétention #droit_des_étrangers #contentieux_administratif #Conseil_constitutionnel #Conseil_d'État #jurisprudence #jurisprudence_administrative #Cour_de_cassation #CEDH #conventions_internationales #Convention_européenne #convention_sur_les_droits_de_l’enfant

  • La question d’Occident - L’Orient-Le Jour par Henry Laurens
    https://www.lorientlejour.com/article/1363046/la-question-doccident.html

    La conclusion assez « cheveu sur la soupe » de cette rétro-lecture d’Arnold Toynbee sur ce qu’on pourrait appeler « les guerres d’Occident en Orient »...

    Un siècle après, les chercheurs forment toujours le chœur grec des observateurs impuissants cherchant au mieux à établir ce qui est dans l’ordre des responsabilités et ce qui est dans celui des processus, entre ce qui appartient à la libre détermination des acteurs et ce qui est le piège des logiques de situations. Parfois, ils reproduisent dans leurs corporations les clivages de leurs domaines d’études.

  • Your Man in the Hague (in a Good Way). - Craig Murray
    https://www.craigmurray.org.uk/archives/2024/01/your-man-in-the-hague-in-a-good-way

    (Présent dans la salle des audiences)

    You would not think from the body language it was Israel that stands accused. In fact the only people in the court whose demeanour was particularly dodgy and guilty were the judges. They absolutely looked like they really did not want to be there. They seemed deeply uncomfortable, fidgeted and fumbled papers a lot, and seldom looked directly at the lawyers speaking.

    It occurred to me that the people who really did not want to be in the Court at all were the judges, because it is in fact the judges and the Court itself on trial. The fact of genocide is incontrovertible and had been plainly set out. But several of the judges are desperate to find a way to please the USA and Israel and avoid countering the current Zionist narrative, the adoption of which is necessary to keep your feet comfortably under the table of the elite.

    What counts more for them, personal comfort, the urgings of NATO, future wealthy sinecures? Are they prepared to ditch any real notion of international law for those things?

    That is the real question before the court. The International Court of Justice is on trial.

    During Blinne’s talk, the President of the court suddenly took an intense interest in her startling red iPad, the colour of a particularly bright nail varnish. This came out several times during the hearing, and I could never put these iPad appearances together with what had just been discussed – it was not that cases or documents had just been cited to look up, for example.

  • Insolite : chargée de l’éducation, elle fuit l’école publique qui ne “remplace pas sérieusement” les profs manquants
    https://contre-attaque.net/2024/01/13/insolite-chargee-de-leducation-elle-fuit-lecole-publique-qui-ne-remp

    « Ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux olympiques », c’est comme « buraliste-professeur-dentiste-boulanger » : ça n’a aucun sens. On a collé plein de sujets extrêmement importants mais méprisés par le gouvernement, on a secoué et ça a fait un super ministère. Et on l’a refilé à une copine de Macron qui n’y connaît rien : Amélie Oudéa-Castéra.

    Cette ministre, c’est la haute bourgeoisie qui vit hors du peuple et qui fait sécession. Elle est héritière d’un couple composé du boss de Publicis, une agence de com’ proche du pouvoir, et d’une DRH, Dominique Duhamel, de la même famille que les célèbres animateurs télé Nathalie Saint-Cricq, Patrice Duhamel ou Benjamin Duhamel, la tête à claque de BFM TV. Le monde est petit. Elle est aussi mariée à l’ancien patron de la Société Générale aujourd’hui à la tête de Sanofi, multinationale du business pharmaceutique qui réalise des profits sur la santé des gens. Le monde est vraiment petit.

    Cette dame scolarise ses trois fils à Stanislas, un établissement privé catholique du VIe arrondissement – l’un des coins les plus bourgeois de Paris – connu pour son enseignement ultra-religieux et réactionnaire. C’est l’école de l’élite fasciste de la capitale. Que des grands bourgeois mettent leurs rejetons dans une telle école, c’est logique, c’est l’instinct clanique des riches. Qu’une telle personne soit nomme MINISTRE DE L’ÉDUCATION est tout simplement hallucinant. C’est comme si un Ministre de la Santé recommandait ouvertement de fuir les hôpitaux publics pour aller uniquement dans des cliniques privées.

    Dans l’établissement Stanislas, les classes sont non mixtes au collège, les enseignements condamnent l’homosexualité, l’avortement et le rapprochement entre les filles et les garçons. Mediapart rapporte que les élèves sont invités à « réussir et servir », que l’établissement diffuse une vision sexiste, homophobe et autoritaire de l’enseignement et distribue des livrets aux élèves prônant la « chasteté », assimilant l’avortement à un « meurtre ». On y invitait des intervenant·es proches de La Manif pour tous et des membres de l’Église pour vanter les thérapies de conversion désormais interdites. Une quinzaine d’anciens élèves avaient raconté à Mediapart des « souffrances » et des « humiliations ».

