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  • Assurance chômage : le gouvernement s’acharne sur les chômeurs les plus précaires | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/assurance-chomage-gouvernement-sacharne-chomeurs-plus-preca/00111203

    Reportées à cause de la crise néo-calédonienne et de l’assassinat de deux agents pénitentiaires, les nouvelles mesures concernant l’assurance chômage devraient enfin être dévoilées par le Premier ministre en début de semaine prochaine, voire dès ce week-end.

    L’annonce d’un nouveau tour de vis ne fait guère de doute. La question est de savoir quels sont les leviers que le gouvernement choisira en définitive d’activer : durée de travail nécessaire pour être indemnisé (6 mois aujourd’hui), période de référence pendant laquelle le demandeur d’emploi doit avoir travaillé (24 mois actuellement), durée maximale d’indemnisation (18 mois pour les chômeurs de moins de 53 ans à ce jour), délai de carence avant de toucher une allocation ou encore révision des règles concernant les seniors…

    Pris isolément ou combinés entre eux, ces paramètres auront des conséquences plus ou moins sévères selon les catégories de chômeurs et généreront des économies conséquentes, voire massives. C’est ce que montre un document de travail de l’Unédic diffusé aux partenaires sociaux mais non rendu public.

    https://justpaste.it/2o52b

    • Sur un réseau craignos (mais pas trop), Yann Gaudin nous informe :

      Petit répit avant la sauvagerie

      On nous annonce finalement l’entrée en vigueur au 1er décembre 2024 de la nouvelle lame très tranchante en matière de protection des salariés en situation de chômage, avec les détails techniques dans un décret au 1er juillet.

      Nous serons alors quasiment le pays le plus insécurisant d’Europe tous paramètres combinés (conditions d’accès, durée et montant d’indemnisation).

      Il faudra désormais avoir travaillé minimum l’équivalent de 8 mois à temps plein sur 20 mois pour bénéficier de la protection par une indemnisation, sinon ce sera la très grande pauvreté du RSA (rien du tout pour les jeunes) ou le suicide.

      Vous ne serez plus indemnisés que maximum 15 mois si vous avez moins de 57 ans. Après ce sera la très grande pauvreté du RSA (rien du tout pour les jeunes) ou le suicide.

      Vous ne serez plus indemnisés que maximum 30 jours par mois, donc vous perdrez des jours d’indemnisation.

      Pour rappel, il n’y a actuellement qu’1 emploi pour 5 personnes en situation de chômage et encore, en comptant les contrats courts et à temps partiel. Appauvrir sauvagement des millions de français, est-ce que ça va faire pousser des emplois ?

      A la fin de cette année 2024, les salariés ne vivront plus vraiment en France :
      😑 Il n’y aura plus de liberté de choisir son parcours professionnel, si vous souffrez dans votre emploi vous devrez y rester quand même sous peine de finir vite dans un désastre personnel et familial, et bon courage pour négocier une augmentation de salaire quand votre employeur vous rappellera votre chance d’avoir au moins un emploi.
      😑 Il y aura encore moins d’égalité entre les citoyens aisés aux gros revenus garantis & gros patrimoines protégés et les travailleurs appauvris ou menacés en permanence de l’être.
      😑 Enfin il n’y aura quasiment plus de fraternité envers celles & ceux qui n’auront pas la chance d’avoir un CDI à temps plein bien payé et épanouissant.

      Amis salariés, une pensée à vous et à vos proches, il va y avoir des drames parmi vous, et la délinquance voire la criminalité risquent fort d’augmenter car toutes les insécurités sont liées.

      https://www.facebook.com/yann.gaudin/posts/pfbid02rv5wyz3p21oKSNV3GYM5VteFfoQ3CtATFLLUDyEcMA5F9mekGDd4R5gAaC4VYEgWl

    • chez Mediapart : https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/260524/assurance-chomage-le-grand-jeu-de-massacre

      Pour inciter les entreprises à embaucher des séniors, le premier ministre dégaine le « bonus emploi » permettant de cumuler salaire et allocations-chômage. [...]

      Rien de coercitif, donc, pour les entreprises qui jettent des salarié·es jugé·es trop âgé·es. Mais tout pour les patrons qui cherchent de la main-d’œuvre, qualifiée et expérimentée, pour pas trop cher. « Je suis une entreprise, je balance tout le monde à 55 ans, et après deux ans de chômage je les récupère à moitié prix », commente dans Libération le président de la CFE-CGC, François Hommeril.

      (qui cite Libé : https://www.liberation.fr/economie/social/assurance-chomage-gabriel-attal-confirme-une-reduction-de-la-duree-dindem )

    • une petite explication historique de la manip de Macron pour virer le paritarisme de l’assurance chômage, avoir (enfin) les mains libres, et abattre cette partie du système social en toute tranquillité. Le plan était visiblement prévu de longue, les premieres actions datent de 2018 :

      https://ses.ens-lyon.fr/articles/main-basse-sur-lassurance-chomage

      Quatre mois plus tard (juin 2018), la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (LCAP, art. 54) réécrit l’article L 5422-9 du code du travail qui édicte que l’allocation chômage est financée par des contributions des salariés. Celles-ci sont donc supprimées, si bien que l’affirmation selon laquelle cette « exonération » serait « sans aucun impact sur les droits sociaux » (annexe 4) s’efface au profit d’une autre lecture.

      Le président de la République précise en effet que cette réforme « transforme la philosophie même de notre solidarité nationale [qui] est de moins en moins une assurance individuelle, assortie d’un droit de tirage, financée par l’ensemble des contribuables, […] l’assurance chômage aujourd’hui n’est plus du tout financée par les cotisations des salariés » mais « par les cotisations des employeurs et par la CSG. Cette transformation, il faut en tirer toutes les conséquences ; il n’y a plus un droit au chômage, au sens où on l’entendait classiquement, il y a l’accès à un droit qu’offre la société mais sur lequel on ne s’est pas garanti à titre individuel, puisque tous les contribuables l’ont payé [4] ».

      Alea jacta est : l’assurance chômage est plongée dans le grand bain de la politique sociale [5].

    • Réforme de l’Assurance-chômage : une offensive ultra-violente qui vise l’ensemble du monde du travail
      https://www.revolutionpermanente.fr/Reforme-de-l-Assurance-chomage-une-offensive-ultra-violente-qui

      Ce dimanche, Gabriel Attal dévoilait le contenu de la nouvelle réforme de l’assurance chômage. Une réforme d’une grande violence contre les travailleurs les plus précaires sur laquelle comptent le gouvernement et le MEDEF pour attaquer brutalement l’ensemble du monde du travail.

      ... « Balancer tout le monde à 55 ans, et après deux ans de chômage je les récupère à moitié prix »

      Loin de se cantonner aux jeunes travailleurs, cette réforme aura également un lourd impact pour les seniors. Alors que les chômeurs pouvaient toucher des allocations chômages d’une durée de vingt-sept mois à partir de 55 ans, seuls les travailleurs âgés de 57 ans bénéficieront désormais d’une telle exception sur la durée du versement. Une durée « exceptionnelle » elle-même rabotée par la nouvelle réforme en passant de vingt-sept à vingt-deux mois.

