• Loi « immigration » : la laborieuse mise en place des régularisations « métiers en tension »
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    Loi « immigration » : la laborieuse mise en place des régularisations « métiers en tension »
    Par Anjara Andriambelo et Julia Pascual
    « Régularisons ceux qui travaillent, ce sera dix mille régularisations en plus dès l’année prochaine. » Le 19 décembre 2023, devant l’Assemblée nationale, Gérald Darmanin s’emballe. Alors que sa loi « immigration » va être adoptée par les députés dans quelques instants, avec les voix du Rassemblement national, le ministre de l’intérieur défend la « jambe gauche » de son texte. Bien que sa portée ait été amoindrie par les amendements de la droite sénatoriale, un article du texte doit faciliter la régularisation des travailleurs sans papiers dans les métiers en tension.
    Pour montrer son volontarisme, M. Darmanin publie quatre instructions d’application immédiate dès le 5 février, dont l’une porte sur ces métiers en tension. Il y précise les conditions requises pour qu’un travailleur sans papiers obtienne un titre de séjour : trois ans d’ancienneté sur le territoire, douze fiches de paye à mi-temps au moins dans un métier en tension et l’occupation actuelle d’un de ces métiers, listés par arrêté ministériel. « Vous veillerez particulièrement à ce que les dossiers soient instruits dans un délai de quatre-vingt-dix jours », précise le ministre aux préfets, alors que, sur certains territoires, les temps d’instruction des demandes de titre de séjour se comptent en années.
    Près de quatre mois plus tard, sur le terrain, les passages à l’acte sont encore balbutiants. « C’est assez mou, convient un préfet, sous le couvert de l’anonymat. Autant sur le volet répressif de la loi et notamment les expulsions, on nous demande de faire remonter un tableau mensuel avec les mesures prises, autant sur le reste, il n’y a pas de demande spécifique. » « Les préfets appliquent avec zèle les motifs d’édiction d’OQTF [obligation de quitter le territoire français], mais c’est zéro sur les régularisations métiers en tension », corrobore Lydie Nicol, secrétaire nationale confédérale de la CFDT chargée de l’immigration.
    Sollicité sur le nombre de régularisations qui ont été opérées depuis février sur la base du nouveau dispositif, le ministère de l’intérieur ne nous a transmis aucun chiffre, au motif que « la méthodologie des retombées statistiques sur les titres de séjour est malheureusement tributaire des publications annuelles ».
    Certaines préfectures ne font, en tout cas, même pas apparaître la possibilité de demander un titre de séjour « métiers en tension » sur leur site Internet. C’est le cas, par exemple, de celles de Seine-Saint-Denis, de Haute-Garonne ou encore de Savoie, où réside Léonard (le prénom a été modifié). Cet Albanais de 60 ans remplit pourtant en théorie tous les critères. Il vit en France depuis huit ans, travaille comme agent d’entretien – un métier qui figure dans la liste des métiers en tension fixée pour la région Auvergne-Rhône-Alpes, où il vit – et possède trente-six fiches de paie. Sa femme, agente de nettoyage comme lui, remplit tous les critères également. Mais, faute de procédure d’accès mise en place par la préfecture du département, ils sont tous deux dans l’impasse.
    En Seine-Saint-Denis, le constat est identique. « La fameuse carte “métiers en tension” n’existe pas », explique Jean-Albert Guidou, membre du pôle « travailleurs migrants » de la CGT, alors qu’il se tient, en cette fin du mois de mai, devant une salle de la bourse du travail de Bobigny, où l’écoute, fébrile, une assemblée de quelque soixante-dix travailleurs sans papiers. Tandis que les étrangers font face à la difficulté d’accès aux rendez-vous en préfecture, certains d’entre eux ont nourri l’espoir que le nouveau titre « métiers en tension » facilite leurs démarches.C’est le cas de Daouda (le prénom a été modifié), un plongeur intérimaire sénégalais, arrivé en France en 2019. Il aimerait déposer une demande de régularisation, mais la préfecture de Bobigny – dans la cantine de laquelle il a d’ailleurs travaillé pendant plusieurs mois – est « bloquée », dit-il. « En attendant, les patrons en profitent et, comme sans-papiers, on ne peut pas revendiquer », lâche Mamadou Diallo, un Guinéen de 28 ans qui travaille comme installateur de portes et de fenêtres en région parisienne. Ce jeune diplômé en sociologie est payé 1 400 euros par mois pour trente-neuf heures hebdomadaires. Il a « tout suivi de la loi “immigration” ». Et il est persuadé que « le volet humanitaire du texte a été abandonné. C’était juste un moyen de maquiller le caractère répressif de la loi ».
    Aux côtés de Mamadou Diallo, un Marocain de 39 ans est venu se renseigner sur ses droits. S’il obtenait un titre de séjour, cet ouvrier marbrier pour une entreprise de pompes funèbres pourrait chercher de meilleures conditions de travail et quitter le taudis que lui loue à prix d’or un marchand de sommeil. Dans le contexte actuel, il l’avoue, « les gens ont peur de demander de régulariser leur situation, car ils redoutent une OQTF ».
    A contrario, dans d’autres départements, des dossiers ont déjà pu être pris en compte. Ainsi, en Bretagne, l’avocate Dorothée Calonne – qui préfère taire le nom du département de peur que la préfecture ne soit considérée comme trop bienveillante – a déposé une demande de régularisation pour un ouvrier d’élevage présent en France depuis 2016 et employé depuis près de deux ans. « Il a très rapidement obtenu un récépissé de sa demande avec une autorisation de travail, se réjouit-elle, alors que dans un dossier classique de régularisation par le travail, il y a au minimum un an d’attente. » Dans les Hautes-Pyrénées, Mathieu Oudin a lui aussi obtenu une autorisation de travail pour un électricien marocain. « Ça n’a pris qu’un mois, c’est un miracle », souligne l’avocat.
    En revanche, Laurie Quinson, dans les Bouches-du-Rhône, n’a toujours pas reçu d’accusé de réception d’une demande de régularisation d’un électricien pakistanais, pourtant déposée dès le 12 février. « Actuellement, la préfecture traite des dossiers déposés en décembre… », explique-t-elle. En Gironde, l’avocat Pierre Lanne, lui non plus, n’a pas reçu d’accusé de réception d’une demande de régularisation faite en mars pour un client de nationalité algérienne et responsable de l’atelier de réparation d’un concessionnaire automobile.
    « On va se retrouver face à des situations disparates sur le territoire, ce qu’on dénonce depuis des années avec la circulaire Valls », regrette Flor Tercero, présidente de l’association Avocats pour la défense des droits des étrangers. La circulaire ministérielle dite « Valls » est le texte qui régit depuis 2012 les régularisations par le travail, en précisant aux préfectures les conditions sous lesquelles évaluer les demandes. La loi Darmanin crée un moyen supplémentaire de régularisation qui a notamment l’avantage, contrairement à la circulaire Valls, de ne pas solliciter de l’employeur qu’il effectue des démarches en faveur de son salarié – une façon de lui retirer son pouvoir de blocage. Mais, comme avec la circulaire Valls, les préfectures conservent leur entier pouvoir d’appréciation.
    Un haut fonctionnaire au sein du gouvernement assure toutefois qu’il n’y a « aucune volonté d’entrave » à la loi et que sa mise en œuvre suit « un cycle normal ». Une instruction de la ministre du travail, Catherine Vautrin, a d’ailleurs été envoyée aux préfets le 24 mai, leur demandant de se concerter avec les acteurs économiques locaux pour modifier la liste des métiers en tension. Celle en vigueur date de 2021. Déclinée par région, elle est, de l’aveu de tous, décorrélée des réalités de terrain. « En Auvergne-Rhône-Alpes, il n’y a dans la liste aucun métier du bâtiment, de l’aide à la personne, et pour la restauration, il n’y a que maître d’hôtel », illustre Gérard Gomès-Léal, un bénévole de l’association d’aide aux migrants La Cimade, en Savoie.
    Dans le contexte de la crise des agriculteurs, le gouvernement a modifié une première fois la liste en mars pour y inclure en catastrophe certains métiers agricoles. Pour mieux correspondre aux « réalités locales du marché du travail », la ministre du travail a demandé aux préfets d’appliquer une « nouvelle méthodologie » et de tenir compte non seulement des métiers qui ont des difficultés de recrutement, mais aussi de ceux « ayant déjà largement recours à la main-d’œuvre étrangère », mais qui, parce que leurs emplois sont déjà pourvus partiellement par des travailleurs sans papiers, ne ressortent pas de la statistique officielle.
    Les préfectures doivent envoyer des propositions d’ajout de nouveaux métiers en tension avant le 21 juin. « Le temps que tout se mette en place, on aura perdu un an », regrette Gérard Gomès-Léal, qui rappelle que la disposition sur les métiers en tension n’est prévue pour s’appliquer que jusqu’à la fin de l’année 2026.

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  • Immigration irrégulière : 105 candidats interpellés à Djilor dont 57 étrangers
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    Immigration irrégulière : 105 candidats interpellés à Djilor dont 57 étrangers
    La brigade territoriale de Foundiougne a procédé à l’interpellation de 105 candidats à l’émigration clandestine signalés au niveau des îles de Boro, dans la commune de Djilor, département dans la région de Fatick. Leur interpellation a eu lieu dans la soirée du 28 mai 2024 par les éléments des aires marines protégées. Il s’agit de 49 sénégalais dont 02 filles, 27 Bissau guinéens, 02 Gambiens dont 01 fille, 02 Maliens et 26 guinéens de Conakry dont 1 fille. Les éléments de la brigade territoriale de Foundiougne ont saisi 149 bidons de 20 litres de carburant hors bord.

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  • Allemagne : plus de 3 millions de personnes en quête d’une protection - InfoMigrants
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    Allemagne : plus de 3 millions de personnes en quête d’une protection
    Par InfoMigrants Publié le : 31/05/2024
    Plus de 3 millions de personnes étaient enregistrées comme cherchant ou ayant obtenu une forme de protection en Allemagne à la fin de l’année 2023, selon les statistiques officielles. À la fin de l’année 2023, près de 3,2 millions de personnes en quête de protection internationale étaient enregistrées en Allemagne, soit une augmentation de 100 000 personnes par rapport à l’année précédente. L’Allemagne reste ainsi en tête de la liste des pays de l’Union européenne qui comptent le plus grand nombre de personnes ayant demandé ou obtenu une protection.
    Selon l’Office allemand des statistiques Destatis, la majorité des personnes proviennent d’Ukraine, soit 977 000 cas. Les Syriens arrivent en deuxième position, avec 712 000 personnes, ce qui représente une augmentation de 6 % par rapport à 2022. Les plus de 323 000 Afghans constituent le troisième groupe le plus important, avec une hausse de 13 % par rapport à l’année précédente.
    Arrivent ensuite les ressortissants irakiens et turcs, avec respectivement 200 000 et un peu plus de 150 000 personnes.
    Ces cinq nationalités combinées composaient environ 75 % de toutes les personnes en quête d’une protection l’année dernière, alors que le nombre d’arrivées de demandeurs d’asile continue d’augmenter dans toute l’Europe.Plus de 2,5 millions de personnes se sont vu accorder un statut de protection à la fin de l’année dernière, souligne le rapport, soit une hausse de 12 % des demandes traitées.
    La grande majorité des demandeurs n’ont toutefois obtenu qu’un statut de protection temporaire, dont la moitié par le biais d’une procédure d’asile simplifiée. Si le paysage politique dans leur pays d’origine venait à changer et qu’ils ne sont plus considérés comme étant persécutés, ces personnes perdraient leur droit de séjour temporaire et seraient invités à rentrer chez eux. Il est à noter que les Ukrainiens qui ont fui la guerre ont obtenu une autorisation de séjour temporaire dans le cadre d’un dispositif de protection générale accordée par l’Union européenne. Dans le même temps, 189 000 personnes ont vu leur demande d’asile rejetée ou ont perdu leur statut de protection en Allemagne l’an dernier. Cela ne signifie pas automatiquement qu’elles seront expulsées, car il existe encore d’autres formes de résidence, comme la “Duldung”, qui est un séjour toléré, dans la mesure où une personne ne peut être renvoyée pour des raisons allant de l’absence de documents de voyage à un état de santé fragile. Toutefois, les taux d’expulsion ont à nouveau progressé ces derniers mois. Au cours du premier trimestre 2024, l’Allemagne a renvoyé près de 4 800 personnes dont la demande de protection a été rejetée, un chiffre en hausse de 30 % par rapport à la même période de l’année dernière, selon un rapport du quotidien TAZ.
    La majorité des personnes expulsées depuis le début de l’année sont originaires de Macédoine du Nord, qui est considérée comme un pays d’origine sûr. Pour la même raison les autorités allemandes ont renvoyé des ressortissants de la Géorgie et de la Serbie. Le journal précise que dans 7 050 cas, les expulsions n’ont pas eu lieu, le plus souvent parce que les autorités ignorent où se trouvent les personnes concernées. En outre, selon Destatis, le statut de protection de 455 000 personnes était toujours en cours d’examen à la fin de l’année 2023, soit une baisse de 20 % du nombre de dossiers en cours par rapport à fin 2022.
    (...) Les données révèlent également l’âge moyen des personnes en quête d’une protection. En Allemagne, un demandeur d’asile ou un réfugié a en moyenne 32,2 ans, ce qui est considérablement plus jeune que l’âge moyen en Allemagne, qui est de 44,6 ans. Une nouveauté observée sur les dernières années est la parité parmi les demandeurs d’asile et les réfugiés. Ainsi, les femmes représentent 49 % de toutes les personnes enregistrées. Toutefois, cela s’explique en grande partie par le fait que l’immense majorité des personnes fuyant l’Ukraine sont des femmes, alors que la plupart des demandeurs d’asile en provenance du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie sont des hommes