    L’ancien ministre de l’Éducation Pap Ndiaye, pourtant peu courageux, avait quand même ouvert une enquête sur ce lycée d’extrême droite. Le rapport n’a pas été rendu public, et avec Oudéa-Castéra, il restera secret.

    Le plus grave est la justification de la Ministre. Devant la presse le 12 janvier, elle a assumé l’envoi de ses enfants dans une telle école parce que dans le public elle aurait « vu des paquets d’heures pas sérieusement remplacées » et qu’avec son mari, elle « en a eu marre », qu’ils étaient « frustrés » de la médiocrité et du manque de moyens de l’école public.

    Tout est fou dans cette déclaration : Oudea-Castera fait littéralement partie du gouvernement qui organise la destruction de l’école publique, ne donne pas les moyens pour que les profs soient remplacés, et réprime les enseignants qui défendent l’éducation publique ! Cette Ministre déclare donc fuir la situation qu’elle contribue à créer. Imaginez un patron de restaurant qui dirait dans les médias qu’il vaut mieux éviter d’y manger parce que sa bouffe donne la gastro, et qui conseillerait le resto d’à côté.

    C’est aussi un crachat au visage de tous les enseignants, c’est-à-dire aux dizaines de milliers de travailleurs et travailleuses dont elle a la charge en tant que Ministre de l’Éducation.

    C’est enfin un piétinement de la laïcité : alors que ce gouvernement a mis en scène un chasse honteuse aux jeunes lycéennes musulmanes à la rentrée au nom de la séparation entre l’école et la religion, ses ministres mettent leurs enfants dans les pires établissements privés religieux, piétinant la laïcité sans aucun complexe.

    Cette affaire rappelle l’urgence de détruire l’enseignement privé. On a tendance à croire que ces écoles religieuses s’autofinancent avec les frais d’inscription que doivent payer les familles, mais pas du tout. L’État subventionne l’école privée, qui a reçu 8 milliards d’euros d’argent public en 2022.

    Les collèges et lycées privés sont financés pour 65,7% par l’État et regroupent 2 millions d’élèves en 2022. L’écrasante majorité de ces structures est catholique : 96%.

    Financé par l’État, le privé est gagnant sur toute la ligne : l’argent public s’ajoute aux frais versés par les familles, ce qui permet à ces établissement d’avoir de meilleurs bâtiments, une meilleure qualité de cours, des classes moins remplies et des activités extra-scolaires… Au détriment des écoles publiques.

    Arrêter de subventionner le privé, mais aussi briser l’entre-soi des écoles élitistes publiques, permettrait d’empêcher toutes les Amélie Oudéa-Castéra de mettre leurs enfants à l’abri dans des cocons pour petits bourges fascistes. Confrontés à la réalité de l’enseignement public, cela pousserait peut-être les gouvernants, enfin, à redonner des moyens décents à l’Éducation.

  • Dépassement systématique de budget, militarisation de l’espace public, gentrification, greenwashing : une "encyclopédie des nuisances" des #JOP à travers le temps.
    Descriptions des fonctionnements occultes de la "machine olympique" et de sa gouvernance par le #CIO.

    Jules Boykoff : « Les JO, c’est l’économie du ruissellement inversé » - AOC media
    https://aoc.media/entretien/2024/01/12/jules-boykoff-les-jo-cest-leconomie-du-ruissellement-inverse

    Pourquoi les Jeux Olympiques sont-ils devenus une force économique avant d’être un événement sportif ? Ancien athlète, le politiste Jules Boykoff montre que des processus d’accumulation du capital considérables se mettent en place dès lors qu’une ville organise des Jeux Olympiques de grande ampleur. Leur coût est systématiquement sous-évalué, l’espace public est militarisé, les équilibres sociaux déstabilisés, et les écosystèmes menacés. Pourquoi les villes continuent-elles alors de les organiser ?

    https://justpaste.it/e9wny

    • Pour la création de l’état de Neu-Israel !!

      Je comprends que notre passé nazi nous oblige moralement à soutenir les Juifs et Israël. C’est d’accord, en tant qu’Allemand tu n’y échappes pas. Je souscris l’unique solution logique du problème : en Palestine les Juifs ne vivront jamais en paix, alors donnons leur de notre propre chef une partie de notre pays.

      La Palestine était un mauvais choix et n’a jamais donné des résultats satisfaisant.

      Mais de là leur filer le Bade-Wurtemberg et la Bavière, les Länder les plus riches d’Allemagne,, non, c’est trop généreux.Vu les prognostiques qui annoncent qu’en septembre la plupart des mairies y seront conquises par l’extrême droite j’opte pour le Brandebourg, la Saxe et la Thuringe.