      En procédant à un tel charcutage social envers les seniors, le gouvernement assure une main d’œuvre très bon marché pour l’ensemble du patronat, en plus des jeunes travailleurs contraints d’accepter les offres d’embauches les plus précaires. Car comme le souligne le Premier ministre, « un sénior au chômage qui reprendra un emploi moins bien rémunéré que son emploi précédent pourra cumuler son nouveau salaire avec son allocation [...] pour atteindre le même salaire qu’il avait avant de tomber au chômage ». Un moyen donc les patrons de payer à bas-coût une main d’œuvre déjà qualifiée, comme le résumé le président de la CFE-CGC auprès de Libération : « je suis une entreprise, je balance tout le monde à 55 ans, et après deux ans de chômage je les récupère à moitié prix ».

      Un relèvement du seuil d’autant plus brutal pour les travailleurs seniors, déjà contraint de partir deux ans plus tard du fait du relèvement de l’âge de départ à 64 ans, que la durée d’indemnisation est indexée à la conjoncture économique selon le principe de « contracyclicité » introduit par la réforme de 2019. Ainsi, depuis février 2023, la durée de versement des allocations a été rabotée de 25% pour l’ensemble des chômeurs, faisant passer cette dernière de vingt-quatre à dix-huit mois. Cette réforme impose en effet un coefficient réducteur dès lors que le taux de chômage ne dépasse pas les 9%. Un mécanisme qui couplé aux nouvelles mesures introduites par le décret du 1er juillet auront des effets qui alertent jusqu’à la CFDT qui, dans un communiqué du 23 mai dernier, a alerté sur la chute inévitable de la durée d’indemnisation.

      Des milliards sur le dos des plus précaires comme gages aux agences de notation

      Si Gabriel Attal se défend de mener « une réforme d’économie », l’ampleur des attaques ne laissent pas dupe pourtant pas des intentions qui animent le gouvernement. Le ministère du Travail lui-même n’avait pas caché l’objectif affiché cette déconstruction méthodique des droits des chômeurs, en avançant que cette réforme devait permettre 3,6 milliards d’économies par ans, soit plus de 10 % du montant total des allocations versées en 2023. Dès lors les ambitions de façade affichées par Gabriel Attal, « prospérité et d’activité », ne trompent pas. Comme le résume Le Monde, les milliards espérés par le gouvernement laissent « de quoi interpréter cette réforme davantage comme une façon de trouver dans l’urgence des marges de manœuvre budgétaires, plutôt que d’apporter des solutions pérennes au chômage de masse. »

      Une ambition d’autant plus visible, devant certaines des mesures introduites par cette réformes et qui s’assimilent à de véritables rapines. Ainsi, alors que les allocations étaient versées pour chaque jour du mois, soit l’équivalent de 30 à 31 jours d’indemnité journalière selon le mois, le gouvernement a procédé à un lissage lui permettant d’engranger plusieurs centaines de millions d’économies. En ce sens, les allocations seront versées en ne prenant en compte que 30 jours d’indemnités journalières, peu importe le mois. Cette innovation, qu’Attal présente comme une « mensualisation » des indemnités, lui rapporterait 950 millions d’euros sur trois ans.

      Autant « d’économies » réalisées sur le dos des chômeurs qui font figure de véritables gages pour la bourgeoisie et pour les agences de notations, alors que le gouvernement était sommé par ces dernières de couper dans ses dépenses budgétaires, au risque de voir sa note dévaluée. Un enjeu d’autant plus central pour Macron et Attal à l’heure où le déficit et la dette ne cessent de se creuser malgré les politiques austéritaires et les milliards dépensés en incitations fiscales pour les investisseurs et les plus fortunés. L’enjeu n’est pas seulement tactique mais a une dimension stratégique. En ouvrant une nouvelle offensive brutale contre l’assurance chômage, Macron et le MEDEF cherchent à rattraper le retard compétitif de la France avec ses voisins européens sur le terrain de la casse des droits sociaux. L’offensive sur l’assurance chômage cherche ainsi à aiguiser la concurrence entre les travailleurs pour qu’ils acceptent n’importe quel emploi...

  • Le rideau de fumée des « salaires décents » de Michelin | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/250424/le-rideau-de-fumee-des-salaires-decents-de-michelin


    On se doutait bien qu’il y avait un loup dans le potage.

    L’annonce par le groupe de pneumatiques auvergnat qu’il verserait désormais des « salaires décents » à ses salariés a suscité l’enthousiasme de Bruno Le Maire. Mais la mesure est tout sauf émancipatrice, car il s’agit plutôt d’une forme élargie de chantage à l’emploi.

  • Chanel fabrique et vend des produits grâce à Pôle emploi | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/220424/chanel-fabrique-et-vend-des-produits-grace-pole-emploi

    Les « stagiaires » ont en fait travaillé à la chaine tout en consommant leurs droits à la formation et leur « revenu » a été équivalent à une seule des pièces qu’elles ont fabriqué de manière intensive.
    Elles n’ont jamais vraiment eu le droit de refuser quoi que ce soit et ont été jetées juste avant de devoir les payer.
    #esclavage

    Sandrine et Catherine, 55 et 52 ans, étaient les deux femmes les plus âgées de la formation. Pendant le travail à la chaîne, une épée de Damoclès planait constamment au-dessus de leur tête. « Ce n’était pas compliqué mais hyper rapide. C’est très anxiogène. On peut très bien vous convoquer un beau jour pour vous dire que c’est fini pour vous, raconte Catherine. On appelait ça “Causse Lanta” [en référence à l’émission de survie de TF1 « Koh-Lanta » − ndlr]. »

    Les craintes de Catherine se sont matérialisées trois jours avant la fin de la formation. Convoquée dans le bureau des ressources humaines, on lui annonce qu’elle ne répond pas aux critères d’exigence. Elle est mise dehors après près de trois mois. « À ce moment-là, vous ressentez de la rage, souffle Catherine. Si on m’avait fait sortir au bout de trois semaines, ça ne m’aurait pas posé de souci. »

    Même sentence pour Sandrine, et même sentiment d’amertume. « Quand ils vous recrutent, ils vous disent qu’ils attendent beaucoup de “savoir-être”. Eux sont extraordinairement polis, mais ils jettent les gens à la première occasion. »

  • « Apologie du terrorisme » : un syndicaliste du Nord écope d’un an de prison avec sursis | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/180424/apologie-du-terrorisme-un-syndicaliste-du-nord-ecope-d-un-de-prison-avec-s

    Le secrétaire général de la CGT du Nord a été condamné jeudi par le tribunal correctionnel de Lille à une peine de prison avec sursis. En cause, la publication d’un tract de soutien à la Palestine en octobre 2023. La CGT fait appel.

  • Austérité : le gouvernement en veut toujours plus | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/110424/austerite-le-gouvernement-en-veut-toujours-plus

    Services publics, collectivités locales, modèle social… le gouvernement annonce chaque semaine de nouvelles coupes budgétaires afin, espère-t-il, de réduire le déficit public. Grande perdante : l’économie française.

  • Finances publiques : le cas d’école du bouclier tarifaire | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/110424/finances-publiques-le-cas-d-ecole-du-bouclier-tarifaire

    Le bouclier tarifaire était censé protéger les ménages. Il a surtout protégé les surprofits de quelques acteurs. Le rapport de la Cour des comptes sur ce dispositif illustre jusqu’à la caricature le gaspillage de l’argent public.

  • “Djihadisme d’atmosphère” : Gilles Kepel, un expert de l’islam controversé
    https://www.telerama.fr/debats-reportages/djihadisme-d-atmosphere-gilles-kepel-un-expert-de-l-islam-controverse-70199

    Hum, les pâtisseries safranées, ça fait envie ! Personne n’aurait vu passer ça sur justpast.it ?

