Vallée de la Roya
Des brèches dans la forteresse
par Emilien Bernard, illustré par Tomagnetik
paru dans le CQFD n°151 (février 2017)
▻http://cqfd-journal.org/Des-breches-dans-la-forteresse
Un lundi soir de décembre, sortie de Vintimille, dans ce hideux no man’s land saturé de béton qui tient lieu de zone transfrontalière. Quelques ombres chargées de sacs plastiques cheminent en bord de route, direction la France. Au péage, avant que la barrière ne s’ouvre, une berline sombre déboule en sens inverse, bloquant la Renault Espace défraîchie qui nous tient lieu de carrosse. Crissement de pneus. Quatre patibulaires descendent, en civil – trois hommes et une femme. « Le coffre, ouvrez le coffre », exigent-ils, en italien. Chose faite, ils fouillent rapidement sous les couvertures et repartent illico prendre position à deux pas. En embuscade.
Un peu plus loin, après quelques glauques tunnels, rebelote. Des Français, cette fois. Ceux-là sont en uniforme et dotés de mitraillettes. Pour le reste, même topo : ouverture du coffre, fouille rapide, pouvez circuler. Rapide et lapidaire. La seule chose qui les intéresse ? Les migrants susceptibles d’être planqués dans le coffre. Roulerait-on en Lamborghini volée à plaque d’immatriculation « Mort aux condés » et sous l’emprise de puissants psychotropes qu’ils ne broncheraient pas.
Par le train, emprunté quelques semaines plus tard, c’est globalement le même topo : surveillance maximum. En gare de Vintimille, les uniformes sont présents en masse. Il y a des militaires, des carabinieri, des douaniers, des civils louches, etc. C’est l’après-midi, et des petits groupes de migrants surveillent les abords, en quête d’une opportunité. « Il y a beaucoup de surveillance, mais si on est patients on trouve toujours, explique l’un d’eux. Le plus dur commence dans le train . »
#Migration #Vintimille #Roya #No_Border #CQFD