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  • Traversées de la Manche : « On meurt plus au moment de l’embarcation qu’en pleine mer » - InfoMigrants
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    Traversées de la Manche : « On meurt plus au moment de l’embarcation qu’en pleine mer »
    Par Charlotte Boitiaux Publié le : 31/05/2024
    Confrontés à une pression policière toujours plus forte, à une surcharge des canots plus importante et à des départs de plus en plus loin de Calais, les migrants risquent davantage leur vie lors des tentatives de traversées de la Manche. Dans la nuit de samedi 13 janvier à dimanche 14 janvier 2024, un groupe de Syriens, dont un bébé d’un mois, rejoint un canot déjà en mer. Il est 2 heures du matin. La houle, la nuit et les vagues font paniquer le groupe au moment de monter dans l’embarcation. Le bateau se retourne. Les migrants tombent à l’eau. Dans la confusion, deux adolescents syriens de 14 et 16 ans se noient, à quelques mètres seulement de la plage. Trois autres personnes mourront aussi cette nuit-là. L’eau était à 9 degrés.
    Depuis plusieurs mois, les traversées de la Manche ont « changé... en pire », estime Salomé Bahri, coordinatrice de l’association Utopia 56 à Grande-Synthe, présente depuis des années sur le littoral français. « On a remarqué que les décès [de migrants] se produisent désormais près des côtes. On meurt plus au moment de l’embarcation, et moins en pleine mer », résume-t-elle. « On peut aussi mourir avant même d’avoir atteint la Manche. Prenez l’exemple de cette fillette de sept ans [morte par noyade, le 3 mars 2024]. Elle est décédée dans le canal de l’Aa, le canot n’avait même pas atteint la mer ».Seize migrants, dont dix enfants âgés de sept à treize ans, se trouvaient à bord de ce bateau. Celui-ci « n’était pas dimensionné pour supporter autant de personnes », avait affirmé la préfecture du Nord dans un communiqué.
    Pour Utopia 56, « les traversées ne sont plus celles d’il y a un an ou deux ans ». D’abord, parce que les départs sont plus « dangereux ». De plus en plus d’embarquements se font en amont de la Manche, sur les canaux, les rivières qui se jettent dans la Manche. Le but : éviter les policiers qui patrouillent sur les plages. « On pense être à l’abri, être discret, mais les gens tombent des canots et meurent aussi », résume Fabien Touchard, un autre coordinateur d’Utopia 56.
    D’autres passeurs envisagent aussi de faire monter leurs passagers quand l’embarcation est déjà en mer, forçant les femmes et les enfants à s’enfoncer dans l’eau sur plusieurs dizaines de mètres avant de les hisser à bord. Pourquoi une telle prise de risques ? Parce que les trafiquants savent que les policiers n’ont pas le droit d’intercepter les migrants une fois qu’ils sont en mer. Cette compétence relève du droit maritime. Pour Fabien Touchard, les trafiquants agissent donc par souci de rentabilité. « Il y a un an et demi, deux ans, on était sur des canots de 30, 40 personnes, aujourd’hui on est sur des bateaux de 60, 70 personnes voire plus dans des cas exceptionnels. Les passeurs se disent que le taux d’empêchement [des traversées] est élevé, il faut donc charger davantage les bateaux. »
    Or la qualité des canots, elle, ne s’est pas améliorée. « Dans la précipitation et la peur de se faire repérer par les forces de l’ordre, les migrants ne prennent plus le temps de correctement gonfler les pneumatiques que certains passeurs fournissent », explique encore Salomé Bahri d’Utopia 56. « Par exemple, on constate que des migrants n’installent plus le sol rigide au fond des bateaux, or ce sol permet de maintenir le canot à flot. Sans, le bateau s’affaisse rapidement, il prend l’eau… On voit de plus en plus de personnes rentrer à la nage sur les plages ». Pour Fabien Touchard et Salomé Bahri, les trafiquants s’adaptent aussi face à l’important dispositif policier déployé sur les plages du nord du pays. Un arsenal militaire qui s’inscrit dans des accords passés entre le Royaume-Uni et la France pour tenter d’endiguer l’immigration clandestine. En mars dernier, les Britanniques ont annoncé verser plus de 500 millions d’euros sur quatre ans à la France pour militariser davantage la frontière maritime.
    « Les rapports de forces entre exilés et policiers se durcissent inévitablement. Il y a des surveillances au drones, des patrouilles partout... », explique Salomé Bahri. « On assiste à des gazages sur les plages, des bateaux lacérés au couteau… Des migrants nous racontent que les policiers jettent maintenant des gaz lacrymogènes dans les canots sur le départ alors même que des enfants se trouvent à l’intérieur. Résultat, les mises à l’eau [de bateaux] sont plus chaotiques qu’avant ». Ces rapports de force ont aussi une influence sur le timing des départs. « Pour éviter au maximum ces confrontations violentes, les migrants prennent désormais des risques au niveau de la météo. Par exemple, ils vont prendre la mer quand le temps est instable, quand les vagues sont très hautes. Ils pensent que les plages sont moins surveillées par temps de pluie », explique Fabien Touchard.
    Et ils partent de plus en plus loin. « Avant, les canots partaient depuis le Calaisis ou le Dunkerquois. Maintenant, on reçoit des appels à l‘aide des personnes qui se trouvent à Boulogne-sur-Mer, au Touquet, à Berck », développe Salomé. Soit des villes plus au sud, très éloignées des côtes anglaises. « Si avant, les migrants mettaient six ou huit heures pour aller de Calais à Douvres [port de débarquement des migrants en Angleterre, ndlr], désormais ils doivent doubler voire tripler ce temps de trajet en mer ». Enfin, les montées à bord aussi se complexifient, notamment à cause d’un nouveau phénomène de « montées sauvages ». Les exilés qui vivent depuis plusieurs semaines voire mois dans le nord de la France n’ont parfois plus les moyens de payer les passeurs. « Ils ont épuisé leurs économies dans différentes tentatives », explique encore Salomé Bahri. « Ils ont tenté la traversée deux trois, quatre fois, 10 fois... Quand ils n’ont plus rien, ils essaient alors de monter à la dernière minute à bord d’une embarcation, gratuitement, avec les problèmes que cela peut créer : surnombre, altercations avec les autres passagers… » Malgré tous ces dangers, les traversées de la Manche sont loin d’être enrayées. Depuis le début de l’année, plus de 10 000 migrants sont arrivés sur le sol anglais, contre 7 600 l’année dernière à la même période. Et les morts ne cessent d’augmenter. Au moins 16 exilés sont morts en tentant de traverser la Manche depuis le début de l’année 2024. Ils étaient 12 pour l’ensemble de l’année 2023, et un en 2022, selon la préfecture de la Manche et de la mer du Nord.

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  • Comment les Vietnamiens sont devenus parmi les principaux migrants sur les « small-boats » vers l’Angleterre - InfoMigrants
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    Comment les Vietnamiens sont devenus parmi les principaux migrants sur les « small-boats » vers l’Angleterre
    Par Louis Chahuneau Publié le : 30/05/2024
    Depuis le début de l’année, les migrants vietnamiens sont de plus en plus nombreux à traverser la Manche en direction du Royaume-Uni. Depuis le drame du camion charnier en 2019 où 39 Vietnamiens avaient trouvé la mort par asphyxie en se rendant de manière irrégulière au Royaume-Uni, les exilés originaires du Vietnam continuent de tenter d’atteindre les côtes britanniques, mais par voie maritime.
    Au Royaume-Uni, 10 Downing street tremble. À cinq semaines des élections législatives britanniques, le Premier ministre conservateur Rishi Sunak ne parvient pas à limiter le nombre de migrants arrivant par bateau au Royaume-Uni : elles ont atteint un record sur les premiers mois de l’année 2024 avec 10 000 passages.Récemment, le ministère de l’Intérieur britannique a constaté un autre phénomène inquiétant. Depuis le début de l’année, la part de migrants vietnamiens sur les « small-boats » a considérablement augmenté. Entre janvier et mars 2024, 1 060 personnes originaires du Vietnam ont débarqué au Royaume-Uni par bateau, soit 14% du total des arrivées. Selon les médias britanniques, ils représentent désormais la plus large communauté qui traverse la Manche.
    « Une théorie sur l’augmentation récente des traversées en bateau est que l’autre itinéraire irrégulier, à l’arrière d’un camion à travers le tunnel sous la Manche, est devenu plus difficile en raison des réglementations récemment mises en œuvre dans le cadre du Brexit. Cela a poussé les migrants vietnamiens à emprunter les petites embarcations », explique à InfoMigrants Seb Rubsy, sociologue britannique à l’Université de Birmingham et spécialiste de cette communauté. « Avec le Brexit, les échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l’Europe continentale ont été réduits, ce qui a entraîné une diminution du nombre de camions transportant des marchandises entre les deux régions », complète Mimi Vu, experte indépendante sur le trafic d’êtres humains.
    En 2019, la Grande-Bretagne a par ailleurs été marquée par la tragédie du camion charnier retrouvé dans l’Essex, dans lequel 39 migrants vietnamiens avaient trouvé la mort par asphyxie. Un drame qui a également participé au changement de méthode. Chez les bénévoles français qui maraudent sur les plages du nord, c’est un peu la sidération. « À notre grande surprise, on a constaté depuis le début de l’année beaucoup de Vietnamiens sur la côte. C’est incroyable, c’est une population qu’on ne croisait pas du tout avant », raconte à InfoMigrants Olivier Ternisien d’Osmose 62 qui patrouille sur les plages dans le Boulonnais et le Montreuillois.
    « On croise autant de femmes que d’hommes, des personnes plutôt jeunes mais je n’ai pas vu de familles avec enfants », ajoute Sophie Roux, de la même association, qui se souvient d’une communauté un peu plus argentée que d’autres : « Quand ils échouent à traverser, ils ne cherchent même pas à négocier le prix des taxis pour rentrer vers Dunkerque », se souvient-elle. Même écho chez les bénévoles d’Utopia 56. « Depuis l’été dernier, on voit de plus en plus de Vietnamiens sur le littoral nord, surtout à Grande-Synthe et Dunkerque », commente Angèle Vettorello, coordinatrice de l’association à Grande-Synthe.
    Dans les années 2010, les Vietnamiens se regroupaient essentiellement vers Angres (Pas-de-Calais), à une centaine de kilomètres des côtes françaises. Les médias avaient même surnommé cette ville « Vietnam city » en raison de l’entraide qui régnait entre l’ex-municipalité communiste et cette communauté asiatique à qui elle avait mis un local à disposition. Mais les temps ont changé et le hangar a fermé en 2018. Désormais, les Vietnamiens se mélangent d’avantage aux autres communautés (kurde, bangladaise ou encore soudanaise). « Il y a de plus en plus de Vietnamiens qui viennent sur les points de distribution, ce qui nous a poussé à traduire nos textes de prévention en vietnamien », explique encore Salomé Bahri d’Utopia 56. « Parfois on voit des Kurdes et des Vietnamiens prendre un bateau ensemble. Je pense que les communautés se mélangent de plus en plus car le nombre de passagers par ’small-boat’ est de plus en plus élevé ». (...)
    Les migrants vietnamiens peuvent aussi compter sur l’appui d’une communauté historiquement établie en France. Fin mai, une opération de police conjointe menée par les services de l’Office central de lutte contre le trafic illicite de migrants (OLTIM) et la police anglaise ont permis de démanteler une filière de passeurs de migrants entre la France et le Royaume-Uni. Douze personnes, soupçonnées d’être des logeurs ou des convoyeurs, ont été arrêtées en banlieue parisienne, tandis que quatre autres ont été interpellées en Angleterre. Parmi eux, un jeune homme de 25 ans, surnommé
    Cette opération de police a permis de comprendre comment fonctionne les réseaux de passeurs vietnamiens. « Pour diminuer leurs frais de passages clandestins, les migrants transportaient de la métamphétamine, afin d’alimenter les trafiquants asiatiques du Val-de-Marne », expliquent les enquêteurs français dans un document consulté par InfoMigrants. Lors d’une perquisition, les policiers ont notamment découvert chez l’un des suspects 218 grammes de kétamine, 102 grammes de méthamphétamine et 36 grammes d’ecstasy, des drogues de synthèse.
    "Depuis la tragédie de l’Essex, les trafiquants demandent dorénavant 50 000 dollars [environ 46 000 euros, ndlr], voire plus, et prétendent garantir la sûreté du voyage jusqu’au Royaume-Uni avec un emploi à la clé, expliquaient dans une étude parue en 2020 les expertes indépendantes Nadia Sebatoui et Mimi Vu. « Les familles empruntent au moins la moitié de la somme totale pour payer la première partie du voyage du Vietnam jusqu’à un pays européen (…) Les trafiquants et les groupes criminels utilisent cette situation d’endettement pour exercer un contrôle sur le migrant tout au long du voyage, ce qui l’oblige à se soumettre en route à des situations d’exploitation, par exemple en étant forcé de travailler dans un atelier clandestin ou de vendre des médicaments contrefaits. »
    Le réseau franco-britannique logeait des migrants dans plusieurs communes du Val-de-Marne, à Thiais, Choisy-le-Roi ou encore Ivry-sur-Seine. « L’un des interpellés a confié aux policiers que le coût de la traversée était d’environ 20 000 euros par migrant. Son rôle était de réceptionner des migrants vietnamiens fraîchement arrivés en France avec des visas hongrois de deux ans. Il devait ensuite leur trouver des hébergements et un emploi dans des ongleries. »
    D’après les études publiées ces dernières années, il apparaît que les migrants vietnamiens profitent des relations diplomatiques entre leur pays et les anciens États du bloc communiste (Hongrie, Roumanie, Slovaquie, Pologne...) pour atteindre l’Europe. « Entre 1981 et 1990, 217 183 Vietnamiens ont été employés sous contrat dans ces pays », expliquent notamment deux chercheurs dans une enquête de terrain publiée en 2017."La majorité des nouveaux arrivants sont originaires de quelques provinces du centre du Vietnam, comme Nghệ An et Hà Tĩnh, qui ont été négligées sur le plan économique et présentent des taux de chômage élevés. Ils sont généralement issus de milieux pauvres, ruraux ou urbains, et n’ont probablement pas de diplôme universitaire", analyse le chercheur britannique Seb Rusby. Actuellement, il semblerait que la Hongrie tienne la corde pour attirer les migrants vietnamiens.
    Il y a quelques années, des passeurs ont ainsi profité d’un partenariat entre le Vietnam et Malte pour inscrire de jeunes Vietnamiens au Malta College of Arts, Science and Technology. Selon le quotidien britannique The Guardian, sur les 265 étudiants vietnamiens qui ont obtenu ce visa, seuls deux sont depuis rentrés au Vietnam."Ces enfants, à la merci des réseaux de passeurs, ont été retrouvés par la police dans des pays comme la Belgique, l’Allemagne et la Suisse, réduits en esclavage dans des salons de manucure et exploités", explique l’experte indépendante Mimi Vu. Depuis, l’université a fermé son visa.
    Lorsqu’ils arrivent au Royaume-Uni, les Vietnamiens sont employés dans des bars à ongles, ou plus rarement dans des fermes à cannabis, que la police britannique ferme régulièrement. Au début des années 2000, la diaspora vietnamienne a importé au Royaume-Uni le concept des bars à ongles très populaire aux États-Unis. « Depuis, ils représenteraient plus de 60% des commerces montés par la communauté vietnamienne », constatent des chercheurs.
    Les réseaux de passeurs vietnamiens récupèrent directement leurs clients à la sortie des « small-boats ». « Ce qu’on comprend c’est qu’il y a une grosse organisation côté anglais, ils savent où ils vont. Tout est organisé de l’autre côté », explique Olivier Ternisien de l’association Osmose 62. Pour tenter de décourager les Vietnamiens de monter sur les frêles embarcations, le gouvernement britannique a lancé il y a quelques semaines une campagne de communication sur les réseaux sociaux pour les sensibiliser aux dangers de la traversée de la Manche. De quoi remédier au phénomène ? Au moins 16 migrants sont morts en tentant de traverser la Manche depuis le début de l’année 2024.

    #Covid-19#migrant#migration#vietnam#royaumeuni#routemmigratoire#mineur#famille#traversee#manche#reseau#sante#trafic

  • Canaries : la petite île d’El Hierro débordée par l’afflux migratoire - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/57316/canaries--la-petite-ile-del-hierro-debordee-par-lafflux-migratoire

    Routes migratoires : les Canaries débordées
    Canaries : la petite île d’El Hierro débordée par l’afflux migratoire
    Par FRANCE 24 Publié le : 27/05/2024
    Au large du Maroc, les îles espagnoles des Canaries font face à leur pire crise migratoire depuis 2006. En un an, plus de 30 000 migrants sont arrivés sur l’archipel. Sur le seul mois de janvier, El Hierro, la plus petite île des Canaries, a vu débarquer sur ses côtes pas moins de 4 000 migrants. Malgré l’organisation conjointe des habitants et des associations, l’île est débordée. Un reportage de Clara Le Nagard et Armelle Exposito.
    L’île d’El Hierro, un territoire de 268 kilomètres carrés situé à 1 000 kilomètres des premières côtes de la péninsule ibérique, est devenue le symbole de la crise migratoire en Espagne. En un an, la plus petite île de l’archipel des Canaries a vu débarquer sur ses côtes plus de 14 000 migrants, alors même qu’El Hierro compte moins de 10 000 habitants et seulement trois communes.
    Face à cet afflux, l’île s’est organisée tant bien que mal en déployant des infrastructures de premiers soins dans le port de La Restinga, au sud de l’île, et en construisant deux centres d’accueil, un pour les majeurs et un pour les mineurs. Au cœur du problème se trouvent les mineurs qui ne peuvent plus être accueillis et qui sont envoyés vers d’autres îles des Canaries, comme Tenerife et Gran Canaria. Une situation devenue impossible à gérer, puisque les centres d’accueil sont débordés là-bas aussi.
    Sur le terrain, les associations et les habitants sont dévoués et font de leur mieux pour prendre en charge les migrants, qui arrivent souvent du Sénégal, du Mali ou encore de la Mauritanie. Depuis plus d’un an, le gouvernement des Canaries alerte Madrid sur la gravité de la situation et a soumis une proposition législative visant à répartir les mineurs migrants non accompagnés dans toutes les communautés autonomes d’Espagne.

