C’est à croire que nos joyeux, joyeuses, chroniqueurEs n’ont même pas les capacités intellectuelles nécessaires pour lire une page Wikipédia. S’il est vrai que l’utilisation péjorative du terme « anarchie » ne date pas d’hier, cette utilisation vise à préserver les préjugés que l’organisation hiérarchique capitaliste se complaît à entretenir, ne serait-ce que pour s’assurer de la pérennité de son pouvoir. L’anarchie a peu à voir avec le chaos, c’est plutôt une manière d’affirmer qu’une société peut se structurer autrement que par une hiérarchie verticale où une poignée de personnes domine les autres. Une façon de repenser l’organisation d’une communauté d’individus sans rapport de force ou de domination d’un individu sur le groupe par l’autogestion et la démocratie directe, par exemple. N’en déplaise aux Ravary, Martineau, Duhaime et autres, nous ne sommes pas des groupies de Castro, de Chavez ou de tout autre homme ou femme d’État. En fait, nous sommes par définition opposéEs à l’État et au gouvernement : nous avons en horreur l’autorité et la hiérarchie. Nous croyons au potentiel de chaque être humain, il est donc clair que nous méprisons les cultes de la personnalité et l’héroïsation de certains individus, comme d’autres le feraient, assis devant leur télé à regarder des reality shows merdiques, entrecoupés de publicités où Quebecor ne cesse de se mettre en abîme.
Nous sommes peu, et pourtant, on nous craint. Ce n’est pas surprenant puisque nous préférons l’éthique aux lois, et que l’absence de lois arbitraires, inutiles et répressives, est invariablement synonyme de chaos dans l’esprit infiniment manipulable du « citoyen moyen ». Les lois, on le sait tous et toutes, sont un mal nécessaire, puisque si le meurtre n’était pas interdit, tout le monde s’y adonnerait à cœur joie. Toutes nos pulsions éclateraient au grand jour si elles n’étaient pas sauvagement réprimées par l’autorité suprême du « système », ce grand mot fourre-tout qui permet de nous accoler l’étiquette de théoriciens du complot, puisque, faute de vouloir le renverser — ainsi que le suggère la rumeur à notre endroit — nous cherchons à le repenser entièrement et totalement.
Dans l’ignorance parfaite de ce qu’est l’anarchie, nous, les anarchistes, sommes les boucs émissaires parfaits pour justifier les arrestations de masse, la brutalité policière, la répression préventive, l’interdiction de manifester et tout ce qui peut métamorphoser la journée du 15 mars en coït interrompu.