    Gilles Kepel est intarissable sur son animal totem : le sanglier, que chassaient ses aïeux paternels de la Bohême tchèque. Désormais, à l’écouter, la bête traquée, c’est lui, le politologue médiatique, spécialiste tout-terrain de l’islam radical depuis plus de trente ans. « Mais la mise à mort tant espérée n’est pas encore arrivée », met-il en garde en offrant d’appétissantes pâtisseries safranées.

  • Le retour de l’austérité, signe de l’instabilité économique globale | Mediapart | 01.04.24

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/010424/le-retour-de-l-austerite-signe-de-l-instabilite-economique-globale

    Mais ce sont les pays émergents les plus fragiles qui sont le plus durement frappés par cette nouvelle tendance, souvent avec l’action directe du Fonds monétaire international (FMI). Outre l’Argentine soumise à la furie austéritaire de son nouveau président libertarien Javier Milei, on peut citer parmi les pays touchés par ce tour de vis l’Égypte, le Nigéria, la Turquie ou le Kenya. Le mouvement n’est pas encore généralisé, mais il y a clairement un tourbillon disciplinaire en cours.

    Ce mouvement est accompagné d’un discours prônant à nouveau l’austérité comme une solution aux maux économiques. Dans le Financial Times du 25 mars, le président de la banque Rockefeller International, Ruchir Sharma, se réjouissait ainsi que les cinq pays émergents cités plus haut aient eu recours à ces méthodes dignes, reconnaît-il, du bon vieux « consensus de Washington ». « Ils sont en voie de guérison », affirmait-il ainsi.

    Un nouveau « consensus de Washington » ?

    Mais nous ne sommes pas pour autant revenus aux grandes heures du consensus de Washington des années 1980. Ce retour de bâton de l’austérité s’accompagne en effet d’un autre mouvement majeur en apparence contradictoire et pourtant assez général d’un soutien public inédit à l’économie. Après des années de politique monétaire très accommodante, les États ont accéléré les injections de fonds dans le secteur privé.

    Rien qu’aux États-Unis, l’ensemble des plans d’aide mis en place depuis la pandémie s’élève à près de 5 000 milliards de dollars, soit près d’un quart du PIB annuel de la première économie du monde. La Chine n’est pas en reste, l’objectif affiché par Xi Jinping de développer les « nouvelles forces productives » technologiques se fait évidemment avec l’appui d’argent public.

    Mais même dans les pays qui prétendent revenir à des logiques d’austérité, les largesses publiques au secteur privé ne cessent pas. Dans les pays émergents, les problèmes budgétaires tiennent souvent à la faiblesse de l’imposition du capital. Surtout, en Allemagne comme en France, les coupes budgétaires ont servi à maintenir les importantes aides publiques au secteur privé. Outre-Rhin, la censure du « fonds pour le climat et la transformation » (KTF) par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe en octobre a conduit le gouvernement fédéral à favoriser l’aide aux entreprises au détriment des aides sociales. En France, on sait que la nouvelle réforme de l’assurance-chômage n’est justifiée que par le maintien d’un flux fiscal annuel de près de 200 milliards d’euros en faveur des entreprises et du refus d’augmenter les impôts sur le capital.

    • Romariiiic cite un de ses articles d’y à 4 jours
      https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/270324/le-recit-de-la-peur-de-la-dette-sert-la-destruction-de-l-etat-social

      qu’il débute façon Vaudeville cf : https://seenthis.net/messages/1047752#message1048280

      et conclu ainsi, toujours aussi rassurant :

      Mais cette logique vient percuter la situation d’affaiblissement structurel de la croissance et le besoin permanent d’autres secteurs, notamment de l’industrie, de bénéficier de flux publics directs et indirects. Pour régler cette tension, et permettre de satisfaire tous les secteurs du capital, la solution est alors de faire peser l’ordre de la dette sur les dépenses sociales et les services publics. La proposition de hausse de la TVA de Bruno Le Maire pour régler le problème – déjà mise en place sous le quinquennat Hollande – s’inscrit également dans ce cadre de répression sociale.

      « Le retour de l’ordre de la dette vient asseoir les inégalités de classes », résume Benjamin Lemoine, qui ajoute : « Il y a un cahier des charges social du maintien de la dette en tant qu’actif sans risques au service des financiers : les plus vulnérables, ceux qui dépendent des services publics, comme les organisations de la main gauche de l’État (santé, éducation, recherche, etc.) sont la variable d’ajustement automatique de cette logique perpétuellement recommencée. »

      L’historien de l’économie états-unien Robert Brenner a, dans un article de la New Left Review de 2020, résumé de cette façon ce qu’il pense être un « nouveau régime d’accumulation » et qu’il appelle le « capitalisme politique » par cette formule simple : « la redistribution directe politiquement pilotée de richesse vers le haut pour soutenir des éléments centraux d’une classe capitaliste dominante partiellement transformée ». C’est cette logique qui semble pleinement fonctionner dans le cas français.

      « Le maintien de l’ordre de la dette demande un dosage incessant entre le soutien au capital privé et une capacité à assurer sans chocs politiques le service de la dette, et depuis des années cette capacité repose entièrement sur le sacrifice de l’État social », souligne Benjamin Lemoine. Le problème est que cette logique, soutenue par le récit sur la dette, craque de toute part. Non seulement elle ne produit pas de croissance, mais elle affaiblit, par son coût social et environnemental, la capacité de remboursement de la dette. La guerre sociale alimentée par le récit sur la dette est une impasse. Derrière le vaudeville, il y a bien un récit mortifère.

  • Le doublement de la franchise sur les boîtes de médicaments entre en vigueur
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/03/31/le-doublement-de-la-franchise-sur-les-boites-de-medicaments-entre-en-vigueur

    Dès dimanche donc, la franchise sur les médicaments et les actes paramédicaux passe de 50 centimes à 1 euro. (...)
    En cas de cumul d’actes dans une même journée, le montant ne peut toutefois pas excéder 4 euros de reste à charge par jour sur les actes médicaux (contre 2 euros jusqu’alors) et 8 euros sur les transports sanitaires (contre 4 euros précédemment).
    La « participation forfaitaire » – qui fonctionne selon le même principe pour les consultations et actes médicaux, à l’exception de ceux réalisés lors d’une hospitalisation, mais aussi les examens de biologie médicale et de radiologie – passera, elle, bientôt à 2 euros, contre 1 euro aujourd’hui. La date de cette augmentation, actée par un décret paru à la mi-février, n’est pas encore connue.
    Afin que les personnes ayant le plus fort recours aux soins ne soient pas pénalisées, les deux plafonds annuels – l’un pour les franchises, l’autre pour les participations forfaitaires – sont maintenus à 50 euros chacun.
    Les franchises et remboursements forfaitaires ne sont pas applicables aux mineurs, aux femmes en congé maternité et aux bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire (C2S) – ces derniers ayant des revenus particulièrement modestes. [inférieurs à 1093e/mois pour une personne seule en 2024, ndc]

    Pour « 800 millions d’euros d’économie par an » à la Sécu.