    #Covid-19#migrant#migration#espagne#canaries#routemigratoire#atlantique#fluxmigratoire#sante#elhierro

  • Immigration irrégulière : un ingénieur en génie civil et un tailleur attraits à la barre pour tentative de convoyage de candidats au voyage.
    https://www.dakaractu.com/Immigration-irreguliere-un-ingenieur-en-genie-civil-et-un-tailleur-attrai

    Immigration irrégulière : un ingénieur en génie civil et un tailleur attraits à la barre pour tentative de convoyage de candidats au voyage.
    Immigration irrégulière : un ingénieur en génie civil et un tailleur attraits à la barre pour tentative de convoyage de candidats au voyage.Ma. Mbaye, M. Cissé et Mo. Mbaye ont été attraits, ce 31 mai, devant la barre du tribunal correctionnel pour répondre du délit de tentative de convoyage de candidats à l’immigration clandestine. Ils ont tous été appréhendés à Rufisque après que les enquêteurs ont reçu des renseignements sur cette affaire.
    Ils ont tous contesté les faits, mais il ressort du Pv
    d’enquête que les accusés s’organisaient pour une immigration clandestine. Alors arrêtés, 5 téléphones ont été saisis par les enquêteurs. En cours de route, un des appareils a sonné pour renseigner sur la présence d’individus qui attendaient près de la Sonatel de Rufisque. L’enquête a permis de savoir que le sieur Cissé devait les amener à Ndayane.« Quand le téléphone a sonné c’est un individu qui m’a dit qu’il était sur le site. Je ne devais pas les amener à Ndayane parce que je ne connais pas Ndayane », s’est justifié M. Cissé, ingénieur en génie civil vivant en Mauritanie.
    « Je suis venu au Sénégal entre le 08 et le 09 mai dernier », a-t-il précisé.Pour sa part, Ma. Mbaye tailleur de son état a expliqué avoir été arrêté près d’une pharmacie à Rufisque.
    « Nous n’avons jamais agi pour convoyer des candidats. On m’a arrêté en compagnie de M. Cissé », a-t-il déclaré.
    Revenant à la charge, le procureur a rappelé avoir lui-même entendu les accusés au parquet et ils avaient reconnu le délit de tentative de convoyage de candidats à l’immigration. M. Cissé et Ma. Mbaye ont finalement approuvé.
    « Nous devions juste convoyer des individus à Diamniadio », dira M. Cissé.
    Interpellé sur son implication, le jeune élève Mo. Mbaye a indiqué n’être mêlé ni de près ni de loin à cette affaire.
    « Mon père Ma. Mbaye m’a demandé de lui amener des gosses qui étaient arrivés à la maison et c’est lorsque je suis parti là-bas que les policiers m’ont arreté », a soutenu le jeune élève.
    L’enquête révèle que plusieurs candidats ont témoigné avoir été aidés par les 2 accusés Ma. Mbaye et M. Cissé pour effectuer le voyage. Le document a indiqué que M. Cissé est considéré comme le convoyeur et que M. Mbaye lui, devait servir de capitaine de bord. Ils ont tous les deux refuté les charges.Pour l’avocat de la défense, il n’y a pas d’éléments suffisants incriminant les accusés.
    « Ce sont des individus qui ont été arrêtés alors qu’ils n’étaient que 2 sur le lieu de leur arrestation. Pour convoyer des candidats à l’immigration, il faut plus que ça », a dit la robe noire.
    L’avocat de l’élève a plaidé le renvoi des fins de la poursuite à son encontre car n’ayant obéi qu’à son père. Sur le cas du père Ma. Mbaye, le conseil a également plaidé la relaxe.« Il ressort de l’enquête qu’il n’y a ni offre, ni contrepartie financière, ni matériel », a soutenu le conseil.L’affaire est mise en délibérée en huitaine au 07 juin prochain…

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#migrationirreguliere#Ndayane#mauritanie#rufisque#trafic#droit#sante

  • Coopération Italiano-Sénégalaise : Le ministre Yankhoba Diémé plaide pour la régularisation des « sans papiers » sénégalais
    https://www.dakaractu.com/Cooperation-Italiano-Senegalaise-Le-ministre-Yankhoba-Dieme-plaide-pour-l

    Coopération Italiano-Sénégalaise : Le ministre Yankhoba Diémé plaide pour la régularisation des « sans papiers » sénégalais
    Prenant part à la fête marquant le 78ème anniversaire du Référendum de 1946, faisant de l’Italie, une République, le ministre Yankhoba Diémé a plaidé pour la régularisation des ressortissants sénégalais sans papiers en Italie. « L’Italie est l’un des premiers pays d’europe en matière d’accueil de ressortissants sénégalais. La forte communauté sénégalaise d’Italie jouit d’un niveau d’intégration très appréciable. La décision des autorités italiennes de régulariser le séjour de plusieurs d’entre eux en 2020 constitue assurément une belle preuve de Téranga à l’italienne et d’intégration entre nos deux peuples. Tout en félicitant cette heureuse initiative, je voudrais au nom du gouvernement sénégalais plaider pour son renouvellement », a souhaité le ministre du Travail, de l’Emploi et des Relations avec les institutions. Il a par ailleurs énuméré les programmes et projets de partenariat entre le Sénégal et l’Italie : "il s’agit du programme d’appui au développement économique et social du Sénégal (PADESS), de la Plateforme d’Appui au Secteur Privé et à la Valorisation de la Diaspora Sénégalaise en Italie (PLASEPRI).

    #Covid-19#migration#migrant#senegal#integration#italie#regularisation#developpement#economie#sante

  • En Libye, Benghazi, nouveau hub de la migration clandestine vers les Etats-Unis
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/05/31/en-libye-benghazi-nouveau-hub-de-la-migration-clandestine-vers-les-etats-uni

    En Libye, Benghazi, nouveau hub de la migration clandestine vers les Etats-Unis
    Par Nissim Gasteli (Tunis, correspondance)
    Le 18 mai, peu après minuit, un Boeing 777 de la compagnie aérienne libyenne Ghadames Air décolle de l’aéroport Benina à Benghazi, la plus grande ville de l’est de la Libye, pour atterrir quatorze heures plus tard sur l’aéroport de Managua, au Nicaragua. Selon la chaîne de télévision nicaraguayenne 100 % Noticias, 367 passagers de nationalité indienne se trouvaient à son bord. Le 23 mai, une autre rotation a eu lieu à bord du même appareil avec 298 Indiens. Tous avaient l’intention de rallier ensuite les Etats-Unis.
    Plus tôt, le 28 février et le 14 mars, deux vols similaires avaient été opérés depuis la capitale libyenne, Tripoli, sans que des informations sur la nationalité des passagers soient divulguées. Contactés, ni le ministère nicaraguayen des affaires étrangères ni les autorités aéroportuaires du pays n’ont répondu aux sollicitations du Monde sur ce qui apparaît comme l’ouverture d’une nouvelle route clandestine vers la frontière américaine. Aucune confirmation officielle de ces vols inédits n’a été donnée, mais l’aéroport international Augusto C. Sandino à Managua est aujourd’hui reconnu comme un important point de transit pour les candidats à l’immigration vers les Etats-Unis. En décembre 2023, un avion avec à son bord plus de 300 Indiens avait déjà été immobilisé à l’aéroport de Paris-Vatry (Marne) pour « soupçons de traite d’êtres humains » alors qu’il effectuait une escale technique entre Dubaï et la capitale nicaraguayenne.
    Depuis 2021, « le Nicaragua a ouvert ses frontières aux ressortissants de pays politiquement difficiles, leur permettant de venir sans visa », moyennant un paiement à l’arrivée, explique Manuel Orozco, expert en migration au sein du Dialogue interaméricain, un centre de réflexion basé à Washington. Selon les données qu’il a collectées, 1 145 vols charters ont atterri à Managua depuis mai 2023, provenant principalement d’Amérique latine, mais aussi de Casablanca, au Maroc, et récemment de Benghazi.
    Le régime de Daniel Ortega, président « anti-impérialiste » du Nicaragua, tire profit de ces arrivées d’un point de vue à la fois politique – en accroissant les problèmes à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis, qui ont placé Managua sous sanctions depuis 2021 – et économique. M. Orozco estime à environ 30 millions de dollars les recettes générées par les pénalités de visa que Managua impose aux migrants clandestins, sans compter tous les revenus liés à leur transit dans le pays (transport, hébergement…).
    Avec cette nouvelle route, le Nicaragua opère une jonction avec la Libye, l’un des principaux points de passage de la migration africaine vers l’Europe. Cette filière a émergé comme une alternative aux routes passant par la Turquie, verrouillées à partir de 2016 et la signature d’un accord entre Bruxelles et Ankara. Les exilés venus d’Asie, qui arrivent majoritairement par voie aérienne, se sont reportés sur les aéroports libyens, devenus des hubs pour les réseaux de passeurs.La compagnie syrienne Cham Wings, célèbre pour ses activités illicites comme le trafic de mercenaires, de stupéfiants et d’armes, qui lui ont valu d’être sanctionnée par l’Union européenne (UE), a ajouté le transport de migrants à ses spécialités. Elle vend aux candidats à l’exil un package à 1 200 dollars (environ 1 110 euros), selon une enquête du site d’information Al-Araby Al-Jadid, qui comprend le vol depuis Damas ou Beyrouth et l’autorisation de sécurité, document indispensable pour entrer dans les zones contrôlées par le gouvernement de l’Est libyen. Cham Wings Airlines propose aussi des connexions depuis les pays du Golfe.
    Quelques heures avant le décollage du vol du 18 mai pour Managua, un appareil de Cham Wings, un Airbus A320 d’une capacité de 150 à 180 passagers, s’est posé à l’aéroport de Benina en provenance de Damas. Il avait précédemment opéré un vol entre les Emirats arabes unis et l’Amérique centrale. Les mêmes mouvements se sont répétés le 23 mai. En février et en mars, avant de s’envoler pour le Nicaragua, le Boeing 777 de Ghadames Air a réalisé deux allers-retours vers l’aéroport de Tachkent, en Ouzbékistan. Acquis fin 2023, cet appareil d’une capacité de 400 passagers n’a été utilisé qu’à ces occasions, d’après les sites de suivi du transport aérien.
    « Emmener des migrants depuis l’Ouzbékistan ou encore l’Inde et leur promettre qu’ils vont arriver dans le sud des Etats-Unis, en traversant plusieurs pays et continents de manière irrégulière, ne peut se faire que grâce à des réseaux criminels transnationaux et la complicité de certains Etats », analyse Jalel Harchaoui, chercheur associé au Royal United Services Institute for Defence and Security Studies. L’utilisation de l’aéroport de Benghazi pour de tels vols se fait, sans aucun doute, avec l’assentiment du maréchal Khalifa Haftar, l’homme fort de l’est de la Libye. L’Armée nationale libyenne (ANL) qu’il commande assure la sécurité des lieux et garde un œil sur les arrivées et départs de passagers, comme a pu le constater Le Monde en septembre.
    Outre ses activités civiles, cet aéroport international sert de base pour l’ANL de M. Haftar, qui est accusé depuis plusieurs mois de favoriser la migration vers l’Europe, tant pour des raisons économiques que comme levier de négociations avec l’UE. « Les dirigeants européens sont d’autant plus prêts à venir honorer et, de fait, reconnaître le clan Haftar que le nord de la Cyrénaïque est devenu une plaque tournante de la migration », relève M. Harchaoui.
    Mais, en laissant transiter des migrants vers l’Amérique, M. Haftar prend le risque de compliquer davantage ses relations avec les Etats-Unis. Washington s’inquiète déjà de la présence croissante de la Russie et de son Africa Corps – le nouveau label des milices du Groupe Wagner – dans les zones contrôlées par l’ANL. Au cours des derniers mois, l’envoi de matériel par Moscou, via le port syrien de Tartous, s’est multiplié. Début mai, un porte-parole du département d’Etat expliquait au Monde être « préoccupé par les activités de Wagner soutenues par la Russie sur le continent, qui alimentent les conflits et favorisent la migration irrégulière ».
    Dans le contexte de la campagne électorale aux Etats-Unis, en vue de la présidentielle de novembre, la question migratoire est devenue un sujet de crispation. Ces vols « vont faire réagir » à Washington, prédit Jalel Harchaoui. L’administration américaine a en effet multiplié les actions pour combattre les arrivées de migrants du monde entier à sa frontière sud. Elle a notamment sollicité de la part des pays de transit l’imposition de visas aux ressortissants de pays identifiés comme pourvoyeurs de migrants et déployé un arsenal de pressions et de sanctions contre les compagnies aériennes et les prestataires de services qui facilitent les vols charters. « Je pense que la Libye était le point de départ cette fois-ci, tout comme le Maroc avant… C’est une façon de provoquer les Etats-Unis et de voir jusqu’à quel point ils tolèrent le Nicaragua », conclut Manuel Orozco.

    #Covid-19#migrant#migration#libye#etatsunis#nicaragua#migrationirreguliere#ouzbekistan#inde#turquie#routemigratoire#visas#transit#sante#maroc

  • « La surenchère sur l’immigration en Europe repose davantage sur des formules simplistes que sur des idées réalisables »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/06/01/la-surenchere-sur-l-immigration-en-europe-repose-davantage-sur-des-formules-

    « La surenchère sur l’immigration en Europe repose davantage sur des formules simplistes que sur des idées réalisables »
    Philippe Bernard Editorialiste au « Monde »

    S’il est un domaine où personne ne conteste le rôle primordial que doit jouer l’Europe, c’est bien celui de l’immigration. Parce que le continent, prétendument en perte de vitesse, attire massivement les laissés-pour-compte du développement, les victimes des guerres et des tyrannies politiques. En 2023, 380 000 personnes sont entrées irrégulièrement dans l’Union européenne (UE) – une goutte d’eau au regard des 450 millions d’habitants –, ce chiffre est le plus élevé depuis 2016. Mais aussi parce que le projet européen, bâti sur la libre circulation des biens et des personnes, impose, sous peine de déliquescence, un contrôle des frontières extérieures de l’UE. 86 % des Européens souhaitent le voir renforcé selon une enquête du cercle de réflexion Fondapol, dont 80 % des électeurs de gauche.
    L’ennui est que les discours sur ce sujet, qui domine la campagne des élections européennes du 9 juin, tournent davantage autour de slogans simplistes que sur des idées susceptibles d’avoir prise sur la réalité.
    Prenez la « double frontière » prônée par Jordan Bardella, tête de liste du Rassemblement national (RN). Il s’agit d’abord de « refouler systématiquement les bateaux de migrants qui veulent arriver sur le sol européen ». Sur ce point, l’héritier de Marine Le Pen devrait demander conseil à Giorgia Meloni. La présidente du conseil italien est arrivée au pouvoir en promettant un « blocus naval » dans ce but. Depuis qu’elle dirige son pays, elle en appelle à la solidarité de l’UE et à la coopération des pays d’Afrique du Nord pour prévenir les arrivées. Elle a même autorisé 452 000 étrangers à travailler en Italie d’ici à 2025.
    M. Bardella veut, de surcroît, priver les étrangers non ressortissants de l’UE de la libre circulation dans l’espace Schengen. Mais lorsque le premier ministre, Gabriel Attal, lui a fait remarquer qu’une telle mesure impliquerait de contrôler tout le monde, y compris les travailleurs frontaliers, et créerait d’immenses files d’attente, le leader d’extrême droite s’est replié sur l’idée de « renforcer les contrôles aléatoires », précisément ce qui se fait aujourd’hui.
    Le même décalage entre slogan choc et réalité vaut pour l’idée des « barrières physiques à l’Est (murs, fossés, caméras, intelligence artificielle, etc.) » que François-Xavier Bellamy, tête de la liste Les Républicains (LR) aux européennes, rêve de déployer. L’exemple des murs érigés à la frontière mexicaine, notamment au cours du mandat de Donald Trump, qui n’empêchent pas des arrivées record de migrants, fait douter de l’efficacité de ces installations.
    Quant à la promesse phare de l’ancien premier ministre britannique Boris Johnson, reprise par son successeur, qui consiste à expulser vers le Rwanda les demandeurs d’asile, elle fait des émules dans l’UE. Mais elle ne sera pas honorée, a dû admettre Rishi Sunak, avant les élections générales du 4 juillet. Et probablement jamais, puisque les travaillistes, largement favoris, ont promis de l’annuler. Ce « plan Rwanda », en a conclu le Labour, « était une escroquerie du début à la fin ».
    Que les slogans démagogiques se muent rarement en mesures efficaces ne signifie pas que toute action soit vaine. Fruit de compromis laborieusement négociés pendant huit ans, le pacte sur la migration et l’asile, adopté par les Vingt-Sept et validé le 10 avril par les députés européens, a beaucoup de défauts. Il est muet sur les noyades en Méditerranée et ne remet pas en cause la règle dite « de Dublin », qui désigne le pays de première entrée comme le seul à devoir examiner les demandes d’asile et pénalise les Etats situés à la périphérie sud de l’Union.
    Centré sur l’endiguement des arrivées, ce « pacte » risque d’empêcher certaines personnes persécutées d’accéder à l’asile. Et ne constitue pas l’amorce d’une politique commune d’immigration destinée à définir le profil des étrangers dont l’Europe souhaite la venue, pour sa démographie et son économie, dans un « marché » migratoire mondial dont les Etats-Unis et le Canada, par exemple, savent tirer le maximum.
    Pourtant, ce « pacte », en généralisant le filtrage des arrivants et en accélérant les procédures d’examen des demandes d’asile aux frontières extérieures (mais non dans des pays tiers), constitue la première réponse commune des Vingt-Sept aux crises récurrentes et aux inquiétudes des populations. La typologie complexe des votes sur ce texte au Parlement européen reflète des préoccupations de politique intérieure : les députés conservateurs et socio-démocrates allemands et espagnols l’ont très largement approuvé, mais, parmi les élus français, presque aucun socialiste ou LR.
    Or, sitôt adopté, ce compromis, qui amorce un mécanisme attendu de responsabilité et de solidarité commun, est remis en cause par certains de ses promoteurs, comme les conservateurs allemands de la CDU à laquelle appartient la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Sous la pression de l’extrême droite, à l’approche du scrutin européen, ils défendent désormais l’idée d’une externalisation du traitement des demandes d’asile sur le modèle « rwandais » du Royaume-Uni. Les dirigeants de quinze pays de l’UE viennent de signer un appel commun dans ce sens.
    Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Quinze pays de l’Union européenne réclament l’externalisation des demandeurs d’asile
    Quant au RN, il veut supprimer la possibilité de demander l’asile une fois sur le sol français, seuls les consulats à l’étranger pouvant les recueillir. Un projet ingérable et injuste – il provoquerait un afflux de migrants aux guichets consulaires tandis que les véritables persécutés craindraient de s’y rendre –, bafouant de surplus la convention de Genève sur les réfugiés qui oblige à examiner la situation de ceux qui continueraient à entrer en France. Au rythme de ces embardées répressives et de ces slogans liberticides, le pacte migratoire européen, voué aux gémonies par l’extrême droite comme un « pacte de submersion », va finir par paraître pour ce qu’il est : insatisfaisant mais modéré.

