Le fantasme, de même, ne se résume pas à l’acte. Il est un spectacle total, qui engage non seulement des mots, des faits, des odeurs, des bruits, mais des pensées, le plus souvent sales, obscènes, parfois même choquantes. La majorité des fantasmes impliquent des relations de subordination : simulation de viol, fantasme de kidnapping, de prostitution forcée, d’abus sexuel, envie de recevoir des ordres ou des instructions : « Tu t’habilleras comme ça pour me recevoir dans la chambre Numéro XX que j’aurai réservée à telle heure dans tel hôtel », « Tu m’attendras dans telle position et ne retourne pas la tête, si ça se fait, je ne serai pas seul(e) », « Va acheter tel et tel objet, rejoins-moi à tel endroit, seulement vêtue d’une culotte sous un manteau / habillé en pute sous ton costard-cravate », etc.
Certains hommes souhaitent être "plugés", réduits à l’état d’objet fragile et vulnérable, transformés en baby-pute, leurs "petits" trous auscultés et remplis. D’autres préfèrent mener le jeu, livrer leur partenaire à des inconnu(e)s ou le/la soumettre à des séances de “léchage” sanctionnées par des récompenses. Peu importe le lieu. Métro, chambre à coucher, bar d’un hôtel quatre étoiles ou cave… N’importe quel endroit peut devenir le lieu d’un vertige : il s’agit avant tout de (se) désorienter, jusqu’à en perdre même les sens. Dans Petite Anatomie de l’image, Hans Bellmer parle de ces hystériques qui, au 19e siècle, pouvaient transférer des sensations… L’une d’elle, âgée de 14 ans, « perdit la vision par les yeux en même temps qu’elle acquérait la faculté de voir par l’extrêmité du nez et le lobe gauche de l’oreille, tout en conservant la même acuité visuelle. Même transposition de l’odorat qui, plus tard, se déplaça au talon… » (Source : Lombroso, dans Transferts de sensation dans l’hystérie et l’hypnose). Une autre adolescente avait la capacité de voir distinctement avec sa main. « Elle lisait dans l’obscurité ».