    #santé #pauvres #accès_aux_soins

  • Le récit de la peur de la dette sert la destruction de l’État social | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/270324/le-recit-de-la-peur-de-la-dette-sert-la-destruction-de-l-etat-social

    L’annonce d’un déficit public plus élevé que prévu a intensifié le discours lancé voici quelques semaines sur la menace de la dette. Ce récit a pour principale fonction de justifier l’austérité future en préservant les transferts vers le secteur privé.

    • Cest une pièce de théâtre sans cesse rejouée dans le spectacle général de l’économie. À intervalles réguliers, un placard s’ouvre et un ministre des finances découvre avec horreur l’existence de titres de dettes qu’il a lui-même placés dans le meuble. S’ensuit une panique générale bien rodée où les portes claquent et où chacun vient crier à la faillite, appeler à la responsabilité, menacer d’une attaque des marchés financiers.

      Chacun alors appelle à la baisse de la dépense publique et à l’austérité « pour sauver le pays ». D’ailleurs, voici un employé de bureau du ministère qui se présente avec une pile d’études économiques fort sérieuses montrant que l’austérité renforce « la croissance structurelle ». Contre les populismes, la raison commande de couper dans les dépenses.

      La scène se poursuit par un régime d’austérité sévère qui concerne principalement les plus pauvres. La misère croît, le pays voit sa croissance structurelle s’effondrer, et la récession est assurée. Le final est assuré par le même ministre qui jure, la main sur le cœur, qu’on ne l’y prendra plus. Avant de retourner remplir le placard…

      La France, en ces premiers mois de 2024, semble être entrée de plain-pied dans ce mauvais vaudeville rejoué cent fois, mais dont les conséquences concrètes sont considérables. Les discours alarmistes sur la dette se multiplient. Comme le souligne auprès de Mediapart Benjamin Lemoine, sociologue et auteur de l’ouvrage L’Ordre de la dette (La Découverte, 2022), « l’effet de surprise politico-médiatique est feint ».

  • En Suède, la grève contre Tesla se poursuit depuis quatre mois - Next
    https://next.ink/brief_article/en-suede-la-greve-contre-tesla-se-poursuit-depuis-quatre-mois

    Le brief du 05 mars 2024

    Le mouvement dure depuis la fin octobre.

    Des salariés suédois refusent de reprendre le travail tant que Tesla n’acceptera pas de signer l’accord collectif sur les salaires, dans un pays où les négociations entre employeurs et syndicats font partie intégrante de l’organisation des conditions de travail.

    C’était en début de mois. Et donc, là bas aussi, ça fait pas la grève à moitié (https://seenthis.net/messages/1047628).

    Et là, ça date du 21 février dernier, via le Figaro. Ça fait pas les gros titres, quand dans un autre pays que le notre, des salariés, prennent en otage tout un pays... C’est tout de même le comble que ce soit un journal de droite qui relaie ces infos. Apparemment, ça n’en parle pas des masses ailleurs.

    Grève chez Tesla en Suède : les bornes de recharges bloquées à partir du 4 mars
    https://www.lefigaro.fr/societes/greve-chez-tesla-en-suede-les-bornes-de-recharges-bloquees-a-partir-du-4-ma

    Publié le 21/02/2024
    Un syndicat suédois a annoncé mercredi qu’il bloquerait les stations de recharge des voitures électriques Tesla, après environ quatre mois de grève provoquée par le refus du constructeur automobile américain de signer une convention collective sur les salaires. L’entretien et l’installation des bornes Tesla en Suède seront suspendus à partir du 4 mars, a indiqué le syndicat des employés des services et de la communication (Seko) dans un communiqué, dans un acte de solidarité avec le mouvement en cours .

  • Au Nigéria, la stratégie néolibérale aggrave la crise économique | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/020324/au-nigeria-la-strategie-neoliberale-aggrave-la-crise-economique

    Inspirée par le FMI et la Banque mondiale, la stratégie de libéralisation du nouveau président Bola Tinubu a aggravé la crise que traverse depuis près de dix ans le pays le plus peuplé d’Afrique. Le naira, la monnaie nigériane, est en chute libre.
    Romaric Godin - 2 mars 2024 à 18h27

    #Nigeria #CEDEAO
    https://justpaste.it/e7rd9

  • La #rémunération hors norme d’#Arnaud_Rousseau, président de la #FNSEA, à la tête du groupe #Avril

    L’émission de France 2 « Complément d’enquête », consacrée jeudi soir à la FNSEA, révèle le montant de la rémunération d’Arnaud Rousseau par sa société Avril : 187 000 euros en 2022. Sans compter ses autres revenus liés à ses multiples casquettes.

    Le chiffre est dix fois supérieur au revenu moyen des agriculteurs et agricultrices du pays. Président du conseil d’administration du groupe Avril et président du syndicat de la FNSEA, Arnaud Rousseau a touché en 2022 une rémunération supérieure à 187 000 euros de la part de la société spécialisée dans le colza et le tournesol. C’est ce que révèle l’émission de France 2 « Complément d’enquête », dans un long format consacré à la FNSEA, diffusé jeudi 29 février à partir de 23 heures (https://www.france.tv/france-2/complement-d-enquete/5714862-agriculture-pour-qui-roule-la-fnsea.html).

    Rapportée à une moyenne mensuelle, cette rémunération, dans laquelle sont inclus des jetons de présence et des avantages en nature – voiture et logement de fonction –, est équivalente à plus de 15 500 euros par mois. L’information de l’équipe de « Complément d’enquête » a été confirmée par le directeur juridique du groupe Avril. Il a toutefois été précisé à France 2 que « ce que perçoit Arnaud Rousseau est confidentiel ».

    Ce montant ne fait pas le tour des rémunérations d’Arnaud Rousseau, dont l’ensemble des revenus est, à l’évidence, encore supérieur. L’homme est en effet président de la FNSEA – où il touche des indemnités d’élu –, exploitant agricole à la tête de plusieurs structures bénéficiaires des aides publiques de la PAC – dont Mediapart révélait les montants l’an dernier –, vice-président de la chambre d’agriculture de la région Île-de-France, vice-président de la FOP (Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux), et maire de sa commune.
    Des manœuvres pour empêcher la reconnaissance de maladies liées aux pesticides

    Dans son enquête, le magazine de France 2 révèle également comment la FNSEA a tenté de manœuvrer pour empêcher la reconnaissance de maladies liées aux pesticides. Au cours de réunions rassemblant expert·es et partenaires sociaux pour décider de la reconnaissance de maladies professionnelles agricoles, le syndicat majoritaire des exploitantes et exploitants agricoles s’est notamment opposé, en 2011, à la reconnaissance de la maladie de Parkinson et, en 2013, à la reconnaissance du lymphome non hodgkinien. L’une et l’autre seront tout de même reconnus respectivement en 2012 et en 2015.

    La reconnaissance de maladies liées aux pesticides permet aux victimes de toucher, via la MSA, la Mutuelle sociale agricole, des indemnités à vie. Plus il y a de maladies reconnues, plus les cotisations sociales des exploitantes et exploitants agricoles sont susceptibles d’augmenter. À ce jour, de nombreuses victimes sont obligées d’aller jusqu’en justice pour faire reconnaître leur maladie.

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/290224/la-remuneration-hors-norme-d-arnaud-rousseau-president-de-la-fnsea-la-tete
    #agriculture

    • Le groupe Avril, présidé par le patron de la FNSEA, carbure aux frais de l’État

      L’entreprise d’Arnaud Rousseau est devenue leader sur le marché des « #biocarburants ». Son or jaune, c’est le #colza. La société a prospéré grâce à une réglementation sur mesure et à un important #rabais_fiscal.