    #Covid-19#migrant#migration#UE#france#election#immigration#politiquemigratoire#sante#droit

  • Demandeurs d’asile : « Derrière les “défaillances systémiques” du dispositif d’accueil français, il y a un refus d’adopter des solutions pragmatiques »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/05/31/demandeurs-d-asile-derriere-les-defaillances-systemiques-du-dispositif-d-acc

    Demandeurs d’asile : « Derrière les “défaillances systémiques” du dispositif d’accueil français, il y a un refus d’adopter des solutions pragmatiques »
    Tribune Guillaume Rossignol, directeur du Jesuit Refugiee Service
    En mars 2024, un arrêt du Conseil du contentieux des étrangers belge a empêché le transfert d’un demandeur d’asile vers la France au vu de « défaillances systémiques » du dispositif d’accueil de l’Etat français. Selon cet arrêt, ce demandeur d’asile risquait d’être traité de manière incompatible avec ses droits fondamentaux. « Certaines nuits, je reste assis sur une chaise près des agents de sécurité d’un hôpital, par crainte d’être de nouveau agressé durant mon sommeil », témoigne, par exemple, M. N., demandeur d’asile, accompagné par le Service jésuite des réfugiés (JRS France).
    Les défaillances dans l’accueil des demandeurs d’asile ne sont pas nouvelles. La France a ainsi été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme en 2021 pour les traitements inhumains et dégradants dont avaient été victimes des personnes en demande d’asile. Mais le plus inquiétant est l’ampleur de ces défaillances.
    Au 31 mars 2024, selon les chiffres issus d’Eurostat et de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), un organisme chargé de délivrer les « conditions matérielles d’accueil », c’est-à-dire une domiciliation, un hébergement et une allocation minimale assurant aux demandeurs un niveau de vie digne qui garantisse leur subsistance et protège leur santé physique et mentale, plus de 46 000 personnes en demande d’asile en étaient privées.
    Or, plus qu’une crise du système d’accueil contre laquelle « on ne pourrait rien » – elle résulterait, par exemple, de l’impossibilité de traiter de trop nombreuses demandes –, certains cas manifestent une volonté délibérée de laisser perdurer ces situations et de justifier l’injustifiable, en s’abritant derrière le paravent du « droit ».
    Ainsi en est-il de la politique française envers les demandeurs d’asile dits « dublinés », par référence au règlement européen de Dublin, organisant les procédures d’asile au sein de l’Union européenne (UE) et dont les principes ont été globalement repris par le pacte européen sur l’asile et la migration adopté le 14 mai 2024.
    Ces personnes, qui ont demandé la protection internationale de la France et y séjournent, sont entrées sur le territoire de l’UE par un autre pays. En application des textes précités, la France peut, pendant une durée de dix-huit mois, demander leur transfert dans le pays par lequel elles sont entrées dans l’UE (procédure Dublin) afin que ce pays assume et instruise lui-même la demande d’asile. Mais, une fois passé ce délai, la France devient responsable de leur demande d’asile. Or, nos autorités refusent à ces personnes tout moyen de subsistance, prétendant ne pas y être tenues en application du droit en vigueur.
    Quelle que soit l’interprétation que l’on donne du droit français ou européen applicable, les priver d’une allocation et d’un hébergement en plus d’un accès au travail, c’est laisser les demandeurs d’asile dans une situation inhumaine et dégradante qui ne peut être conforme à aucun droit. Une première en la matière, le Service jésuite des réfugiés (JRS France) vient d’introduire devant le Conseil d’Etat une requête « en reconnaissance de droits » − un dispositif original introduit par une loi de 2016 sur la modernisation de la justice du XXIe siècle − pour faire reconnaître les droits individuels de l’ensemble de ces personnes au bénéfice des « conditions matérielles d’accueil ».
    Nous ne devons pas laisser justifier l’injustifiable, mais garder le souci de la justice. Derrière ces « défaillances systémiques » du dispositif d’accueil français, il y a aussi un refus d’adopter des solutions pragmatiques, en laissant l’idéologie prendre le dessus. Selon l’économiste El Mouhoub Mouhoud, président de l’université Paris-Dauphine-PSL, nous assistons à un « recul inquiétant de l’argumentation rationnelle » sur les questions d’immigration.
    Ainsi, une grande pluralité d’acteurs, y compris le Medef et les syndicats de salariés, se sont prononcés en faveur d’une solution simple : l’accès au travail des demandeurs d’asile. Cela réduirait, en effet, les coûts de leur accueil tout en leur permettant de se sentir utiles et en faisant rentrer des ressources dans le budget de l’Etat, à l’heure où les finances sont au rouge, le tout dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre, puisque les trois quarts des PME françaises déclaraient, fin 2023, rechercher en vain du personnel.
    Renoncer aux discours réducteurs
    D’après un rapport de JRS France, fondé sur les données d’enquêtes publiques de la Commission européenne, la France est le seul pays de l’Union européenne, avec la Hongrie, à ne pas accorder aux demandeurs d’asile un accès effectif au marché du travail.
    Si tous les autres pays européens le font, ce n’est pas uniquement parce que c’est un droit établi par la directive européenne accueil mais aussi, et peut-être d’abord, parce que cela sert leurs intérêts économiques et sociaux sans que soit constaté pour autant un quelconque « appel d’air ». Il nous faut garder le souci de la réalité ; la réalité, c’est bâtir des solutions viables qui ne renoncent pas à l’humain.
    Si les situations indignes se propagent, c’est que nous n’y résistons pas avec assez de force, parce que nous perdons la perception de l’unicité et du caractère irremplaçable de chacun. C’est là le danger qui nous menace et menace l’Europe. Dans son poème Restons éveillés, dédié aux travailleurs immigrés, Missak Manouchian nous l’intimait déjà : il nous faut renoncer aux discours réducteurs pour garder claire vision et hauteur de vue.
    Guillaume Rossignol est directeur de JRS France (Service jésuite des réfugiés), une organisation catholique internationale qui agit aux côtés des demandeurs d’asile et des réfugiés.

    #Covid-19#migrant#migration#france#UE#asile#droit#sante#refugie#accueil

  • Affaire des cabinets de conseil : perquisition au ministère de la santé dans le cadre d’une information judiciaire pour « favoritisme »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/05/29/perquisition-au-ministere-de-la-sante-dans-l-affaire-des-cabinets-de-conseil

    Les gendarmes de la section de recherches de Paris ont perquisitionné le siège du ministère, ciblant le recours croissant par l’Etat aux cabinets de conseil, dont McKinsey, étroitement lié au chef de l’Etat.
    Par Samuel Laurent et Adrien Sénécat

    L’affaire concernant le recours aux cabinets de conseil connaît un nouvel épisode. Selon nos informations, confirmées de source judiciaire, les enquêteurs de la section de recherches de Paris ont procédé, mercredi 29 mai, à une perquisition au siège du ministère de la santé, rue de Ségur, à Paris, en présence des magistrats instructeurs.
    Cette perquisition est menée dans le cadre d’une information judiciaire ouverte le 21 octobre 2022 par le Parquet national financier (PNF) pour #favoritisme et #recel_de_favoritisme, à la suite d’un rapport de la commission d’enquête sénatoriale sur l’influence des cabinets de conseil privés sur les #politiques_publiques.

    Rendus publics le 16 mars 2022, les travaux de la commission sénatoriale, pilotée par Eliane Assassi (Parti communiste français) et Arnaud Bazin (Les Républicains), avaient pointé le « recours massif et croissant » par les services de l’Etat aux cabinets de conseil comme #Accenture, #CapGemini ou McKinsey : un peu moins d’un milliard d’euros pour l’année 2021, soit plus du double des 379 millions d’euros dépensés en 2018.

    Le rapport fustigeait globalement le « réflexe » du recours accru à ces sociétés privées pour assumer des missions relevant en principe de la compétence de la puissance publique, et décrivait un « phénomène tentaculaire », qui posait la question de la « souveraineté » de l’Etat face à ces cabinets. Il notait également le coût de ces multiples contrats : 3 millions d’euros pour la création, par CapGemini, d’un « baromètre des résultats de l’action publique » ; 2,15 millions pour « l’appui » de Roland Berger à la réforme de la formation professionnelle.

    Optimisation fiscale [ici, pour ne pas dire fraude fiscale]

    Un rapport de la Cour des comptes, dévoilé par Le Monde en décembre 2022, avait par ailleurs épinglé plus précisément le rôle de ces cabinets de conseil durant la pandémie de #Covid-19. Plus de 50 millions d’euros ont été dépensés pour des prestations de leur part, notamment en matière informatique. Si le ministre de la santé de l’époque, Olivier Véran, avait assuré que tout était « super clair et transparent », la Cour n’était pas de cet avis.

    Pour elle, nombre de ces dépenses posaient question quant au respect du droit de la commande publique, et l’urgence sanitaire, souvent invoquée par l’exécutif, ne pouvait suffire à tout justifier – « en période de guerre, regarde-t-on qui prépare les munitions, à quel endroit on le fait et si les munitions sont bien transférées dans l’arsenal ? » [ben oui], demandait Olivier Véran, alors ministre de la santé, face au Sénat, en février 2022. « L’urgence impérieuse a systématiquement été invoquée pour passer les marchés dans des délais courts sans mise en concurrence, ni négociation », regrettait la Cour, estimant que, dans certains cas, les missions confiées aux cabinets de conseil relevaient « du cœur de missions de service public » et auraient « pu être prises en charge par le ministère ».

    Elle s’interrogeait aussi sur les conditions d’attribution à certains cabinets de marchés-clés « sans mise en concurrence ni négociation ». Parmi ces cabinets figurait en premier lieu le cabinet McKinsey, bénéficiaire de sept contrats autour de la campagne de vaccination contre le Covid-19, pour un total de 11,6 millions d’euros.
    La « Firme », comme on surnomme ce géant américain, au chiffre d’affaires de 15 milliards d’euros (dont 329 millions d’euros en France), avait selon la commission sénatoriale, réussi à ne quasiment pas payer d’#impôt_sur_les_sociétés de 2011 à 2021. Le PNF a ouvert, le 31 mars 2022, une information judiciaire pour #blanchiment_aggravé et fraude fiscale aggravée, ciblant les pratiques d’optimisation fiscale du groupe américain. Le siège français de McKinsey a été perquisitionné le 24 mai 2022 dans ce dossier.

    Des liens étroits avec Emmanuel Macron

    Si McKinsey est au cœur des enquêtes et des polémiques, c’est aussi pour une autre raison, relevée par plusieurs enquêtes journalistiques, notamment celle du Monde, en février 2021 : la « Firme » entretient de longue date des liens étroits avec le candidat, puis chef de l’Etat, Emmanuel Macron. Les « MacronLeaks », cette fuite de données qui avait rendu publics des milliers de courriels internes de la campagne, ont montré que plusieurs hauts responsables de McKinsey, comme Karim Tadjeddine, qui a connu M. Macron au sein de la commission Attali en 2010, étaient au cœur du dispositif du futur chef de l’Etat en 2017. Une activité militante qu’ils exerçaient pro bono, sans être rémunérés, assurent-ils.

    La collusion [ici pour concomitence] entre cette présence d’importants cadres de McKinsey dans l’entourage proche du candidat Macron et la hausse importante du recours par l’Etat aux services des #cabinets_de_conseil ne pouvait que soulever des interrogations, balayées d’un revers de main par le candidat Macron, sur France 3, le 27 mars 2022 : « On a l’impression qu’il y a des combines ; c’est faux », s’était agacé le chef de l’Etat, ajoutant : « S’il y a des preuves de manipulation, que ça aille au pénal. »

    La justice l’a entendu : en novembre 2022, le Parquet national financier (#PNF) confirmait que trois procédures pénales étaient ouvertes. L’une ciblant les soupçons de fraude fiscale concernant McKinsey, une seconde, ouverte le 20 octobre 2022 à la suite de plusieurs signalements, se concentre sur les comptes de campagne d’Emmanuel #Macron pour 2017 et 2022 et vise à éclaircir les conditions d’intervention du cabinet McKinsey dans la campagne.

    Enfin, la troisième information judiciaire, ouverte le 21 octobre 2022, s’intéresse à un éventuel « favoritisme » dont aurait bénéficié #McKinsey par rapport à ses concurrents. C’est dans ce cadre que les gendarmes de la section de recherches de Paris ont procédé à cette perquisition rue de Ségur. Le PNF confirme par ailleurs au Monde que « l’enquête préliminaire sur le volet #fraude_fiscale, ainsi que l’information judiciaire sur le volet campagne présidentielle sont toujours en cours, notamment avec l’exploitation des documents saisis en perquisition ».

  • Les écoles privées attirent les étudiants étrangers sans master en quête de titre de séjour
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/05/24/les-ecoles-privees-seduisent-les-etudiants-etrangers-sans-master-en-quete-de

    Les écoles privées attirent les étudiants étrangers sans master en quête de titre de séjour
    Par Anjara Andriambelo
    Publié le 24 mai 2024 à 18h37, modifié le 25 mai 2024 à 08h30
    Poursuivre ses études en France, après une licence, est souvent source d’anxiété pour les étudiants étrangers. Et pour cause : l’acceptation dans une formation permet à l’autorité préfectorale d’apprécier le caractère réel et sérieux des études lors du renouvellement de leur titre de séjour. « C’est un parcours du combattant », témoigne Aline (les personnes citées par leurs prénoms souhaitent rester anonymes), 22 ans. Dans l’attente fébrile des résultats de la plate-forme nationale Mon master, rendus publics le 4 juin, l’étudiante chinoise, inscrite en licence d’écogestion à l’université Paris-Saclay, redoute de voir ses craintes se concrétiser et sa situation administrative compromise, en cas de rejet de ses quinze candidatures. Pour ces étrangers, qui représentent 14 % des étudiants inscrits dans l’enseignement supérieur français, l’enjeu est de taille. A ce jour, ni Campus France, l’établissement public chargé de la promotion de l’enseignement supérieur français, ni le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche ne sont en mesure de chiffrer le nombre d’étudiants de nationalité étrangère recalés. Campus France dit « ne pas s’être penché sur le sujet ».
    Le manque de suivi « est une réalité à dénoncer », déplore Emile Albini, chargé de travaux dirigés en droit administratif à l’université d’Orléans, et vice-président de l’association Voix des étudiants étrangers, dont la mission est d’accompagner ceux-ci gratuitement dans leurs démarches auprès des préfectures depuis 2023. Il dit suivre plusieurs dizaines de cas d’étudiants non affectés, redoutant, dans le pire des cas, une obligation de quitter le territoire français.
    Conscientes de cette vulnérabilité, les écoles privées intéressent ces candidats déçus. Ce qui n’est pas sans risque pour eux. La diversité actuelle de l’offre de formation peut créer de la confusion, entre grades, visas, établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général, titres inscrits au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ou encore le label décerné par le ministère du travail Qualiopi.
    D’après le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche « cette multiplicité a fini par créer un paysage peu lisible, permettant à certains acteurs de jouer sur le flou en prétendant un niveau de reconnaissance par l’Etat qu’ils ne possèdent pas ». (...)
    En 2018, la loi dite « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a engendré un véritable essor de l’alternance qui a séduit notamment de plus en plus les étudiants étrangers, grâce à l’argument de l’employabilité, vendu par les écoles. Selon Emile Albini, cette attractivité s’explique par l’espoir, à terme, de pouvoir plus facilement basculer dans le marché du travail et d’obtenir un titre de séjour salarié auprès de la préfecture.
    Pour ces étudiants, l’apprentissage apporte la garantie d’une meilleure insertion sur le marché du travail. En France, 852 000 nouveaux contrats ont été signés en 2023, ce qui a permis de franchir la barre symbolique du million de jeunes en apprentissage, selon les derniers chiffres publiés par la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques. Les entreprises reçoivent jusqu’à 6 000 euros de subventions de l’Etat par apprenti. Un marché attractif pour de nombreuses écoles privées.
    (...)
    « Tout étranger victime de pratiques frauduleuses est légitime à porter plainte pour les faits qui le concernent directement », rappelle le ministère de l’intérieur et des outre-mer. Mais « certains étudiants sont découragés de le faire parce qu’ils peuvent être sous la menace d’une obligation de quitter le territoire français. Ils obtiennent rarement une réponse, et la procédure met l’étudiant qui témoigne dans une situation compliquée », explique le porte-parole de l’association Voix des étudiants étrangers.
    Selon une enquête de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en 2022, plus de 30 % des établissements contrôlés se sont révélés être en anomalie en matière de pratiques commerciales trompeuses, usant de mentions valorisantes sans justification vérifiable, comme « mastère, diplôme équivalent master 1, Master of Science, MBA… »
    Le ministère de l’intérieur et des outre-mer déclare collaborer avec le ministère de l’enseignement supérieur et le ministère du travail, dans la mise en place d’un label, en vue d’une meilleure information des étudiants nationaux et internationaux souhaitant entreprendre un cursus d’études dans un établissement privé. « L’objectif est qu’il soit plus simple à lire pour les jeunes et leur famille. Il aura également pour conséquence de limiter les abus liés pouvant parfois apparaître autour du flou sur la reconnaissance de certaines formations », assure le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Le nouveau label, initialement attendu au printemps, est désormais annoncé pour cet été.