      Entre la jeunesse de village aux battes de baseball et l’AfD d’un côté et le Likoud avec ses colons de l’autre la différence n’est pas énorme. Ce serait du fair play .

      Fascholand bleibt Fascholand !

      Manque de bol, les Juifs d’Israël préfèrent acheter à Berlin-Mitte parce qu’ils n’osent pas s’en prendre aux hordes de paysans et chômeurs incultes. Mais si on autorisait qu’ils importent Tsahal et le Mossad le rapporte de force serait plus avantageux.

      N.B. Au sein de la chambre des Länder le Bundestat un seul état Nouvel-Israël ne compterait qu’un tier des sièges attribués aux trois Länder actuels. La droite sera moins influente alors à ce niveau. C’est compliqué la politique.

      #Bade-Wurtemberg #Bavière #Thuringe #Saxe #Brandebourg #juifs #philosemitisme #politique #parodie #wtf

  • Israël accusé d’« actes génocidaires » : « On attendait depuis longtemps qu’un État prenne l’initiative »
    La Cour internationale de justice (CIJ) va examiner à partir de ce jeudi 11 janvier une requête de l’Afrique du Sud, qui accuse Israël de commettre des « actes génocidaires » sur les Palestiniens de la bande de Gaza. Israël rejette ces accusations. C’est la première procédure devant la justice internationale concernant la guerre en cours. D’autres pourraient suivre. Trois questions à Francesca Albanese , rapporteuse spéciale des Nations unies sur les droits de l’homme dans les Territoires palestiniens occupés.

    Publié le : 10/01/2024 | RFI | Guilhem Delteil
    https://www.rfi.fr/fr/moyen-orient/20240110-isra%C3%ABl-accus%C3%A9-d-actes-g%C3%A9nocidaires-on-attendait-depuis-l

    RFI : L’Afrique du Sud a déposé une requête contre Israël auprès de la Cour internationale de justice pour « génocide ». La Cour examinera cette plainte entre jeudi et vendredi, entendant les arguments des deux parties. Comment accueillez-vous cette procédure ?

    Francesca Albanese : En général, l’accueil de la communauté des droits humains a été très favorable. On attendait depuis longtemps un État ayant des principes et qui prenne l’initiative d’invoquer l’application de la Convention de prévention du génocide. Pas uniquement dans le but de porter en justice les responsables du crime de génocide une fois qu’il est avéré, mais surtout de prendre des mesures de prévention quand il y a un risque de génocide. C’est ce que l’Afrique du Sud a fait.

    La campagne militaire israélienne contre la bande de Gaza a tué entre 23 000 et peut-être 30 000 personnes à Gaza – et notamment près de 10 000 enfants. Ce sont des chiffres épouvantables. Il y a aussi la destruction d’infrastructures civiles et des hôpitaux : on est en présence de conditions qui rendent la vie impossible pour une grande partie de la population. Enfin, il y a également le risque d’épidémie : la communauté scientifique alerte sur la possibilité que 500 000 personnes puissent mourir à Gaza en raison des maladies. C’est pour ça qu’on parle d’un risque concret de génocide à Gaza.

    En plus de l’accusation de « génocide » portée devant la Cour internationale de justice, il y a aussi des accusations de crimes de guerre. Peut-il y avoir des procédures judiciaires pour ces faits-là ?

    Nous devons avoir des procédures judiciaires, c’est absolument prioritaire, que ce soit à l’égard du Hamas, de ses responsables comme de ceux qui ont exécuté les attaques du 7 octobre – car il faut rappeler que les civils ne doivent jamais être la cible d’actions militaires, et c’est pour ça que je dis sans aucune hésitation que le Hamas a commis des crimes de guerre –, ou que ce soit à l’égard d’Israël ; Israël a commis des crimes de guerre après le 7 octobre et commettait des crimes de guerre avant le 7 octobre.

    Mais il y a aussi la possibilité de crimes contre l’humanité. Parce qu’affamer une population par un siège, un blocus total imposé à une population bombardée, cela peut être un crime contre l’humanité. Regardez aussi le déplacement forcé et la menace de déportation d’une grande partie de la population de Gaza. Nous avons besoin d’une enquête indépendante et efficace.

    Autres images qui ont choqué, celles d’arrestations d’hommes dans la bande de Gaza qui se sont retrouvés dénudés, les yeux bandés, les mains ligotées. Est-ce que vous avez des nouvelles du sort de ces personnes, de leurs conditions de détention ?

    Absolument pas. Et ça, c’est un des problèmes les plus graves. Il est impossible d’avoir accès et de s’assurer des conditions de détention des milliers de Palestiniens arrêtés depuis le 7 octobre, à Gaza et en Cisjordanie. Il y a plus de 4 000 Palestiniens que l’armée israélienne a emprisonnés dans les derniers trois mois. Ce sont des chiffres énormes, qui s’ajoutent aux chiffres énormes de détenus arbitraires palestiniens par l’armée israélienne.

