Des êtres et des choses, repenser l’#histoire de la #citoyenneté
Qu’est-ce qu’une barque à Antibes, un coffre à Alger, des terres collectives à Naples ou un mulet abandonné en Espagne disent de la citoyenneté ? L’ouvrage « La Cité des choses » observe les actions de la vie quotidienne et l’histoire de la protection des biens et des personnes pour y répondre.
La Cité des choses. Une nouvelle histoire de la citoyenneté, voici un titre d’ouvrage bien intriguant. Il n’est pas courant que des esclaves affranchis de l’Antiquité côtoient des artisans migrants du siècle des Lumières, qu’une barque à Antibes se trouve face à un coffre à Alger, ou qu’un hôtel à Turin rencontre un mulet abandonné en Espagne. La Cité des choses. Une nouvelle histoire de la citoyenneté : quelles sont ces « choses » et que signifie « citoyenneté » ?
Une autre définition de la citoyenneté
Les auteurs et autrices de La Cité des choses proposent une définition de la citoyenneté qui s’éloigne de la seule conception institutionnelle de ce statut social : « La citoyenneté, dans cet ouvrage, ne correspond pas à un document, à un titre officiellement délivré par une autorité centrale », explique l’historienne Simona Cerutti, directrice avec Thomas Glesener et Isabelle Grangaud de La Cité des choses. « La citoyenneté correspond plutôt au droit de prendre part aux ressources locales. Nous avons utilisé la métaphore du banquet : (le droit) de s’asseoir autour d’une table dans laquelle des ressources de la cité – l’instruction, la santé, le mariage – sont distribuées. »
D’autres modèles de citoyenneté
À partir de l’espace méditerranéen, l’ouvrage propose de repenser l’histoire de la citoyenneté en s’affranchissant des seuls modèles politiques occidentaux. « La Méditerranée est un haut lieu d’une histoire traditionnelle de la citoyenneté – des cités de l’Antiquité grecque à l’ère des révolutions en passant par les cités italiennes médiévales. Nous, nous explorons une Méditerranée qui est restée dans l’ombre », avance l’historien Thomas Glesener. « L’histoire classique de la citoyenneté associe cette question à la participation, à l’accès au droit politique, qui passe souvent par le droit de vote. Nous, nous cherchons la citoyenneté dans des actions qui ne sont a priori pas identifiées comme politiques, mais dont nous nous efforçons de montrer leurs dimensions politiques. »
Suivre les choses pour trouver de la citoyenneté
De part et d’autre de la Méditerranée, les chercheuses et chercheurs de La Cité des choses enquêtent sur les sociétés du 16e au 21e siècle à partir de ce que leurs sources révèlent de la gestion des « choses » (objets, immeubles, terres, héritages, dettes…). « Ce sont des biens qui ne se réduisent pas à des objets de transaction ou d’appropriation, mais qui prennent de la valeur parce qu’ils sont partagés et qu’ils doivent être protégés », précise Simona Cerutti. Leurs études mettent en lumière l’importance de l’inscription dans une chaîne de succession, dont la trace se suit dans les « choses », pour reconnaître à une personne son statut de citoyen.
En démontrant une continuité entre choses et personnes, les autrices et auteurs entendent démontrer la capacité des choses à construire et transformer des statuts sociaux. La Cité des choses invite, à travers l’histoire, à concevoir la citoyenneté comme un processus résultant d’interactions et d’actions de la vie quotidienne qui participent à la construction des hiérarchies et des statuts politiques.
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