    #Covid-19#migrant#migration#france#etudiantetranger#universite#OQTF#campusfrance#titredesejour#sante

  • Royaume-Uni : plus de 10 000 migrants ont traversé la Manche depuis le début de l’année
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/05/25/royaume-uni-plus-de-10-000-migrants-ont-traverse-la-manche-depuis-le-debut-d

    Royaume-Uni : plus de 10 000 migrants ont traversé la Manche depuis le début de l’année
    Le Monde avec AFP
    Publié le 25 mai 2024 à 14h25
    Plus de 10 000 migrants sont arrivés au Royaume-Uni après avoir traversé la Manche depuis le début de l’année, selon des chiffres du ministère britannique de l’intérieur publiés samedi 25 mai. Il s’agit d’un record atteint en pleine campagne pour les élections législatives du 4 juillet dans le pays.
    Vendredi, cinq nouvelles embarcations ont accosté dans le sud de l’Angleterre, avec à leur bord 288 migrants, portant le total de personnes qui sont ainsi parvenues à traverser la Manche à 10 170. Beaucoup viennent d’Afghanistan, d’Iran et de Turquie. Cela représente une augmentation de plus de 35 % par rapport à l’an dernier.
    L’immigration clandestine est un sujet majeur dans la campagne qui a démarré officiellement mercredi, avec l’annonce de la date des élections par le premier ministre, Rishi Sunak. Ce dernier avait promis de mettre fin aux arrivées de migrants en situation irrégulière et en avait même fait une de ses priorités.
    Le gouvernement conservateur espérait dissuader les migrants de venir au Royaume-Uni avec sa loi visant à expulser des milliers de demandeurs d’asile vers le Rwanda.Jeudi, Rishi Sunak a reconnu que ce projet très controversé ne serait vraisemblablement pas appliqué avant le scrutin. Il a dit vouloir voir les premiers vols décoller après l’élection s’il la remporte. « Rishi Sunak prendra des mesures audacieuses pour arrêter les bateaux » de migrants, a martelé sur X le ministre de l’intérieur, James Cleverly, samedi.
    Les travaillistes, qui ont plus de vingt points d’avance dans les sondages sur les conservateurs, ont, eux, promis qu’ils abandonneraient la politique d’expulsion des migrants vers le Rwanda, critiquant un « gadget » coûteux et inefficace. « Le gouvernement a perdu le contrôle de nos frontières », a déclaré Keir Starmer, le chef de l’opposition et futur premier ministre si le Labour emporte les élections. Le Parti travailliste estime également que l’immigration est trop importante et a promis de déployer des moyens inspirés de la lutte antiterroriste pour lutter contre les gangs de passeurs.

    #Covid-19#migrant#migration#royaumeuni#france#traversee#frontiere#expulsion#rwanda#politiquemigratoire#droit#sante

  • L’UE reconnait « une situation difficile » dans ses partenariats avec les pays africains pour lutter contre l’immigration irrégulière - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/57257/lue-reconnait-une-situation-difficile-dans-ses-partenariats-avec-les-p

    ’UE reconnait « une situation difficile » dans ses partenariats avec les pays africains pour lutter contre l’immigration irrégulière
    Par La rédaction Publié le : 22/05/2024
    La Commission européenne a reconnu mardi « une situation difficile » après la publication d’une enquête journalistique révélant que les fonds de l’UE alloués à des pays africains – Tunisie, Maroc et Mauritanie – servaient en partie à financer des refoulements dans le désert pour empêcher les exilés d’atteindre l’Europe. Des pratiques contraires au droit international.
    Face aux accusations de complicité sur les violations des droits de l’Homme dans certains pays d’Afrique, la Commission européenne a réagi mardi 21 mai. « Parfois, la situation est difficile dans nos pays partenaires » mais ils « restent des États souverains et contrôlent leurs forces nationales », a affirmé une des porte-parole de l’institution, Ana Pisonero. Son homologue Éric Mamer, interrogé lors d’un point presse quotidien, a lui aussi partagé la même analyse : « C’est une situation qui est difficile, qui est mouvante et sur laquelle nous allons continuer à travailler ».
    Une enquête, publiée le même jour par des médias internationaux dont Le Monde et le Washington Post avec le collectif de journalistes Lighthouse Reports, révèle comment « l’Europe soutient, finance et participe directement à des opérations clandestines menées dans les pays d’Afrique du Nord pour abandonner chaque année des dizaines de milliers de personnes noires dans le désert ou dans des régions reculées afin de les empêcher de venir dans l’Union européenne (UE) ».
    L’enquête signale que des réfugiés et migrants au Maroc, en Mauritanie et en Tunisie sont « appréhendés en raison de la couleur de leur peau, emmenés dans des bus et conduits au milieu de nulle part, souvent dans des zones désertes et arides », sans eau ni nourriture. Certains sont emmenés vers des zones frontalières où ils sont « vendus par les autorités à des trafiquants d’êtres humains et à des gangs qui les torturent contre rançon ». Depuis plusieurs années, InfoMigrants a publié des dizaines d’articles et de témoignages de migrants racontant les arrestations arbitraires dans les rues ou dans les maisons des Noirs dans ces pays, mais aussi en Libye et en Algérie, et les refoulements dans des zones désertiques.
    À l’été 2023, la rédaction avait récolté plusieurs récits d’exilés relatant les interpellations dans les rues de Sfax, dans le centre-est de la Tunisie, et les expulsions dans le désert, à la frontière avec l’Algérie et la Libye – des pratiques qui n’ont jamais cessé depuis et qui se sont mêmes accentuées ces derniers jours.
    En fin d’année, InfoMigrants avait révélé que des exilés étaient discrètement transmis par des forces tunisiennes à des Libyens, et transférés dans les prisons du pays. « Le véhicule s’est arrêté au niveau d’une montagne de sable. De l’autre côté, c’est la Libye. Les Tunisiens sont montés sur la montagne pour annoncer leur présence. Cinq minutes après, on a entendu des klaxons venus d’en face. Les policiers ont alors braqué leur kalachnikov sur nous et nous ont dit : ‘Haya, haya’ [’allez-y’, en français, ndlr] en montrant la Libye. Tout le monde avait peur », avait expliqué Moussa, un Guinéen. De l’autre côté, des milices libyennes les attendaient pour les conduire dans des centres de détention.
    Au Maroc aussi, les témoignages recueillis de ce type sont nombreux. Le dernier date de février 2024 : un Guinéen avait détaillé à la rédaction ses multiples refoulements dans le désert, vers Ourzazate (sud du Maroc) et Beni Melal (centre du Maroc).
    Des fonds de l’UE utilisés pour refouler des migrants dans le désert
    elon l’enquête de Lighthouse Reports publiée mardi, ce « système de déplacement de masse (…) fonctionne notamment grâce à l’argent, les véhicules, l’équipement, le renseignement et les forces de sécurité fournis par l’UE et les pays européens ». Le quotidien Le Monde écrit qu’en Tunisie les « pick-up Nissan utilisés par la police pour arrêter les migrants correspondent à des modèles livrés par l’Italie et l’Allemagne entre 2017 et 2023 ».Au Maroc, les « 4x4 Toyota Land Cruiser, utilisés lors d’arrestations dont les images ont été diffusées sur les réseaux sociaux (…) correspondent aux modèles achetés par l’Espagne, puis par l’Europe » dans le cadre d’un accord entre les deux pays.
    En Mauritanie enfin, l’UE finance « la reconstruction de deux centres de rétention. Ceux-là mêmes où des migrants sont enfermés avant d’être envoyés dans le désert, acheminés dans des pick-up Toyota Hilux en tout point similaires à ceux livrés par l’Espagne en 2019 », peut-on lire dans l’enquête."Des exemples, parmi d’autres, qui démontrent que ces opérations, contraires à la Convention européenne des droits de l’Homme, bénéficient du soutien financier de l’UE et de ses États membres", insistent les journalistes.
    Depuis 2015, le Maroc, la Tunisie et la Mauritanie ont reçu 400 millions d’euros pour la gestion des frontières via le fonds fiduciaire d’urgence (FFU). Une somme à laquelle s’ajoutent d’autres aides financières accordées directement par des pays européens à ces trois États africains. D’après Lighthouse Reports, les instances de l’UE ont parfaitement connaissance d’une partie de ces arrestations arbitraires, contraires au droit international. Dans le cas du Maroc par exemple, la Commission européenne avait en 2019 fait référence à une « vaste campagne de répression » contre des Subsahariens et des expulsions « illégales » vers des zones reculées dans un document sur les financements de l’UE au royaume chérifien. Sans pour autant mettre fin à son partenariat.

    #Covid-19#migrant#migration#UE#tunisie#maroc#mauritanie#espagne#migrationirreguliere#politiquemigratoire#droit#sante#expulsion

  • Valeria Falaski, Cheffe intérimaire OIM/Sénégal : Les États doivent se concerter pour une migration basée sur le respect des droits humains »
    https://www.dakaractu.com/Valeria-Falaski-Cheffe-interimaire-OIM-Senegal-Les-Etats-doivent-se-conce

    Valeria Falaski, Cheffe intérimaire OIM/Sénégal : Les États doivent se concerter pour une migration basée sur le respect des droits humains »
    L’État du Sénégal et ses partenaires sont à pied d’ œuvre pour trouver une solution aux flux migratoires irréguliers devenus un fléau national. C’est pourquoi le programme de protection, de retour et de réintégration des migrants en Afrique Subsaharienne est mis en place. Sur ce, la cheffe intérimaire de OIM/Sénégal signifie que « c’est pour mettre en place un cadre de concertation technique pour l’appui au retour volontaire des migrants. La migration doit être ordonnée, sûre et régulière. Les Etats doivent se concerter pour une migration basée sur le respect des droits humains », laisse entendre la cheffe par intérim de l’Oim au Sénégal à l’occasion de l’atelier de partage et de stabilisation des termes de références du Groupe de Travail Technique autour de l’assistance à l’arrivée, la réintégration, la protection, la santé mentale et le soutien psychosocial.

    #Covid-19#migration#migrant#senegal#OIM#migrationirreguliere#retourvolontaire#reintegration#protection#santementale#psychosocial

  • Espace Schengen : l’Union européenne adopte de nouvelles règles pour les contrôles aux frontières
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/05/24/espace-schengen-l-union-europeenne-adopte-de-nouvelles-regles-pour-les-contr

    Espace Schengen : l’Union européenne adopte de nouvelles règles pour les contrôles aux frontières
    Publié le 24 mai 2024 à 19h58, modifié le 24 mai 2024 à 19h59
    L’Union européenne a adopté, vendredi 24 mai, une réforme du code Schengen, destinée notamment à clarifier le cadre prévu pour la réintroduction des contrôles aux frontières intérieures de l’espace de libre circulation, et à harmoniser les restrictions en cas d’urgence sanitaire. La réforme, sur laquelle les négociateurs avaient trouvé un accord en février, vise aussi à contrôler les mouvements migratoires au sein de l’espace Schengen et à répondre aux situations d’instrumentalisation des migrants par des pays tiers.
    Elle permet à un Etat membre de « transférer les ressortissants de pays tiers appréhendés dans la zone frontalière et séjournant illégalement sur son territoire vers l’Etat membre d’où ils sont directement arrivés ». « L’arrestation devra avoir lieu dans un cadre de coopération bilatérale », précise dans un communiqué le Conseil de l’UE représentant les Vingt-Sept.
    Afin de lutter contre les tentatives de pays tiers d’orchestrer l’arrivée de migrants dans le bloc, comme la Biélorussie et la Russie ont été accusées de le faire à des fins de déstabilisation, les nouvelles règles permettront notamment aux Etats membres de limiter le nombre de points de passage aux frontières. Elles permettent aussi de prendre des mesures contraignantes au niveau européen pour restreindre l’accès de ressortissants de pays tiers au bloc en cas d’urgence sanitaire de grande ampleur. Pendant la pandémie de Covid-19, Bruxelles n’avait pu émettre que des recommandations non contraignantes à l’intention des Etats membres pour tenter d’harmoniser les restrictions imposées aux voyageurs entrant dans l’UE. La réforme du code Schengen a été proposée en décembre 2021 par la Commission européenne pour tirer les leçons de la crise du Covid-19, qui avait donné lieu à des restrictions en pagaille. Selon les nouvelles règles, le Conseil de l’UE pourra aussi imposer des tests et des mesures de quarantaine.
    Au sein de l’espace Schengen, qui regroupe 27 pays – dont 23 Etats membres de l’UE plus l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse –, plus de 400 millions de personnes peuvent en principe circuler sans être soumises à des contrôles. Depuis mars, deux autres pays, la Bulgarie et la Roumanie, ont partiellement rejoint ce groupe.
    Mais depuis 2015, invoquant la pression migratoire ou la menace terroriste, un certain nombre de pays ont réintroduit des contrôles d’identité à leurs frontières. Ils sont actuellement huit à le faire (la Slovénie, l’Italie, l’Allemagne, l’Autriche, la France, la Norvège, le Danemark, la Suède). Ces contrôles sont autorisés par le code Schengen à titre exceptionnel, en cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure d’un Etat, mais de manière provisoire. La Cour de justice de l’UE avait rappelé en avril 2022 qu’ils ne devaient pas excéder six mois.
    La réforme prévoit qu’en cas de menace grave à sa sécurité un Etat peut autoriser des contrôles à ses frontières pour une durée maximale de deux ans, avec une prolongation possible d’un an. Ces Etats devront évaluer la nécessité et la proportionnalité de ces contrôles et déterminer si les objectifs poursuivis ne peuvent être atteints par des mesures alternatives.