      Le 30 mars 2022, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, la #Fédération_nationale_des_syndicats_d’exploitants_agricoles (FNSEA) organise un « grand oral » des candidats à la fonction suprême à l’occasion de son congrès annuel qui se tient à Angers (Maine-et-Loire). Emmanuel Macron intervient, en vidéo, depuis son QG de campagne. Et il fait cette promesse : « Je voulais ici vous le dire très clairement. Le Crit’Air 1 sera attribué aux véhicules qui roulent en permanence au B100. C’était, je le sais, attendu. »

      Le #B100 ? C’est un #carburant fait d’#huile_de_colza. Les #poids_lourds roulant exclusivement avec ce produit vont donc obtenir la #vignette qui autorise à circuler dans les « #zones_à_faibles_émissions » (#ZFE) mises en place dans les grandes agglomérations pour limiter la pollution locale. Deux semaines plus tard, le 16 avril, l’arrêté paraît au Journal officiel. On est entre les deux tours de la présidentielle, il n’y a eu aucune consultation publique.

      La décision ne tombe pas du ciel. Elle est particulièrement favorable à une société étroitement liée à la FNSEA : Avril, quatrième groupe agroalimentaire français, qui a lancé trois ans et demi plus tôt l’Oleo100, un carburant B100. De la graine de colza qu’il achète auprès des coopératives de producteurs comme sur les marchés mondiaux, et qu’il fait passer dans ses usines de trituration, le groupe Avril tire à la fois un produit sec – ce qu’on appelle les tourteaux, destinés à l’alimentation animale – et une huile végétale. C’est cette huile qui fait tourner des moteurs Diesel.

      L’entreprise est présidée par Arnaud Rousseau, alors premier vice-président de la FNSEA et dans les starting-blocks pour succéder à sa présidente, Christiane Lambert – il prendra la tête du syndicat un an plus tard. L’attribution de la vignette vient compléter un arsenal règlementaire qui contribue directement aux bénéfices mirobolants du groupe : grâce à un important rabais fiscal et à la vente, en plus de son propre carburant, de « certificats » censés aider à la décarbonation des transports, le groupe Avril, via sa filiale Saipol, dégage des dizaines de millions d’euros de bénéfices sur un produit à la rentabilité hors normes. Loin, très loin, de ce que touchent réellement agricultrices et agriculteurs. Et sans que l’écologie y gagne.

      Le jour même de l’intervention d’Emmanuel Macron au congrès de la FNSEA, Arnaud Rousseau se réjouit de la nouvelle dans un communiqué de la FOP (Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux), qu’il préside également à ce moment-là : « L’ensemble des acteurs de la filière française des huiles et protéines végétales se félicite de l’obtention de la vignette Crit’Air 1 pour le B100, carburant 100 % végétal », écrit-il.

      La mesure était, de fait, attendue. Une présentation commerciale de l’Oleo100 auprès de potentiels clients évoquait déjà, début 2021, la future vignette en indiquant « actions en cours pour Crit’Air 1 et classification “véhicule propre” ».

      Elle ne fait certes pas grand bruit mais certains s’en émeuvent. Le sénateur (Europe Écologie-Les verts) Jacques Fernique s’est étonné de cette décision discrétionnaire, prise au profit d’un seul produit. « Cette évolution réglementaire soudaine interpelle […] au sortir d’un premier quinquennat marqué par la tenue de la convention citoyenne pour le climat et à l’orée d’un second, placé, selon le président de la République, sous le signe d’une “méthode nouvelle” associant l’ensemble des acteurs et dont l’écologie serait “la politique des politiques” », dit-il dans une question adressée au Sénat le 14 juillet 2022.

      Répondant à nos questions, le service communication d’Avril le reconnaît : « La demande de classification Crit’Air 1 a été portée par les différentes associations professionnelles représentatives des industriels producteurs de B100, des constructeurs et des transporteurs ». On peut d’ailleurs relever sur le site de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) que le groupe déclare avoir mené des actions de lobbying auprès de décideurs sur le sujet.

      Côté producteurs de B100, ces associations, précise-t-il, ce sont « Estérifrance, le syndicat français des producteurs de biocarburants de type Ester méthylique d’acide gras [type dont fait partie l’huile de colza – ndlr] », et « l’European Biodiesel Board, une association européenne visant à promouvoir l’utilisation des biocarburants dans l’UE ». La filiale Saipol d’Avril fait partie de l’une et de l’autre.
      Un « biocarburant » polluant

      L’an dernier, le député (MoDem) Mohamed Laqhila posait une question similaire à l’Assemblée nationale, s’interrogeant sur la différence de « traitement » entre le B100 et le HVO, alors même que ce dernier « est homologué dans de nombreux pays européens depuis plusieurs années ».

      Le HVO est un autre carburant alternatif qui peut être composé, celui-là, à partir d’huiles usagées, de graisses animales et de déchets. Autrement dit, sans recourir aux terres agricoles. Mais les véhicules roulant au HVO, eux, ne sont pas autorisés dans les centres-villes classés ZFE.

      Pourquoi une telle distinction ? Au regard de ce que dit la science, elle n’a pas lieu d’être. « Dans un moteur, la combustion du B100 se traduit par plus de NOx [oxydes d’azote – ndlr] qu’un carburant fossile, explique le chercheur Louis-Pierre Geffray, de l’institut Mobilités en transition. Ces NOx supplémentaires sont normalement traités par le système antipollution du véhicule, mais il n’y a aucune raison objective qui explique pourquoi, en usage réel, ce biocarburant est classé Crit’Air 1, à la différence du HVO et du diesel qui sont restés en Crit’Air 2. »

      AirParif, qui observe la qualité de l’air en Île-de-France, est arrivé aux mêmes conclusions en comparant les émissions du diesel et des carburants alternatifs.

      Interrogé sur le sujet, le ministère des finances – auquel est maintenant rattachée la Direction générale de l’énergie et du climat qui avait signé l’arrêté en question – indique que le B100 permet des réductions d’autres émissions. Et que si le HVO est exclu, c’est qu’il n’y a pas de moteur permettant de s’assurer qu’« il ne sera utilisé que du carburant HVO ».

      Ce traitement favorable au carburant issu de l’huile de colza n’est pas anecdotique. Il fait partie du « business model » d’Avril, mastodonte présent dans dix-neuf pays, au chiffre d’affaires, en 2022, de 9 milliards d’euros. Depuis longtemps, le groupe développe une stratégie d’influence auprès de la puissance publique comme auprès des gros acteurs du secteur, afin de s’assurer une position hégémonique sur le marché.

      Comme Mediapart l’avait écrit, une importante niche fiscale était déjà favorable, au cours des années 2000 et 2010, à un produit du groupe Avril – qui s’appelait alors Sofiprotéol –, le diester.
      De niche fiscale en niche fiscale

      Les bonnes affaires avec la bénédiction de l’État ne se sont pas arrêtées là. Dès son homologation par arrêté ministériel, en avril 2018, le B100 a bénéficié d’un énorme rabais fiscal. Cette année-là, Avril déclare à la HATVP l’action de lobbying suivante : « défendre les intérêts de la filière française lors des révisions du dispositif fiscal d’incitation à l’incorporation de biocarburants ».