    Nous sommes dans une condition d’urgence sans précédent. Cela a été dénoncé par les Nations unies, par les ONG internationales, palestiniennes et israéliennes qui sont sur place. L’énormité de ce qui se passe est telle qu’elle justifie une intervention internationale organique et efficace. Malheureusement, je ne vois pas les conditions pour déployer tout ça.

    #CIJ

    • Israël accusée de « génocide » devant la CIJ : la justice internationale est « susceptible d’agir »

      Professeur de droit international à l’Université libre de Bruxelles, François Dubuisson analyse les enjeux de la plainte déposée par l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice (CIJ). L’organe judiciaire de l’ONU tient des audiences jeudi 11 et vendredi 12 janvier à La Haye (Pays-Bas), suite à une requête de Pretoria sur des faits de « génocide » qui serait commis par Israël lors de ses opérations militaires dans la bande de Gaza.

      RFI, Nicolas Falez, Publié le : 10/01/2024
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      RFI : La Cour internationale de Justice (CIJ) est l’organe judiciaire principal des Nations unies. Quand s’est-elle déjà penchée sur le conflit israélo-palestinien ?

      François Dubuisson : La CIJ règle les litiges entre États et peut rendre des avis lorsqu’on lui pose une question juridique. Dans le passé, elle a déjà été consultée sur la légalité du mur construit par Israël en territoire palestinien. Elle en avait constaté l’illégalité. Depuis plusieurs mois, elle est saisie d’une seconde demande d’avis qui porte de manière beaucoup plus générale sur la nature de l’occupation israélienne du territoire palestinien. Les audiences doivent se tenir en février.

      Après les attaques du Hamas le 7 octobre et le début de la guerre à Gaza, l’Afrique du Sud a saisi la CIJ, lui demandant de se prononcer sur d’éventuels faits « de génocide ». C’est une première ?

      Oui, c’est la première fois qu’une procédure inter-étatique incrimine Israël devant la CIJ. La procédure est basée sur la Convention de 1948 sur le génocide. Les plaidoiries porteront uniquement sur celle qualification : est-ce que les opérations militaires menées par Israël dans la Bande de Gaza, les difficultés d’accès à l’aide humanitaire, les conséquences pour la population palestinienne entrent dans la qualification de « génocide » ?

      Comment vont se dérouler les deux jours d’audience de cette semaine à La Haye ? Et quelle sera la suite ?

      À ce stade de la procédure, il s’agit d’une demande de mesures conservatoires par l’Afrique du Sud. C’est une sorte de référé en urgence où l’Afrique du Sud demande à la Cour d’édicter des mesures s’imposant à Israël pour éviter tout risque de préjudice irréparable. La Cour pourrait les annoncer très rapidement, demandant à Israël de s’abstenir d’une série d’actes ou lui demandant de laisser passer davantage d’aide humanitaire pour prévenir un potentiel génocide. Ce n’est pas à ce stade que la Cour se prononcera pour dire si oui ou non ce que fait Israël relève du génocide.

      L’étape suivante sera-t-elle celle de l’examen sur le fond ?

      Oui, l’analyse définitive des actes commis par Israël va probablement prendre plusieurs années. Un temps assez long, c’est pour cela qu’il y a un intérêt à des mesures conservatoires, pour essayer d’avoir une prise sur ce qui se déroule actuellement.

      Quels sont les moyens de rendre obligatoires les mesures qui pourraient être édictées par la CIJ ?

      Elles seraient obligatoires, mais cela ne veut pas dire qu’Israël s’y conformerait. Mais des mesures conservatoires constitueraient un levier pour les autres États. En effet, au titre de la Convention sur le génocide, l’ensemble des États-parties ont des obligations de prévention du génocide. Donc, si la Cour dit qu’un certain nombre de mesures doivent être prises pour empêcher un génocide, cela peut inciter des États à accroître leur pression sur Israël. (...)

  • En Espagne, le mouvement « Adolescence sans portable » crée un débat national
    https://www.france24.com/fr/europe/20240107-en-espagne-le-mouvement-adolescence-sans-portable-cr%C3%A9e-un-d%

    La mesure a déjà fait réfléchir le gouvernement. Le 13 décembre 2023, la ministre de l’Éducation, Pilar Alegría, a proposé aux communautés autonomes d’interdire le téléphone en primaire et de restreindre son utilisation au secondaire, en fonction de chaque établissement.

    L’ Espagne pense à réfréner le fléau électronique qui fait des ravages sur les enfants. En france on en est encore à se trainer Babylala de la Régression et son interdiction de robes.

    #addiction_numérique