    #Covid-19#migrant#migration#UE#espaceschengen#pressionmigratoire#securite#terrorisme#frontiereinterieure#droit#sante

  • Migrants subsahariens en Tunisie : « Ayez pitié de nous et laissez-nous partir d’ici ! »
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/05/25/migrants-subsahariens-en-tunisie-ayez-pitie-de-nous-et-laissez-nous-partir-d

    Migrants subsahariens en Tunisie : « Ayez pitié de nous et laissez-nous partir d’ici ! »
    Par Monia Ben Hamadi (El-Amra, El-Hamaizia, Tunisie,
    Il ne dort plus à la belle étoile dans les champs d’oliviers, mais sous une tente de fortune, faite de branchages et de tuyaux, recouverte d’une bâche en plastique. Originaire de Freetown, capitale de la Sierra Leone, Musa* a échoué à Henchir Ben Farhat, domaine agricole privé situé à El-Amra, il y a plus de huit mois, en septembre 2023. Comme des centaines de migrants et demandeurs d’asile venues de divers pays d’Afrique subsaharienne, il ne pensait pas rester aussi longtemps dans cette petite localité du centre-est de la Tunisie devenue l’un des principaux points de départ vers l’île italienne de Lampedusa.
    Faute de mieux, le Sierra Léonais de 36 ans s’est improvisé épicier. Devant sa tente, il a monté un petit stand qui propose des fruits et légumes, quelques pâtes, des produits d’hygiène. Pour s’approvisionner, il doit parcourir plusieurs kilomètres à pied jusqu’au marché d’El-Amra avant de revenir au camp pour les entreposer. Une opération risquée. « En ville, on peut être arrêtés par la police, c’est plus dangereux qu’ici », explique-t-il.
    Depuis les déclarations du président Kaïs Saïed en février 2023, qui affirmait que l’arrivée de Subsahariens faisait partie d’un « plan criminel pour modifier la composition démographique » du pays, les autorités ont considérablement durci leur approche envers les migrants. A El-Amra, les patrouilles de la garde nationale, renforcées par des unités venues de Tunis, sont constamment sur le qui-vive. Régulièrement, des migrants sont expulsés des oliveraies où ils s’étaient installés, arrêtés ou conduits à la frontière.
    Fin avril, les agents de la garde nationale ont détruit le campement de Henchir Ben Farhat lors d’une opération sécuritaire. Musa, qui a perdu tout son stock de marchandises, a tenté la traversée vers l’Europe une seconde fois, sans succès. Son embarcation en métal a de nouveau pris l’eau. Depuis, il a remonté son commerce, en attendant une nouvelle occasion de quitter le pays.
    Dans le campement, la violence des forces de l’ordre a laissé des cicatrices visibles sur le corps des hommes. Amos, 34 ans, né au Liberia, montre des traces de brûlures sur son bras et son épaule causées, selon lui, par les bombes de gaz lacrymogènes lancées par les forces de l’ordre lors de la destruction du camp. Lui non plus ne parvient pas à quitter le pays. « Ils ne veulent pas de nous, mais ils nous empêchent de partir, pourquoi ? Ils préfèrent nous voir souffrir et mourir ici ? », s’interroge-t-il.
    En mai, les garde-côtes tunisiens ont annoncé avoir intercepté ou secouru 28 147 personnes depuis le début de l’année, et environ 79 635 en 2023. Car la Tunisie reste essentiellement un pays de transit : d’après le ministre de l’intérieur, lors d’une audition au Parlement, 23 000 migrants subsahariens en situation irrégulière se trouveraient sur le territoire tunisien. Le 6 mai, le président tunisien Kaïs Saïed, lors d’un conseil de sécurité, a néanmoins accusé certaines associations d’inciter les Subsahariens à « coloniser » la Tunisie. Des propos suivis de l’adoption de nouvelles restrictions contre les migrants et les voix critiques du chef de l’Etat.
    Une dizaine d’organisations venant en aide aux migrants ont été ciblées par les autorités, et au moins cinq responsables associatifs arrêtés, mis en examen et écroués, dont Saadia Mosbah, militante antiraciste et présidente de l’association Mnemty, qui lutte contre les discriminations raciales en Tunisie.
    Deux responsables du Conseil tunisien pour les réfugiés (CTR) ont aussi été placés en détention préventive pour « association de malfaiteurs dans le but de faciliter l’accès de personnes au territoire tunisien ». Ils sont accusés d’avoir publié un appel d’offres pour la location d’un hôtel destiné à accueillir des réfugiés ou demandeurs d’asile, dans le cadre de leur mission avec le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
    Parallèlement à ces arrestations, une proposition de loi a été déposée par treize députés au Parlement le 6 mai, visant à modifier la loi sur les conditions de séjour des étrangers. Cette version amendée prévoit jusqu’à trois ans de prison pour toute personne qui aiderait un étranger à entrer ou à séjourner illégalement dans le pays. Le gouvernement tunisien étudie un projet d’amendement du décret-loi sur les associations afin de restreindre et de contrôler les financements étrangers.
    A El-Amra, depuis le 6 mai, le contrôle des transferts financiers en provenance de l’étranger s’est considérablement intensifié. Amos ne peut plus désormais retirer lui-même l’argent que sa famille et ses proches lui envoient par la poste et dépend de citoyens tunisiens ou de migrants en situation régulière pour recevoir à sa place les transferts qui lui permettent de vivre et d’économiser pour la prochaine traversée.
    Le discours de Kaïs Saïed sur un supposé financement étranger destiné à encourager les migrants à s’installer en Tunisie trouve un écho parmi la population. « Ils sont chaque jour plus nombreux, on a peur », assure Dhouha, accusant les étrangers d’être responsables d’une augmentation de la criminalité, bien que ces allégations ne soient pas corroborées par des chiffres. L’éducatrice en crèche de 42 ans et mère de famille soupçonne les migrants de vouloir s’approprier les terres des Tunisiens, et souhaiterait que les autorités durcissent encore la répression. « Il faudrait fermer les frontières terrestres et les laisser passer par la mer, mais les responsables ne veulent pas. Meloni est venue et a fait ce qu’elle voulait. On se sent comme les gardiens de l’Europe ici », accuse-t-elle, en référence aux visites récurrentes de la présidente du Conseil italien à Tunis depuis la signature de l’accord de « partenariat stratégique complet » entre l’Union européenne et la Tunisie, le 16 juillet 2023. Cet accord prévoit des aides financières pour réduire les départs de migrants depuis les côtes tunisiennes vers l’Italie. Bien que Kaïs Saïed avait affirmé en octobre que la Tunisie n’avait vocation à garder que ses propres frontières, la coopération en matière de contrôle s’est effectivement intensifiée.
    Face à l’augmentation du nombre de Subsahariens qui campent dans les environs d’El-Amra, la tension monte désormais entre les groupes de migrants eux-mêmes, particulièrement dans la sous-localité d’El-Hamaizia, à quelques kilomètres du centre-ville. Des affrontements violents y ont éclaté, mercredi 15 mai, faisant plusieurs blessés selon des témoins. Les forces de l’ordre ont dû intervenir pour rétablir le calme. « Ayez pitié de nous et laissez-nous partir d’ici ! », implore Kevin, 36 ans, originaire du Nigeria, installé avec son épouse et sa fille de 5 ans dans un camp d’El-Hamaizia. « Il y a des groupes de migrants qui nous terrorisent. Ils nous battent, prennent nos téléphones ou demandent de l’argent à nos familles avant de nous relâcher », témoigne-t-il, en se saisissant, pour le faire cuire, un poulet qu’il vient de plumer.
    Quand la chaleur de la journée se dissipe, peu avant le coucher du soleil, il arrive qu’une ferveur inattendue gagne les oliveraies. C’est l’heure des matchs de football. Ce soir-là, dans l’un des camps d’El-Hamaizia, les femmes sont à l’honneur. Des cages de but faites de tuyaux et recouvertes de plastique ont été installées, et des dizaines de spectateurs entourent le terrain, délimité par des traces sur le sable. Les acclamations, les rires et les applaudissements rythment la rencontre. Pendant ce temps, d’autres vont bientôt se préparer à prendre la mer, portés par l’espoir d’atteindre les rives de l’Europe.

    #Covid-19#migrant#migration#tunisie#italie#mediterranee#UE#migrationirreguliere#droit#sante#violence

  • Comment l’argent de l’UE permet aux pays du Maghreb d’expulser des migrants en plein désert
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/05/21/comment-l-argent-de-l-union-europeenne-permet-aux-pays-du-maghreb-de-refoule

    Comment l’argent de l’UE permet aux pays du Maghreb d’expulser des migrants en plein désert
    Par Nissim Gasteli (Tunis, correspondance), Maud Jullien (Lighthouse Reports), Andrei Popoviciu (Lighthouse Reports) et Tomas Statius (Lighthouse Reports)
    s des droits humains et avec le renfort de moyens européens.
    A Rabat, au Maroc, Lamine (toutes les personnes citées par un prénom ont requis l’anonymat), un jeune Guinéen, a été arrêté six fois par la police, en 2023, avant d’être renvoyé sans ménagement à l’autre bout du pays. En Mauritanie, Bella et Idiatou, également guinéennes, ont été abandonnées en plein désert après avoir été interpellées, puis incarcérées. Leur crime ? Avoir pris la mer pour tenter de rejoindre l’Espagne. En Tunisie, François, un Camerounais, s’est orienté comme il a pu après que les forces de sécurité l’ont lâché, au beau milieu des montagnes, près de la frontière avec l’Algérie. C’était la troisième fois qu’il était déporté en l’espace de quelques mois.
    Ces trois récits de personnes migrantes se ressemblent. Ils se déroulent pourtant dans trois Etats différents du nord de l’Afrique. Trois pays distincts qui ont en commun d’être les étapes ultimes des principales routes migratoires vers l’Europe : celle de la Méditerranée centrale, qui relie les côtes tunisiennes à l’île italienne de Lampedusa ; celle de la Méditerranée occidentale, qui part du Maghreb vers l’Espagne ou encore la route dite « Atlantique », qui quitte les rivages du Sénégal et du Sahara occidental pour rejoindre les îles Canaries.
    Pour cette raison, le Maroc, la Tunisie et la Mauritanie ont aussi en commun de faire l’objet de nombreuses attentions de l’Union européenne (UE) dans la mise en place de sa politique de lutte contre l’immigration irrégulière. Alors que la question migratoire crispe les opinions publiques et divise les Etats membres sur fond de montée de l’extrême droite dans de nombreux pays, l’Europe mobilise d’importants moyens pour éviter que les Subsahariens candidats à l’exil ne parviennent jusqu’à la mer. Au risque que l’aide apportée aux gouvernements du Maghreb participe à des violations répétées des droits humains.
    Depuis 2015, les trois Etats ont perçu plus de 400 millions d’euros pour la gestion de leurs frontières, rien que par l’entremise du fonds fiduciaire d’urgence (FFU), lancé par l’UE lors du sommet sur la migration de La Valette, capitale de Malte. Une somme à laquelle s’ajoutent des aides accordées directement par certains Etats membres ou relevant d’autres programmes. En juillet 2023, l’UE a encore signé un accord avec la Tunisie, qui inclut une aide de 105 millions d’euros pour lutter contre l’immigration irrégulière. Peu de temps avant, le 19 juin, le ministre de l’intérieur français, Gérald Darmanin, en déplacement à Tunis, s’était engagé à verser plus de 25 millions d’euros à Tunis pour renforcer le contrôle migratoire. Plus récemment, le 8 février, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, annonçait de Nouakchott la signature d’un soutien financier pour 210 millions d’euros à destination de la Mauritanie, dont une partie serait allouée à la « gestion des migrations ».
    A travers quelles pratiques ? Au terme de près d’un an d’enquête, Le Monde, le média à but non lucratif Lighthouse Reports et sept médias internationaux partenaires ont pu documenter pour la première fois le recours à des arrestations massives et à des expulsions collectives dans ces trois Etats. Au Maroc, en 2023, près de 59 000 migrants auraient été interpellés sur le territoire par les forces de sécurité, d’après un décompte officiel. Une partie d’entre eux ont été déportés vers le sud et vers l’intérieur du pays comme à Agadir, Khouribga, Errachidia, Béni Mellal. En Mauritanie, plusieurs bus rejoignent chaque semaine les étendues arides de la frontière avec le Mali et y abandonnent des groupes de migrants sans ressources. En Tunisie, ce sont onze renvois collectifs vers les frontières libyenne et algérienne, organisés par les forces de sécurité entre juillet 2023 et mai 2024, que nous avons pu documenter grâce à des témoignages, des enregistrements audio et vidéo. Une pratique aux conséquences dramatiques : au moins 29 personnes auraient péri dans le désert libyen, selon un rapport de la mission d’appui des Nations unies en Libye, paru en avril.
    Des migrants subsahariens abandonnés par la police tunisienne sans eau ni abri, dans le désert, non loin de la ville frontalière libyenne d’Al-Assah, le 16 juillet 2023.
    Interrogé sur le cas tunisien, en marge du discours sur l’état de l’Union devant le Parlement européen, le 15 septembre, le vice-président de la Commission européenne, le Grec Margaritis Schinas, assurait : « [Ces pratiques] ne se déroulent pas sous notre surveillance, et ne font pas partie de nos accords. L’argent européen ne finance pas ce genre de tactiques. » Notre enquête démontre le contraire.
    En Tunisie, des pick-up Nissan utilisés par la police pour arrêter les migrants correspondent à des modèles livrés par l’Italie et l’Allemagne entre 2017 et 2023. Au Maroc, les forces auxiliaires de sécurité, à l’origine de nombreuses arrestations, reçoivent une partie de l’enveloppe de 65 millions d’euros alloués par l’UE au royaume chérifien, entre 2017 et 2024, pour le contrôle de la frontière. En Mauritanie, les Vingt-Sept financent, dans les deux principales villes du pays et pour une enveloppe de 500 000 euros, la reconstruction de deux centres de rétention. Ceux-là mêmes où des migrants sont enfermés avant d’être envoyés dans le désert, acheminés dans des pick-up Toyota Hilux en tout point similaires à ceux livrés par l’Espagne en 2019. Des exemples, parmi d’autres, qui démontrent que ces opérations, contraires à la Convention européenne des droits de l’homme, bénéficient du soutien financier de l’UE et de ses Etats membres.
    Lamine, 25 ans, connaît les rues de Rabat comme sa poche. Le jeune homme, natif de Conakry, est arrivé au Maroc en 2017 « pour suivre une formation » de cuisine, relate-t-il lorsque nous le rencontrons, en octobre 2023, dans le quartier de Takaddoum, devenu le lieu de passage ou d’installation des migrants. Le jeune homme est enregistré auprès du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) comme demandeur d’asile, ce qui est censé le protéger d’une expulsion.
    Au fil des années, Lamine s’est habitué aux « rafles » quotidiennes par les forces auxiliaires de sécurité marocaines visant des migrants comme lui. A Takaddoum, nombreux sont ceux qui assurent avoir été témoins de l’une de ces arrestations de ressortissants subsahariens. « Tous les Blacks savent que s’ils sortent entre 10 et 20 heures, ils risquent de se faire embarquer », ajoute Mafa Camara, président de l’Association d’appuis aux migrants mineurs non accompagnés. Une affirmation « sans fondement », selon le ministère de l’intérieur marocain. Sollicité, le HCR confirme qu’« il arrive parfois que les réfugiés et les demandeurs d’asile soient arrêtés ». La suite est également connue : les personnes sont amenées dans des bâtiments administratifs faisant office de centres de rétention, avant d’être transférées dans un commissariat de la ville où des bus viennent les récupérer. Elles sont alors déportées, le plus souvent dans des zones reculées ou désertiques. Ce harcèlement serait un des maillons essentiels de la stratégie du royaume pour lutter contre l’immigration irrégulière. « Le but est bien sûr de rendre la vie des migrants difficile, soutient un consultant requérant l’anonymat. Si l’on vous emmène dans le Sahara deux fois, la troisième, vous voulez rentrer chez vous. » L’homme, qui a participé au Maroc à plusieurs projets de développement financés par l’UE, soutient que les autorités marocaines agissent de la sorte pour justifier les nombreux financements européens qu’elles reçoivent, dont 234 millions d’euros uniquement du FFU. « La relocalisation des migrants vers d’autres villes est prévue par la législation nationale. Elle permet de les soustraire aux réseaux de trafic et aux zones dangereuses », oppose, de son côté, le ministère de l’intérieur marocain.
    Début 2023, Rabat soutenait avoir empêché plus de 75 000 départs vers l’Europe, dont 59 000 sur son territoire et 16 000 en mer. En 2023, Lamine, lui, a été arrêté à six reprises avant d’être envoyé à l’autre bout du pays.
    Pendant plusieurs jours, nous avons suivi et filmé les minivans des forces auxiliaires qui sillonnent les rues de Rabat. Des témoignages, des vidéos et des enregistrements audio réunis par ailleurs attestent de l’ampleur du phénomène de harcèlement des migrants de Tanger à Fès, de Nador à Laayoune. Au cours de notre enquête, nous avons pu identifier deux types de véhicules utilisés pour ces opérations, achetés grâce à des financements européens. Comme ces utilitaires Fiat Doblo, visibles sur une vidéo d’arrestation de migrants, diffusée en mai 2021 à la télévision marocaine, identiques à ceux d’un lot acheté à partir de 2019 grâce au FFU. Ou ces 4 × 4 Toyota Land Cruiser, utilisés lors d’arrestations dont les images ont été diffusées sur les réseaux sociaux, et qui correspondent aux modèles achetés par l’Espagne, puis par l’Europe dans le cadre du FFU.
    Au Maroc, les forces auxiliaires de sécurité, à l’origine de nombreuses arrestations, filmées à Rabat, le 19 octobre 2023.
    Au Maroc, les forces auxiliaires de sécurité, à l’origine de nombreuses arrestations, filmées à Rabat, le 19 octobre 2023.
    Lors de ces arrestations collectives, le mode opératoire est toujours identique : deux minivans blancs stationnent dans un quartier fréquenté par des migrants, tandis que plusieurs agents en civil se mêlent à la foule. Ils contrôlent, puis appréhendent les migrants, avant de les faire monter dans les véhicules. Une vingtaine de personnes, que nous avons interrogées, assurent avoir été témoins ou victimes de violences policières lors de ces arrestations.
    Le 19 octobre 2023 à l’occasion d’une opération que nous avons documentée, un bus des forces auxiliaires a pris la direction de Khouribga, une bourgade à 200 kilomètres au sud de Rabat. En pleine nuit, les officiers ont déposé une dizaine de jeunes hommes à l’entrée de la petite ville. Ces derniers ont ensuite marché vers la gare routière, avant de rejoindre un petit groupe de migrants, eux-mêmes déportés quelques jours plus tôt. Parmi eux, Aliou, un Guinéen de 27 ans, affirme avoir été déplacé de la sorte « près de 60 fois » depuis son arrivée au Maroc, en 2020.