      Sept mois après l’arrêté ministériel, Saipol annonçait le lancement de l’Oleo100. La société est la première sur le coup. Les concurrents n’arriveront que dans un second temps - un an plus tard pour la coopérative Centre ouest céréales, trois ans plus tard pour Bolloré. Eux et une poignée d’autres resteront minoritaires sur le marché.

      Cette ristourne fiscale donne un sacré avantage au B100 sur les autres carburants : il n’est taxé qu’à hauteur de 118,30 euros par mètre cube. Le produit alternatif HVO, commercialisé entre autres par TotalEnergies, Dyneff ou encore le néerlandais Neste, est imposé au même niveau que le diesel issu du pétrole, soit une taxe à hauteur de 607,5 euros par mètre cube.

      Pour l’État, la perte est substantielle. Elle pèse 489,20 euros par mètre cube de B100. Pour l’année 2023 où la filiale Saipol d’Avril, a vendu, selon ses propres chiffres, 185 000 mètres cubes d’Oleo100, ce manque à gagner dans les recettes publiques s’élève à 90,5 millions d’euros.

      Le ministère des finances dément avoir mis en place un traitement privilégié. « Aucune mesure favorisant un groupe n’a été prise. » Bercy explique la différence de taxation entre B100 et HVO par leurs caractéristiques chimiques. Le B100 est « un carburant qui ne peut être utilisé qu’avec des moteurs dédiés, et dans le cadre de flottes captives de camions spécifiquement conçus pour ce carburant. Son utilisation est donc particulièrement encadrée et restrictive ». À l’inverse, le HVO pouvant être utilisé dans différents types de moteur, le contrôle de sa bonne utilisation n’est pas possible.

      Au total, selon les chiffres d’Avril, la société présidée par Arnaud Rousseau a vendu environ 360 000 m³ d’Oleo100 depuis 2020. Ce sont plus de 176 millions d’euros qui ne sont pas allés dans les caisses de l’État. Et ce trou dans les recettes fiscales pourrait encore se creuser : selon nos informations, les projections du groupe continuent de suivre une courbe ascendante, avec l’estimation que le marché du B100 avoisinera les 600 000 m³ en 2025.

      Même si le B100 est moins émetteur de gaz à effet de serre que le gazole ordinaire, l’apport écologique de ce développement n’est pas avéré. « La fiscalité très avantageuse sur le B100 se traduit par un fort développement de ce carburant, au détriment de l’incorporation de renouvelables dans le diesel classique B7 vendu à la pompe aux particuliers, fait valoir le chercheur Louis-Pierre Geffray. Car, sur l’ensemble des carburants, l’incorporation d’énergies issues de productions agricoles en concurrence avec l’alimentation humaine est limitée par le cadre réglementaire européen à 7 %, et ce seuil a été atteint en France. » Au bénéfice du B100, donc, et au détriment des autres carburants. « Ce qui ne se justifie que partiellement en termes de vertu environnementale », souligne le chercheur.

      Dans une note publiée l’année dernière par l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddrri), ce chercheur et deux de ses collègues relèvent en outre que la culture de colza est très consommatrice de produits phytosanitaires. C’est « la deuxième culture française la plus traitée » aux pesticides, et elle absorbe en moyenne 170 kilos par hectare d’engrais azoté, estiment-ils, soulignant par ailleurs que la consommation française d’huile de colza est très dépendante des importations.

      Fin 2021, la fiscalité du B100 a d’ailleurs été étrillée par la Cour des comptes, qui avait mis en exergue, dans un rapport sur le développement des biocarburants, des taux d’imposition « sans aucune rationalité », conduisant à un système « qui n’est pas conforme à la réglementation européenne sur la taxation des produits énergétiques ». De fait, le niveau d’imposition du B100 est plus de deux fois inférieur au minimum fixé par la directive européenne sur la taxation de l’énergie pour les équivalents au gazole routier.

      La stratégie de maximisation du quatrième groupe agroalimentaire français ne s’est pas arrêtée là. Ces dernières années, il a étendu son emprise du côté des acheteurs de carburant. C’est ainsi qu’il a noué des partenariats avec des constructeurs automobiles – Renault Trucks, Volvo Trucks, Man, Scania –, comme l’écrivait Transport Infos l’an dernier, mais aussi signé des contrats avec des sociétés de la logistique et des transports. L’objectif ? garantir des débouchés pour son carburant, en concevant des modèles de véhicules qui ne peuvent rouler qu’au B100, et en incitant des transporteurs à se tourner vers ces nouveaux poids lourds.

      Depuis le projet de loi de finances (PLF) 2020, une nouvelle niche fiscale est apparue : l’achat de tels véhicules, pour les entreprises qui en font l’acquisition, entraîne, suivant le poids de l’engin, une déduction d’impôt de 5 à 15 %. C’est ce que le secteur appelle le « suramortissement ».
      Le bénéfice de Saipol, une info « confidentielle »

      Il est, enfin, encore une politique publique qui contribue directement aux juteuses affaires du groupe Avril sans pour autant contribuer efficacement à la décarbonation du secteur pour laquelle elle a été conçue. C’est celle des « certificats ». Ce système complexe, mis en place en 2019 – au départ pour pousser le secteur des carburants vers la décarbonation –, est un marché secondaire, où ne s’échangent plus des matières premières, mais des tickets permettant d’éviter des pénalités de l’État. Un mécanisme semblable aux droits à polluer pour le CO2.

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      Le marché des certificats

      Le marché des certificats permet à un fournisseur de gazole qui a dépassé le seuil obligatoire d’incorporation de 9 % d’énergie renouvelable dans son produit de vendre l’équivalent de son surplus sous forme de certificats. C’est le cas de la filiale Saipol d’Avril, dont le produit Oleo100 est constitué à 100 % de renouvelable, et qui peut donc vendre des certificats pour 91 % de ses volumes.

      À l’inverse, le fournisseur n’ayant pas atteint ce seuil des 9 % achète les certificats qui lui permettent de combler virtuellement l’écart. S’il ne le fait pas, des pénalités, plus douloureuses pour ses comptes, lui sont imposées par l’État. C’est la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans le transport (Tiruert).

      Le principe de ce mécanisme, non réglementé et opaque, est de donner aux fournisseurs abondants en renouvelables une assise financière confortable de façon à ce qu’ils poursuivent dans cette voie, afin d’obtenir, sur l’ensemble de la production française de carburant le mix attendu par les directives européennes. Cela génère donc pour eux deux sources de revenu : la vente du biocarburant en lui-même, et la vente des certificats.

      Le premier est indexé sur le prix du gazole, vendu quelques centimes au-dessous. Pour les seconds, les prix ne sont pas publics. Selon nos informations, ces certificats s’échangeaient l’année dernière autour de la coquette somme de 900 euros par mètre cube de carburant renouvelable – en ce début d’année, le prix était descendu à 700 euros.

      –—

      La filiale d’Avril vend à la fois son produit Oleo100 et des certificats qui lui sont associés. C’est ainsi qu’elle dégage, sur son carburant, une marge incongrue. Celle-ci pèserait, pour la seule année 2023, entre 110 et 150 millions d’euros (voir en annexes notre calcul à partir du prix de vente du carburant, du coût de production et de la vente des certificats).

      Si l’on retient le bas de la fourchette, cela donnerait un taux de marge d’environ 29 %. Soit une rentabilité digne de l’industrie du luxe - en 2023, le taux de marge de LVMH, qui a publié ses chiffres en début d’année, était de 26,5 %...