    C’est une valse incessante qui se joue ce 25 janvier, en fin de matinée, devant le commissariat du quartier de Ksar, à Nouakchott. Des véhicules vont et viennent. A l’intérieur de l’un d’eux – un minibus blanc –, une dizaine de migrants, le visage hagard. A l’arrière d’un camion de chantier bleu, une cinquantaine d’exilés se cramponnent pour ne pas basculer par-dessus bord. Tous ont été arrêtés par la police mauritanienne. Chaque jour, ils sont des centaines à découvrir l’intérieur décrépi de ces petits baraquements ocre. Cette étape ne dure que quelques jours au plus. « Il y a plusieurs bus par semaine qui partent vers le Mali », confirme un visiteur du commissariat faisant office de centre de rétention.
    Sur ces images filmées en Mauritanie, en caméra cachée, plus d’une dizaine de migrants sont sur le point d’être déposés devant le centre de rétention de Ksar, à Nouakchott, avant d’être déportés loin de la ville, le 25 janvier 2024.
    Sur ces images filmées en Mauritanie, en caméra cachée, plus d’une dizaine de migrants sont sur le point d’être déposés devant le centre de rétention de Ksar, à Nouakchott, avant d’être déportés loin de la ville, le 25 janvier 2024. Certains migrants ont été appréhendés dans les rues de Nouakchott. « Le bus des policiers se promène dans les quartiers où vivent les migrants, comme le Cinquième [un quartier à l’ouest de Nouakchott], témoigne Sady, un Malien arrivé en Mauritanie en 2019. Les policiers entrent dans les boutiques. Ils demandent aux gens : “Tu es étranger ?” Puis ils les emmènent. A chaque fois, j’ai vu des gens se faire frapper, maltraiter. On vit avec la crainte de ces refoulements. »
    « Les éventuelles interpellations concernant les étrangers en situation irrégulière se font conformément aux conventions, lois et règlements en vigueur, sans arbitraire ni ciblage de zones ou de quartiers spécifiques », assure le porte-parole du gouvernement mauritanien, Nani Ould Chrougha. Bella et Idiatou ont, quant à elles, été interceptées en mer par des gardes-côtes, lors d’une tentative de traversée en direction des îles Canaries, confettis d’îles espagnoles à plusieurs centaines de kilomètres des côtes africaines. Le traitement qui leur a été réservé est le même que pour les autres migrants, alors qu’elles bénéficiaient d’un titre de séjour mauritanien : une expulsion manu militari vers les frontières sud du pays. « Des expulsions vers le Sénégal et le Mali, sur des bases raciales, ont eu lieu entre 1989 et 1991, souligne Hassan Ould Moctar, spécialiste des questions migratoires. Mais les demandes répétées de l’Union européenne en matière migratoire ont réactivé cette dynamique. »Pour Bella et Idiatou comme pour Sady, la destination finale est Gogui, à la frontière malienne, une zone désertique à plus de 1 000 kilomètres de Nouakchott. « Ils nous ont jetés hors du bus, puis ils nous ont poussés vers la frontière. Ils nous ont chassés comme des animaux et ils sont partis », raconte, révoltée, Idiatou, quand nous la rencontrons au Sénégal, où elle a trouvé refuge. Ce récit, neuf migrants au total l’ont confié au Monde. Sady, qui vivait à Nouakchott grâce à des petits boulots, a été repoussé deux fois. Selon un document interne du HCR, que Le Monde a consulté, plus de 300 personnes dénombrées par le Haut-Commissariat ont fait l’objet du même traitement en 2023. La majorité d’entre elles assurent avoir été victimes de violations des droits humains. Sollicité, un porte-parole du HCR confirme avoir « reçu des rapports faisant état de cas de refoulement vers le Mali » et « plaider auprès des autorités mauritaniennes pour mettre fin à de telles pratiques ». « Les migrants en situation irrégulière sont reconduits aux postes-frontières officiels de leur pays de provenance », se défend le porte-parole du gouvernement mauritanien, selon lequel le procédé est conforme à la loi et réalisé en assurant une « prise en charge totale – nourriture, soins de santé, transport ». La Mauritanie est depuis quinze ans l’un des verrous des routes migratoires qui mènent en Espagne. D’après notre décompte, sans inclure l’argent promis début 2024, plus de 80 millions d’euros ont été investis par l’UE dans le pays depuis 2015, destinés surtout au renforcement des frontières, à la formation des effectifs de police ou encore à l’achat de véhicules. Les groupes d’action rapide-surveillance et intervention (GAR-SI), des unités d’élite financées par l’UE dans plusieurs pays du Sahel à travers le FFU, ont également fait partie du dispositif. En 2019, ils ont ainsi livré à la police mauritanienne 79 personnes appréhendées sur le territoire, d’après un document interne de l’UE. Un rapport non public de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), daté de février 2022, mentionne qu’une bonne partie de leurs effectifs – plus de 200 hommes – a été déployée à Gogui pour des missions de « surveillance frontalière ».
    En outre, plusieurs véhicules utilisés pour assurer les expulsions de Nouakchott vers le sud du pays correspondent à des modèles livrés par des Etats membres. Comme ces pick-up Toyota Hilux fournis par l’Espagne, « pour la surveillance du territoire ou la lutte contre l’immigration irrégulière ». Depuis 2006 et en vertu d’un accord bilatéral de réadmission de migrants entre les deux pays, une cinquantaine de policiers espagnols sont déployés en permanence à Nouakchott et à Nouadhibou, les deux principales villes du pays. Des moyens techniques, dont des bateaux, sont également mis à disposition. En 2023, près de 3 700 interceptions en mer ont ainsi été réalisées par des patrouilles conjointes, d’après un décompte du ministère de l’intérieur espagnol, consulté par Le Monde. Plusieurs sources policières et un visiteur des centres de rétention mauritaniens attestent de la présence fréquente de policiers ibériques à l’intérieur. Bella et Idiatou assurent avoir été prises en photo par ces derniers au commissariat de Nouakchott. Interrogée sur ce point, l’agence espagnole Fiiapp, principal opérateur de ces projets de coopération policière, a nié la présence d’agents dans le centre de rétention. Les autorités mauritaniennes, quant à elles, ont confirmé l’existence d’« échange d’informations dans le domaine de la lutte contre l’immigration clandestine », mais « dans le respect de la vie privée des personnes et de la protection de leurs données personnelles ». Selon un autre document du HCR, daté de janvier 2023, des migrants rapportent que les Espagnols ont participé aux raids les visant. « Parfois, ils essayaient même d’expulser des gens qu’on avait identifiés comme réfugiés », se souvient un salarié de l’agence, que nous avons interrogé. « Notre équipe de policiers sur le terrain n’est pas au courant de telles pratiques », assure la Fiiapp. Quand le ministère de l’intérieur espagnol se borne à répondre que ses effectifs travaillent « dans le respect des droits de l’homme, et en accord avec la législation nationale et internationale ».
    Un matin de novembre 2023, dans la ville tunisienne de Sfax, Moussa, un demandeur d’asile camerounais de 39 ans, et son cousin sortent d’un bureau de poste lorsqu’ils sont interpellés par les autorités. En quelques heures, les deux hommes se retrouvent à la frontière libyenne, remis aux mains d’une milice, puis enfermés dans l’un des centres de détention pour migrants du pays. Pendant plusieurs mois, ils subissent des violences quotidiennes.
    Selon la Mission d’appui des Nations unies en Libye (Manul), près de 9 000 personnes ont été « interceptées » depuis l’été 2023 par les autorités de Tripoli, à la frontière tunisienne. Dans une note interne que nous avons consultée, la Manul déplore des « expulsions collectives » et des « retours forcés sans procédure », exposant les migrants à de « graves violations et abus des droits humains, avec des cas confirmés d’exécution extrajudiciaire, de disparition, de traite, de torture, de mauvais traitement, d’extorsion et de travail forcé ». « Ils repartent d’où ils viennent, car ils causent des problèmes », justifie, sous le couvert de l’anonymat, un agent de la garde nationale. Sollicité, le ministère des affaires étrangères tunisien réfute les accusations d’« expulsion de migrants d’origine subsaharienne vers des zones désertiques », les qualifiant d’« allégations tendancieuses ».
    Dès le 7 juillet 2023, Frontex, l’agence européenne de garde-frontières, est pourtant informée – selon un rapport interne dont nous avons pris connaissance – de ces « opérations » consistant à « conduire des groupes de ressortissants subsahariens jusqu’à la frontière [de la Tunisie] avec la Libye et l’Algérie, en vue de leur refoulement ». Frontex ajoute que ces opérations sont surnommées sur les réseaux sociaux « ménage de blacks ». Une source européenne anonyme, au fait du dossier, veut croire qu’« aucune ressource provenant de l’UE n’a contribué à ce processus [d’expulsion] », mais reconnaît toutefois qu’il est « très difficile de tracer une limite, car [l’UE soutient] les forces de sécurité ».
    Utilisation de ressources européennes
    Depuis une dizaine d’années, de fait, l’UE participe au renforcement de l’appareil sécuritaire tunisien, d’abord à des fins de lutte contre le terrorisme, puis contre l’immigration irrégulière. Jusqu’en 2023, elle a investi plus de 144 millions d’euros dans la « gestion des frontières », auxquels s’ajoutent les aides directes des Etats membres, permettant l’achat d’équipements comme ​​des navires, des caméras thermiques, des radars de navigation… Près de 3 400 agents de la garde nationale tunisienne ont par ailleurs reçu des formations de la part de la police fédérale allemande entre 2015 et août 2023 ; et deux centres d’entraînement ont été financés par l’Autriche, le Danemark et les Pays-Bas, à hauteur de 8,5 millions d’euros.
    L’enquête du Monde et de ses partenaires montre que certaines de ces ressources ont directement été utilisées lors d’expulsions. Ainsi, Moussa a formellement identifié l’un des véhicules dans lequel il a été déporté vers la Libye : un pick-up Navara N-Connecta blanc du constructeur Nissan – modèle analogue aux 100 véhicules offerts à la Tunisie par l’Italie, en 2022 pour « lutter contre l’immigration irrégulière et la criminalité organisée ». A Sfax, en Tunisie, ces véhicules utilisés par la police lors d’une arrestation collective sont du même modèle que ceux fournis par l’Italie en 2022, comme le montre un document nos équipes se sont procuré.
    En 2017, le gouvernement allemand avait, lui aussi, offert à la Tunisie 37 Nissan Navara, en plus d’autres équipements, dans le cadre d’une aide à la « sécurisation des frontières ». Deux vidéos publiées sur les réseaux sociaux, et que nous avons vérifiées, montrent également l’implication des mêmes véhicules dans les opérations d’arrestation et d’expulsion menées par les autorités tunisiennes dans la ville de Sfax. Contacté, le ministère de l’intérieur allemand s’est dit attaché « à ce que les équipements remis dans le cadre de la coopération bilatérale soient utilisés exclusivement aux fins prévues », tout en estimant que les véhicules décrits par notre enquête sont « très répandus en Afrique ». Les autorités italiennes n’ont pas répondu à nos sollicitations.
    En dépit de la situation, largement relayée par la presse, de centaines de migrants repoussés dans les zones frontalières du pays, l’UE a signé, le 16 juillet 2023, un mémorandum d’entente avec la Tunisie, devenue le premier point de départ des migrants vers le continent. Un accord érigé en « modèle » par Mme von der Leyen. La médiatrice européenne, Emily O’Reilly, a toutefois ouvert une enquête sur ce mémorandum : « Le financement de l’UE (…) ne doit pas soutenir les actions ou mesures susceptibles d’entraîner des violations des droits de l’homme dans les pays partenaires », a rappelé Mme O’Reilly à Mme von der Leyen, dans une lettre rendue publique le 13 septembre 2023.
    « Les Etats européens ne veulent pas avoir les mains sales. Ils sous-traitent donc à des Etats tiers des violations des droits de l’homme, estime, pour sa part, Marie-Laure Basilien-Gainche, professeure de droit public à l’université Jean-Moulin-Lyon-III. Mais, du point de vue du droit, ils pourraient être tenus pour responsables. » La Commission européenne nous informe par la voix d’un porte-parole que « l’UE attend de ses partenaires qu’ils remplissent leurs obligations internationales, y compris le droit au non-refoulement » et que « tous les contrats de l’UE contiennent des clauses relatives aux droits de l’homme permettant à la Commission d’ajuster leur mise en œuvre si nécessaire ». Or, des documents que nous nous sommes procurés attestent de la connaissance que les instances de l’UE ont de ces arrestations et de ces déportations collectives. Une décision de la Commission européenne, de décembre 2019, à propos des financements de l’UE au Maroc, fait par exemple référence à une « vaste campagne de répression » contre des migrants subsahariens, se traduisant par des arrestations et des expulsions « illégales » dans des zones reculées. Dans un rapport finalisé en 2019, la Cour des comptes européenne s’inquiétait, déjà, de l’opacité avec laquelle les fonds attribués par les Vingt-Sept aux autorités marocaines étaient utilisés, ainsi que du manque de « procédures de contrôle ».
    En Mauritanie, plusieurs officiels du HCR, de l’OIM ou des forces de police espagnoles confient avoir connaissance de la pratique d’expulsion en plein désert. Des éléments repris dans un rapport et une recommandation du Parlement européen datés de novembre 2023 et janvier 2024. Alors que le déploiement de Frontex en Mauritanie est en cours de discussion, l’agence rappelait, en 2018, dans un guide de formation à l’analyse de risques, destiné aux Etats africains partenaires dans la lutte contre l’immigration irrégulière, que la « charte africaine des droits de l’homme et des peuples interdit les arrestations ou détentions arbitraires ». En dépit de cette attention, Frontex a ouvert une cellule de partage de renseignement à Nouakchott, dès l’automne 2022, et procédé à la formation de plusieurs policiers. Parmi eux se trouvent plusieurs agents en poste au centre de rétention de Nouakchott. Celui-là même par lequel transitent chaque jour des migrants victimes de déportation collective.

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  • En Tunisie, des migrants camerounais interceptés en mer et abandonnés à la frontière algérienne
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2024/05/21/en-tunisie-des-migrants-camerounais-interceptes-en-mer-et-abandonnes-a-la-fr

    En Tunisie, des migrants camerounais interceptés en mer et abandonnés à la frontière algérienne
    Par Nissim Gasteli (Tunis, correspondance)#
    Une longue coque blanche de 35 mètres surmontée d’une cabine à deux étages : François, un Camerounais de 38 ans qui préfère ne pas donner son nom complet, reconnaît immédiatement l’un des douze patrouilleurs de la garde nationale tunisienne, offerts par l’Italie en 2014, et dont la maintenance est toujours assurée par Rome. Le don, d’une valeur de 16,5 millions d’euros, a permis aux autorités tunisiennes de renforcer le contrôle de leur frontière maritime avec l’Union européenne (UE).
    Rencontré dans un appartement de Tunis par Le Monde, qui a enquêté avec le média à but non lucratif Lighthouse Reports et sept médias internationaux sur les violations des droits humains subies par des migrants dans les pays du Maghreb, parfois avec des moyens alloués par des pays de l’UE, François raconte.
    Les yeux rivés sur l’écran d’un téléphone qui affiche une image du bateau, il se souvient s’être retrouvé à bord, avec sa compagne, Awa, et l’enfant de cette dernière, Adam, un matin de septembre 2023, alors qu’ils tentaient de rejoindre l’île italienne de Lampedusa à bord d’un petit rafiot. Des semi-rigides rapides interceptaient des embarcations de migrants avant de les transborder sur le patrouilleur. Celui-ci finissait par revenir au port de Sfax, « pour déposer » les migrants. Débarquée, la petite famille a été abandonnée la nuit suivante par la même garde nationale dans une zone montagneuse et désertique, à la frontière algérienne, avec près de 300 personnes, réparties en petits groupes, toutes ressortissantes d’Afrique. « Lorsqu’ils nous ont déposés, [les agents] nous ont dit : “Là-bas, c’est l’Algérie, suivez la lumière. Si on vous voit à nouveau ici, on vous tirera dessus.” » Le groupe d’une vingtaine de personnes, parmi lesquelles des hommes, des femmes dont deux sont enceintes et un enfant, s’exécute, mais se heurte immédiatement à des « tirs de sommation du côté algérien ». Ils font alors demi-tour.
    Pendant neuf jours, ils sont contraints de marcher à travers les montagnes, de dormir à même le sol, avant de regagner la ville de Tajerouine, dans l’ouest du pays, raconte François, données GPS et photos à l’appui. « Après une semaine sans sommeil, sans manger, vous commencez à perdre l’équilibre, vous êtes proche de la mort », dit-il froidement, évoquant les douleurs « aux articulations, aux pieds, au dos, aux hanches, aux chevilles » et des « hallucinations » à cause de la déshydratation.
    La première fois que Le Monde l’a rencontré, début octobre 2023, dans la localité côtière d’El Amra, François revenait de cet enfer. Depuis, l’homme a encore été expulsé à deux reprises. En novembre, il est arrêté avec d’autres migrants à El Amra. Frappés à coup de « gourdin, de chaîne, de matraque » et dépouillés de tous leurs biens par des agents de la garde nationale, ils sont finalement expulsés au milieu des « dunes de sable », dans le désert du gouvernorat de Tozeur, raconte le Camerounais.
    Revenu dans la région de Sfax quelques jours après, François tente une troisième fois, fin décembre, la traversée vers l’Europe. Mais le même scénario se répète : son bateau est arraisonné par la garde nationale. « Je savais exactement ce qui allait se passer. Le même film recommence : nous sommes ramenés à Sfax, menacés, dépouillés, mis dans des bus. » François et Adam – Awa n’ayant pas réussi à embarquer sur le rafiot – sont à nouveau expulsés, avec des centaines de personnes, réparties en petits groupes, selon ses dires.
    Ils se retrouvent ainsi près de la ville frontalière de Haïdra avec une quinzaine de personnes. Parmi elles, une femme « appelle un de ses contacts » : un homme qui vient les chercher en camionnette pour les ramener jusqu’à Sfax. Mais, à leur arrivée, ils sont déposés dans une maison et faits prisonniers. « Nous nous sommes retrouvés entre les mains d’hommes armés de machettes et de gourdins. Ils nous ont fait comprendre que nous devions payer [pour être libérés]. »
    Profitant de la vulnérabilité des migrants, des groupes criminels composés de Tunisiens et de migrants subsahariens prolifèrent dans le pays, s’enrichissant grâce à l’extorsion : la famille de François a dû verser une rançon de 300 euros, envoyée par une application mobile, pour qu’ils soient libérés, avec l’enfant, au bout d’une semaine. Par la suite, François a de nouveau été enlevé par l’un de ces groupes alors qu’il se trouvait dans un appartement qu’il louait à Sfax. Il a alors subi la torture à « coups de câbles électriques ». Des photos de lui, nu, sont envoyées à sa famille au Cameroun pour la convaincre de payer de nouveau une rançon avant qu’il parvienne à s’échapper par une fenêtre laissée ouverte. Epuisé par tant de souffrances, François a reconsidéré son rêve d’Europe.
    Contacté, le ministère tunisien des affaires étrangères réfute les accusations d’« expulsion de migrants d’origine subsaharienne vers des zones désertiques », les qualifiant d’« allégations tendancieuses » qui « n’engagent que leurs auteurs ». Les autorités italiennes n’ont pas répondu à nos sollicitations.

    #Covid-19#migration#migrant#migrationirreguliere#tunisie#subsaharien#sfax#UE#routemigratoire#desert#droit#violence#sante#algerie#maghreb#refoulement

  • Expulsions en Algérie : 11 migrants meurent de soif dans le désert, selon Alarme Phone Sahara - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/57104/expulsions-en-algerie--11-migrants-meurent-de-soif-dans-le-desert-selo

    Expulsions en Algérie : 11 migrants meurent de soif dans le désert, selon Alarme Phone Sahara
    Par Charlotte Boitiaux Publié le : 20/05/2024
    En deux mois, 11 migrants sont morts de soif dans le désert algérien, à la frontière du Niger, dans la zone dite du « Point Zéro ». Les expulsions de migrants subsahariens par les autorités d’Alger se poursuivent, en dépit de toute légalité, à un rythme soutenu : depuis janvier 2024, déjà 10 000 personnes ont été abandonnées dans le désert par Alger, selon l’association Alarme Phone Sahara.
    Le 12 mai, un Malien est retrouvé inconscient dans le désert du Sahara, dans la région dite du « Point Zéro », cette zone qui marque la frontière entre l’Algérie et le Niger, par les équipes du collectif Alarme Phone Sahara. Il fait plus de 45 degrés. Abandonné là quelques heures plus tôt par les autorités algériennes, l’homme est emmené au plus vite à Assamaka, la première ville frontalière à 15 km de là, au Niger.
    « Mais il était trop tard, il est malheureusement décédé. Il faisait trop chaud », raconte à InfoMigrants Azizou Chehou, coordinateur de l’association Alarme Phone Sahara.Deux jours plus tôt, sept corps avaient été retrouvés dans la même zone, entre le Point Zéro et Assamaka. « Il s’agissait de trois Maliens, deux Guinéens, un Burkinabé, et un corps non identifié », énumère Azizou Chehou. « Eux aussi sont morts de soif ».
    Le 5 avril, autre découverte macabre : trois corps en état de décomposition sont retrouvés par les équipes d’Alarme Phone Sahara, toujours vers le Point Zéro. « Ils n’ont pas dû supporter la chaleur. Ils devaient eux aussi être épuisés, sans réserve d’eau. Nous n’avons pas trouvé de documents sur eux, nous n’avons pas pu les identifier », précise Azizou Chehou.
    C’est en plein Sahara aux portes du désert du Ténéré que sont envoyés depuis des années les exilés, majoritairement subsahariens, par les autorités d’Alger.Selon les équipes d’Alarme Phone Sahara - basées à Agadez, Assamaka, Arlit, Niamey, dans la région de Kawar (sur la route vers la Libye), déjà 10 000 migrants ont été expulsés depuis le début de l’année. « Et nous sommes seulement au mois de mai, si la tendance se maintient, on risque de dépasser le chiffre de 2023 : 23 000 expulsés ».
    Sur son compte X (anciennement Twitter), Alarme Phone Sahara documente ces abandons et les arrivées au Niger qui en résultent : le 26 avril 2024, « 647 personnes arrivées à Assamaka », le 21 avril, « 262 exilés sont arrivés à Assamaka ». « La chaleur extrême qui s’est installée dans la zone sahélienne depuis des semaines rend une fois de plus les conditions de vie des migrants difficiles & très préoccupantes », peut-on encore lire sur X.
    Au mois de janvier, Alarme Phone Sahara évoquait aussi la reprise des rafles par les autorités algériennes dans les villes du pays. « Ces arrestations arbitraires ont toujours existé mais leur fréquence varie. Aujourd’hui, on arrête les Noirs dans leur appartement, dans la rue, sur leur lieu de travail, sur les terrains de sport et puis on les envoie vers Point zéro », expliquait alors l’organisation.
    Il existe aussi des renvois « dominos ». Depuis des mois, par exemple, la Tunisie expulse elle aussi illégalement des Subsahariens vers la Libye et l’Algérie. « Quand les autorités algériennes constatent que des Noirs ont traversé la frontière, ils les arrêtent ». Puis ces migrants « sont expulsés à leur tour » vers le Niger, détaille Azizou Chehou.
    Combien meurent sans laisser de traces ? « Nous ne pouvons pas savoir, malheureusement. Nous n’avons pas le matériel ou les véhicules adéquat pour aller les chercher dans le désert », déplore Azizou Chehou. Chaque année, de nombreux exilés disparaissent dans le Sahara. Ils peuvent se perdre, mourir de déshydratation, ou être victimes de groupes mafieux.
    Amadou, un migrant contacté par InfoMigrants en juillet 2020, racontait avoir vu trois personnes mourir sous ses yeux dans le désert. « Ils étaient tellement fatigués qu’ils se sont effondrés au sol », avait expliqué le jeune Africain qui travaillait depuis deux ans en Algérie avant d’être arrêté. Face à l’intensification des violentes opérations de refoulements de Subsahariens par les autorités algériennes, la junte au pouvoir au Niger a convoqué, le 3 avril, l’ambassadeur algérien dans le pays.
    Le secrétaire général adjoint du ministère nigérien des Affaires étrangères, Oumar Ibrahim Sidi, qui a reçu le diplomate algérien, « a formellement exprimé les protestations des plus hautes autorités nigériennes contre le caractère violent du mode opératoire utilisé par les services de sécurité algériens pour mener ces opérations ». Il « a demandé » au diplomate algérien « d’intercéder » auprès des autorités de son pays, afin que les refoulements s’opèrent notamment « dans le respect de la dignité de l’intégrité physique et morale » des migrants.

    #Covid-19#migrant#migration#niger#tunisie#algerie#afriquesubsaharienne#refoulement#deserttenere#agadez#assamaka#arlit#niamey#morbite#mortalite#sante#santementale

  • Sénégal : « Il y a urgence à tenir une conférence africaine sur la gestion des flux migratoires » - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/57179/senegal--il-y-a-urgence-a-tenir-une-conference-africaine-sur-la-gestio

    Sénégal : « Il y a urgence à tenir une conférence africaine sur la gestion des flux migratoires »
    Par RFI Publié le : 20/05/2024
    La route atlantique de l’émigration clandestine vers les Canaries est réputée très dangereuse, pourtant elle continue à être empruntée. La marine sénégalaise a ainsi annoncé que plus de 500 migrants avaient été interceptés dans les eaux territoriales depuis le début du mois de mai. Boubacar Seye, le président de l’ONG Horizons sans Frontière est l’invité d’Afrique midi.

    #Covid-19#migrant#migration#senegal#atlantique#canaries#espagne#UE#rouetmigratoire#mortalite#sante#politiquemigratoire

  • Recent Updates on Paxlovid’s Transition to Market & Why Access Matters https://www.idsociety.org/covid-19-real-time-learning-network/therapeutics-and-interventions/recent-updates-on-paxlovids-transition-to-market--why-access-matters/#/+/0/publishedDate_na_dt/desc

    Importantly, the efficacy of antivirals against #COVID-19 has not substantially waned over time (unlike the efficacy of monoclonal antibodies), despite ongoing and dramatic viral variant evolution. This is notable because it is not true of many antivirals in other disease contexts

    #paxlovid

  • Quinze pays de l’UE demandent à Bruxelles de faciliter l’envoi de migrants vers des pays tiers - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/57145/quinze-pays-de-lue-demandent-a-bruxelles-de-faciliter-lenvoi-de-migran

    Quinze pays de l’UE demandent à Bruxelles de faciliter l’envoi de migrants vers des pays tiers
    Par FRANCE 24 Publié le : 17/05/2024
    Quinze pays européens ont plaidé jeudi auprès de la Commission européenne pour durcir le contrôle de l’immigration en Europe, notamment en permettant l’envoi de migrants dans des pays tiers, à l’image de l’accord passé entre l’Italie et l’Albanie. Mais la notion juridique de « pays tiers sûr » qui encadre la loi européenne fait débat.
    C’est une forme de pression sur Bruxelles à moins d’un mois des élections européennes. Quinze pays de l’Union européenne, emmenés par le Danemark et la République Tchèque, plaident jeudi 16 mai pour « de nouvelles solutions » pour transférer plus facilement des migrants à des pays hors de l’Union européenne, y compris lors d’opérations de sauvetage en mer.
    Ces quinze pays, incluant notamment l’Italie ou la Grèce mais pas la Hongrie, veulent aller plus loin que le pacte migratoire récemment adopté par l’UE qui durcit le contrôle de l’immigration en Europe.
    Ils demandent à la Commission européenne « d’identifier, d’élaborer et de proposer de nouveaux moyens et de nouvelles solutions pour prévenir l’immigration irrégulière vers l’Europe », selon cette lettre consultée par l’AFP.
    Ils plaident ainsi pour des mécanismes permettant « de détecter, d’intercepter et, en cas de détresse, de secourir des migrants en haute mer et de les emmener dans un lieu sûr d’un pays partenaire hors de l’UE où des solutions durables pourraient être trouvées pour ces migrants ».Ils citent ainsi l’accord que l’Italie a conclu récemment avec l’Albanie pour envoyer dans ce pays candidat à l’UE des migrants secourus dans les eaux italiennes, afin que leurs demandes d’asile y soient traitées.
    Les quinze pays suggèrent également de pouvoir renvoyer plus facilement les demandeurs d’asile dans des pays tiers pour qu’y soit étudiée leur demande. La loi européenne prévoit qu’un immigrant arrivant dans l’UE puisse être envoyé dans un pays extérieur au bloc où il aurait pu demander l’asile, à condition qu’il ait un lien suffisant avec ce pays tiers. Ce qui exclut à ce stade un modèle de type Royaume-Uni/Rwanda.
    « L’application du concept de ’pays tiers sûr’ dans la loi européenne sur l’asile doit être réévaluée », écrivent ces pays.Plus généralement, ces pays veulent multiplier les accords avec les pays tiers situés le long des routes migratoires, citant en exemple des partenariats déjà conclus, comme celui avec la Turquie pour retenir les réfugiés syriens en 2016. « Nous encourageons l’établissement de partenariats globaux, mutuellement bénéfiques et durables avec les principaux pays partenaires situés le long des routes migratoires », selon les signataires.Ces propositions, destinées à la future Commission européenne, interviennent à moins d’un mois des élections européennes pour lesquelles les sondages prédisent une poussée des partis anti-immigration.
    Les quinze pays signataires sont la Bulgarie, la République tchèque, le Danemark, la Finlande, l’Estonie, la Grèce, l’Italie, Chypre, la Lettonie, la Lituanie, Malte, les Pays-Bas, l’Autriche, la Pologne et la Roumanie.

    #Covid-19#migrant#migration#UE#routemigratoire#asile#immigration#paystiers#partenariatmigratoire#droit#sante

  • Grèce : plus de 40 migrants secourus au large de la Crète, trois personnes portées disparues - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/57151/grece--plus-de-40-migrants-secourus-au-large-de-la-crete-trois-personn

    Grèce : plus de 40 migrants secourus au large de la Crète, trois personnes portées disparues
    Par La rédaction Publié le : 17/05/2024
    Les garde-côtes grecs ont annoncé jeudi avoir secouru une embarcation en détresse au large de la Crète. Une quarantaine de personnes ont été sauvées mais trois autres manquent à l’appel. La Crète et sa voisine, la petite île de Gavdos, ont connu cette année un pic d’arrivées de migrants, venus de Libye.
    Les garde-côtes grecs ont secouru 42 migrants au large de l’île de Crète, ont annoncé les autorités jeudi 16 mai. Trois personnes sont portées disparues et étaient toujours recherchées ce vendredi. Leur bateau avait envoyé un signal de détresse alors qu’il était en mer. Selon un responsable de la Marine, les migrants ont été secourus par des navires commerciaux tandis qu’un hélicoptère survolait la zone maritime, à environ 27 milles marins au sud-ouest de la Crète.
    Les causes du naufrage ne sont pas encore connues, a déclaré à Reuters le responsable sous couvert d’anonymat. L’île de Crète et sa petite voisine Gavdos, la pointe la plus méridionale de l’Europe, ont connu une augmentation des arrivées de migrants cherchant à traverser la frontière vers l’Europe depuis la Libye ces derniers mois.
    En mars, Gavdos avait déjà fait face, au total, à l’arrivée de 1 180 migrants, venus par la mer. Du jamais vu pour cette île qui ne compte que 70 habitants à l’année.
    Le gouvernement grec a promis de l’argent et du personnel (médical notamment) pour aider ces îles non équipées pour gérer de telles arrivées. Pour les soulager, Athènes transfèrent rapidement la plupart des nouveaux arrivants vers le continent. La Grèce est une porte d’entrée privilégiée vers l’Union européenne pour les migrants et les réfugiés du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie depuis 2015. Ces dix dernières années, la majorité des exilés sont partis des côtes turques pour atteindre Chios, Lesbos ou encore Samos.
    Mais aujourd’hui, les départs vers la Grèce se font aussi depuis l’est de la Libye. De nombreuses embarcations chargées d’exilés partent de Tobrouk, région non reconnue par l’ONU et contrôlée par le maréchal Haftar. Les côtes y sont moins surveillées - par rapport à celles de l’ouest du pays - et les départs en mer jugés par les passeurs plus « faciles »."Ces départs sont de plus en plus fréquents", avait déjà commenté l’été dernier Federico Soda, chef de mission Libye auprès de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) à InfoMigrants.
    La majorité des candidats à l’exil depuis cette zone sont égyptiens, soudanais, bangladais et syriens. Ils arrivent depuis l’Égypte voisine qui souffre d’une économie en perte de vitesse. Les migrants d’Afrique subsaharienne s’y disent aussi de plus en plus victimes de violences et de rejet de la part de la population. « Il y a tous les migrants de la Corne de l’Afrique qui passent par l’Égypte pour prendre un bateau et aller en Grèce », précisait aussi Marc Lavergne, spécialiste du monde arabe et directeur de recherche émérite au CNRS, au micro de RFI. « C’est pour ça que la Grèce [...] est en première ligne face à cet afflux de migrants »

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