      Comment justifier ce profit colossal que les contribuables financent pour partie ? Contacté, Arnaud Rousseau ne nous a pas répondu. Il n’est que le président « non exécutif » du groupe, nous précise le groupe Avril, lequel nous indique que le montant des bénéfices et du chiffre d’affaires de la filiale Saipol en 2023 est une information « confidentielle ».

      À l’évidence, l’activité biocarburants, avec ces dispositifs et traitements fiscaux particuliers, est la locomotive du groupe. En 2022, où le chiffre d’affaires d’Avril avait fait un bond à 9 milliards d’euros, la filiale Saipol dégageait, selon les derniers comptes disponibles, 135,5 millions d’euros de bénéfices. Ce qui représentait plus de 50 % du résultat net du groupe Avril.

      Depuis le début du mouvement de colère du monde agricole, l’un des principaux arguments d’Arnaud Rousseau pour maintenir la pression et obtenir la levée d’un maximum de contraintes pour le secteur est d’invoquer la fonction nourricière de l’agriculture et la nécessité de préserver la souveraineté alimentaire de la France.

      Il l’a répété sur France 2, sur RTL et sur France Inter ces dernières semaines : « Notre objectif, c’est de produire pour nourrir. » Devant les grilles du parc des expositions Paris Expo, Porte de Versailles à Paris, peu avant l’ouverture du Salon de l’agriculture samedi matin, où il réclamait « une vision » et « des réponses » du chef de l’État, le patron de la FNSEA le disait encore : « Produire pour nourrir, pour nous ça a du sens. La souveraineté alimentaire et faire en sorte que dans ce pays on continue à produire une des alimentations les plus sûres du monde, dont on est fiers […], tout cela, ça a du sens pour nous. »

      L’activité phare du mastodonte qu’il préside bénéficie pourtant déjà des attentions du gouvernement, et n’a rien à voir avec le fait de nourrir la population : elle fait tourner des bus et des camions, et elle rapporte énormément d’argent.

      https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/290224/le-groupe-avril-preside-par-le-patron-de-la-fnsea-carbure-aux-frais-de-l-e
      #fiscalité #fisc

  • Le leader français de la protection sociale menacé de privatisation
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/250224/le-leader-francais-de-la-protection-sociale-menace-de-privatisation

    Le groupe paritaire AG2R La Mondiale, spécialiste de l’assurance et de la protection patrimoniale, connaît une crise interne sans précédent. Les syndicats s’opposent à un projet de privatisation dont le risque est de casser le système de retraite par répartition. La direction s’entête.

    [...]

    Ce n’est pas la première fois que le monde des assurances part à l’assaut des autres structures non capitalistiques du secteur. L’exemple de Claude Bébéar qui, à partir des Mutuelles de Normandie, a créé AXA , un des géants mondiaux de l’assurance, donne des idées à certains. Mais AG2R La Mondiale, c’est autre chose, un groupe à part.

    De l’extérieur, personne ne le connaît, hormis pour son équipe cycliste qui participe au Tour de France. Le groupe appartient à cette nébuleuse de l’assurance, un monde complexe, opaque. Mais il est plus qu’une assurance ou qu’une mutuelle. C’est un groupement de protection sociale qui est régi par le code de la Sécurité sociale et est dirigé et contrôlé par les organisations syndicales (entreprises et salarié·es).

    [...]

    Car il n’y a pas que l’État qui lorgne sur les réserves de l’Agirc-Arrco. Depuis plusieurs années, les assureurs, les fonds de pension, les gérants d’actifs, à l’instar de BlackRock, tournent autour de cette manne qui leur échappe et cherchent par tous les moyens à miner l’édifice de la retraite par répartition. « Cela fait des années que les vautours tournent autour de notre système de retraite, insinuent le doute dans les esprits sur sa solidité pour le mettre à terre », relève un proche du dossier. « Réussir à privatiser AG2R porterait un coup terrible à l’ensemble du système », reconnaît un représentant syndical qui redoute l’effet domino.

    [...]

    La situation au sein du groupe est devenue incontrôlable. Alimentant les peurs, la direction évoque le risque d’une implosion. « AG2R est en danger. Bruno Angles divise le corps social. Il n’est plus en capacité de diriger le groupe », affirme Sophie Binet. « En moins de deux ans, on ne peut que constater que les dégâts internes et externes provoqués par la gestion de Bruno Angles sont considérables. Il faut que cela s’arrête. […] Il est incompréhensible que Bruno Angles soit encore en place, sinon à considérer qu’il a de solides appuis dans un cercle très proche du pouvoir qui ne rêve que de donner aux fonds de pension les retraites complémentaires du privé », complète François Hommeril.

  • L’esclavage, un élément secondaire dans la naissance de la révolution industrielle ? Sure. Not. | Mediapart | 14.02.24

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/140224/aux-sources-du-capitalisme-l-esclavage

    Pour le vieux continent, les historiens de l’économie apologétiques du capitalisme ont longtemps défendu – et défendent encore – l’idée que l’esclavage fut un élément secondaire dans la naissance de la révolution industrielle. Pour beaucoup, le commerce d’esclaves a été une sorte de « détail » de l’histoire économique du capitalisme.

    Un livre publié en 2023 aux éditions Polity et pas encore traduit en français vient donner un autre éclairage aux premières heures de la naissance du capitalisme et défaire cette narration construite largement dans le cours du XIXe siècle, après les abolitions de l’esclavage.

    Dans « Slavery, Capitalism and the Industrial Revolution », deux chercheuses, Maxine Berg et Pat Hudson, replacent l’esclavagisme et le système des plantations qui en est issu, au cœur du développement de l’économie britannique du XVIIIe siècle. Et elles en font un élément déterminant de la révolution industrielle et des formes particulières que prendra le capitalisme britannique jusqu’à nos jours.

    • Ce que montre Maxine Berg et Pat Hudson, c’est l’effet d’entraînement de cette industrie à base esclavagiste sur la dynamique capitaliste et industrielle d’ensemble au Royaume-Uni. Cette dynamique n’est pas toujours immédiatement visible. Mais les autrices soulignent par exemple combien cette révolution dans la consommation a été un élément clé de la « révolution industrieuse », un changement notable de rapport au travail qui a permis la révolution industrielle.

      Ainsi, notent-elles, « le désir pour une nouvelle variété de marchandises a amené des changements graduels dans les comportements des ménages ordinaires d’Europe occidentale ». Progressivement, pour s’offrir le luxe devenu atteignable du sucre, l’économie de subsistance va être abandonnée pour recourir au travail salarié. On va accepter de travailler davantage et plus dur pour acquérir ces biens devenus, selon les témoignages mêmes de la fin du XVIIIe siècle, des besoins essentiels.

      Le sucre.

    • Les autrices ramènent clairement à cette histoire originelle plusieurs traits de la société britannique contemporaine : non seulement le racisme, mais aussi le niveau élevé des inégalités, la formation très étroite des élites ou encore la très forte division géographique de l’Angleterre.

      « L’esclavage a donné au capitalisme moderne quelques-unes de ses structures fondamentales de production et de consommation et a promu les inégalités de race, de classes et de lieux qui ont caractérisé la Grande-Bretagne et le reste du monde au cours des trois derniers siècles », écrivent Maxine Berg et Pat Hudson. Une conclusion qui rejoint de nombreuses analyses récentes, avec des approches parfois différentes comme celle, récente, de Sylvie Laurent (voir ici son entretien).

    • Alors pourquoi le capitalisme industriel a-t-il émergé d’abord au Royaume-Uni ? [plus qu’en France, au Portugal ou aux Pays-Bas]
      [...] élément central : l’État britannique a été un soutien déterminé du système productiviste de plantation et il l’a prouvé non seulement sur le plan institutionnel, mais aussi sur le plan militaire. La défaite de la France et des Pays-Bas en 1763 à la fin de la guerre de Sept Ans est, de ce point de vue, un événement majeur de l’histoire du capitalisme.

  • Oh Mon Dieu, la loi Egalim sert de papier toilette | Mediapart | 14.02.24

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/140224/les-geants-de-l-agroalimentaire-ne-respectent-pas-la-loi-selon-la-cour-des

    Le rapport de la Cour des comptes se concentre sur les éleveurs bovins qui produisent de la viande et du lait, et qui sont en quasi-totalité soumis à cette loi, contrairement par exemple aux filières céréalières et des fruits et légumes, qui en sont exemptées.

    La filière bovine présente toutes les caractéristiques d’abus potentiels : face aux 91 000 exploitations en France, il y a en effet très peu d’acheteurs. Voyez plutôt : dans le lait, 76,3 % de la collecte est réalisée par seulement 28 entreprises. « En raison de cette asymétrie, les acheteurs bénéficient d’un rapport de force à leur avantage dans la négociation des prix », note Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes.

    Pour mener leur enquête, les magistrats de la rue Cambon ont examiné les contrôles effectués par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) en 2022 et en 2023. Au total, les pratiques de 64 acheteurs ont été vérifiées. C’est peu, mais chaque industriel contrôlé réalise en moyenne la bagatelle de… 2,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel. On peut donc déduire, sans trop s’avancer, que ce sont les géants de l’agroalimentaire en France qui ont été ciblés ici par la DGCCRF.
    [...]
    Dans le détail, sur les 35 contrôles menés sur les acheteurs de viande, la Cour constate que dans 43 % des cas, il y a une absence totale de contractualisation avec les agriculteurs. Et que seuls 20 % des industriels ont des pratiques contractuelles totalement conformes à la loi.

    Pour ce qui concerne la filière laitière, les 29 contrôles réalisés entre 2022 et 2023 font apparaître, pour seulement 31 % d’entre eux, l’existence de relations commerciales conformes à la loi. Souvent, dans cette filière, les contrats sont en fait incomplets ou litigieux, notamment à cause d’un usage erroné des indicateurs économiques qui sont censés garantir, scientifiquement, l’évolution des coûts de production des agriculteurs et leur niveau minimum.

    Autre problème, tous ces manquements pointés par la DGCCRF sont jusqu’ici restés impunis. « Les sanctions prévues par la loi n’ont pas encore été appliquées. Cette situation doit être corrigée dans les meilleurs délais », exige la Cour des comptes.

  • Un médecin du travail jugé trop conciliant avec des salariés a été sanctionné
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/080224/un-medecin-du-travail-juge-trop-conciliant-avec-des-salaries-ete-sanctionn

    Jean-Louis Zylberberg a été lourdement sanctionné par l’Ordre pour avoir délivré des certificats d’inaptitude à six salariés de la même entreprise. Leur patron jugeait qu’il s’agissait d’avis « de complaisance ». L’affaire repose le débat autour du secret médical dans le monde du travail.
    [...]
    Pour la CGT, syndicat auquel appartient le médecin sanctionné, c’est au contraire une « attaque inconcevable à l’encontre de l’autonomie d’exercice des médecins et, à terme, dangereuse pour la santé des salarié·es ». Dans un communiqué de soutien, l’organisation insiste : « Les intérêts des salarié·es et la protection de leur santé ne peuvent pas être bafoués par les intérêts économiques du patronat. » Sollicité par Mediapart, le conseil de l’ordre des médecins n’a pas donné suite.

    Depuis 2007, tout employeur peut attaquer un médecin auprès de l’Ordre « dès lors qu’il est lésé de manière suffisamment directe et certaine par un certificat ou une attestation établie ». Avant cette date, seuls les patient·es, assurances, la Sécurité sociale ou des associations de malades pouvaient introduire une plainte disciplinaire. Mais un mot, ajouté dans un article du Code de la santé publique, a tout changé. L’adverbe « notamment » a été accolé à la liste des plaignant·es potentiel·les.

    « Les employeurs se sont engouffrés dans la brèche », déplore le député insoumis François Ruffin, qui a adressé une question écrite fin décembre 2023 au ministre du travail, à la suite de la convocation du docteur Zylberberg. « De plus en plus de médecins doivent faire face à des sanctions disciplinaires pour avoir simplement fait leur travail : tenter de protéger la santé des salariés », ajoute l’élu LFI dans son texte. La CGT abonde et demande, dans son communiqué, que « l’État prenne ses pleines responsabilités, en retirant le terme “notamment” […] du Code de la santé publique » afin de garantir « l’indépendance et la protection de la médecine du travail ».

    Les certificats et attestations faisant le lien entre la santé physique ou mentale et le travail sont dans la ligne de mire des employeurs. L’association Santé et médecine du travail (a-SMT), présidée par Jean-Louis Zylberberg, estime que deux cent plaintes sont ainsi portées chaque année contre des praticien·nes, dont la moitié concernerait les médecins du travail.
    [...]
    Le secret médical est ici une question centrale. « Il est inadmissible qu’un·e médecin ait à choisir entre violer le secret médical en divulguant des informations sur le/la patient·e ou renoncer à se défendre et à avoir un procès équitable », tempête la CGT. Dominique Huez, de l’association Santé et médecine du travail, abonde : « Dans le cas du docteur Zylberberg, des avis d’inaptitude sont pointés. Or, il nous est interdit de parler de la santé du patient sur ces certificats car ils sont transmis à l’employeur et cela briserait le secret médical ! »
    [...]
    Le docteur Zylberberg ajoute : « La parole des salariés est gommée. Personne ne les entend alors que ce sont les seuls qui peuvent parler. Mais le principe du contradictoire ne fait pas partie de la procédure », ironise-t-il.

    #santé #travail #santé_au_travail #médecine_du_travail

  • Les consommateurs et salariés englués dans l’enfer de l’inflation | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/030224/les-consommateurs-et-salaries-englues-dans-l-enfer-de-l-inflation

    On ne doit donc pas s’étonner de voir les chiffres de la consommation en biens s’effondrer alors même que la consommation globale progresse. Le dernier chiffre publié sur décembre 2023 est sans appel. Certes, cette consommation, augmente de 0,3 % sur un mois, mais, à 45,936 milliards d’euros, elle affiche une baisse de 5,05 % par rapport à décembre 2019. Pour trouver un montant aussi faible avant la crise sanitaire pour un mois de décembre, il faut remonter à 2012.

    Certains secteurs sont particulièrement touchés, à commencer bien sûr par l’alimentaire où la consommation de décembre 2023 est de 15,87 milliards d’euros, soit le plus bas chiffre mensuel depuis septembre 2004. Il faut remonter même à 2000 pour trouver une consommation aussi faible pour un mois de décembre !

    Le textile et l’habillement sont aussi fortement touchés. En décembre 2023, le montant de la consommation de ces produits est inférieur de 4,93 % à celui de décembre 2019. Et pour trouver un montant aussi faible, il faut remonter à juillet 2022 ou, avant la crise sanitaire, à octobre 2001…